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Les nouvelles règles en matière d'abus de marché, R.D.C.-T.B.H., 2017/5, p. 465-507

Les nouvelles règles en matière d'abus de marché

Françoise Lefèvre [1] , Arnaud Coibion [2] , Thierry L'Homme [3] et Mathis Bredimus [4]

TABLE DES MATIERES

1. Introduction 1.1. Champ d'application du règlement

1.2. Pouvoirs d'enquête et de surveillance des régulateurs

1.3. Sanctions pénales

2. L'information privilégiée 2.1. Le caractère public de l'information

2.2. Le caractère précis de l'information

2.3. Le caractère spécifique de l'information

2.4. L'influence possible sur le cours

3. La communication de l'information privilégiée 3.1. Les modalités de la communication

3.2. Le report de la communication 3.2.1. L'atteinte aux intérêts légitimes de l'émetteur

3.2.2. L'induction en erreur

3.2.3. La confidentialité

3.2.4. La décision de report

3.3. La situation spécifique des établissements de crédit

4. Les opérations d'initié et la divulgation illicite d'informations privilégiées 4.1. Les opérations d'initié

4.2. La divulgation illicite d'informations privilégiées

5. Comportements légitimes 5.1. Mise en oeuvre de précautions internes au sein d'une personne morale

5.2. Teneur de marché, personne habilitée à agir comme contrepartie ou personne habilitée à exécuter des ordres pour compte de tiers

5.3. Exécution d'une obligation devenue exigible

5.4. Offre publique ou fusion

5.5. Exécution de sa propre décision

6. Liste d'initiés 6.1. Introduction

6.2. Emetteurs concernés

6.3. Principes

6.4. Liste unique divisée en sections

6.5. Délégation à un tiers

6.6. Format obligatoire

6.7. Tenue électronique

6.8. Mise à jour

6.9. Conservation et communication à l'autorité

6.10. Obligations relatives aux personnes figurant sur les listes d'initiés

7. Obligation de notification des dirigeants et des personnes liées 7.1. Introduction

7.2. Champ d'application et définitions 7.2.1. Emetteurs

7.2.2. Dirigeant

7.2.3. Personne liée

7.3. Notification et publication 7.3.1. Introduction

7.3.2. Obligation de notification

7.3.3. Obligation de publication

7.3.4. Seuil

7.3.5. Informations à notifier

7.3.6. Transactions visées

8. Périodes d'arrêt applicables aux dirigeants 8.1. Introduction

8.2. Champ d'application - Personnes concernées

8.3. Champ d'application - Publications avant lesquelles une période d'arrêt s'applique

8.4. Champ d'application - Transactions concernées

8.5. Champ d'application - Mandats discrétionnaires

8.6. Circonstances dans lesquelles un émetteur peut autoriser une transaction pendant une période d'arrêt 8.6.1. Autorisation pour circonstances exceptionnelles

8.6.2. Autorisation basée sur les spécificités de la négociation concernée

8.6.3. Portée limitée de l'autorisation

8.7. Obligations supplémentaires

9. Manipulations de marché 9.1. Manipulations de marché et pratiques de marché admises

9.2. Manipulations de marché 9.2.1. Champ d'application étendu

9.2.2. Types de manipulations de marché (i) Les manipulations de marché à effet (potentiel) spécifique

(ii) Les manipulations de marché à effet (potentiel) et moyens spécifiques

(iii) Les manipulations de marché à base d'informations

(iv) Manipulation d'un indice de référence

(v) Comportements spécifiques visés à l'article 12, 2., du règlement

9.2.3. Chevauchement entre dispositions

9.3. Pratiques de marché admises

10. Programmes de rachat d'actions propres et mesures de stabilisation 10.1. Programmes de rachat

10.2. Mesures de stabilisation

RESUME
Le règlement n° 596/2014 relatif aux abus de marché s'applique depuis le 3 juillet 2016. Il a remplacé, dans une très large mesure, l'ensemble des règles nationales en la matière, telles qu'elles avaient été adoptées sur la base de la directive n° 2003/6, elle-même abrogée par le règlement.
Le but des nouvelles règles n'était pas une modification radicale des règles en matière d'abus de marché, mais une plus grande uniformité dans tous les Etats membres. L'harmonisation recherchée a été atteinte au moyen du règlement ainsi que de nombreuses mesures d'exécution. Les grands principes, comme la définition de l'information privilégiée, l'interdiction d'effectuer des opérations d'initié et l'obligation pour les émetteurs de publier les informations privilégiées qui les concernent, restent largement inchangés, tout en incorporant les enseignements récents issus d'arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne, par exemple en ce qui concerne le caractère précis de l'information privilégiée.
Le règlement a toutefois introduit une série de nouveautés et a modifié, parfois subtilement, certaines règles telles qu'elles étaient d'application antérieurement. A titre d'exemples, l'on peut citer les modalités de report de la publication d'une information privilégiée par un émetteur, le plus grand niveau de détail requis pour l'élaboration des listes d'initiés et le champ d'application substantiellement élargi de l'obligation des dirigeants de notifier leurs transactions à la FSMA et au public. L'on relèvera également les périodes d'arrêt applicables aux dirigeants, maintenant prévues par le règlement à titre obligatoire, ou encore l'adaptation de l'interdiction des manipulations de marché au trading algorithmique.
Le présent article analyse tour à tour la notion d'information privilégiée, l'obligation de publication des informations privilégiées par les émetteurs et le report de publication, les opérations d'initié et la divulgation illicite d'informations privilégiées, les comportements légitimes, la liste d'initiés, les obligations de notification des dirigeants et des personnes qui leur sont liées, les périodes d'arrêt applicables aux dirigeants, les manipulations de marché, les programmes de rachat d'actions propres et les mesures de stabilisation.
SAMENVATTING
Verordening nr. 596/2014 inzake marktmisbruik is van toepassing sinds 3 juli 2016. Deze verordening heeft het gros van de nationale regels met betrekking tot marktmisbruik die waren aangenomen ter implementatie van richtlijn nr. 2003/6/EG vervangen. De richtlijn werd zelf ook opgeheven door de verordening.
De regeling had niet als doel de toepasselijke regels inzake marktmisbruik drastisch te wijzigen maar om de regels te harmoniseren in alle lidstaten. Deze harmonisatie werd bereikt door de verordening alsook door een groot aantal uitvoeringsmaatregelen. De belangrijkste principes, zoals de definitie van voorwetenschap, het verbod op handel met voorwetenschap en de verplichting voor instellingen om voorwetenschap openbaar te maken, blijven grotendeels ongewijzigd, maar werden nu ook aangepast aan de arresten van het Hof van Justitie van de Europese Unie, bijvoorbeeld wat betreft het concreet karakter van de voorwetenschap.
De verordening heeft niettemin een reeks nieuwigheden geïntroduceerd en heeft bepaalde regels die voorheen van toepassing waren, soms op subtiele wijze, gewijzigd. Voorbeelden daarvan zijn de uitstelregeling voor de openbaarmaking van voorwetenschap door een instelling, de vereiste van meer gedetailleerde insiderslijsten en het opmerkelijk uitgebreide toepassingsgebied van de verplichting die rust op het management om hun transacties te melden aan de FSMA en aan het publiek. Ook de gesloten periodes die van toepassing zijn op het management, dewelke onder de verordening verplicht zijn geworden, of de wijzigingen aan het verbod op marktmanipulatie in algoritmische handel zijn het vermelden waard.
Onderhavig artikel analyseert het concept voorwetenschap, de verplichting voor instellingenvoorwetenschap openbaar te maken en het uitstellen daarvan, handel met voorwetenschap en wederrechtelijke mededeling van voorwetenschap, de legitieme gedragingen, de lijst van insiders, de gesloten periodes voor het management, de marktmanipulaties, de inkoopprogramma's van eigen aandelen en de stabilisatiemaatregelen.
1. Introduction

1.Le présent article [5] analyse les changements apportés par le règlement n° 596/2014 du 16 avril 2014 [6] (ci-après, le « règlement ») en matière d'abus de marché, spécifiquement ceux s'appliquant aux sociétés cotées belges.

Le règlement remplace, depuis le 3 juillet 2016, la directive n° 2003/6/CE du 28 janvier 2003 sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché ainsi que les mesures d'exécution nationales de cette directive (ci-après, « directive MAD I »).

Il est complété au niveau européen par des actes délégués, des actes d'exécution, des lignes directrices et des questions et réponses de la Commission européenne et de l'Autorité européenne des marchés financiers (ci-après, « AEMF »).

Les mesures belges de mise en application de ce nouveau cadre normatif comprennent la loi du 27 juin 2016 [7], l'arrêté royal du 25 avril 2016 [8], l'arrêté royal du 11 septembre 2016 [9], deux nouvelles circulaires [10] de l'Autorité des services et marchés financiers (ci-après, « FSMA »), ainsi que les modifications et mises à jour de certaines de ses circulaires existantes [11].

2.Après avoir brièvement passé en revue le champ d'application du règlement, les pouvoirs d'enquête et de surveillance des régulateurs et les sanctions pénales applicables (point 1), nous détaillerons successivement la notion d'information privilégiée (point 2), l'obligation de publication des informations privilégiées par les émetteurs et le report de publication (point 3), les opérations d'initié et la divulgation illicite d'informations privilégiées (point 4), les comportements légitimes (point 5), la liste d'initiés (point 6), les obligations de notification des dirigeants et des personnes qui leur sont liées (point 7), les périodes d'arrêt applicables aux dirigeants (point 8), les manipulations de marché (point 9) et les programmes de rachat d'actions propres et les mesures de stabilisation (point 10) [12].

1.1. Champ d'application du règlement

3.Le champ d'application général du règlement est précisé à son article 2 [13]. Les nouvelles règles s'appliquent ainsi aux:

    • instruments financiers admis ou faisant l'objet d'une demande d'admission à la négociation sur un marché réglementé;
    • instruments financiers négociés sur un système multilatéral de négociation (Multilateral Trading Facility; ci-après, « MTF »), admis ou faisant l'objet d'une demande d'admission à la négociation sur un MTF;
    • instruments financiers négociés sur un système organisé de négociation (Organised Trading Facility; ci-après, « OTF »);
    • instruments financiers non couverts par les points (a), (b) ou (c), dont le cours ou la valeur dépend du cours ou de la valeur d'un instrument financier visé auxdits points ou qui a un effet sur ce cours ou cette valeur, y compris, sans s'y limiter, les contrats d'échange sur risque de crédit et les contrats financiers pour différences.

    En Belgique, Euronext Brussels constitue un marché réglementé. Les MTF incluent Euronext Growth (anciennement, Alternext), Euronext Access (anciennement, le Marché Libre), l'Expert Market (anciennement, le Marché des Ventes Publiques), le Trading Facility et EasyNext [14]. La notion d'OTF - définie comme les deux autres concepts par la directive n° 2014/65/UE concernant les marchés d'instruments financiers [15] (ci-après, « MiFID II ») [16] - s'appliquera à partir du 3 juillet 2018.

    Sauf en matière d'obligation de publication d'informations privilégiées, de listes d'initiés, de notifications par les dirigeants et les personnes liées et de périodes d'arrêt, il n'est pas requis qu'un instrument financier soit admis à la négociation sur demande de l'émetteur lui-même ou avec son accord [17].

    Il est précisé que le règlement s'applique à toute transaction, tout ordre ou comportement, indépendamment du fait que cette transaction, cet ordre ou ce comportement ait lieu ou non sur une plate-forme de négociation. De plus, sous réserve des précisions apportées par le présent article, les interdictions et exigences s'appliquent aux actions menées et aux omissions commises dans l'Union européenne et dans un pays tiers concernant les instruments visés.

    4.La notion d'instruments financiers est également définie par MiFID II [18]. Elle inclut, tout d'abord, les valeurs mobilières - concept plus amplement décrit par la même directive -, les instruments du marché monétaire ainsi que les parts d'organismes de placement collectif. Sont également visés certains contrats dérivés comme les contrats d'option, contrats à terme, contrats d'échange et accords de taux futurs relatifs aux valeurs mobilières, monnaies, taux d'intérêt ou encore aux rendements. Nous renvoyons aux normes applicables pour davantage de détails sur les autres instruments financiers couverts par le règlement.

    1.2. Pouvoirs d'enquête et de surveillance des régulateurs

    5.Les articles 22 et suivants du règlement renforcent l'arsenal des pouvoirs d'enquête et de surveillance des régulateurs. La plupart des pouvoirs d'enquête et de surveillance énumérés dans le règlement sont déjà compris dans la panoplie des pouvoirs dont disposait la FSMA en vertu de la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers [19] (art. 34 et 35 et 79 à 85 tels que modifiés par la loi du 2 mai 2007 [20]).

    Le régime des sanctions administratives du règlement (art. 30) présente une nouveauté pour la FSMA, à savoir la possibilité d'ordonner la restitution de l'avantage retiré de la violation commise ou des pertes qu'elle a permis d'éviter. Les nouveaux seuils de sanctions administratives pécuniaires ont également été insérés à l'article 36, § 2, de la loi surveillance.

    1.3. Sanctions pénales

    6.Enfin, il faut signaler que le règlement est complété par la directive n° 2014/57/UE du 16 avril 2014 relative aux sanctions pénales applicables aux abus de marché [21] (ci-après, la « directive sanctions pénales »). Au terme de cette directive, les Etats membres doivent introduire des définitions communes des infractions pénales que constituent les opérations d'initiés, les manipulations de marché et les divulgations illicites d'informations privilégiées et imposer des sanctions pénales maximales (d'au moins quatre ans pour les opérations d'initiés et les manipulations de marché et d'au moins deux ans pour les divulgations illicites d'informations privilégiées).

    La directive sanctions pénales doit encore faire l'objet d'une transposition en droit belge. Un avant-projet de loi en ce sens a été adopté par le Conseil des ministres le 31 mars 2017.

    2. L'information privilégiée

    7.La notion d'information privilégiée constitue le coeur même des règles interdisant l'abus de marché et imposant la communication aux investisseurs [22]. La définition qui en est donnée dans l'article 7 du règlement est identique à celle qui figurait dans la directive MAD I et à l'article 10 ancien de la loi surveillance en ce qui concerne ses éléments essentiels. Le règlement a développé les modalités d'application de cette définition pour certains produits spécifiques, comme les instruments dérivés sur matières premières ou les quotas d'émission, que nous n'examinerons pas dans le cadre de la présente contribution.

    Il s'ensuit que l'information privilégiée recouvre toujours (i) une information qui n'a pas été rendue publique, (ii) qui doit être suffisamment précise, (iii) qui doit concerner un émetteur ou un produit financier et (iv) qui serait susceptible d'influencer de façon sensible le cours des instruments financiers si elle était rendue publique.

    Eu égard au caractère directement applicable du règlement, l'article 10 de la loi surveillance qui constituait le siège de la matière a été modifié et traite dorénavant des modalités de communication de l'information. L'article 25 de la même loi qui interdisait les abus de marché est aujourd'hui majoritairement consacré aux pouvoirs attribués à la FSMA en matière de lutte contre les abus de marché.

    Le considérant 4 du règlement indique qu'il était nécessaire d'offrir une plus grande sécurité juridique aux participants et de leur rendre la réglementation moins complexe. Le considérant 18 explique, quant à lui, que la sécurité juridique devrait être renforcée pour les participants au marché grâce à une définition plus fine des deux éléments essentiels de la définition de l'information privilégiée, à savoir le caractère précis de cette information et l'importance de son impact potentiel sur les cours des instruments financiers, ce qui est louable. Nous examinerons ci-après si cet objectif a été rencontré.

    2.1. Le caractère public de l'information

    8.L'article 17 du règlement ainsi que le règlement d'exécution n° 2016/1055 du 29 juin 2016 [23] contiennent des indications concernant les modalités de publication des informations privilégiées imposées aux émetteurs et participants du marché. Elles imposent notamment la diffusion des informations privilégiées à un public aussi large que possible sans aucune discrimination, gratuite et simultanée dans l'ensemble de l'Union. Les informations privilégiées doivent être communiquées aux médias dont le public peut raisonnablement attendre qu'ils diffusent efficacement ces informations.

    Toutefois, une information peut être devenue publique par un autre canal qu'une communication de l'émetteur [24]. Les auteurs estiment que l'information est publique lorsqu'elle est à la disposition de la communauté des investisseurs envisagée de manière générale [25]. En cette matière, la cour d'appel de Paris avait prononcé un arrêt intéressant le 3 avril 2014 [26]. Elle avait décidé que les problèmes de solvabilité d'une société cotée étaient publics dans la mesure où:

    « Le public avait pu constater que l'agence Moody's avait procédé durant l'été 2008 à la dégradation de la notation attribuée à la société Orco. »

    Un article était paru dans une revue spécialisée indiquant que l'action en question, conseillée à la vente peu de temps avant à 26 EUR, n'avait pas encore trouvé de support bien solide pour mettre un terme à son effondrement, et concluait « vendez ». Le cours de l'action Orco s'était effondré de 80 EUR à 25 EUR au cours du premier semestre 2008 et avait continué à se dégrader au second semestre pour atteindre 6 EUR à la fin de l'année 2008, reflétant une dégradation continue et connue du public de la situation du groupe. La cour d'appel avait indiqué que « le cours de l'action Orco s'est en effet effondré […], reflétant une dégradation continue et connue du public de la situation du groupe ». La cour d'appel avait ainsi décidé qu'une information n'était pas privilégiée si elle était connue d'un public spécialisé tels les analystes et les agences de notation et ce, dans la mesure où cette information se reflétait dans l'évolution du cours de bourse, bien qu'elle n'ait pas été formellement communiquée à l'investisseur par l'émetteur.

    Dans ses Market Abuse Rules, la Financial Conduct Authority [27] (ci-après, la « FCA ») avait fourni certains indicateurs de ce que l'information était généralement accessible (et donc n'était pas comprise dans la notion d'information privilégiée), et notamment le fait que l'information est généralement accessible d'une autre manière que par la communication de l'émetteur, notamment par internet ou d'autres canaux de publication (en ce compris les publications uniquement disponibles contre paiement) ou si cette information découlait d'une information qui avait elle-même été rendue publique. Ainsi, au Royaume-Uni également, si l'information publique avait été reprise par les analystes qui en avaient tiré de nouvelles conséquences dans leurs rapports, l'information émanant de l'analyste devait être considérée comme publique en ce que cette information découlait d'une information publique et qu'un investisseur pouvait y avoir accès en conduisant ses recherches.

    2.2. Le caractère précis de l'information

    9.Le règlement dispose à l'article 7, 2., qu'« une information est réputée à caractère précis si elle fait mention d'un ensemble de circonstances qui existe ou dont on peut raisonnablement penser qu'il existera ou d'un événement qui s'est produit et dont on peut raisonnablement penser qu'il se produira, si elle est suffisamment précise pour qu'on puisse en tirer une conclusion quant à l'effet possible de cet ensemble de circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers ou des instruments financiers dérivés qui leur sont liés (…). A cet égard, dans le cas d'un processus se déroulant en plusieurs étapes visant à donner lieu à, ou résultant en certaines circonstances ou un certain événement, ces circonstances futures ou cet événement futur peuvent être considérés comme une information précise, tout comme les étapes intermédiaires de ce processus qui ont partie liée au fait de donner lieu à, ou de résulter en de telles circonstances ou un tel événement ».

    Il est des informations dont la nature même rendra l'application de cette disposition aisée, dans la mesure où les événements concernés se réaliseront de manière instantanée. En revanche, lorsque l'information se construit au fil du temps, la détermination du moment où elle atteint le stade d'information privilégiée peut s'avérer particulièrement complexe.

    10.La difficulté provient de ce que la notion d'information privilégiée utilisée pour interdire l'abus de marché est la même que celle utilisée pour la communication obligatoire au marché, alors qu'elle vise à rencontrer des nécessités différentes. Les trois mesures que sont l'interdiction du délit d'initié, la manipulation de marché ainsi que l'obligation de divulgation sont proches l'une de l'autre, ont pour but d'assurer un marché efficient mais elles ont des objets différents. L'interdiction de délit d'initié a pour but d'éviter que l'on abuse d'une position privilégiée découlant de ce que l'on possède une information matérielle monopolistique. L'obligation de communiquer au marché l'information matérielle monopolistique a pour but que les marchés mettent en oeuvre un mécanisme de fixation du prix de l'instrument le plus précis possible, et ce grâce à l'information dont ils disposent. Le but de l'obligation de divulgation n'est pas d'interdire l'abus de marché mais d'informer le public.

    Idéalement, l'interdiction d'abus de marché devrait être effective dès qu'il apparaît que l'information dont l'émetteur dispose pourrait éventuellement affecter le prix de l'instrument parce que c'est à partir de ce moment-là qu'il devient possible pour l'insider d'abuser de son monopole de l'information. Afin de rendre l'interdiction de délit d'initié effective, l'information privilégiée devrait inclure toute information, même celle qui n'est encore ni certaine, ni précise.

    En revanche, l'obligation de communication a pour but d'informer le public à propos de circonstances ou d'événements qui affecteront le prix. Si la communication est fondée sur des circonstances et des événements qui ne sont pas encore certains, cette communication peut tromper le public comme, par exemple, lorsque l'émetteur communique la perspective de conclure un contrat lucratif qui entraîne la hausse du prix de l'action, et lorsqu'il doit ensuite révéler que ce contrat n'a pas été conclu, entraînant alors un mouvement inverse de la cotation de son action. De plus, l'information privilégiée ne se matérialise en général pas instantanément. Dans la plupart des cas, ce qui va affecter le prix de l'action se développe au fil du temps et peut parfois prendre des mois avant de se réaliser complètement.

    La même information est donc amenée à remplir deux fonctions incompatibles.

    11.Cette utilisation double de l'information privilégiée avait d'ailleurs conduit à deux approches différentes sous l'empire de la directive MAD I. Certains Etats, comme l'Allemagne et la Belgique, avaient imposé un timing identique pour les deux mesures [28]. Une fois qu'une information était privilégiée, l'obligation de communication au marché et l'interdiction d'opérations d'initié prenaient effet immédiatement et simultanément. Cette identité chronologique a produit un problème décrit par Carmine Di Noia, un membre de l'AEMF, comme le problème de la couverture trop petite: soit vos orteils sont froids, soit votre nez est froid. Ou bien l'information privilégiée inclut certaines informations incertaines, ce qui renforcera l'interdiction de délit d'initié mais sera néfaste à l'obligation de communication et à la formation du prix, soit elle ne contient que des informations certaines ou presque certaines, ce qui produira le résultat opposé. En tout état de cause, en imposant une définition unique pour l'information privilégiée, et une chronologie identique pour les deux mesures portant sur le délit d'initié et sur la communication obligatoire, le résultat est par définition insatisfaisant.

    L'approche à deux vitesses, qui avait été mise en oeuvre par l'Italie et le Danemark, aboutissait à ce que chaque mesure soit traitée de manière séparée. L'information privilégiée était considérée comme se formant en amont, même si l'information était incertaine et elle avait pour conséquence d'entraîner une interdiction de délit d'initié. La communication, d'autre part, ne devait intervenir que lorsque l'information privilégiée était devenue certaine. Ainsi, chronologiquement, l'interdiction de délit d'initié entrait d'abord en vigueur, pour être suivie plus tard par la communication obligatoire, lorsque l'information avait acquis un niveau de certitude suffisant. C'est ce qui pouvait être d'ailleurs compris de l'article 6, 1., de la directive MAD I qui exigeait la communication dès que possible et non pas immédiatement comme le droit belge l'avait prévu.

    12.En 2011, lorsque la Commission présenta son avis sur la réforme de la directive MAD I et émit sa proposition de règlement, elle proposa la mise en place d'un système à deux vitesses:

    « Inside information can be abused before an issuer is under the obligation to disclose it. The state of contract negotiations, terms provisionally agreed in contract negotiations, the possibility of the placement of financial instruments, conditions under which financial instruments will be marketed, or provisional terms for the placement of financial instruments may be relevant for investors. Therefore, such information should qualify as inside information. However, such information may not be sufficiently precise for the issuer to be under an obligation to disclose it. In such cases, the prohibition against insider dealing should apply, but the obligation on the issuer to disclose the information should not. » [29].

    13.Toutefois, à la même époque, l'affaire Geltl était pendante devant la Cour de justice de l'Union européenne [30]. Cette décision a déjà fait couler beaucoup d'encre [31]. Nous n'en réexpliquerons pas les éléments constitutifs mais la réponse de la Cour de justice a été clairement influencée par la question qui avait été posée par le tribunal allemand. En effet, il s'agissait d'un cas où la seule question concernait le moment auquel il fallait communiquer l'information. Toutefois, dans la mesure où le tribunal allemand appliquait la chronologie simultanée, il a formulé la question comme s'il s'agissait d'une définition de l'information privilégiée et non pas du moment auquel celle-ci devait être communiquée. Il a demandé si l'information privilégiée devait inclure des informations relatives à des événements spécifiques qui faisaient partie d'un processus en plusieurs étapes. La réponse était évidente en ce qui concernait l'interdiction du délit d'initié mais ne l'était pas nécessairement en ce qui concernait la communication au marché.

    L'avocat général Mengozzi semble n'avoir perçu le problème que sous l'angle de l'interdiction du délit d'initié et a, d'ailleurs, fait de multiples références à la décision rendue par la Cour de justice dans l'affaire Spector qui concernait un cas de délit d'initié [32]. Il s'est aussi référé à la nécessité d'éviter tout délit d'initié et a, par conséquent, suggéré qu'un seuil de certitude bas soit appliqué à la définition afin de permettre une application large de l'interdiction de délit d'initié. Lorsqu'il a traité du problème concernant la communication publique d'une information incertaine, il a recommandé une interprétation qui élargisse la quantité d'information à disposition du public [33].

    La Cour de justice a tenté d'accommoder la nécessité d'interdire les délits d'initié avec le besoin d'éviter des communications au marché inutiles. Si le degré de probabilité qui était exigé pour qualifier certains éléments d'information privilégiée était élevé, les initiés pourraient abuser de leur avantage en opérant sur la base de ces informations. Toutefois, si la définition devait comprendre des résultats improbables, les émetteurs devraient alors communiquer trop d'informations. C'était un puzzle difficile à résoudre et la Cour de justice a adopté une solution qui a consisté à interpréter les termes de la directive MAD I « may reasonably be expected » par le biais d'une nouvelle notion tout aussi peu claire, celle de la « perspective réelle »:

    « It follows that, in using the terms 'may reasonably be expected', Article 1(1) of Directive 2003/124 refers to future circumstances or events from which it appears, on the basis of an overall assessment of the factors existing at the relevant time, that there is a realistic prospect that they will come into existence or occur. »

    Cette conception de « perspective réelle » était contraire aux travaux préparatoires de la directive MAD I, car le Parlement européen avait estimé que le caractère de précision ne pouvait que résulter des éléments tangibles d'un événement qui avait une probabilité significative d'intervenir dans le futur [34]. La doctrine belge avait régulièrement réitéré l'exigence d'un degré de probabilité élevé [35] ou suffisamment certain [36]. De même, la jurisprudence de la Commission bancaire, financière et des assurances (CBFA) faisait état d'un degré de certitude suffisant et d'une probabilité significative de la survenance d'un élément à venir [37].

    14.L'arrêt Geltl a donc considérablement modifié l'approche qui avait été suivie en droit belge jusqu'alors. Selon le Cambridge Dictionary, un « prospect » est une possibilité que quelque chose se passe dans le futur. De même, selon le Larousse Illustré, une perspective consiste dans l'attente d'événements considérés comme probables. Une probabilité est « une mesure de chance de la réalisation d'un événement aléatoire - rapport du nombre de résultats favorables à l'événement aux nombreux résultats possibles ». Autrement dit, une probabilité simple porte sur un événement susceptible de se produire même si ce pourcentage de chance n'est pas particulièrement élevé.

    En adoptant les critères de « perspective réelle » ou de « realistic prospect », la Cour de justice a décidé que le niveau de probabilité exigé par le texte de la loi ne devait pas nécessairement être élevé. La probabilité devait uniquement être réaliste, soit un événement plus probable qu'improbable [38].

    Si cette nouvelle périphrase a permis à la Cour de justice de réussir le grand écart exigé par l'unicité de la notion, elle a pour effet et conséquence de rendre extrêmement difficile l'application concrète de la notion, spécialement lorsque l'information se construit au fil du temps. La détermination du moment auquel un processus évolutif devient une perspective réelle constitue une difficulté majeure ex ante et un fondement de critiques sans fin ex post.

    15.Le règlement n'a aucunement profité de l'occasion pour clarifier la situation et permettre une mise en oeuvre moins aléatoire des obligations des émetteurs. Il n'a pas retenu l'approche en deux étapes qui aurait permis de résoudre ou d'éliminer les incertitudes en appliquant à chaque définition les caractéristiques nécessaires à la réalisation de leur objectif propre. Il a, au contraire, confirmé l'application du critère de la perspective réelle dans le considérant 16 du règlement.

    Il s'est borné à préciser, ce qu'avait déjà fait le CESR, qu'une étape intermédiaire d'un processus en plusieurs étapes est réputée constituer une information privilégiée si, en soi, cette étape satisfait aux critères relatifs à l'information privilégiée, tout en précisant que la notion de perspective réelle ne devrait pas être interprétée comme signifiant que l'ampleur de l'effet de l'ensemble des circonstances sur le cours doit être prise en compte [39].

    Il faut constater que, malgré les déclarations d'intention concernant le renforcement de la sécurité juridique, le règlement n'a en rien modifié ni précisé la notion de caractère précis de l'information, telle qu'elle avait été établie par la directive MAD I, et interprétée par l'arrêt Geltl.

    La compensation accordée aux émetteurs pour leur permettre de fonctionner dans un milieu aussi incertain a consisté dans l'aménagement des possibilités de report de l'information privilégiée, comme il sera discuté ci-après.

    2.3. Le caractère spécifique de l'information

    16.Le caractère de spécificité de l'information a également été interprété de manière extrêmement large par la Cour de justice dans l'arrêt Lafonta  [40]. Dans cet arrêt, la Cour a dit pour droit que la réglementation n'exigeait pas, pour que des informations puissent être considérées comme précises, qu'il soit possible de déduire, avec un degré de probabilité suffisant, que leur influence potentielle sur le cours des instruments financiers concernés s'exercera dans un sens déterminé, une fois qu'elles seront rendues publiques. Il s'ensuit que l'information peut être suffisamment spécifique même si l'émetteur n'est pas en mesure de déterminer dans quel sens le prix est susceptible d'évoluer, en raison de l'imprécision de l'information dont il dispose ou bien du caractère inhabituel de pareille communication au marché.

    Sur ce point également, le règlement n'a rien précisé, ce qui laisse la jurisprudence Lafonta intacte. Il s'ensuit que le désir de sécurité juridique déclaré du législateur européen n'a, sur ce point également, pas été mis à exécution.

    2.4. L'influence possible sur le cours

    17.L'information doit être telle que l'investisseur raisonnable serait susceptible de l'utiliser comme faisant partie des fondements de la décision d'investissement. Le critère de sensibilité de l'information est donc très proche du critère de spécificité [41]. Selon la doctrine, on pourrait les distinguer en considérant que le critère de précision au sens de l'article 7, 2., du règlement vise à écarter les informations vagues, alors que celui de sensibilité au sens de l'article 7, 4., du règlement vise à écarter les informations qui n'auraient qu'un impact nul ou négligeable sur le cours [42].

    Le préambule du règlement dispose que la question de savoir si un investisseur raisonnable et susceptible de tenir compte d'une information particulière doit être appréciée sur la base des informations disponibles ex ante [43]. Cette appréciation doit prendre en considération l'impact anticipé de l'information en question, compte tenu de l'ensemble des activités de l'émetteur qui y sont liées, de la fiabilité de la source d'information et de toutes les autres variables pertinentes du marché.

    Le considérant 15 du règlement précise que les informations disponibles ex post peuvent servir à vérifier la présomption de sensibilité des cours aux informations disponibles ex ante mais ne devraient pas être utilisées pour poursuivre les personnes qui auraient tiré des conclusions raisonnables des informations dont elles disposaient ex ante.

    18.L'on connaît toutefois la grande difficulté de l'appréciation ex post d'une décision ex ante. En effet, le biais rétrospectif influence de manière décisive et très difficilement évitable la décision des régulateurs et des tribunaux, comme les études l'ont largement démontré. Le biais rétrospectif a pour effet que les personnes qui connaissent le résultat d'un événement surestiment la possibilité qu'elles auraient eue de prédire la réalisation de cet événement si on leur avait posé la question avant qu'il se réalise. A posteriori, l'être humain exagère systématiquement ce qui aurait pu être anticipé. Il n'a pas seulement tendance à considérer ce qui s'est passé comme ayant été inévitable mais il considère aussi qu'avant que cela ne se produise, l'événement aurait déjà dû être perçu comme relativement inévitable. Il croit que les autres auraient dû anticiper les événements bien mieux que ce ne fut le cas en réalité [44].

    Le biais rétrospectif est bien identifié et largement documenté [45] y compris en France [46] ainsi qu'en Belgique, notamment par le Conseil supérieur de la Justice qui a attiré l'attention sur les pièges que l'on peut rencontrer dans une enquête ex post  [47]. En effet, la reconstitution de l'histoire se situe toujours dans le contexte d'une enquête régulatoire ou pénale, initiée longtemps après les faits, dans un contexte d'événements précis et connus. L'issue de l'enquête, et donc de la reconstitution de l'histoire, dépend du contexte présent par la nature des questions sélectionnées par l'enquêteur et de la personne même de l'enquêteur [48].

    3. La communication de l'information privilégiée
    3.1. Les modalités de la communication

    19.L'article 17 du règlement dispose que tout émetteur rend publiques dès que possible les informations privilégiées qui concernent directement cet émetteur. L'émetteur veille à ce que les informations privilégiées soient rendues publiques d'une façon permettant un accès rapide et complet à ces informations ainsi qu'une évaluation correcte et rapide de celles-ci par le public et, le cas échéant, par le biais de mécanismes officiellement désignés visés par l'article 21 de la directive n° 2004/109/CE [49]. L'émetteur ne combine pas la publication d'information privilégiée avec la commercialisation de ses activités. Il doit afficher et conserver sur son site Internet, pour une période d'au moins cinq ans, toutes les informations privilégiées qu'il est tenu de publier.

    3.2. Le report de la communication

    20.Le règlement a conservé la possibilité de reporter la communication de l'information privilégiée mais en a modifié certaines modalités. Le report ne peut intervenir que si toutes les conditions habituelles sont réunies, à savoir (i) que la publication immédiate soit susceptible de porter atteinte aux intérêts légitimes de l'émetteur, (ii) que le retard de la publication ne soit pas susceptible d'induire le public en erreur et (iii) que la confidentialité de l'information soit assurée. L'article 17 précise que, dans le cas d'un processus qui se déroule en plusieurs étapes, l'émetteur peut, sous sa propre responsabilité, différer la publication d'une information privilégiée liée à ce processus, sous les mêmes conditions.

    3.2.1. L'atteinte aux intérêts légitimes de l'émetteur

    21.L'AEMF a émis des guidelines en matière de report de la communication de l'information privilégiée, et ce, le 20 octobre 2016 [50]. Ces guidelines contiennent certains exemples admis de protection des intérêts légitimes de l'émetteur, à savoir:

      • lorsque l'émetteur conduit des négociations qui risquent d'être mises en péril si l'information devait devenir publique immédiatement, et par exemple en cas de fusion, acquisition, scission, spin off, restructuration, réorganisation, etc.;
      • lorsque la viabilité financière de l'émetteur est en danger grave ou imminent mais sans toutefois que les conditions de la faillite soient réunies, et si la divulgation immédiate de l'information risquait de préjudicier les intérêts des actionnaires existants ou potentiels en mettant en danger la réussite des négociations destinées à assurer la viabilité financière de l'émetteur. Ce cas était déjà visé par les recommandations du CESR [51];
      • lorsque l'information privilégiée concerne des décisions prises par un niveau de management de l'émetteur qui doit, conformément à la loi ou aux statuts de l'émetteur, obtenir l'accord d'un autre organe de celui-ci, autre que l'assemblée générale, à la condition que l'émetteur s'arrange pour que la décision définitive soit prise le plus rapidement possible;
      • si un produit ou une invention sont développés par l'émetteur, lorsqu'une publication immédiate de cette information serait susceptible de menacer les droits de propriété intellectuelle de l'émetteur;
      • lorsque l'émetteur planifie d'acheter ou de vendre une participation importante dans une autre entité et que la communication de cette information pourrait mettre en danger la réalisation de ce plan;
      • lorsqu'une transaction précédemment annoncée est soumise à l'approbation d'une autorité publique, approbation conditionnée par des exigences additionnelles, lorsque la publication immédiate desdites exigences serait susceptible d'affecter la possibilité pour l'émetteur de les respecter et donc de faire échec à la conclusion finale de la transaction. L'on peut ici penser à certaines conditions imposées dans le cadre des remèdes aux concentrations exigés par les autorités de la concurrence.
      3.2.2. L'induction en erreur

      22.Dans ses guidelines, l'AEMF indique qu'un report de publication devrait être considéré comme susceptible d'induire le public en erreur lorsque:

        • l'information privilégiée est significativement différente d'une publication antérieure de l'émetteur sur le même sujet;
        • l'information privilégiée concerne le fait que les objectifs financiers de l'émetteur risquent de ne pas être remplis, lorsque de tels objectifs ont précédemment été annoncés publiquement par l'émetteur;
        • l'information privilégiée est différente des attentes du marché, si ces attentes proviennent de signaux qui ont précédemment été envoyés par l'émetteur.

        Il s'ensuit que le report de la communication ne sera pas accepté si, sur la base d'informations antérieures communiquées par l'émetteur, le marché s'attendait à l'inverse de ce qui est devenu une information privilégiée, à la suite d'une communication antérieure provenant de l'émetteur.

        Si le marché s'attend à un certain niveau de résultats sur la base de rapports d'analystes par exemple, la possibilité d'un report pour protection de l'intérêt légitime de l'émetteur ne devrait pas être prohibée, puisque l'émetteur n'est pas à l'origine de ces attentes.

        3.2.3. La confidentialité

        23.L'article 17, 4., du règlement requiert enfin que l'émetteur qui décide de différer la publication soit en mesure d'assurer la confidentialité de l'information privilégiée en question.

        24.L'article 17, 7., quant à lui, impose de publier sans retard si la confidentialité n'est plus assurée. Pendant la période de report, l'émetteur doit s'assurer que les conditions de report sont constamment remplies, notamment la condition concernant la confidentialité. Si la confidentialité de l'information ne devait plus être assurée, y compris lorsque des rumeurs suffisamment précises indiquent que l'information a fuité, et quelle que soit la source de la violation de la confidentialité, l'émetteur doit divulguer l'information privilégiée [52]. L'article 17, 7., du règlement précise que l'émetteur doit procéder à la communication si une rumeur fait explicitement référence à une information privilégiée dont la publication a été différée, lorsque cette rumeur est suffisamment précise pour que la confidentialité de cette information ne soit plus assurée.

        Cette disposition ne permet pas de déterminer si la communication doit avoir lieu uniquement lorsque la rumeur est correcte ou bien également lorsque la rumeur est incorrecte, ce qui n'était pas exigé auparavant.

        3.2.4. La décision de report

        25.Changement important par rapport à la directive MAD I, l'autorité compétente doit aujourd'hui être informée immédiatement après la publication de l'information reportée. Cela confirme que la communication à l'autorité de contrôle n'était pas antérieurement une condition du report, mais qu'elle n'en était qu'une modalité ou, tout au plus, une formalité non essentielle.

        L'émetteur doit informer l'autorité compétente que la publication a été différée et faire état par écrit de la manière dont les conditions ont été satisfaites. La notification à l'autorité peut utiliser les moyens de communication électroniques et doit comporter une liste d'informations précises détaillée par l'AEMF [53].

        26.L'AEMF considère également qu'il devrait y avoir une personne désignée au sein de l'émetteur, qui serait responsable des décisions en matière de reports de l'information privilégiée. Cette personne devrait être clairement identifiée au sein de l'émetteur et disposer du pouvoir de décision nécessaire. Il devrait s'agir d'un membre de la direction ou d'un directeur exécutif avec de l'ancienneté, eu égard à l'importance majeure de la décision. Cette personne devrait évaluer spécifiquement la réunion des trois conditions prévues par l'article 17, 4., du règlement avant d'autoriser le report de la communication [54]. De même, cette personne devrait être consultée et prendre la décision de communiquer l'information de la manière appropriée, quand les conditions de l'article 17, 4., du règlement ne sont plus réunies [55].

        27.Si ces nouvelles modalités du report peuvent être vues comme une tentative de permettre encore un fonctionnement raisonnable de l'économie en ne paralysant pas les émetteurs par le biais d'une définition de l'information privilégiée impraticable, il faut bien constater qu'elles ne feront qu'amplifier les situations de biais rétrospectif lorsque l'autorité de contrôle apprendra après coup que l'émetteur détenait, parfois depuis un certain temps, une information privilégiée. Le système précédent de notification prévu par l'article 10, § 4 ancien, de la loi surveillance permettait d'avertir l'autorité de contrôle de la situation et de limiter les risques de critiques ultérieures, en la tenant informée de l'évolution de la situation, même de manière informelle. Il faut donc recommander aux émetteurs, et en particulier à la personne chargée d'évaluer la situation au sein des émetteurs, de consigner par écrit, de manière très régulière et précise, les raisons pour lesquelles elle estime que le seuil de l'information privilégiée n'est pas encore atteint, ou que sont réunies les conditions imposées pour le report, et ce, pour être en mesure de soumettre à l'autorité de contrôle autant de preuves que possible de la situation ex ante.

        3.3. La situation spécifique des établissements de crédit

        28.Le règlement a tiré les leçons de la crise financière qui a touché les banques en 2008. En effet, lorsque la viabilité financière d'une banque est en jeu, il peut être indispensable de retarder la communication au marché des informations concernées, et ce, afin de ne pas mettre en péril l'efficacité des mesures d'urgence en cours de préparation ou d'exécution qui visent à la sauver ou afin de prévenir la matérialisation d'un risque systémique non canalisé [56]. Il s'agit d'une possibilité de report supplémentaire par rapport à celle ouverte aux émetteurs qui n'ont pas la qualité d'établissements de crédit ou d'établissements financiers, conformément à l'article 17, 6., avant-dernier alinéa, du règlement.

        Le règlement met ainsi en oeuvre les solutions pragmatiques qui avaient été appliquées par les autorités de supervision, et notamment par la Financial Services Authority (ci-après, « FSA ») lorsqu'elle avait été confrontée au beau milieu de la crise financière à des soutiens de liquidité accordés aux banques anglaises par la Banque centrale anglaise. La Banque d'Angleterre avait en effet prêté des fonds très importants pour sauver RBS et HBOS en automne 2008. Le régulateur britannique avait accepté que cette information ne soit rendue publique que lorsqu'il serait arrivé à la conclusion que le système bancaire s'était suffisamment stabilisé pour que la publication de l'importance de l'intervention de support ne crée plus un risque pour la survie des banques concernées. Ce n'est donc que fin 2009 que cette information fut finalement publiée. La FSA avait expliqué dans son Consultation Paper qu'elle considérait que les intérêts légitimes de l'émetteur incluaient la réception par ce dernier d'aide en matière de liquidité, sans obligation de communication. Les Disclosure and Transparency Rules de la FSA contenaient explicitement cette précision. C'est cette approche également qui avait justifié le report de l'information dans l'affaire Kerviel pendant une semaine, comme l'avait expliqué le rapport Lagarde sur le sujet [57].

        Diverses études ont été menées après la crise de 2008 sur le risque pour les banques d'un bank run en l'absence de risque objectif de faillite. Ainsi, dans le secteur bancaire, augmenter la communication de l'information à propos des actifs de la banque peut avoir des effets négatifs. Une meilleure information sur la valeur actuelle des biens de la banque peut rendre la banque fragile en tant que telle et causer un bank run, même en l'absence de problème objectif risquant de mettre en péril la survie de celle-ci [58]. Ainsi, bien qu'une banque puisse rencontrer des difficultés passagères, les perspectives globales peuvent demeurer positives. Divulguer une information sur cette banque alors qu'elle se trouve dans une situation délicate peut amener les investisseurs à retirer massivement leurs fonds alors que cette banque a une valeur actuelle nette positive. A ce stade, autoriser un certain degré d'opacité, voire une opacité totale dans certains cas, permet d'éviter le retrait massif de fonds de la part des investisseurs et ainsi empêcher la liquidation inefficiente de cette banque [59], comme la liquidation de Lehman Brothers qui s'est soldée par un boni de plus de huit milliards.

        29.Le règlement autorise donc en son article 17, 5., afin de préserver la stabilité du système financier, qu'un émetteur qui est un établissement de crédit ou un établissement financier, diffère, sous sa propre responsabilité, la publication d'une information privilégiée, y compris des informations liées à un problème temporaire de liquidité, et notamment la nécessité d'une aide d'urgence en matière de liquidité de la part d'une banque centrale ou d'un prêteur en dernier ressort, à la condition que toutes les conditions suivantes soient satisfaites:

          • la publication d'informations privilégiées risque de nuire à la stabilité financière de l'émetteur et du système financier;
          • il est dans l'intérêt public de différer sa publication;
          • la confidentialité de l'information est assurée;
          • l'autorité compétente a consenti à ce que la publication soit différée.

          Contrairement donc aux autres situations de report ne visant pas les établissements de crédit, l'émetteur doit notifier à l'autorité compétente son intention de différer la publication de l'information privilégiée et l'autorité compétente décide, après consultation éventuelle de la Banque centrale européenne, si la publication de l'information peut être différée. Cette autorité doit évaluer au moins chaque semaine si les conditions sont toujours réunies. Si l'autorité compétente n'autorise pas le report, l'émetteur doit communiquer l'information privilégiée immédiatement.

          L'AEMF précise [60] que l'émetteur n'est pas requis de communiquer l'information jusqu'à ce que l'autorité compétente ait pris la décision. Elle insiste sur le fait qu'il convient d'apporter un soin tout particulier à ce que la communication avec l'autorité compétente soit confidentielle, et recommande à cet effet l'utilisation de moyens tels que des e-mails protégés par des mots de passe. De surcroît, l'AEMF admet que, s'il est nécessaire que l'intention de report soit communiquée par écrit, cela n'exclut pas des discussions orales préalables avec l'autorité compétente, ni la communication de la décision par cette autorité compétente de manière orale, surtout en cas d'urgence [61]. Le règlement d'exécution n° 2016/1055 détaille le contenu de la notification du report de la publication et de l'information écrite, qu'il s'agisse du contenu de cette communication ou des moyens qui peuvent être mis en oeuvre pour l'opérer.

          4. Les opérations d'initié et la divulgation illicite d'informations privilégiées
          4.1. Les opérations d'initié

          30.L'article 8 du règlement dispose qu'une opération d'initié se produit lorsqu'une personne détient une information privilégiée et en fait usage en acquérant ou en cédant pour son compte ou pour le compte d'un tiers directement ou indirectement des instruments financiers auxquels cette information se rapporte. L'utilisation d'une information privilégiée pour annuler ou modifier un ordre lorsque ce dernier avait été passé avant que la personne concernée ne détienne l'information privilégiée est également prohibée.

          Le règlement confirme ainsi l'exigence de l'utilisation de l'information privilégiée conformément à la décision de la Cour de justice dans l'arrêt Spector  [62]. Le considérant 23 précise que l'interdiction des opérations d'initié devrait s'appliquer dès lors qu'une personne qui est en possession d'informations privilégiées tire un avantage injuste du bénéfice obtenu grâce à ces informations, en effectuant des opérations de marché conformément à ces informations, en acquérant ou cédant, en tentant d'acquérir ou de céder, en annulant ou en modifiant ou en tentant d'annuler ou de modifier un ordre. Lorsqu'une personne physique ou morale en possession d'informations privilégiées acquiert ou cède, etc., il devrait être supposé que cette personne a utilisé ces informations. Cette présomption s'entend sans préjudice des droits de la défense. Il s'agit donc d'une présomption réfragable [63].

          Le fait de recommander à une autre personne d'effectuer une opération d'initié ou d'inciter une autre personne survient lorsqu'une personne qui dispose d'une information privilégiée recommande qu'une autre personne opère des transactions sur ces instruments ou l'incite ou recommande qu'une autre personne annule ou modifie un acte relatif à un instrument financier auquel l'information se rapporte [64].

          31.Conformément au considérant 28 du règlement, ne devraient pas constituer des informations privilégiées des travaux de recherches et des estimations élaborées sur la base de données publiques, et le simple fait qu'une opération est effectuée sur ces bases ne devrait pas constituer l'utilisation d'informations privilégiées. Cependant, peuvent par exemple constituer des informations privilégiées les informations dont la publication ou la diffusion est normalement attendue par le marché et qui contribuent au processus de formation des cours des instruments financiers, ou le rapport d'un analyste des marchés ou d'une institution reconnue.

          Les acteurs du marché doivent donc étudier dans quelle mesure les informations ne sont pas publiques et examiner leur effet éventuel sur les instruments financiers négociés avant la publication ou la diffusion des informations afin de déterminer s'ils négocient sur la base d'informations privilégiées.

          32.En ce qui concerne les catégories d'initiés, l'article 8, 4., du règlement reprend les catégories de la directive MAD I et distingue donc entre les initiés primaires et les initiés secondaires, sans modification.

          Enfin, les interdictions d'abus de marché devraient également couvrir les personnes qui collaborent à un abus de marché, comme, par exemple, les courtiers élaborant ou conseillant une stratégie de trading visant à commettre un abus de marché, les personnes encourageant une autre personne disposant d'informations privilégiées à les divulguer illicitement ou encore les personnes développant des logiciels en collaboration avec un trader en vue de faciliter un abus de marché (considérant 39 du règlement).

          4.2. La divulgation illicite d'informations privilégiées

          33.Selon l'article 10 du règlement, une divulgation illicite d'informations privilégiées se produit lorsqu'une personne est en possession d'une information privilégiée et divulgue cette information à une autre personne, sauf lorsque cette divulgation a lieu dans le cadre normal de l'exercice d'un travail, d'une profession ou de fonctions.

          La disposition fait référence à l'article 8, 4., du règlement en ce qui concerne les catégories d'initiés, à savoir les personnes ayant eu accès à l'information par leurs activités, ainsi que celles sachant ou devant savoir que l'information est privilégiée [65].

          Est également une divulgation illicite d'informations privilégiées la divulgation ultérieure des recommandations ou incitations visées à l'article 8, 2., du règlement lorsque la personne qui divulgue la recommandation ou l'incitation sait, ou devrait savoir, qu'elle était basée sur des informations privilégiées.

          34.L'exception permettant la divulgation dans le cadre normal de l'exercice d'un travail, d'une profession ou de fonctions, qui existait déjà en vertu de la directive MAD I [66], trouve notamment à s'appliquer dans le cadre des opérations de fusion-acquisition et plus particulièrement des pourparlers confidentiels qui les précèdent. La doctrine classique et contemporaine, à laquelle nous nous rallions, admet ainsi, à certaines conditions, la divulgation d'informations privilégiées dans le cadre d'une due diligence sur une société cotée [67].

          Dans ce contexte, l'on notera que cette exception implique que les conditions de report de la publication d'une information privilégiée soient réunies - dans le cas contraire, l'information privilégiée devrait être publiée « dès que possible » [68] - et, plus particulièrement, que la personne recevant l'information privilégiée soit soumise à une obligation de confidentialité. Dans l'hypothèse d'une due diligence, l'on considère ainsi généralement qu'une divulgation, afin de pouvoir relever du cadre professionnel « normal » et ainsi bénéficier de l'exception, doit être effectuée conformément aux précautions et usages normaux en la matière, dont la conclusion préalable d'un accord de confidentialité concernant l'existence des pourparlers et les informations divulguées, et d'un accord de standstill interdisant au destinataire des informations échangées d'effectuer des opérations sur les titres en question [69]. Une décision du conseil d'administration, qui doit être conforme à l'intérêt social, est également requise.

          35.La présomption de licéité des sondages de marché, effectués conformément au règlement, constitue une forme particulière de divulgation d'informations privilégiées dans le cadre normal de l'exercice d'un travail, d'une profession ou de fonctions. Les sondages de marché, dont la base légale est l'article 11 du règlement, font l'objet de règles spécifiques énoncées au règlement d'exécution n° 2016/959 du 17 mai 2016 [70] et au règlement délégué n° 2016/960 du 17 mai 2016 [71].

          5. Comportements légitimes

          36.Pour atténuer la rigueur des règles énoncées en ses articles 8 et 14, le règlement énumère certains comportements dits « légitimes ». Il s'agit de situations dans lesquelles le simple fait qu'une personne soit en possession d'une information privilégiée ne signifie pas nécessairement que cette personne ait utilisé cette information et ait ainsi commis une opération d'initié [72].

          Ce concept de comportement légitime est une nouveauté introduite par le règlement, bien que certaines formes d'exemptions aient été acceptées sous l'ancien régime (voy. not. point 5.3., infra).

          L'objectif poursuivi est « d'éviter d'interdire, par accident, des formes d'activité financière qui sont légitimes, à savoir celles qui n'entraînent pas d'abus de marché » [73].

          Le règlement met ainsi en place une série de présomptions de non-utilisation de l'information privilégiée. Ces présomptions peuvent cependant être renversées si la FSMA est en mesure d'établir qu'il existait une raison illégitime pour les ordres, transactions ou comportements concernés [74]. Le considérant 31 du règlement ajoute qu'aucune personne « ne devrait être protégée en vertu de ses fonctions » et ajoute que certaines personnes « ne devraient être protégées que si elles agissent de façon appropriée, dans le respect tant des normes de leur profession que de celles du présent règlement, à savoir dans le respect de l'intégrité du marché et de la protection des investisseurs ».

          Plusieurs situations doivent être distinguées, chacune étant affectée de conditions propres.

          5.1. Mise en oeuvre de précautions internes au sein d'une personne morale

          37.Une personne morale bénéficie de la première présomption de comportement légitime à la double condition suivante [75]:

            • elle a établi, mis en oeuvre et maintenu à jour des mesures et procédures internes appropriées et efficaces pour garantir de manière effective que ni la personne physique qui a pris la décision pour son compte d'acquérir ou de céder des instruments financiers auxquels l'information privilégiée se rapporte ni aucune autre personne physique qui aurait pu exercer une quelconque influence sur cette décision n'étaient en possession de l'information privilégiée; et
            • elle n'a pas encouragé, recommandé, incité ou influencé d'une quelconque manière la personne physique qui a, pour le compte de la personne morale, acquis ou cédé des instruments financiers auxquels se rapporte l'information.

            38.L'on remarquera d'emblée que cette présomption de comportement légitime ne s'applique qu'aux personnes morales, puisqu'elle a pour objet d'éviter la contamination d'une personne morale sous l'angle de l'abus de marché par les agissements d'une personne physique dont on pourrait estimer qu'elle a agi comme préposé ou agent de cette personne morale [76]. Cette présomption bénéficiera donc a priori surtout aux sociétés cotées, à leurs actionnaires institutionnels et aux structures d'investissement (telles les structures de gestion des fonds de private equity, les « General Partners » ou « GPs » dans le jargon du capital-risque).

            La première condition est rédigée de manière stricte puisqu'il ne suffit pas d'établir à un moment déterminé des procédures internes (dites « information barriers » ou « Chinese Walls ») mais il faut également les mettre en oeuvre et les maintenir à jour. De plus, le standard requis pour ces procédures est élevé en soi puisqu'elles doivent être appropriées et efficaces (ces deux adjectifs semblent d'ailleurs partiellement superfétatoires). Enfin, ces procédures doivent avoir été réfléchies de manière à garantir leur efficacité. Au sein des banques, ces barrières sont généralement érigées entre les départements du côté dit « privé » (tels le département mergers and acquisitions advisory, equity and debt capital markets, acquisition and structured finance, etc.) et les départements du côté du « public » (marchés financiers (vente et trading), equity and debt research[77]. Ces mesures de prévention prennent la forme de barrières physiques (pièces distinctes, portes équipées de verrous), de barrières informatiques, de barrières liées à l'organisation des ressources humaines (un employé ne pouvant pas travailler pour les deux types de départements à un même moment), et de barrières organisationnelles [78].

            39.Il est permis de se demander si les termes utilisés signifient nécessairement qu'une obligation de résultat repose sur la personne morale. En d'autres termes, la présomption de comportement légitime peut-elle être renversée s'il est prouvé que la personne physique qui a pris la décision d'acquérir ou de céder des instruments financiers ou une autre personne physique qui aurait pu exercer une quelconque influence sur cette décision étaient en possession de l'information privilégiée? Nous ne le pensons pas. En effet, l'article 9, 1., du règlement prévoit comme deuxième condition que la personne morale n'ait pas posé d'acte positif à l'égard de la personne physique. Il faudra donc qu'un tel acte positif de la personne morale soit prouvé pour renverser la présomption de comportement légitime.

            5.2. Teneur de marché, personne habilitée à agir comme contrepartie ou personne habilitée à exécuter des ordres pour compte de tiers

            40.Une personne (physique ou morale) bénéficie de la deuxième présomption de comportement légitime si elle remplit une des conditions suivantes [79]:

              • pour l'instrument financier auquel cette information se rapporte, cette personne est un teneur de marché [80] (en anglais « market maker ») ou une personne habilitée à agir comme contrepartie, et lorsque l'acquisition ou la cession des instruments financiers auxquels se rapporte cette information s'effectue légitimement dans le cadre normal de l'exercice de sa fonction en tant que teneur de marché ou de contrepartie pour cet instrument financier [81]; ou
              • elle est habilitée à exécuter des ordres pour le compte de tiers, et lorsque l'acquisition ou la cession des instruments financiers auxquels se rapportent ces ordres s'effectue dans le but légitime d'exécuter ceux-ci dans le cadre normal de l'exercice du travail, de la profession ou des fonctions de cette personne.

              41.L'un des principaux objectifs affichés par les auteurs du règlement en introduisant l'article 9 était en effet la reconnaissance du rôle des teneurs de marchés, lorsqu'ils agissent en leur capacité légitime de pourvoyeurs de la liquidité du marché [82]. Il est ainsi reconnu que « le simple fait que des teneurs de marché ou des personnes habilitées à agir comme contreparties se limitent à exercer leur activité légitime d'achat ou de vente d'instruments financiers, ou que des personnes habilitées à exécuter des ordres pour le compte de tiers détenant des informations privilégiées se limitent à exécuter, annuler ou modifier consciencieusement un ordre, ne devrait pas être réputé constituer une utilisation de ces informations privilégiées » [83].

              Cependant, cette présomption est clairement réfragable par la FSMA: les protections prévues par le règlement à l'intention des teneurs de marchés, des organismes habilités à agir en qualité de contrepartie ou des personnes habilitées à exécuter des ordres pour le compte de tiers détenant des informations privilégiées ne s'étendent pas aux activités clairement interdites au titre du règlement [84], parmi lesquelles figure par exemple la pratique de « front running » [85].

              42.Notons que l'article 9, 2., du règlement distingue la situation du teneur de marché de celle de la personne habilitée à exécuter des ordres pour le compte de tiers, mais soumet les deux catégories d'intermédiaires à des conditions formulées en termes presque identiques. La raison de cette différence de texte tient au fait que la deuxième catégorie est résiduaire: les conditions de l'exercice du « comportement légitime » doivent donc être exprimées en termes plus génériques.

              5.3. Exécution d'une obligation devenue exigible

              43.Une personne (physique ou morale) bénéficie de la troisième présomption de comportement légitime lorsque cette personne effectue une transaction afin d'acquérir ou de céder des instruments financiers et que cette transaction est effectuée pour assurer l'exécution d'une obligation devenue exigible, en toute bonne foi et non dans le but de contourner l'interdiction d'opération d'initié et si elle remplit une des conditions suivantes [86]:

                • cette obligation résulte d'un ordre passé ou d'une convention conclue avant que la personne concernée ne détienne une information privilégiée; ou
                • cette transaction est effectuée pour satisfaire à une obligation légale ou réglementaire née, avant que la personne concernée ne détienne une information privilégiée.

                44.Il s'agit ici d'éviter qu'une personne qui s'est engagée à réaliser une opération, soit contractuellement, soit par application d'une obligation légale ou réglementaire, ne puisse être en mesure d'exécuter cette obligation dès lors qu'elle a eu entre-temps accès à une information privilégiée.

                Cette première condition trouvera une application bienvenue dans le cas des dérivés sur actions dont le règlement a lieu avec un décalage dans le temps. Un autre exemple concerne certaines structures qui peuvent être mises en place dans le cadre de plans d'intéressement des dirigeants ou du personnel.

                La seconde condition vise par exemple la situation dans laquelle la société a acquis ses propres actions au-delà de la limite de 20% visée à l'article 620, § 1er, 2°, du Code des sociétés, dans le cadre d'une acquisition à la suite d'une transmission de patrimoine à titre universel ou lors d'une vente conformément aux articles 1494 et s. du Code judiciaire en vue de recouvrer une créance de la société sur le propriétaire de ces actions, lesquelles doivent être aliénées dans un délai de 12 mois à compter de leur acquisition [87], [88], et lorsque la société prend connaissance d'une information privilégiée avant d'avoir pu aliéner les actions concernées. Il est permis de se demander si cette même condition vise également les actions acquises en vue de leur distribution au personnel, qui doivent elles aussi être aliénées dans un délai de 12 mois [89]. En effet, les émetteurs anticipent en principe les périodes d'exercice et veillent à disposer d'un nombre suffisant d'actions propres en temps utile. Notons d'ailleurs que le recours à cette disposition est peu courant en pratique, les émetteurs préférant souvent se reposer sur le régime général du rachat de titres propres, qui suppose l'habilitation préalable de l'assemblée générale mais n'impose pas de délai pour l'aliénation des titres.

                45.L'on notera qu'avant l'entrée en vigueur du règlement, cette exemption était reprise à l'article 25, § 2, alinéa 1er, de la loi surveillance qui disposait [90] que « [l]'interdiction [des opérations d'initié] ne s'applique pas aux transactions effectuées pour assurer l'exécution d'une obligation d'acquisition ou de cession d'instruments financiers lorsque cette obligation est devenue exigible et résulte d'une convention conclue avant que l'intéressé dispose de l'information privilégiée en question » [91].

                5.4. Offre publique ou fusion

                46.Une personne (physique ou morale) bénéficie de la quatrième présomption de comportement légitime lorsque cette personne a obtenu cette information privilégiée dans le cadre de la réalisation d'une offre publique d'acquisition sur, ou d'une fusion avec, une société, et utilise cette information privilégiée dans le seul but de mener à bien cette offre publique d'acquisition ou cette fusion.

                Cette présomption ne vaut cependant que sous réserve qu'au moment de l'approbation de l'offre ou de la fusion par les actionnaires de cette société, toutes les informations privilégiées aient été rendues publiques (pratique dénommée « cleansing » en anglais) [92] ou aient cessé d'une autre façon d'être des informations privilégiées [93].

                Notons que cette exception est d'application stricte: elle ne s'appliquera donc pas à d'autres structures permettant d'aboutir à un résultat comparable, tels un apport en nature d'actifs significatifs, ou un apport d'universalité ou de branche d'activités, permettant à l'apporteur d'acquérir le contrôle suite à l'émission des actions nouvelles de la société bénéficiaire de l'apport.

                47.Au Royaume-Uni, la FCA a énuméré quelques exemples d'usage d'information privilégiée « dans le seul but de mener à bien cette offre publique d'acquisition ou cette fusion »: notamment le fait de chercher à obtenir des actionnaires de la société cible des engagements irrévocables d'apporter leurs titres à l'offre (ou simples expressions de soutien dans ce même contexte) ou encore le fait de prendre des dispositions en vue d'une augmentation de capital pour émettre de nouvelles actions de l'offrant dans le cadre d'une offre publique d'échange [94].

                48.L'article 9, 4., du règlement précise expressément que cette présomption ne s'applique pas au ramassage en bourse (« stakebuilding » en anglais), c'est-à-dire le fait d'acquérir progressivement sur le marché les titres de la société sur laquelle l'on désire lancer ultérieurement une offre publique d'achat. Comme nous le verrons ci-dessous, l'exclusion visant le ramassage en bourse est limitée à l'article 9, 4., dès lors que l'article 9, 5., pourrait implicitement couvrir, selon certains auteurs, cette même pratique.

                5.5. Exécution de sa propre décision

                49.Il est également précisé que le simple fait qu'une personne (physique ou morale) utilise le fait de savoir qu'elle a décidé d'acquérir ou de céder des instruments financiers dans le cadre de l'acquisition ou de la cession de ces instruments financiers ne constitue pas en soi une utilisation d'informations privilégiées [95].

                Comme le relève le considérant 31 du règlement, « agir en se fondant sur ses propres plans et stratégies de négociation ne devrait pas être considéré comme une utilisation d'informations privilégiées ».

                50.Selon certains commentateurs, cette disposition semble pouvoir être lue comme légitimant le ramassage en bourse [96]. La nouvelle législation semblerait donc mettre un terme aux incertitudes qui existaient sous l'empire de la législation antérieure [97]: la connaissance de sa propre intention de lancer ultérieurement une offre publique d'acquisition ne constituerait pas une information privilégiée qui interdirait le ramassage en bourse. Bien qu'une telle conclusion puisse se justifier sur le plan de la pratique internationale [98], une certaine prudence nous semble devoir s'imposer jusqu'à une prise de position claire de l'AEMF à ce sujet. En effet, en tout état de cause, il n'en demeure pas moins interdit de réaliser un tel ramassage lorsque l'acquéreur dispose d'information privilégiée, par exemple à la suite d'une due diligence sur la cible: c'est précisément cette interdiction de principe qui est rappelée à l'article 9, 4., du règlement [99].

                Dans tous les cas, la conclusion d'un contrat dérivé relatif aux actions de la cible, permettant de réaliser une plus-value purement financière lorsque le cours de bourse montera lors de l'annonce de l'offre, reste illégitime [100].

                6. Liste d'initiés
                6.1. Introduction

                51.Les listes d'initiés constituent un outil important pour les régulateurs enquêtant sur de possibles abus de marché. Ces listes peuvent aussi être utilisées par les émetteurs (et les autres personnes visées) pour mieux maîtriser le flux des informations privilégiées et mieux gérer leurs obligations de confidentialité. L'obligation d'établir des listes d'initiés existait déjà en vertu de la directive MAD I. Le règlement et le règlement d'exécution n° 2016/347 du 10 mars 2016 [101] ont, dans ce domaine également, poussé l'harmonisation nettement plus loin que l'ancienne directive ne l'avait fait. Selon les considérants du règlement, ceci viserait à réduire « les contraintes administratives inutiles sur les émetteurs » [102]. Il est permis de se demander si cet objectif de réduction des contraintes administratives a été atteint.

                6.2. Emetteurs concernés

                52.Les obligations relatives aux listes d'initiés s'appliquent uniquement aux émetteurs qui ont sollicité ou approuvé l'admission de leurs instruments financiers à la négociation sur un marché réglementé dans un Etat membre ou, s'il s'agit d'un instrument négocié exclusivement sur un MTF ou sur un OTF, ont approuvé la négociation de leurs instruments financiers sur un MTF ou sur un OTF ou ont sollicité l'admission à la négociation de leurs instruments financiers sur un MTF dans un Etat membre [103].

                6.3. Principes

                53.En vertu de l'article 18, 1., du règlement, les émetteurs ou toute personne agissant en leur nom ou pour leur compte doivent établir « une liste de toutes les personnes qui ont accès aux informations privilégiées, et qui travaillent pour eux en vertu d'un contrat de travail ou exécutent d'une autre manière des tâches leur donnant accès à des informations privilégiées, comme les conseillers, les comptables ou les agences de notation de crédit ».

                Seuls les initiés qui ont un accès effectif, réel, à l'information privilégiée doivent figurer sur la liste [104]. Un accès potentiel ne suffit pas. Les personnes à indiquer sur la liste incluent le personnel de support lorsqu'il a accès à l'information privilégiée, comme par exemple les assistant(e)s et secrétaires. En revanche, les actionnaires d'un émetteur qui auraient accès à des informations privilégiées ne comptent pas parmi les personnes qui doivent figurer sur une liste d'initiés. Ils figureront cependant sur la liste qui doit être établie pour un sondage de marché s'ils ont été contactés dans ce cadre.

                6.4. Liste unique divisée en sections

                54.Chaque émetteur doit désormais avoir une liste unique. L'article 2 du règlement d'exécution n° 2016/347 prévoit que cette liste doit être divisée en différentes sections, chacune se rapportant à un type précis d'information privilégiée. Des nouvelles sections sont ajoutées à la liste d'initiés à mesure que de nouvelles informations privilégiées sont identifiées. Chaque section de la liste d'initiés inclut uniquement les coordonnées des personnes ayant accès au type d'information privilégiée sur laquelle porte cette section.

                Pour éviter que les mêmes personnes ne figurent de manière répétée dans différentes sections des listes d'initiés, les émetteurs ou les personnes agissant en leur nom ou pour leur compte, peuvent décider d'ajouter une section supplémentaire à la liste d'initiés. Cette section est appelée la « section des initiés permanents ». Selon les considérants du règlement d'exécution n° 2016/347, une telle section « ne devrait inclure que les personnes qui, de par la nature de leurs fonctions ou de leur position, ont en permanence accès à l'en­semble des informations privilégiées que possède l'émetteur » [105]. Les coordonnées des initiés permanents ne sont pas incluses dans les autres sections de la liste d'initiés. Il convient que les émetteurs qui voudraient opter pour ce système pèsent avec attention le pour et le contre. Il faut par exemple prendre garde aux conséquences qu'il entraîne pour les initiés concernés, par exemple quant aux possibilités pratiques d'effectuer des transactions sur les instruments financiers de la société. Rappelons qu'il n'existe aucune obligation de faire figurer les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes au sens de l'article 19 du règlement sur une section des initiés permanents au sens de l'article 18 du même règlement.

                6.5. Délégation à un tiers

                55.Seuls les émetteurs ont l'obligation de tenir une liste d'initiés. Les personnes agissant en leur nom ou pour leur compte n'ont pas d'obligation autonome de le faire en vertu du règlement [106], bien que les textes ne soient pas parfaitement clairs sur ce point. Cependant, l'émetteur peut mandater un tiers pour tout ou partie de la liste (ou, plus précisément, tout ou partie de la section pertinente de liste). C'est en ce sens qu'il faut comprendre les références à toute personne agissant au nom ou pour le compte d'un émetteur dans le règlement et dans le règlement d'exécution n° 2016/347.

                La situation la plus fréquente est que l'émetteur mandate chacun des tiers qui travaille pour lui sur un projet de transaction pour tenir la liste des initiés au sein de ce tiers. Cette personne devra dans ce cas se conformer aux obligations prévues par le règlement et par le règlement d'exécution n° 2016/347 pour les listes d'initiés. Par exemple, ce sera à ce tiers, plutôt qu'à l'émetteur lui-même, qu'il appartiendra de recueillir la reconnaissance écrite des initiés au sein de ce tiers.

                Il est important qu'un émetteur coordonne avec le ou les tiers agissant pour lui le moment auquel les données sont enregistrées dans la liste, afin d'éviter un risque d'incohérence quant à la détermination du moment précis auquel l'information privilégiée est née [107].

                L'émetteur reste dans tous les cas pleinement responsable des obligations prévues par le règlement en matière de liste d'initiés (art. 18, 2., du règlement).

                6.6. Format obligatoire

                56.La liste d'initiés contient notamment a) l'identité de toute personne ayant accès à des informations privilégiées, b) la raison pour laquelle cette personne figure sur la liste d'initiés, c) la date et l'heure auxquelles cette personne a eu accès aux informations privilégiées et d) la date à laquelle la liste d'initiés a été établie (art. 18, 3., du règlement).

                L'annexe I du règlement d'exécution n° 2016/347 prescrit les modèles qui doivent être utilisés. Le premier modèle est le modèle de base applicable à la liste d'initiés, qui comprendra, pour rappel, autant de sections qu'il y aura d'informations privilégiées. Le second modèle est le modèle à suivre pour la section des initiés permanents de la liste d'initiés, si l'émetteur opte pour cette faculté. Quant à l'annexe II, elle comporte le modèle de liste d'initiés à soumettre par les émetteurs d'instruments financiers admis à la négociation sur un marché de croissance des PME. La circulaire de la FSMA du 18 mai 2016 reprend, en substance, ces mêmes modèles.

                Ces modèles prévoient des données à caractère personnel nettement plus complètes qu'en vertu des anciennes règles, telle que la date de naissance, l'adresse privée, les numéros de téléphone et, « le cas échéant », le numéro d'identification national des personnes concernées. Selon les considérants du règlement d'exécution n° 2016/347 [108], il s'agit de faciliter la tâche des autorités compétentes en leur permettant d'analyser rapidement le comportement de négociation des initiés, d'établir des liens entre initiés et personnes impliquées dans des transactions suspectes, d'identifier les contacts qu'ils ont pu avoir entre eux à des moments critiques et de demander des enregistrements relatifs aux échanges de données, le cas échéant.

                6.7. Tenue électronique

                57.La liste d'initiés doit être établie et tenue à jour sous un format électronique. Celui-ci doit garantir a) le caractère confidentiel des informations contenues dans la liste en limitant l'accès à celle-ci aux personnes clairement identifiées faisant partie du personnel de l'émetteur (ou toute personne agissant en son nom ou pour son compte), qui ont besoin de cet accès par la nature de leur fonction ou leur position, b) l'exactitude des informations contenues dans la liste d'initiés et c) l'accès aux versions précédentes de la liste d'initiés et la possibilité de les récupérer (art. 2, 3. et 4., du règlement d'exécution n° 2016/347).

                6.8. Mise à jour

                58.En vertu de l'article 18, 4., du règlement, cette liste d'initiés doit être mise à jour « rapidement », dans les circonstances suivantes: a) en cas de changement du motif pour lequel une personne a déjà été inscrite sur la liste d'initiés, b) lorsqu'une nouvelle personne a accès aux informations privilégiées et doit, par conséquent, être ajoutée à la liste d'initiés et c) lorsqu'une personne cesse d'avoir accès aux informations privilégiées. Chaque mise à jour précise la date et l'heure auxquelles sont survenus les changements entraînant la mise à jour, ainsi que la date de la mise à jour elle-même.

                6.9. Conservation et communication à l'autorité

                59.La liste d'initiés doit être conservée pour une période d'au moins cinq ans après son établissement ou sa mise à jour (art. 18, 5., du règlement). Cette période se calcule donc à partir de la dernière modification de la liste. Toute liste d'initiés doit être communiquée à l'autorité compétente « dès que possible » à la demande de celle-ci (art. 18, 1., du règlement). La circulaire de la FSMA du 18 mai 2016 précise certaines modalités pratiques de communication de la liste.

                6.10. Obligations relatives aux personnes figurant sur les listes d'initiés

                60.En vertu de l'article 18, 2., du règlement, les émetteurs ou toute personne agissant en leur nom ou pour leur compte prennent toutes les mesures raisonnables pour s'assurer que les personnes figurant sur la liste d'initiés reconnaissent par écrit les obligations légales et réglementaires correspondantes et aient connaissance des sanctions applicables aux opérations d'initiés et à la divulgation illicite d'informations privilégiées. Selon nous, ceci doit être fait chaque fois qu'une personne est ajoutée à une nouvelle section de la liste.

                7. Obligation de notification des dirigeants et des personnes liées
                7.1. Introduction

                61.L'article 19 du règlement prévoit deux catégories d'obligations pour les dirigeants. En premier lieu, il prévoit une obligation de notification et de publication des transactions des personnes exerçant des responsabilités dirigeantes (ci-après, les « dirigeants ») et des personnes qui leur sont étroitement liées (ci-après, les « personnes liées »). La présente section 7 traite de cette obligation. En second lieu, il prévoit une interdiction d'effectuer des transactions, uniquement en ce qui concerne les dirigeants, pendant les périodes d'arrêt, ainsi que certaines exceptions. Cette interdiction sera traitée à la section 8.

                7.2. Champ d'application et définitions
                7.2.1. Emetteurs

                62.Le champ d'application de l'article 19 est plus restreint que celui des interdictions générales des articles 14 et 15 du règlement. En effet, l'article 19 s'applique uniquement aux émetteurs qui ont sollicité ou approuvé l'admission de leurs instruments financiers à la négociation sur un marché réglementé ou, s'il s'agit d'un instrument négocié exclusivement sur un MTF ou sur un OTF, ont approuvé la négociation de leurs instruments financiers sur un MTF ou sur un OTF ou ont sollicité l'admission à la négociation de leurs instruments financiers sur un MTF (art. 19, 4., du règlement). De plus, en ce qui concerne les obligations de notification, seuls les dirigeants d'un tel émetteur dont le siège social est en Belgique, et leurs personnes liées, doivent effectuer leurs notifications en Belgique (art. 19, 2., du règlement).

                Pour rappel, en Belgique, Euronext Brussels est un marché réglementé au sens du point a). Euronext Growth (anciennement, Alternext) et Euronext Access (anciennement, le Marché Libre) sont visés par le point b). La FSMA considère que les dirigeants d'un émetteur dont les instruments financiers sont négociés sur le Euronext Expert Market (anciennement, le Marché des Ventes Publiques), et les personnes liées, ne sont pas visés par les règles de l'article 19 (Circ. de la FSMA du 18 mai 2016, note de bas de page 3).

                Par ailleurs, les règles de l'article 19 s'appliquent dès que l'émetteur a sollicité l'admission de ses instruments financiers à la négociation sur un marché réglementé ou un MTF, c'est-à-dire avant même que la négociation n'ait effectivement commencé. Il en résulte par exemple qu'un dirigeant qui acquiert des actions de sa société dans le cadre d'une IPO devra effectuer une notification [109].

                7.2.2. Dirigeant

                63.Aux termes de l'article 3, 1., du règlement, point 25., un dirigeant est défini comme une personne au sein d'un émetteur qui est:

                  • un membre de l'organe d'administration, de gestion ou de surveillance de cette entité; ou
                  • un responsable de haut niveau qui, sans être membre des organes visés au point a), dispose d'un accès régulier à des informations privilégiées concernant directement ou indirectement cette entité et du pouvoir de prendre des décisions de gestion concernant l'évolution future et la stratégie d'entreprise de cette entité.

                  64.Pour les sociétés anonymes de droit belge, le point a) concernera en tout cas les membres du conseil d'administration et, s'il en existe un, du comité de direction (au sens de l'art. 524bis C. soc.). En ce qui concerne le point b), on soulignera la double condition qu'il prévoit et, dès lors, son champ d'application relativement étroit. En général, ce point b) concernera les membres du comité exécutif, lorsqu'il n'existe pas de comité de direction. Il s'agit cependant d'une question à apprécier au cas par cas en fonction des particularités propres à chaque société [110].

                  65.Le plus souvent, le champ d'application de la notion de dirigeant sera, en pratique, largement le même que celui des dirigeants visés par les articles 96, § 2, 520bis et 520ter du Code des sociétés relatifs à la rémunération des dirigeants de sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé. Les définitions ne sont toutefois pas formulées de la même manière, la définition du Code des sociétés étant plus large, à tout le moins en théorie.

                  66.Dans le cas d'un administrateur personne morale, le dirigeant sera le représentant permanent et la personne morale sera la personne liée, comme c'était déjà le cas dans l'interprétation des règles anciennes [111].

                  67.Faut-il le préciser, l'émetteur lui-même n'est pas un dirigeant.

                  7.2.3. Personne liée

                  68.Aux termes de l'article 3, 1., du règlement, point 26., une personne liée est définie comme:

                    • « le conjoint ou un partenaire considéré comme l'équivalent du conjoint conformément au droit national;
                    • l'enfant à charge conformément au droit national;
                    • un parent qui appartient au même ménage depuis au moins un an à la date de la transaction concernée; ou
                  1. une personne morale, un trust ou une fiducie, ou un partenariat,
                      • dont les responsabilités dirigeantes sont exercées par une personne exerçant des responsabilités dirigeantes ou par une personne visée aux points a), b) et c);
                      • qui est directement ou indirectement contrôlé(e) par cette personne;
                      • qui a été constitué(e) au bénéfice de cette personne; ou
                      • dont les intérêts économiques sont substantiellement équivalents à ceux de cette personne ».
                    1. Le point d) pose la question de savoir comment appliquer le concept de « personne étroitement liée » à un administrateur [112] dans le contexte des « mandats croisés ». La même question se posait déjà sous les anciennes règles.

                      Il s'agit de la situation où un administrateur de la société A exerce également des responsabilités dirigeantes dans une autre personne morale, un trust, une fiducie ou un partenariat. Cette situation suffit-elle à faire de cette autre entité une personne liée à l'administrateur de la société A? Si la réponse est positive, cette autre entité aura l'obligation de notifier toutes transactions sur les instruments financiers de la société A (ou les instruments financiers qui leur sont liés).

                      Le point d) cité ci-dessus prévoit quatre critères pour qu'une personne morale, trust, fiducie ou partenariat constitue une personne liée. A la lecture du texte réglementaire, il est clair que ces critères ne sont pas cumulatifs. Le texte utilise en effet le terme « ou ». Dès lors, dans une interprétation littérale, le seul fait qu'un administrateur de la société A soit administrateur d'une autre société, ferait de manière automatique de cette autre société une personne liée, en vertu du critère (1) ci-dessus.

                      Dans une interprétation raisonnable, il faut toutefois considérer que le critère (1) vise uniquement à capturer les situations où l'administrateur a une véritable emprise sur la direction de l'entité en question. Par exemple, si l'administrateur de la société A est un administrateur parmi d'autres au sein du conseil d'administration d'une autre société, s'il ne domine pas la prise de décision au sein de ce conseil et si aucun des critères (2) à (4) n'est rempli, cette société ne devrait pas, à notre avis, être étroitement liée à l'administrateur.

                      On observera que les documents préparatoires au règlement sont muets sur ce point d'interprétation. De plus, à notre connaissance, il n'existe pas (encore) de prise de position officielle de l'AEMF à ce sujet. On notera cependant que la définition de la personne liée était la même en vertu des anciennes règles et que la FSMA, de même par exemple que la FCA britannique, adoptaient à l'époque, en substance, l'interprétation raisonnable indiquée à l'alinéa qui précède.

                      7.3. Notification et publication
                      7.3.1. Introduction

                      69.Les nouvelles règles visent à accroître la transparence des opérations effectuées par les dirigeants et leurs personnes liées [113]. Cette transparence poursuit un triple objectif. Tout d'abord, il s'agit d'une mesure de prévention des opérations d'initiés et un moyen supplémentaire de surveillance des marchés pour les autorités compétentes [114]. Ensuite, la publication de ces opérations peut également être « une source d'information fort précieuse pour les investisseurs » [115]. Enfin, plus largement, « la transparence intégrale et adéquate du marché est une condition préalable à l'obtention de la confiance des acteurs de marché et, en particulier, à l'obtention de celle des actionnaires d'une entreprise » [116].

                      L'obligation de notification et de publication existait déjà sous l'ancienne directive MAD I et les anciennes règles belges, mais son champ d'application a été étendu, le délai de notification et de publication a été raccourci et les formalités ont été amplifiées et harmonisées.

                      7.3.2. Obligation de notification

                      70.Le point 1. de l'article 19 prévoit que les dirigeants et leurs personnes liées notifient, à la fois à l'émetteur et à l'autorité compétente, « toute transaction effectuée pour leur compte propre et se rapportant aux actions ou à des titres de créance dudit émetteur, ou à des instruments dérivés ou à d'autres instruments financiers qui leur sont liés ». Ces notifications sont effectuées « rapidement et au plus tard trois jours ouvrables après la date de la transaction ». Comme on le sait, le délai était auparavant de cinq jours ouvrables sous le régime de la directive MAD I.

                      71.La date de la transaction doit être déterminée conformément au droit national applicable à la transaction [117]. Pour les donations et héritages reçus, la date de la transaction est la date d'acceptation, déterminée conformément au droit national applicable [118].

                      72.Aussi longtemps que le montant total des transactions effectuées au cours de la même année civile ne dépasse pas le seuil précisé ci-dessous, il n'y a pas d'obligation de notification.

                      73.Comme déjà indiqué, l'autorité compétente à laquelle le dirigeant doit notifier les transactions visées, est celle de l'Etat membre dans lequel l'émetteur a son siège social (art. 19, 2.) [119]. Il s'agit, en Belgique, de la FSMA [120].

                      7.3.3. Obligation de publication

                      74.Le délai de publication est entièrement le même que celui de notification. Le point 3. de l'article 19 prévoit que c'est l'émetteur qui doit publier les informations. Il prévoit toutefois qu'à titre de solution de substitution, le droit national peut prévoir qu'une autorité compétente peut publier elle-même les informations. C'est le cas en Belgique, où la FSMA est chargée de la publication des informations, sur son site web (comme par le passé).

                      7.3.4. Seuil

                      75.L'obligation de notification prévue par le point 1. s'applique à toutes les transactions ultérieures une fois qu'un montant total de 5.000 EUR est atteint au cours d'une année civile. Ce seuil est calculé en ajoutant sans compensation toutes les transactions visées au point 1. Une autorité compétente peut décider de porter le seuil énoncé au point 8. à 20.000 EUR. La FSMA n'a pas fait usage de cette faculté, contrairement par exemple à l'AMF française.

                      7.3.5. Informations à notifier

                      76.En vertu du point 6., la notification doit notamment comporter la nature de la ou des transactions (p. ex. acquisition ou cession), en indiquant si elles sont liées à l'exercice de programmes d'options sur actions ou aux exemples spécifiques énoncés au point 7., la date et le lieu de la ou des transactions et le prix et le volume de la ou des transactions. Le règlement d'exécution n° 2016/523 du 10 mars 2016 [121] définit les normes techniques d'exécution relatives au format et au modèle de notification et de publication des transactions. Il s'est agi de prévoir des règles uniformes, au moyen d'un modèle unique. Une telle uniformisation n'existait pas en vertu de l'ancienne directive MAD I.

                      Bien que le point 1. de l'article 19 se réfère à la notification de « toute » transaction, il n'est pas nécessairement requis d'effectuer une notification séparée pour chaque transaction individuelle. Il est en effet possible d'effectuer une seule notification reprenant plusieurs transactions, pour autant que le délai de 3 jours soit respecté [122]. Toutefois, chaque transaction doit être détaillée au sein de cette notification unique, outre une présentation agrégée des données selon les catégories définies par le modèle.

                      Le modèle de notification, annexé au règlement d'exécution n° 2016/523, est obligatoire (art. 2). Les notifications doivent être transmises par des moyens électroniques, prescrits par les autorités compétentes.

                      77.La circulaire FSMA_2016_08 du 18 mai 2016 [123] prévoit les points suivants en matière de notification:

                        • comme déjà indiqué, les émetteurs n'ont pas l'obligation de publier eux-mêmes les notifications. Cette publication est effectuée par la FSMA sur son site web;
                        • les personnes tenues à notification doivent notifier leurs transactions à l'émetteur concerné et à la FSMA via l'application de notification en ligne « eMT » développée par la FSMA;
                        • les personnes tenues à notification peuvent mandater une autre personne pour notifier leurs transactions, mais restent toujours elles-mêmes juridiquement responsables du respect de leur obligation de notification et du contenu de la notification;
                        • l'application de notification en ligne « eMT » prévoit que les transactions notifiées sont confirmées à la FSMA par les émetteurs. La FSMA attend des émetteurs qu'ils prennent des mesures de précaution raisonnables pour contrôler la vraisemblance quant à la source des notifications et, le cas échéant, pour contrôler que les mandataires sont dûment autorisés à notifier des transactions au nom des personnes tenues à notification. Cette « attente » à la charge des émetteurs n'est pas prévue par les règlements européens et paraît donc y ajouter.

                        78.La publication par la FSMA de la notification, conjuguée au fait que l'application en ligne développée par la FSMA assure une notification à la fois à la FSMA et à l'émetteur, permet de résoudre une difficulté pratique. En effet, comme déjà indiqué, c'est dans le même délai de 3 jours ouvrables que la notification doit à la fois être faite et être publiée [124].

                        Au sujet des mandats de notification, ceux-ci peuvent par exemple être confiés à l'émetteur ou à un gestionnaire d'investissement. Plusieurs émetteurs encouragent, à juste titre, les dirigeants et personnes liées à confier à l'émetteur l'ensemble de leurs notifications. Ceci permet à l'émetteur d'effectuer au préalable le contrôle visé dans la circulaire de la FSMA. Dans ce cas, il est nécessaire de prévoir que le dirigeant ou la personne liée doit communiquer toutes les informations nécessaires à l'émetteur suffisamment de temps avant l'échéance du délai de trois jours, par exemple dans un délai de deux jours, voire d'un seul jour.

                        7.3.6. Transactions visées

                        79.Nous l'avons vu, en vertu du point 1. de l'article 19, doit être notifiée toute transaction effectuée pour le compte propre d'un dirigeant ou d'une personne liée et se rapportant aux actions ou à des titres de créance dudit émetteur, ou à des instruments dérivés ou à d'autres instruments financiers qui leur sont liés. Il s'agit donc d'un champ d'application très large et nettement plus étendu que les anciennes règles. Le point 7. de l'article 19, ainsi que l'article 10 du règlement délégué n° 2016/522 du 17 décembre 2015 [125] en donnent certains exemples, auxquels nous renvoyons.

                        Pour autant que la transaction concerne un instrument visé par l'obligation de notification, le lieu d'exécution de la transaction n'importe pas. Par exemple, une transaction privée conclue en dehors de tout marché devra aussi être notifiée, comme c'était déjà le cas par le passé [126].

                        Les transactions visées incluent aussi les transactions où le dirigeant ou la personne liée « ne joue pas un rôle actif dans la décision d'investissement », comme les donations reçues et les héritages [127]. Effectuer une donation est également soumis à l'obligation de notification.

                        Les nouvelles règles s'appliquent également aux transactions sur les instruments de dette, comme les obligations. Il en résulte notamment que les dirigeants au sein des émetteurs dont seuls des instruments de dette sont négociés sur un marché visé par l'article 19 sont désormais aussi visés par les règles prévues par cet article 19.

                        La mise en gage constitue une autre extension du champ d'application de l'obligation de notification. Cette extension s'explique par le fait que la mise en gage d'actions « peut entraîner des répercussions matérielles potentiellement déstabilisatrices pour l'entreprise en cas de cession soudaine et imprévue » [128]. Le règlement prévoit toutefois qu'« un gage ou une sûreté similaire portant sur des instruments financiers liés au dépôt des instruments financiers sur un compte de dépôt de titres ne doit pas être notifié, dès lors et tant que ce gage ou cette sûreté est destiné à garantir une ligne de crédit particulière » [129].

                        80.Les transactions effectuées par des personnes qui organisent ou exécutent des transactions à titre professionnel au nom d'un dirigeant ou d'une personne liée (ou par toute autre personne agissant au nom du dirigeant ou d'une personne liée) sont visées par l'obligation de notification, « y compris lorsqu'un pouvoir discrétionnaire est exercé » [130]. Ceci vise par exemple les transactions effectuées par un « family office », un gestionnaire d'investissements mandaté par le dirigeant ou une personne liée, etc.

                        Cependant, les transactions exécutées par les gestionnaires d'un organisme de placement collectif dans lequel un dirigeant ou une personne liée a investi ne sont pas soumises à l'obligation de notification « si le gestionnaire de l'organisme de placement collectif fait preuve d'une discrétion totale, ce qui exclut la possibilité pour le gestionnaire de recevoir des instructions ou des suggestions sur la composition du portefeuille, directement ou indirectement, par les investisseurs de cet organisme de placement collectif » [131]. Soulignons que cette exception ne vaut donc que pour les organismes de placement collectif, aux conditions qui viennent d'être énoncées.

                        81.En ce qui concerne les plans d'intéressement des dirigeants, plusieurs répondants lors de la consultation publique sur le règlement délégué n° 2016/522 ont soutenu que tant l'octroi unilatéral de stock options (c.-à-d. sans acceptation) que l'acceptation de stock options (lorsqu'une telle acceptation s'applique en vertu du plan) ne devrait pas être notifié, mais seulement leur exercice [132]. Il a aussi été argué lors de cette consultation que l'obligation de notification ne devrait pas s'appliquer en ce qui concerne les instruments dérivés contenus par des plans d'intéressement, comme les phantom stocks  [133]. Plusieurs répondants ont également plaidé pour que les octrois conditionnels (conditional awards) ne doivent pas être notifiés [134]. L'AEMF a rejeté ces demandes, renvoyant aux dispositions de l'article 19 [135]. L'AEMF a notamment spécifié que les instruments dérivés contenus dans un plan d'intéressement sont soumis à l'obligation de notification [136]. Le règlement délégué n° 2016/522 qui a suivi cette consultation prévoit, entre autres, que l'acceptation ou l'exercice d'une option d'achat d'action est soumise à l'obligation de notification, en ce compris dans le cadre d'un plan d'intéressement.

                        82.Relevons enfin que la notion d'autres instruments financiers liés n'est pas définie à l'article 19. Il faut probablement entendre par là les instruments financiers dont le cours ou la valeur dépend du cours ou de la valeur d'un instrument financier visé à l'article 19 ou qui a un effet sur ce cours ou cette valeur, par analogie avec le point d) de l'article 2, 1. Il pourra par exemple s'agir des actions (cotées ou non cotées) d'une autre société dont les actifs consistent exclusivement ou principalement d'actions de l'émetteur [137].

                        Le règlement prévoit une règle particulière en ce qui concerne les parts d'organismes de placement collectif, les produits structurés ou les instruments financiers incorporant un instrument dérivé qui fournissent une exposition à la performance des actions ou titres de créance émis par l'émetteur. Conformément à la règle de base, une transaction portant sur ces instruments financiers est soumise à l'obligation de notification. Une exception s'applique toutefois lorsque soit l'instrument financier lié fournit une exposition de 20% ou moins aux actions ou aux titres de créance de l'émetteur, soit le dirigeant ou la personne liée ne connaissait pas et ne pouvait pas connaître la composition de l'investissement de l'instrument financier lié [138]. Nous renvoyons à l'article 19, 1bis., du règlement pour plus de détails.

                        8. Périodes d'arrêt applicables aux dirigeants
                        8.1. Introduction

                        83.Une nouveauté importante du règlement concerne les « périodes d'arrêt » (« closed periods »). Comme on le sait, ni l'ancienne directive MAD I ni les anciennes règles belges ne prévoyaient de règles en la matière. Le sujet était uniquement réglé par les dealing codes des émetteurs [139].

                        L'article 19, 11., du règlement prévoit que tout dirigeant (voir point 7.2.2.) « n'effectue aucune transaction pour son compte propre ou pour le compte d'un tiers, que ce soit directement ou indirectement, se rapportant aux actions ou à des titres de créance de l'émetteur ou à des instruments dérivés ou à d'autres instruments financiers qui leur sont liés, pendant une période d'arrêt de 30 jours calendaires avant l'annonce d'un rapport financier intermédiaire ou d'un rapport de fin d'année que l'émetteur est tenu de rendre public conformément: a) aux règles de la plate-forme de négociation sur laquelle les actions de l'émetteur sont admises à la négociation; ou b) au droit national ».

                        8.2. Champ d'application - Personnes concernées

                        84.L'interdiction du règlement vise uniquement les dirigeants, non leurs personnes liées. Certains dealing codes vont au-delà et étendent l'interdiction relative aux périodes d'arrêt aux personnes liées. Dans ce cas, l'on pourrait prévoir dans le dealing code que les dirigeants se portent fort du respect par leurs personnes liées de cette obligation. Plus fréquemment, les dealing codes étendent l'interdiction à certains employés qui ne sont pas des dirigeants mais qui ont régulièrement accès à des informations sensibles, par exemple les employés qui travaillent à la préparation des informations financières.

                        8.3. Champ d'application - Publications avant lesquelles une période d'arrêt s'applique

                        85.La nouvelle disposition vise uniquement les publications de résultats qui sont obligatoires. Pour les sociétés dont les actions sont admises à la négociation sur Euronext Brussels, il s'agira des résultats annuels et semestriels. Les publications trimestrielles, quel qu'en soit le contenu, ne sont pas obligatoires et ne sont donc pas visées par la nouvelle disposition. Beaucoup d'émetteurs d'une certaine taille publient certains résultats à l'issue des premier et troisième trimestres, sur une base volontaire. Dans ce cas, la plupart des dealing codes étendent l'interdiction d'effectuer des transactions à la période précédant ces publications. Une telle extension n'est cependant pas légalement requise. Lorsqu'un dealing code prévoit des périodes d'arrêt additionnelles ou plus longues que le règlement, ces extensions n'en deviennent pas pour autant soumises à celui-ci.

                        On notera par ailleurs que la période d'arrêt imposée par l'article 19, 11., prend fin au moment-même de la publication des résultats. Beaucoup de dealing codes continuent cependant, sur une base volontaire, à étendre la période d'arrêt à toute la journée de la publication.

                        L'article 19, 11., a immédiatement suscité une difficulté d'interprétation et d'application en ce qui concerne les résultats annuels. Dans plusieurs pays, dont la Belgique et le Royaume-Uni, les sociétés publient leurs résultats annuels avant la date légalement requise pour la publication de leur rapport annuel. Il s'agit du communiqué annuel. Dans ces conditions, la période d'arrêt précédait-elle la publication du communiqué annuel ou celle, ultérieure, du rapport annuel, ou encore aurait-il fallu appliquer une période d'arrêt avant chacune des deux publications? Les deuxième et troisième solutions auraient été contraires à l'intention du législateur européen.

                        Le Q&A de l'AEMF a spécifié, dès le 13 juillet 2016, que la première solution doit s'appliquer [140]. Il n'en sera toutefois ainsi qu'à la condition que le communiqué annuel contienne toute l'information clé relative aux chiffres financiers dont l'inclusion est prévue dans le rapport annuel ultérieur. Le Q&A précise encore que si l'information indiquée dans le communiqué annuel devait changer après sa publication, ceci n'entraînerait pas l'application d'une nouvelle période d'arrêt, mais devrait être traité conformément à l'article 17 du règlement, relatif à l'obligation de publication d'une information privilégiée. En d'autres termes, dans ce cas de figure, la société doit publier une information corrigée dès que possible, sans attendre la date à laquelle sera publié le rapport annuel.

                        86.Outre les périodes d'arrêt qui précèdent la publication de résultats financiers, beaucoup d'émetteurs prévoient, dans leurs dealing codes, la possibilité pour l'émetteur de décréter des périodes d'arrêt supplémentaires ad hoc. Celles-ci sont souvent appelées périodes interdites (prohibited periods), pour les distinguer des closed periods. Ces périodes interdites concerneront des événements ponctuels, comme la négociation d'un contrat important par exemple. Elles ne sont pas régies par le règlement.

                        8.4. Champ d'application - Transactions concernées

                        87.Nous l'avons vu, le point 1. de l'article 19, relatif aux obligations de notification, vise « toute transaction effectuée pour leur compte propre ». Le point 11. du même article prévoit quant à lui qu'un dirigeant « n'effectue aucune transaction pour son compte propre ou pour le compte de tiers, que ce soit directement ou indirectement » pendant une période d'arrêt. L'interdiction relative aux périodes d'arrêt est donc formulée de manière différente, en ce qu'en principe, elle vise uniquement une transaction par le dirigeant [141], c'est-à-dire, plus précisément, une décision active d'investissement.

                        Sur cette base, l'on peut défendre que l'acquisition d'instruments financiers à la suite d'une donation ou d'un héritage par un dirigeant pendant une période d'arrêt ne serait pas concernée par les périodes d'arrêt [142]. L'on peut aussi invoquer en ce sens, par analogie, le commentaire de l'AEMF fait à propos des notifications, qui considère que la réception d'une donation ou d'un héritage ne constitue pas une décision active d'investissement [143] (pour rappel, il est clair que ces opérations doivent toujours être notifiées).

                        En revanche, dans tous les cas, l'acquisition de stock options, de restricted stock units, de performance stock units ou d'autres instruments financiers par un dirigeant dans le cadre d'un plan d'intéressement est selon nous interdit en période d'arrêt. Ceci résulte du fait que l'article 9 du règlement délégué n° 2016/522 vise, au titre des transactions qu'un émetteur peut autoriser en période d'arrêt à certaines conditions, les attributions ou octrois d'instruments financiers en vertu d'un plan d'intéressement, pour autant, notamment que le dirigeant « n'a pas de pouvoir discrétionnaire sur l'acceptation des instruments financiers attribués ou octroyés ». Il en résulte, à notre avis, que le législateur européen considère tout octroi d'instruments financiers en vertu d'un plan d'intéressement comme étant interdit en période d'arrêt [144]. Cette interprétation est probablement peu problématique en pratique. En effet, la plupart des émetteurs évitaient déjà d'octroyer des stock options, etc. lors des périodes d'arrêt prévues par leur dealing codes. L'exercice de stock options est bien entendu également interdit en période d'arrêt.

                        88.Par ailleurs, indépendamment de la question des périodes d'arrêt, non seulement l'exercice de stock options est visé par l'interdiction générale des opérations d'initiés de l'article 14 du règlement, mais aussi l'acquisition de ces stock options. Il en va de même de l'octroi de restricted stock units, de performance stock units ou d'autres instruments financiers dans le cadre d'un plan d'intéressement. L'ancienne position de la FSMA, qui considérait que l'octroi d'un stock option était possible même en possession d'une information privilégiée, n'est ainsi plus d'actualité. En d'autres termes, par exemple, un dirigeant (de même que toute autre personne) ne peut ni acquérir ni exercer de stock options s'il est en possession d'une information privilégiée, qu'une période d'arrêt soit en cours ou non.

                        8.5. Champ d'application - Mandats discrétionnaires

                        89.Une question importante est celle de savoir si une transaction effectuée par un gestionnaire d'investissements pendant une période d'arrêt est autorisée. Si ce gestionnaire agit sur la base d'un mandat discrétionnaire ou d'un mandat irrévocable conclu avec le dirigeant en dehors de la période d'arrêt et à un moment où il n'existait aucune information privilégiée, la transaction peut à notre avis avoir lieu [145]. Contrairement par exemple à l'acceptation de stock options par un dirigeant, il n'y a dans ce cas aucune action du dirigeant pendant la période d'arrêt. Il est bien entendu qu'aucune intervention de la part du dirigeant auprès de son gestionnaire d'investissement ne peut avoir lieu pour (tenter d')influencer d'une manière ou d'une autre les transactions de ce gestionnaire. On soulignera cependant qu'il n'existe à ce jour aucune position claire de l'AEMF, ce qui est d'autant plus regrettable que la question peut prêter à controverse.

                        Observons enfin qu'en dehors de cette question, un émetteur peut prendre le parti d'imposer au dirigeant de faire en sorte que son gestionnaire d'investissement n'agisse jamais pendant une période d'arrêt, même lorsqu'il s'agit d'un véritable mandat discrétionnaire. Lorsqu'un émetteur adopte cette position, c'est très généralement dans une perspective de gestion du risque de réputation.

                        8.6. Circonstances dans lesquelles un émetteur peut autoriser une transaction pendant une période d'arrêt
                        8.6.1. Autorisation pour circonstances exceptionnelles

                        90.L'article 19, 12., du règlement prévoit deux catégories de circonstances dans lesquelles un émetteur peut autoriser un dirigeant à effectuer une transaction pendant une période d'arrêt. La première catégorie concerne l'autorisation: « au cas par cas en raison de l'existence de circonstances exceptionnelles, telles que de graves difficultés financières, nécessitant la vente immédiate d'actions ».

                        91.L'article 19, 12., du règlement, l'article 7, 2. et l'article 8 du règlement délégué n° 2016/522 visent uniquement une « vente ». Compte tenu de l'objet et du but de ces règles, il est logique qu'une acquisition ne puisse pas être autorisée en période d'arrêt. En revanche, la question se pose en ce qui concerne par exemple une mise en gage. De plus, les mêmes dispositions conçoivent uniquement une vente « d'actions ». Il est curieux que d'autres instruments ne soient pas visés, comme des obligations par exemple. Il est toutefois clair qu'aucun autre type de transaction n'est susceptible d'être autorisé, ce que l'AEMF a souligné [146].

                        92.Dans le cas d'une circonstance exceptionnelle, le dirigeant est tenu, avant une vente en période d'arrêt, d'adresser une demande écrite motivée à l'émetteur pour obtenir l'autorisation de procéder à cette vente (art. 7, 2., du règlement délégué n° 2016/522). La demande écrite doit décrire la transaction envisagée et « expliquer pourquoi la vente d'actions est la seule solution raisonnable pour obtenir le financement nécessaire » (art. 7, 2., du règlement délégué n° 2016/522).

                        Avant de décider d'accorder la permission de procéder à une vente, l'émetteur doit évaluer au cas par cas les demandes écrites qui lui sont adressées. L'émetteur peut donner cette autorisation uniquement si les circonstances peuvent être considérées comme exceptionnelles (art. 8, 2., du règlement délégué n° 2016/522). Le texte ne le spécifie pas explicitement, mais il est clair que, même si les circonstances sont exceptionnelles, l'émetteur n'est pas obligé de donner son autorisation.

                        93.L'article 8 du règlement délégué n° 2016/522 définit les conditions auxquelles une circonstance est exceptionnelle. Ces conditions sont extrêmement strictes. Il faut en effet tout à la fois « qu'elles revêtent un caractère extrêmement urgent, imprévisible et impérieux, que leur cause soit étrangère à la personne exerçant des responsabilités dirigeantes et que cette dernière n'ait aucun contrôle sur elles ». De plus, lorsqu'il détermine si les circonstances sont exceptionnelles, l'émetteur « examine, notamment, si et dans quelle mesure la personne exerçant des responsabilités dirigeantes: a) est soumise, au moment de présenter sa demande, à un engagement financier ou à une créance exécutoire; b) est tenue de respecter, ou s'est mise dans une situation, avant le début de la période d'arrêt, nécessitant le paiement d'une somme à une tierce partie, y compris un passif d'impôt, et ne peut pas raisonnablement honorer un engagement financier ou une créance autrement qu'en procédant à une vente d'actions immédiate ».

                        Selon les cas, il peut par exemple s'agir d'une obligation de paiement en vertu d'une décision de justice ou d'une obligation de payer un impôt, pour autant que les conditions citées ci-dessus soient remplies [147].

                        Lors de la consultation publique relative au règlement délégué n° 2016/522, plusieurs répondants avaient plaidé pour l'introduction du concept « raisonnablement » à propos des circonstances exceptionnelles. L'AEMF a fermement rejeté cette demande [148].

                        8.6.2. Autorisation basée sur les spécificités de la négociation concernée

                        94.En vertu de l'article 19, 12., b), du règlement, un émetteur peut aussi autoriser un dirigeant à effectuer une transaction pendant une période d'arrêt « en raison des spécificités de la négociation concernée dans le cas de transactions réalisées dans le cadre de, ou ayant trait à, un système d'actionnariat ou de plan d'épargne du personnel, l'accomplissement de formalités ou l'exercice de droits attachés aux actions, ou de transactions n'impliquant pas de changement dans la détention de la valeur concernée ».

                        95.L'article 9 du règlement délégué n° 2016/522 précise que l'émetteur peut accorder une telle autorisation notamment dans les cinq cas que cet article détaille. L'usage de l'adverbe « notamment » établit que la liste de l'article 9 n'est pas limitative. Toutefois, toute autorisation ne pourra être accordée que si elle est conforme aux exigences générales de l'article 19, 12., b), du règlement, cité ci-dessus. La liste de l'article 9 est globalement mal adaptée à la pratique des plans d'intéressement des dirigeants en Belgique. On relèvera aussi que la qualité de la version française laisse à désirer et qu'il est préférable de se référer à sa version anglaise.

                        8.6.3. Portée limitée de l'autorisation

                        96.Dans tous les cas, l'autorisation de l'émetteur lèvera uniquement l'interdiction spécifique relative à la période d'arrêt. Elle ne pourra jamais dispenser de l'interdiction générale de commettre une opération d'initié visée à l'article 14 du règlement.

                        8.7. Obligations supplémentaires

                        97.Le point 5. de l'article 19 prévoit deux obligations supplémentaires pour les émetteurs:

                          • ils doivent notifier « par écrit » aux dirigeants leurs obligations au titre de l'article 19, c'est-à-dire les obligations en matière de notification et de période d'arrêt;
                          • ils doivent établir une liste de tous les dirigeants et leurs personnes liées.

                          Le point 5. de l'article 19 prévoit aussi que les dirigeants doivent eux-mêmes notifier « par écrit » à leurs personnes liées leurs obligations au titre de l'article 19, c'est-à-dire les obligations en matière de notification. Les dirigeants doivent conserver une copie de cette notification.

                          9. Manipulations de marché
                          9.1. Manipulations de marché et pratiques de marché admises

                          98.L'article 15 du règlement énonce une des règles principales du nouveau corps de règles en matière d'abus de marché: l'interdiction des manipulations de marché, y compris des simples tentatives.

                          La manipulation de marché, qui est définie à l'article 12 du règlement et dont des « indicateurs » sont énoncés à l'annexe I du règlement et précisés plus avant par le règlement délégué n° 2016/522, se compose - selon la doctrine classique, mais quelque peu inadéquate - de deux volets principaux [149]:

                            • les manipulations de marché basées sur les transactions et autres comportements [150]; et
                            • les manipulations de marché basées sur la diffusion ou la transmission d'informations [151].

                            Nous analyserons cette distinction plus en détails - et en proposerons une autre, mieux adaptée au texte du règlement - au point 9.2.2.

                            99.Il se peut néanmoins que, dans certaines circonstances spécialement définies, des comportements qui normalement constitueraient une manipulation de marché sont considérés comme justifiés par le législateur européen. L'article 13 du règlement confère ainsi aux autorités compétentes des Etats membres - dont la FSMA - le pouvoir d'instaurer des « pratiques de marché admises », dans le cadre desquelles les acteurs du marché peuvent effectuer une transaction, passer un ordre ou adopter tout autre comportement qui normalement relèverait des situations interdites par les articles 15 juncto 12, 1., a). Contrairement aux programmes de rachat d'actions propres et mesures de stabilisation, pour lesquels l'article 5 du règlement prévoit des dérogations spéciales, ces pratiques de marché admises ne sont pas des « safe harbours » [152]. En effet, toute personne prétendant que son comportement relève d'une pratique de marché admise doit non seulement prouver ceci, mais également qu'il répond à des raisons « légitimes ». Nous examinerons cette problématique au point 9.3. et notons d'ores et déjà que l'exemption des pratiques de marché admises ne s'applique pas aux comportements visés aux points b), c) et d) de l'article 12, 1.

                            9.2. Manipulations de marché
                            9.2.1. Champ d'application étendu

                            100.Comme déjà évoqué au point 1.1., le champ d'application général du Règlement a été élargi afin de couvrir davantage de marchés et de plate-formes de négociation, certaines transactions de gré à gré (« over the counter », ou OTC) et un plus grand éventail de produits. Bien que le champ d'analyse du présent article se limite aux instruments financiers, il convient néanmoins de s'intéresser brièvement au champ d'application spécial en ce qui concerne les manipulations de marché, étant donné que celui-ci est particulier à ce type de comportement.

                            Premièrement, les situations visées l'article 12 du règlement couvrent également certains comportements ayant trait aux indices de référence (« benchmarks »), dans la mesure où ceux-ci peuvent servir de base au calcul du prix d'un instrument financier [153]. Nous en décrirons le régime applicable au point 9.2.2., (iv).

                            Deuxièmement, les points a) et b) de l'article 2, 2., du règlement précisent que certains contrats au comptant sur matières premières (« spot commodity contracts ») tombent - de façon indirecte - également dans le champ d'application des articles 12 et 15. Cette précision par rapport au texte de la directive MAD I est importante, dans la mesure où il était loin d'être certain que la manipulation, qu'elle soit directe ou indirecte, de ces produits constituait un comportement prohibé en vertu des anciennes règles [154]. Les marchés au comptant et les contrats sur produits financiers dérivés sont hautement interconnectés et globalisés, de sorte qu'une manipulation à ce niveau peut entraîner des risques systémiques considérables [155].

                            Sont visés:

                              • les contrats au comptant sur matières premières qui ne sont pas des produits énergétiques de gros, lorsque la transaction, l'ordre ou le comportement a, est de nature à avoir ou est destiné à avoir un effet sur le cours ou la valeur d'un instrument financier; et
                              • les types d'instruments financiers, y compris les contrats dérivés ou les instruments dérivés servant au transfert du risque de crédit, pour lesquels la transaction, l'ordre, l'offre ou le comportement a ou est de nature à avoir un effet sur le cours ou la valeur d'un contrat au comptant sur matières premières lorsque le cours ou la valeur dépendent du cours ou de la valeur de ces instruments financiers.

                              Cette applicabilité n'est donc qu'indirecte dans la mesure où ce ne sont pas les « spot commodity contracts » en tant que tels qui sont visés par le règlement, mais la manipulation croisée (« cross manipulation ») entre contrats au comptant sur matières premières et instruments financiers, dans un sens ou dans l'autre. Ne sont pas visées les situations qui n'impliquent aucun instrument financier [156].

                              Troisièmement, l'on notera également un des objectifs clés du règlement, qui concerne l'adéquation du corps de règles à l'évolution technologique en matière de négociation de titres. Selon le considérant 38, « il est souhaitable d'étayer la définition de 'manipulation de marché' par des exemples de stratégies abusives particulières pouvant être mises en oeuvre par tout moyen disponible de trading, y compris le trading algorithmique et le trading à haute fréquence ».

                              Le trading algorithmique est la négociation d'instruments financiers dans laquelle un algorithme informatique détermine automatiquement les différents paramètres des ordres, comme la décision de lancer l'ordre, la date et l'heure, le prix ou la quantité de l'ordre, ou la manière de gérer l'ordre après sa soumission, avec une intervention humaine limitée ou sans intervention humaine [157].

                              Une des formes de trading algorithmique est le trading à haute fréquence (« high-frequency trading », ou « HFT » dans le jargon anglo-saxon), à savoir toute technique de trading algorithmique caractérisée par (a) une infrastructure destinée à minimiser les latences informatiques et autres, y compris par la co-localisation, l'hébergement de proximité ou l'accès électronique direct à grande vitesse, (b) la détermination par le système de l'engagement, la création, l'acheminement ou l'exécution d'un ordre sans intervention humaine pour des transactions ou des ordres individuels; et (c) un débit intrajournalier élevé de messages qui constituent des ordres, des cotations ou des annulations [158].

                              Notons d'ores et déjà que notamment les pratiques suivantes sont fréquemment effectuées au moyen du trading algorithmique ou à haute fréquence: les « ping orders », le « quote stuffing », le « momentum ignition », le « layering », le « spoofing », le « smoking » et le « phishing » [159].

                              9.2.2. Types de manipulations de marché

                              101.Comme déjà indiqué ci-dessus, le règlement prévoit, selon la doctrine classique, essentiellement deux types de manipulations de marché: les manipulations effectuées au moyen d'un comportement - généralement une transaction ou un ordre - et celles effectuées au moyen d'une information.

                              Cette distinction n'est toutefois plus telle quelle adaptée au texte des nouvelles règles. En effet, en raison de l'utilisation des expressions « adopter tout autre comportement » et « effectuer toute autre activité ou adopter tout autre comportement » aux points a) et b) de l'article 12, 1., du règlement, la distinction avec les points c) et d) du même article est devenue moins nette. Rien ne s'oppose à une interprétation selon laquelle une diffusion ou transmission d'informations, telles que visées à ces deux derniers points, seraient de tels « autres comportements » ou « autres activités » (en notant toutefois la spécificité d'objet du point d), à savoir les indices de référence).

                              En réalité, il convient, à notre sens [160], de distinguer quatre types de manipulations de marché prévues par le règlement, en suivant de près la catégorisation prévue par le texte même de la norme:

                                • les manipulations de marché à effet (potentiel) spécifique (art. 12, 1., a);
                                • les manipulations de marché à effet (potentiel) et moyen spécifiques (art. 12, 1., b);
                                • les manipulations de marché à base d'informations (art. 12, 1., c);
                                • les manipulations de marché concernant les indices de référence (art. 12, 1., d).

                                L'on notera que la loi surveillance prévoit un cinquième type de manipulation de marché, également à base d'informations, concernant la stabilité des établissements de crédit, des entreprises d'assurances, des entreprises d'investissement et des organismes de liquidation ou assimilés [161].

                                In concreto, l'annexe I du règlement et le règlement délégué n° 2016/522 prévoient une multitude de situations susceptibles d'être des manipulations de marché. Puisqu'une analyse détaillée de tous ces comportements dépasserait le cadre du présent article, nous renvoyons largement au texte de la norme à cet égard. L'on notera également d'ores et déjà le chevauchement qui peut exister entre les différents types de manipulations de marché; nous renvoyons à nos développements au point 9.2.3.

                                Par ailleurs, le point 2. de l'article 12 prévoit cinq comportements spécifiques qui sont, selon le texte du règlement, « considérés comme » - et qui ne semblent donc pas uniquement susceptibles d'être - des manipulations de marché. Nous analyserons la portée de cette formulation au point 9.2.2., (v).

                                Enfin, dans le cadre des quatre types de manipulations de marché prévus par le règlement, nous analyserons la nécessité ou non d'un élément moral. De manière générale, l'on constate que la directive sanctions pénales, à son considérant 23, dispose que, « [s]i, en vertu de la présente directive, les infractions devraient être punissables lorsqu'elles sont commises intentionnellement et au moins dans les cas graves, les sanctions pour les violations du règlement (UE) n° 596/2014 n'exigent pas que l'intention soit démontrée ou qu'elles soient qualifiées de graves » [162]. A cet égard, l'AEMF a précisé que, « [c]oncerning 'intent', even situations that were not committed with intent are under the scope of market manipulation of MAR » [163]. Comme nous le verrons ci-après, il est toutefois clair que les manipulations de marché visées aux points (b) et (c) requièrent un élément moral et, en particulier, que la situation visée au point (b) ne se conçoit pas en l'absence d'intention frauduleuse.

                                (i) Les manipulations de marché à effet (potentiel) spécifique
                                (a) Aperçu

                                102.Les situations visées par le point a) de l'article 12, 1., du règlement sont caractérisées par l'effet (potentiel) d'un comportement qui n'est pas davantage spécifié. Il peut s'agir d'une transaction, d'un ordre ou de « tout autre comportement ».

                                Est ainsi visé tout comportement qui:

                                  • donne ou est susceptible de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l'offre, la demande ou le cours d'un instrument financier (ou autre produit visé); ou
                                  • fixe ou est susceptible de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d'un ou de plusieurs instruments financiers (ou autre produit visé),

                                  à moins que la personne adoptant le comportement en question établisse qu'elle a agi de cette façon pour des raisons légitimes et en conformité avec une pratique de marché admise.

                                  Aucun élément moral spécifique n'est requis; il s'agit d'une infraction « objective », de sorte qu'il appartiendra au manipulateur présumé de prouver que son comportement était légitime et en conformité avec une pratique de marché admise [164]. En effet, déjà l'exposé des motifs du projet de loi belge relatif à la surveillance du secteur financier et aux services financiers de 2002 précisait qu'« [i]l convient de souligner que, contrairement au délit pénal de manipulation de cours qui fait l'objet de l'article 39 du présent projet, l'abus vise au présent article 25 ne nécessite pas la preuve du recours à des moyens frauduleux » [165].

                                  (b) Indicateurs

                                  103.Les indicateurs - non exhaustifs et qui ne doivent pas pour autant être considérés en soi comme constituant une manipulation de marché - de manipulations consistant à donner des indications fausses ou trompeuses ou à fixer les cours à un niveau anormal ou artificiel sont établis par l'annexe I, section A, du règlement, ainsi que par l'annexe II, section 1, du règlement délégué n° 2016/522. En examinant si une transaction ou un ordre est une manipulation de marché, l'autorité compétente prendra en considération notamment les éléments suivants [166]:

                                    • la proportion du volume quotidien de transactions;
                                    • les variations sensibles du cours;
                                    • l'absence de changement de propriétaire bénéficiaire;
                                    • les renversements de positions sur une courte période;
                                    • la concentration de transactions sur un bref laps de temps durant la séance de négociation et entraînant une variation de cours qui est ensuite inversée;
                                    • la modification de la représentation des meilleurs prix affichés à l'offre et à la demande, ou plus généralement de la représentation du carnet d'ordres auquel ont accès les participants au marché, lorsque les ordres sont annulés avant leur exécution; et
                                    • la passation d'ordres au moment où sont calculés les cours de référence, les cours de compensation et les évaluations.

                                    L'annexe II, section 1, du règlement délégué n° 2016/522 prévoit une multitude d'exemples concrets d'indicateurs de ce type de manipulation. Ces exemples sont organisés en suivant la logique des points a) à g) énumérés ci-dessus. Il est important de noter que les exemples d'indicateurs ne sont pas exclusifs à l'un ou l'autre de ces points, ni même, en fait, au type de manipulation visé à cette section A de l'annexe I, c'est-à-dire au point a) de l'article 12, 1., du règlement. Comme nous le verrons ci-dessous, certains indicateurs sont tout aussi pertinents pour les manipulations consistant à recourir à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice (section B de l'annexe I du règlement, se référant à son article 12, 1., b)).

                                    Nous avons résumé ci-après les pratiques mentionnées à l'annexe II, section 1, du règlement délégué n° 2016/522:

                                      • intervention frauduleuse à la suite d'une offre au public impliquant des parties en collusion;
                                      • création d'un cours plancher ou d'un cours plafond;
                                      • ordres test (« ping orders »);
                                      • hameçonnage (« phishing ») [167];
                                      • abus de position dominante (« abusive squeeze »);
                                      • manipulation inter-plate-formes de négociation;
                                      • manipulation inter-produits;
                                      • passation d'accords de vente ou d'achat n'impliquant pas de changement dans la propriété ni dans le risque de marché ou impliquant le transfert de la détention ou du risque de marché entre des participants agissant de concert ou en collusion (« wash trades »);
                                      • passation d'ordres ou réalisation de transactions affichées publiquement sur des écrans en vue de donner une impression d'activité ou de mouvement du cours (« painting the tape »);
                                      • transactions au cours desquelles des ordres d'achat et de vente à des cours et pour des volumes identiques sont passés simultanément ou quasi simultanément par la même partie ou par des parties différentes, mais en collusion (« improper matched orders »);
                                      • portage frauduleux (« concealing ownership »);
                                      • fait de prendre une position longue, puis d'entreprendre d'autres activités d'achat et/ou de diffuser des informations positives trompeuses au sujet du produit concerné dans le but d'en faire monter le cours en attirant d'autres acheteurs. Lorsque le cours se situe à un niveau artificiellement élevé, la position longue détenue est liquidée (« pump and dump »);
                                      • fait de prendre une position courte, puis d'entreprendre d'autres activités de vente et/ou de diffuser des informations défavorables trompeuses au sujet du produit concerné dans le but d'en faire baisser le cours en attirant d'autres vendeurs. Une fois que le cours a baissé, la position détenue est fermée (« trash and cash ») [168];
                                      • bourrage d'ordres (« quote stuffing »);
                                      • création d'un mouvement des prix (« momentum ignition »);
                                      • intervention à la clôture (« marking the close »);
                                      • empilage d'ordres (« layering ») et émission d'ordres trompeurs (« spoofing »);
                                      • passation d'ordres sans intention de les exécuter;
                                      • écarts excessifs entre prix acheteur et prix vendeur (« excessive bid-offer spreads »);
                                      • passation d'ordres visant à faire gonfler la demande (ou baisser l'offre) d'un produit concerné afin de faire monter (ou baisser) son cours (« advancing the bid »);
                                      • envoi d'ordres, dans le but d'attirer d'autres participants au marché utilisant des techniques traditionnelles de négociation (traders lents), qui sont ensuite rapidement révisés à des conditions moins généreuses, en espérant un repositionnement à un niveau plus élevé face au flux entrant d'ordres émanant des traders lents (« smoking »);
                                      • passation d'accords en vue de fausser les coûts liés à un contrat sur matières premières, tels que l'assurance ou le transport, ayant pour effet de fixer le prix de règlement d'un produit concerné à un cours anormal ou artificiel.

                                      Nous renvoyons au règlement délégué n° 2016/522 pour les définitions précises de ces comportements.

                                      (ii) Les manipulations de marché à effet (potentiel) et moyens spécifiques
                                      (a) Aperçu

                                      104.Afin qu'un comportement (à savoir une transaction, un ordre ou tout autre comportement) puisse être qualifié de manipulation de marché au sens de l'article 12, 1., b), du règlement, il doit remplir deux conditions, la première concernant son effet (potentiel) et la deuxième les moyens utilisés:

                                        • le comportement doit influencer, ou être susceptible d'influencer, le cours d'un ou de plusieurs instruments financiers (ou autre produit visé);
                                        • la personne adoptant le comportement concerné doit avoir recours à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice.

                                        Il ne fait guère de doute que cette disposition requiert un élément moral spécifique, qui est le fait d'avoir recours - intentionnellement - à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice, en tout cas en analysant le texte français ainsi que le texte anglais du règlement [169]. Ce dernier se lit comme suit: « which employs a fictitious device or any other form of deception or contrivance ». Un léger doute est, par exemple, apparu à la lecture du texte allemand du règlement, qui parle de « unter Vorspiegelung falscher Tatsachen oder unter Verwendung sonstiger Kunstgriffe oder Formen der Täuschung » et qui, en l'absence de verbe, contrairement aux textes anglais et français, présente moins de clarté quant à la question de savoir si le comportement doit être intentionnel ou s'il peut éventuellement s'agir de négligence [170]. Le texte anglais enlève tout doute, puisque le mot « employ » implique un comportement conscient et intentionnel, et l'on ne conçoit guère une « deception » ou une « contrivance » accidentelle ou par négligence. Ces comportements poursuivent par essence des desseins illégitimes [171].

                                        A cet égard, l'on peut d'ailleurs se référer à l'interprétation jurisprudentielle donnée au § 10 du Titre Ier du Securities Exchange Act of 1934 américain [172].

                                        Le point (b) de cette disposition se lit en effet comme suit: « It shall be unlawful for any person, directly or indirectly, by the use of any means or instrumentality of interstate commerce or of the mails, or of any facility of any national securities exchange-(b) To use or employ, in connection with the purchase or sale of any security registered on a national securities exchange or any security not so registered, or any securities-based swap agreement, any manipulative or deceptive device or contrivance [173] in contravention of such rules and regulations as the Commission [174] may prescribe as necessary or appropriate in the public interest or for the protection of investors. » [175].

                                        A cet égard, la Cour Suprême des Etats-Unis a décidé que « [a] private cause of action for damages will not lie under § 10(b) and Rule 10b-5 [176] in the absence of any allegation of 'scienter,' i.e., intent to deceive, manipulate, or defraud on the defendant's part » et que « [t]he use of the words 'manipulative,' 'device,' and 'contrivance' in § 10(b) clearly shows that it was intended to proscribe a type of conduct quite different from negligence, and, more particularly, the use of the word 'manipulative' [177], virtually a term of art used in connection with securities markets, connotes intentional or willful conduct designed to deceive or defraud investors by controlling or artificially affecting the price of securities » [178].

                                        L'affaire concernait la question de savoir si le comportement éventuellement négligent du réviseur d'entreprises d'un courtier d'instruments financiers dans le cadre d'un audit des livres financiers de ce dernier constituait une violation du point 10. précité, quod non.

                                        (b) Indicateurs

                                        105.Tout comme pour l'application de l'article 12, 1., a), l'annexe I du règlement, à sa section B, prévoit des indicateurs de manipulations - pour rappel, non exhaustifs et ne devant pas être considérés en soi comme constituant une manipulation de marché - consistant à recourir à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice. Aux fins de son analyse, l'autorité compétente considèrera les éléments suivants:

                                          • si les ordres passés ou les transactions effectuées par des personnes sont précédés ou suivis de la diffusion d'informations fausses ou trompeuses par ces mêmes personnes ou des personnes qui leur sont liées; et
                                          • si les ordres sont passés ou les transactions effectuées par des personnes avant ou après que celles-ci, ou des personnes qui leur sont liées, produisent ou diffusent des recommandations d'investissement qui sont fausses, biaisées ou manifestement influencées par un intérêt significatif.

                                          La section 2 de l'annexe II du règlement délégué n° 2016/522 prévoit des pratiques précisant ces indicateurs. Comme nous l'avons déjà indiqué au point 9.2.2., (i), (b), il s'agit essentiellement de certaines pratiques qui précisent aussi les indicateurs décrits à la section A de l'annexe I du règlement, parfois avec certaines nuances. Nous ne citerons ainsi que celles qui sont propres aux manipulations consistant à recourir à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice:

                                            • diffusion d'informations fausses ou trompeuses dans les médias, y compris l'Internet, ou par tout autre moyen, entraînant ou susceptible d'entraîner l'évolution du prix d'un instrument financier (ou autre produit visé), dans un sens favorable à la position détenue ou à une opération prévue par la ou les personne(s) ayant un intérêt dans la diffusion de ces informations [179];
                                            • ouverture d'une position, puis fermeture juste après publication;
                                            • mouvement ou stockage de matières premières physiques, susceptible de créer une fausse impression quant au niveau de l'offre, de la demande, du cours ou de la valeur d'une matière première ou d'un produit livrable en instrument financier ou en contrat au comptant sur matières premières qui lui est lié;
                                            • mouvement d'un cargo vide, susceptible de créer une impression fausse ou trompeuse quant au niveau de l'offre, de la demande, du cours ou de la valeur d'une matière première ou d'un produit livrable en instrument financier ou en contrat au comptant sur matières premières qui lui est lié.

                                            Nous renvoyons au règlement délégué n° 2016/522 pour les définitions précises de ces comportements.

                                            (iii) Les manipulations de marché à base d'informations

                                            106.Quant au troisième type de manipulation de marché, sa caractéristique essentielle ne requiert, cette fois-ci, aucune spécificité d'effet, même potentiel, mais uniquement une spécificité de moyen, à savoir la diffusion ou la transmission de certaines informations précisément définies, et cela quand la personne se livrant à cette activité agit en connaissance de cause.

                                            L'article 12, 1., c), prévoit ainsi qu'est une manipulation de marché le fait de diffuser des informations, que ce soit par l'intermédiaire des médias, dont l'internet, ou par tout autre moyen, qui - premièrement - donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l'offre, la demande ou le cours d'un instrument financier (ou autre produit visé) ou - deuxièmement - fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d'un ou de plusieurs instruments financiers (ou autre produit visé), y compris le fait de répandre des rumeurs, alors que la personne ayant procédé à une telle diffusion savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient fausses ou trompeuses.

                                            A cet égard, le considérant 48 du règlement précise que, « [é]tant donné l'augmentation du recours aux sites Internet, aux blogs et aux divers médias sociaux, il importe de préciser que la diffusion d'informations fausses ou trompeuses sur l'Internet, y compris par le biais de sites de médias sociaux ou de blogs sans auteur identifiable, devrait être considérée, aux fins du présent règlement, comme étant équivalente à une diffusion par des canaux de communication plus traditionnels ».

                                            L'élément moral requis pour l'application de ce point est clair: la personne commettant la diffusion en question savait-elle, ou aurait-elle dû savoir, que ces informations étaient fausses ou trompeuses?

                                            (iv) Manipulation d'un indice de référence

                                            107.Enfin, le point d) de l'article 12, 1., prévoit une nouveauté directement inspirée du récent scandale de manipulation du Libor, à savoir du taux interbancaire pratiqué à Londres (« London interbank offered rate ») [180]. La disposition en question prévoit, en effet, qu'est une activité prohibée le fait de transmettre des informations fausses ou trompeuses, ou fournir des données fausses ou trompeuses sur un indice de référence lorsque la personne qui a transmis ces informations ou fourni ces données savait ou aurait dû savoir qu'elles étaient fausses ou trompeuses, ou tout autre comportement constituant une manipulation du calcul d'un indice de référence [181].

                                            Certains auteurs ont rapproché ce type de manipulation du comportement visé à l'article 12, 1., c) [182]. Or, le texte ne semble requérir, dans cette deuxième hypothèse (« ou tout autre comportement … »), aucun lien quelconque avec des informations [183]. Une telle lecture rapproche ce type de manipulation donc en réalité du comportement visé à l'article 12, 1., a), voire au point b) de ce dernier, en fonction des circonstances.

                                            Est un indice de référence tout taux, indice ou chiffre mis à la disposition du public ou publié, qui est déterminé périodiquement ou régulièrement par application d'une formule, ou sur la base de la valeur d'un ou de plusieurs actifs ou prix sous-jacents, y compris des estimations de prix, de taux d'intérêt ou d'autres valeurs réels ou estimés, ou des données d'enquêtes, et par référence auquel est déterminé le montant à verser au titre d'un instrument financier ou la valeur d'un instrument financier  [184].

                                            Ce champ d'application étendu s'explique donc par le lien étroit qui existe entre la formation du cours d'un instrument financier et les indices de référence. Comme le précise encore le considérant 44 du règlement, les prix de nombreux instruments financiers sont établis à partir d'indices de référence comme le Libor. Selon le même considérant, la manipulation d'indices de référence, y compris les taux interbancaires offerts et les indices d'indices, accessibles par Internet ou d'une autre manière, gratuitement ou non, est susceptible d'avoir de graves répercussions sur la confiance des marchés et peut entraîner des pertes importantes pour les investisseurs ou des distorsions de l'économie réelle.

                                            Il convient de noter que ces règles s'ajoutent à l'interdiction prévue au règlement n° 1227/2011 [185] concernant la délivrance délibérée de fausses informations aux sociétés qui fournissent des évaluations de prix ou des rapports de marché sur des produits énergétiques de gros avec pour effet de tromper les participants au marché qui se fondent, pour agir, sur ces évaluations de prix ou rapports de marché.

                                            (v) Comportements spécifiques visés à l'article 12, 2., du règlement

                                            108.En vertu, de l'article 12, 2., les comportements suivants sont, entre autres, considérés comme des manipulations de marché:

                                              • le fait, pour une personne ou pour plusieurs personnes agissant de manière concertée, de s'assurer une position dominante sur l'offre ou la demande d'un instrument financier (ou autre produit visé) avec pour effet, réel ou potentiel, la fixation directe ou indirecte des prix d'achat ou des prix de vente ou la création, réelle ou potentielle, d'autres conditions de transaction inéquitables;
                                              • le fait d'acheter ou de vendre des instruments financiers, au moment de l'ouverture ou de la clôture du marché, avec pour effet, réel ou potentiel, d'induire en erreur les investisseurs agissant sur la base des cours affichés, y compris lors de l'ouverture ou de la clôture;
                                            1. le fait de passer des ordres à une plate-forme de négociation, y compris d'annuler ou de modifier ces ordres, en ayant recours à tout moyen disponible de trading, y compris des moyens électroniques, tels que les stratégies de trading algorithmiques et à haute fréquence, lorsque cela a l'un des effets visés au point 1., a) ou b):
                                                • en perturbant ou en retardant, ou en risquant de perturber ou de retarder, le fonctionnement du système de négociation de la plate-forme de négociation;
                                                • en compliquant la reconnaissance par d'autres personnes des véritables ordres dans le système de négociation de la plate-forme de négociation ou en étant susceptible d'agir ainsi, y compris en émettant des ordres qui entraînent une surcharge ou une déstabilisation du carnet d'ordres; ou
                                                • en créant, ou en étant susceptible de créer, une indication fausse ou trompeuse quant à l'offre, à la demande ou au cours d'un instrument financier, notamment en émettant des ordres visant à initier ou à exacerber une tendance;
                                                • le fait de tirer parti d'un accès occasionnel ou régulier aux médias traditionnels ou électroniques en émettant un avis sur un instrument financier (ou autre produit visé) après avoir pris des positions sur cet instrument financier (ou autre produit visé) et de profiter par la suite de l'impact dudit avis sur le cours de cet instrument (ou autre produit visé) sans avoir simultanément rendu public, de manière appropriée et efficace, ce conflit d'intérêts;
                                                • le fait de vendre ou d'acheter sur le marché secondaire, avant la séance d'enchères organisée en vertu du règlement n° 1031/2010 [186], des quotas d'émission ou des instruments dérivés qui leur sont liés, avec pour effet de fixer le prix de clôture des produits mis aux enchères à un niveau anormal ou artificiel, ou d'induire en erreur les enchérisseurs.

                                                109.Une question intéressante qui se pose dans ce contexte est celle de savoir si les comportements précités, qui sont visés au point 2., sont des manipulations de marché autonomes du point 1. Nous ne le pensons pas. En effet, le point 1. de l'article 12 définit clairement la notion de « manipulation de marché ». Ce concept couvre exclusivement les activités exhaustivement énumérées à cette disposition, même si ceux-ci restent à géométrie et présentation factuelle variables. Loin d'être autonomes, les manipulations de marché visées au point 2. sont donc nécessairement des exemples d'une ou de plusieurs activités visées au point 1. de la disposition.

                                                L'on notera toutefois l'absence de rattachement spécifique de ces comportements à l'un ou l'autre type de manipulation de marché du point 1. de l'article 12. Ainsi, le texte-même du point c) de l'article 12, 2., s'appliquera si, entre autres, les comportements y visés ont « l'un des effets visés au § 1er, point a) ou b) » [187].

                                                Or, dans la mesure où un comportement visé au point 2. est susceptible d'être (éventuellement entre autres) une manipulation de marché à effet spécifique visée à l'article 12, 1., a) - cela est, par exemple, le cas du point c) de l'article 12, 2., qui se conçoit, soit en présence, soit en l'absence de « recours à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice » (de sorte qu'il est rattachable au point a) ou au point b) de l'article 12, 1.) - quid de l'exemption de légitimité et de conformité à une pratique de marché admise? Cette disposition a-t-elle lieu à s'appliquer même aux comportements spécifiquement visés au point 2.? En somme, la question est celle de savoir si la présomption prévue à ce point, pour le moins dans la mesure où elle concerne des comportements qui s'analysent à la lumière de l'article 12, 1., a), est réfragable.

                                                Nous pensons que la réponse à cette question devrait être positive [188]. Comme nous l'avons vu ci-dessus, les comportements visés au point 2. de l'article 12 ne sont pas des comportements autonomes par rapport à ceux du point 1. du même article. Ainsi, dans la mesure où, par hypothèse, un comportement ne présente pas les éléments propres aux points b) (« recours à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice »), c) (« alors que la personne ayant procédé à une telle diffusion savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient fausses ou trompeuses ») ou d) (manipulation d'un indice de référence), le seul angle d'analyse de ce comportement reste le point a) de l'article 12, 1. Or, ni le point 1., ni le point 2. de l'article 12 ne contient une exception au champ d'application de l'exemption de légitimité et de conformité à une pratique de marché admise en ce qui concerne les comportements visés au point 2. de cet article. Par conséquent, nous ne voyons pas pourquoi un comportement prévu par le point 2. qui se rattache au point 1., a), ne pourrait pas bénéficier de cette exemption.

                                                9.2.3. Chevauchement entre dispositions

                                                110.Comme nous l'avons vu dans les points qui précèdent, il n'est pas aisé de délimiter le champ d'application des divers points de l'article 12, 1., du règlement en raison du chevauchement des éléments constitutifs des comportements qui y sont prévus.

                                                Le point d) de cet article ne pose pas problème à cet égard, étant donné la spécificité de l'objet de la manipulation, à savoir les indices de référence.

                                                Un chevauchement est toutefois possible entre les points a) et c) de l'article 12, 1., puisque le point a) couvre l'adoption de « tout autre comportement », qui n'exclut pas la diffusion d'informations telle que prévue au point c). Cela peut mener à des frictions entre champs d'application respectifs et un problème d'interprétation réel, étant donné que seul le point c) prévoit l'élément moral « alors que la personne ayant procédé à une telle diffusion savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient fausses ou trompeuses », élément moral qui n'est pas requis, mais pas non plus exclu, par le point a). Par ailleurs, la distinction entre ces dispositions peut s'avérer importante dans la mesure où l'exemption applicable aux comportements légitimes et conformes aux pratiques de marché admises ne se conçoit que pour le point a).

                                                Un auteur, auquel nous nous rallions, propose qu'en pratique, il conviendrait de donner la priorité à une application du point c) dès que l'on est en présence d'une diffusion d'informations telles que visées à cette disposition ainsi que de l'élément moral cité ci-dessus [189]. De cette manière, l'on ne videra pas de sa substance le point c) et l'on évitera de même une confusion quant à l'applicabilité éventuelle d'une pratique de marché admise.

                                                La même question se pose en ce qui concerne la relation entre les points b) et c) du même article. La Commission elle-même admet d'ailleurs que certains comportements ayant trait à la diffusion d'informations peuvent s'analyser sous l'angle du point b). Ainsi, le règlement délégué n° 2016/522 dispose qu'est une pratique précisant l'indicateur à l'annexe I, section B, point a) [190], du règlement la « diffusion d'informations fausses ou trompeuses dans les médias, y compris l'Internet, ou par tout autre moyen, entraînant ou susceptible d'entraîner l'évolution du prix d'un instrument financier [ou autre produit visé], dans un sens favorable à la position détenue ou à une opération prévue par la ou les personne(s) ayant un intérêt dans la diffusion de ces informations » [191]. Or, la différence entre la pratique citée ci-avant et certains comportements visés par le point c) de l'article 12, 1., peut être subtile. Afin de faciliter la comparaison, nous avons recopié ci-dessous les deux normes en question [192]:


                                                Annexe II, section 2, 1., a), du règlement délégué n° 2016/522 Article 12, 1., c), du règlement
                                                « diffusion d'informations fausses ou trompeuses dans les médias, y compris l'Internet, ou par tout autre moyen, entraînant ou susceptible d'entraîner l'évolution du prix d'un instrument financier, d'un contrat au comptant sur matières premières qui lui est lié ou d'un produit mis aux enchères sur la base des quotas d'émission, dans un sens favorable à la position détenue ou à une opération prévue par la ou les personne(s) ayant un intérêt dans la diffusion de ces informations. » « diffuser des informations, que ce soit par l'intermédiaire des médias, dont l'Internet, ou par tout autre moyen, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne l'offre, la demande ou le cours d'un instrument financier, d'un contrat au comptant sur matières premières qui lui est lié ou d'un produit mis aux enchères sur la base des quotas d'émission, ou fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d'un ou de plusieurs instruments financiers, d'un contrat au comptant sur matières premières qui leur est lié ou d'un produit mis aux enchères sur la base des quotas d'émission, y compris le fait de répandre des rumeurs, alors que la personne ayant procédé à une telle diffusion savait ou aurait dû savoir que ces informations étaient fausses ou trompeuses. »

                                                L'on constate que les descriptions de l'effet du comportement visé sont différentes, dans la mesure où le règlement délégué n° 2016/522 parle de « entraînant ou susceptible d'entraîner l'évolution du prix d'un instrument financier », alors que le règlement se réfère à « fixent ou sont susceptibles de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d'un ou de plusieurs instruments financiers ». Il est toutefois permis de se demander quelle est, exactement, la différence entre ces descriptions et surtout dans quelle mesure un comportement est susceptible de relever de l'une de ces catégories, mais pas de l'autre [193].

                                                L'élément clé de distinction est à nouveau l'élément moral, celui requis pour l'application du point b) n'étant pas le même que pour le point c) [194].

                                                9.3. Pratiques de marché admises

                                                111.Comme nous l'avons vu ci-dessus, l'activité visée à l'article 12, 1., a), du règlement est une manipulation de marché à moins que la personne effectuant la transaction, passant l'ordre ou adoptant tout autre comportement pertinent établisse que celle-ci ou celui-ci a été réalisé pour des raisons légitimes et est conforme aux pratiques de marché admises telles qu'établies conformément à l'article 13 du règlement.

                                                Loin d'être un « safe harbour » comme ceux que le règlement prévoit en ce qui concerne les programmes de rachat et les mesures de stabilisation (voir points 10.1. et 10.2.), cette disposition requiert d'un acteur du marché non seulement qu'il établisse la conformité du comportement avec une pratique de marché admise (et objective), mais laisse une certaine marge d'appréciation à l'autorité compétente quant à sa légitimité. Ceci est comparable au « faux » « safe harbour » de l'article 9 du règlement, qui donne à l'autorité compétente la possibilité d'établir qu'il existait une raison illégitime pour les ordres, transactions ou comportements concernés, même s'ils sont par ailleurs conformes au libellé de cet article, la charge de la preuve étant toutefois inversée en l'espèce (voir point 5.).

                                                Une autorité compétente, c'est-à-dire, en Belgique, la FSMA, peut instaurer une pratique de marché admise, en tenant compte de certains critères énoncés à l'article 13, 2., du règlement, ayant trait, entre autres, à la transparence, au fonctionnement des forces du marché et l'interaction entre l'offre et la demande, à la liquidité et l'efficience du marché, aux mécanismes de négociation, à l'intégrité des marchés et aux caractéristiques structurelles du marché concerné. L'autorité tiendra également compte de toute enquête sur la pratique concernée réalisée par elle ou par toute autre autorité. Toutes les pratiques de marché admises sont publiées sur le site de l'AEMF et sujettes à une obligation de réévaluation régulière.

                                                L'on notera qu'une pratique de marché qui a été instaurée par une autorité compétente concernant un marché donné n'est pas considérée comme applicable à d'autres marchés, à moins que les autorités compétentes de ces autres marchés n'aient officiellement admis cette pratique en vertu du règlement.

                                                L'article 13, 3. et 4., prévoit un mécanisme de notification à l'AEMF et aux autres autorités compétentes, suivi d'un avis de l'AEMF concernant la pratique de marché proposée. Une autorité peut instaurer une pratique de marché admise contraire à cet avis, mais doit alors, dans les 24 heures, publier sur son site une note dans laquelle elle expose en détail les motifs de sa décision.

                                                Le règlement prévoit également une procédure de règlement des différends entre autorités compétentes concernant des pratiques de marché admises dont la non-compatibilité avec les critères énoncés à l'article 13, 2., est alléguée.

                                                L'on notera encore que le règlement ne prévoit pas de « grandfathering » automatique des pratiques de marché admises instaurées avant le 2 juillet 2014, mais une procédure de notification à suivre par les autorités compétentes, dans les trois mois à compter de l'entrée en vigueur des normes techniques de réglementation visées au point 7. de l'article 13. Ces normes techniques de réglementation sont visées au règlement délégué n° 2016/908 du 26 février 2016 [195], qui est entré en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne, à savoir le 11 juin 2016.

                                                Ce règlement délégué n° 2016/908 prévoit des règles plus précises concernant les exigences applicables aux pratiques de marché admises et spécifie les critères à prendre en compte lors de leur instauration. Il précise également le processus de notification par l'autorité compétente, l'avis à émettre par l'AEMF et les règles applicables au maintien, à la modification et à la suppression des pratiques de marché admises.

                                                Etant donné que la FSMA n'a reconnu, à l'heure actuelle, aucune pratique de marché admise [196], nous renvoyons au texte du règlement et du règlement délégué n° 2016/908 pour les détails de cette matière.

                                                10. Programmes de rachat d'actions propres et mesures de stabilisation

                                                112.Le préambule du règlement reconnaît que « la négociation de titres ou d'instruments associés en vue de la stabilisation de titres ou les opérations sur actions propres effectuées dans le cadre de programmes de rachat peuvent se justifier par des raisons économiques et elles devraient, dès lors, dans certaines situations, être exemptées des interdictions d'abus de marché, à condition que les actions soient menées avec toute la transparence nécessaire lorsque des informations pertinentes sont communiquées concernant la stabilisation ou le programme de rachat » [197]. L'article 5 du règlement précise les conditions auxquelles ces programmes de rachat et ces mesures de stabilisation échappent aux articles 14 et 15 du règlement.

                                                Des normes communes avaient été énoncées dans le règlement n° 2273/2003 [198], en vigueur antérieurement, dont certaines dispositions furent précisées en droit belge par l'arrêté royal du 5 mars 2006 relatif aux abus de marché, prévoyant une exonération générale qui procède de la technique américaine du « safe harbour » [199]. Le règlement n° 2273/2003 définissait ainsi les exigences qui devaient être respectées pour éviter de commettre une manipulation de cours, et toute pratique qui répondait à ces exigences bénéficiait automatiquement de cette exonération.

                                                Le règlement maintient, en son article 5, l'exemption d'interdiction d'abus de marché aux programmes de rachat d'actions propres répondant à certaines conditions précisées par l'AEMF, à laquelle un mandat a été octroyé pour élaborer des projets de normes techniques de réglementation [200]. Ces normes, publiées le 28 septembre 2015, précisent notamment les conditions applicables aux opérations, les restrictions en matière de durée et de volumes, les obligations de divulgation et de déclaration, ainsi que les conditions relatives aux prix [201]. L'article 5 du règlement a ensuite été complété, en ce qui concerne les conditions applicables aux programmes de rachat et aux mesures de stabilisation, par le règlement délégué n° 2016/1052 du 8 mars 2016 [202].

                                                Les opérations qui peuvent bénéficier de ce « safe harbour » sont donc:

                                                  • les opérations sur actions propres effectuées dans le cadre de programmes de rachat; et
                                                  • les mesures de stabilisation d'un instrument financier.
                                                  10.1. Programmes de rachat

                                                  113.Le règlement aménage une exonération au regard de la législation sur les abus de marché, permettant certains programmes de rachat d'actions propres répondant à des conditions strictes d'échapper à tout risque de se voir qualifiés de manipulation de cours [203].

                                                  Il convient toutefois d'emblée de préciser que ce n'est pas parce qu'une opération de rachat d'actions propres ou une mesure de stabilisation de cours ne remplit pas les conditions du « safe harbour » qu'elle constitue, de ce fait, une manipulation de marché. Les opérations qui ne satisfont pas aux exigences du « safe harbour » tombent certes sous le coup des interdictions énoncées à l'article 12, 1., du règlement, mais ne sont toutefois pas réputées en elles-mêmes constituer des abus de marché [204]. Il appartient à la FSMA d'établir, par le biais de ses enquêtes habituelles, si les interdictions ont été transgressées ou non [205]. Sous l'empire de l'ancien régime de « safe harbour », la FSMA indiquait que le « safe harbour » est par définition « un régime facultatif établissant une présomption selon laquelle les opérations effectuées en respectant toutes les conditions ne constituent pas un abus de marché. Mais inversement, le non-respect de certaine(s) condition(s) prescrite(s) par le régime dérogatoire ne permet pas pour autant de conclure d'office que les opérations en question constituent effectivement un abus de marché; il reviendra à la FSMA, comme pour tout autre cas supposé d'abus de marché, d'établir que les éléments constitutifs de l'infraction sont réunis » [206].

                                                  Le considérant 12 du règlement confirme expressément le caractère facultatif de la protection offerte par l'article 5 du règlement en ces termes: « les opérations sur actions propres effectuées dans le cadre de programmes de rachat ainsi que les mesures de stabilisation d'instruments financiers qui ne bénéficieraient pas des dérogations au titre du présent règlement ne devraient pas être réputées en elles-mêmes constituer des abus de marché ».

                                                  Pour qu'elles soient constitutives d'un abus de marché, ces opérations devront donc se traduire par des comportements recouvrant l'une ou l'autre forme de pratique prohibée par le règlement. En outre, à supposer même que ces comportements soient observés à l'occasion d'une opération de rachat d'actions propres, ceux-ci ne constitueront pas un abus de marché si (i) les raisons qui ont amené l'émetteur à le faire sont légitimes, et (ii) les transactions ou les ordres sont conformes aux pratiques normales du marché concerné [207]. L'article 13, 2., du règlement détermine les critères que la FSMA doit prendre en considération lorsqu'elle examine si une pratique de marché peut être admise. A ce jour cependant, la FSMA n'a pas encore défini les conditions auxquelles devaient satisfaire certains ordres ou transactions pour pouvoir être qualifiés de pratiques de marché admises.

                                                  En pratique, il est conseillé, lorsqu'il n'est pas possible de rencontrer toutes les exigences du « safe harbour », de moduler l'opération envisagée en respectant un maximum d'entre elles, afin de réduire le risque de voir l'opération qualifiée d'abus de marché.

                                                  114.Quand le bénéfice du « safe harbour » peut-il être recherché?

                                                  L'article 5 du règlement énonce que le règlement fixe les conditions à remplir par les programmes de rachat et les mesures de stabilisation d'instruments financiers. La notion de « programmes de rachat » est définie à l'article 3 du règlement. Il s'agit des opérations sur actions propres effectuées conformément aux articles 21 à 27 de la directive n° 2012/30 [208] (anciens art. 19 à 24 de la directive n° 77/91 [209]), c'est-à-dire des opérations sur actions propres effectuées par la société elle-même et non par ses filiales.

                                                  Les acquisitions d'actions d'une société par ses filiales directes, qui sont visées par l'article 28 de la directive n° 2012/30, précitée (ancien art. 24bis de la directive n° 77/91), ne tombent dès lors pas dans le champ d'application du règlement. Par conséquent, elles ne devraient en principe pas pouvoir bénéficier du « safe harbour ».

                                                  De plus, le règlement délégué n° 2016/1052 ne prévoit pas la possibilité d'utiliser des produits dérivés dans le cadre d'un programme de rachat. Ils sont donc exclus du bénéfice du « safe harbour » [210].

                                                  115.Pour qu'un programme de rachat puisse bénéficier du « safe harbour », certaines exigences doivent être remplies [211]:

                                                    tous les détails du programme sont divulgués avant que ne débutent les opérations [212];

                                                    L'émetteur, avant le début des opérations dans le cadre d'un programme de rachat, doit veiller à la publication adéquate des informations suivantes: (a) l'objectif du programme, tel que visé à l'article 5, 2., du règlement; (b) le montant pécuniaire maximal alloué au programme; (c) le nombre maximal d'actions à acquérir; et (d) la période pour laquelle le programme a été autorisé [213];

                                                    les opérations sont notifiées à la FSMA, puis divulguées au public, comme faisant partie du programme de rachat [214]

                                                    L'émetteur déclare à l'autorité compétente de chaque plate-forme de négociation sur laquelle les actions sont admises à la négociation ou négociées, soit la FSMA dans le cas des sociétés cotées belges, l'ensemble des opérations liées au programme de rachat, au plus tard à la fin de la 7e journée boursière suivant leur date d'exécution [215]. Cette notification doit avoir lieu sous une forme détaillée et sous une forme agrégée. La forme agrégée indique le volume global et le prix moyen pondéré par jour et par plate-forme de négociation.

                                                    A l'égard du public, l'émetteur assure la publication adéquate des informations relatives aux opérations liées à un programme de rachat au plus tard à la fin de la 7e journée boursière suivant leur date d'exécution [216]. L'émetteur met également en ligne sur son site web les opérations publiées et tient cette information à la disposition du public pendant cinq ans au moins à compter de la date de publication adéquate.

                                                    Les contraintes de publicité telles que prévues à l'article 620 du Code des sociétés, ainsi qu'aux articles 205 et s. de l'arrêté royal portant exécution du Code des sociétés restent également d'application;

                                                    des limites adéquates sont respectées en ce qui concerne les prix et les volumes  [217]

                                                    L'émetteur ne peut, lorsqu'il exécute des opérations dans le cadre d'un programme de rachat, acheter des actions à un prix supérieur à la plus élevée des deux valeurs suivantes: (a) le prix de la dernière opération indépendante, ou (b) l'offre d'achat indépendante actuelle la plus élevée sur la plate-forme de négociation où l'achat est effectué [218].

                                                    De plus, l'émetteur ne peut, lorsqu'il exécute des opérations dans le cadre d'un programme de rachat, acheter sur une journée de négociation plus de 25% du volume quotidien moyen des actions échangées sur la plate-forme de négociation où l'achat est effectué [219].

                                                    Le précédent règlement n° 2273/2003 prévoyait une exception à la limite de 25%, en cas de liquidité extrêmement faible du marché en cause. Celle-ci a cependant été supprimée en raison du fait qu'elle n'a été invoquée que de manière exceptionnelle et qu'elle est susceptible de préjudicier à l'application uniforme du règlement [220].

                                                    Lorsque les actions sont cotées sur différentes plate-formes de négociation, ces limitations doivent s'appliquer sur la plate-forme sur laquelle les actions sont acquises [221].

                                                    L'AEMF précise par ailleurs que seules les acquisitions en bourse peuvent bénéficier du « safe harbour », à l'exclusion des opérations de gré à gré [222].

                                                    Les normes techniques prévoient par ailleurs certaines règles concernant les enchères;

                                                    les opérations sont réalisées conformément aux objectifs visés à l'article 5, 2., du règlement, et aux conditions énoncées à l'article 5 du règlement et dans les normes techniques de réglementation répondant à des objectifs précis  [223]

                                                    L'article 5, 2., du règlement précise que la dérogation bénéficie uniquement aux programmes de rachat ayant pour seul objectif:

                                                    • de réduire le capital d'un émetteur [224];
                                                    • de satisfaire aux obligations découlant de titres de créance qui sont échangeables en titres de propriété; ou
                                                    • de satisfaire aux obligations découlant des programmes d'options sur actions, ou autres allocations d'actions, aux salariés ou aux membres des organes d'administration, de gestion ou de surveillance de l'émetteur ou d'une entreprise associée.

                                                    L'échange d'actions n'est dès lors permis que dans les limites prévues à l'article 5, 2., du règlement, c'est-à-dire pour permettre à l'émetteur « de satisfaire aux obligations découlant de titres de créance qui sont échangeables en titres de propriété ».

                                                    Le législateur européen ayant repris dans le règlement le libellé particulièrement précis du règlement n° 2273/2003, un programme de rachat ayant (notamment ou uniquement) d'autres objectifs que ceux énoncés ci-dessus, et notamment celui de réguler le cours des actions de la société, de procéder à la remise d'actions à titre d'échange ou de paiement dans le cadre d'opérations de croissance externe ou encore d'éviter un dommage grave et imminent à la société (notamment en cas d'OPA hostile), ne pourrait bénéficier du « safe harbour ». L'AEMF précise également dans ses normes techniques que ces objectifs sont les « seuls légalement admis » [225].

                                                    Lorsque l'émetteur a lancé des programmes de rachat qui poursuivent plusieurs objectifs, certains n'étant pas compatibles avec le « safe harbour », il est recommandé de mettre en place des systèmes de ségrégation permettant une traçabilité des titres, telle l'ouverture chez le teneur de comptes, en amont des rachats, d'un compte distinct par objectif poursuivi [226];

                                                    ne pas enfreindre certaines restrictions;

                                                    L'AEMF ayant considéré que le régime prévu par l'article 6 du règlement n° 2273/2003 est approprié et que les restrictions qu'il prévoit doivent continuer à être appliquées [227], ces restrictions sont à présent reformulées par le règlement délégué n° 2016/1052. L'article 4, 1., de ce dernier prévoit que les émetteurs ne peuvent, sous peine de perdre les bénéfices du « safe harbour », procéder aux opérations suivantes:

                                                      • vendre des actions pendant la durée du programme de rachat;
                                                      • procéder à des opérations durant une période qui constitue une période d'arrêt (« fenêtre négative ») visée par l'article 19, 11., du règlement [228];
                                                      • procéder à des opérations sur des valeurs au sujet desquelles l'émetteur décide de différer la publication d'une information privilégiée conformément à l'article 17, 4. ou 5., du règlement [229].

                                                      Des exceptions, générales ou sélectives, sont par ailleurs prévues à ces restrictions.

                                                      D'une part, les restrictions (dans leur ensemble) ne s'appliquent pas dans deux cas:

                                                        • si l'émetteur a mis en place un programme de rachat planifié; ou
                                                        • si le chef de file du programme de rachat est une entreprise d'investissement ou un établissement de crédit qui prend ses décisions concernant les dates d'achat des actions de l'émetteur indépendamment de celui-ci [230].

                                                        D'autre part, certaines exceptions ne s'appliquent que sélectivement, et ce si l'émetteur est une entreprise d'investissement ou un établissement de crédit [231].

                                                        116.Notons également que les articles 3 et 5 du règlement se limitant à faire référence aux opérations sur actions propres, sans nullement viser d'opérations sur d'autres titres, par exemple sur des « instruments associés », il y a lieu de considérer que le bénéfice du « safe harbour » ne peut être obtenu que s'il porte sur des actions, à l'exclusion des parts bénéficiaires ou des certificats [232].

                                                        10.2. Mesures de stabilisation

                                                        117.Selon le préambule du règlement délégué n° 2016/1052, les opérations de stabilisation « visent à soutenir, pendant une durée limitée, le prix d'une offre initiale ou secondaire de titres soumis à une pression à la vente, ce qui permet d'alléger cette pression exercée par des investisseurs à court terme et de maintenir l'ordre sur le marché des titres concernés » [233]. Le considérant 6 du règlement délégué n° 2016/1052 poursuit: « elles contribuent ainsi à renforcer la confiance des investisseurs et des émetteurs dans les marchés financiers. Par conséquent, dans l'intérêt des investisseurs qui ont souscrit ou acheté ces titres dans le cadre d'une distribution significative, et dans l'intérêt de l'émetteur, les négociations de blocs, qui sont des opérations strictement privées, ne devraient pas être considérées comme une distribution significative de titres » [234].

                                                        La stabilisation est définie par l'article 3 du règlement comme « un achat ou une offre d'achat de valeurs, ou une transaction portant sur des instruments associés équivalents à celles-ci  [235], réalisé par un établissement de crédit ou une entreprise d'investissement dans le cadre d'une distribution significative de telles valeurs, dans le seul but de soutenir le prix sur le marché de ces valeurs pendant une durée prédéterminée, en raison d'une pression à la vente s'exerçant sur elles » [236].

                                                        118.L'article 5, 4., du règlement prévoit que les mesures de stabilisation bénéficient elles aussi d'un « safe harbour » aux conditions (cumulatives) suivantes:

                                                          la stabilisation est effectuée pour une période limitée;

                                                          La période de stabilisation se définit différemment suivant la situation concernée [237]:

                                                          • dans le cas d'une distribution significative sous la forme d'une offre initiale annoncée publiquement, elle commence à la date du début de la négociation des titres sur la plate-forme de négociation concernée et s'achève au plus tard 30 jours calendaires après cette date;
                                                          • dans le cas d'une distribution significative sous la forme d'une offre secondaire, elle commence à la date de la publication adéquate du prix définitif des titres et s'achève au plus tard 30 jours calendaires après la date d'allocation;

                                                          les informations importantes concernant la stabilisation sont divulguées et notifiées à l'autorité compétente de la plateforme de négociation, c'est-à-dire la FSMA;

                                                          L'article 6 du règlement délégué n° 2016/1052 énumère les publications requises à trois moments-clés:

                                                          1. Avant le début de l'offre initiale ou secondaire des titres, la personne désignée comme point central responsable [238] assure la publication adéquate des informations suivantes:
                                                              • le fait que la stabilisation n'aura pas nécessairement lieu et qu'elle peut cesser à tout moment;
                                                              • le fait que les opérations de stabilisation visent à soutenir le prix de marché des titres pendant la période de stabilisation;
                                                              • le début et la fin de la période de stabilisation durant laquelle la stabilisation peut avoir lieu;
                                                              • l'identité des entités effectuant la stabilisation, à moins qu'elle ne soit pas encore connue à ce moment-là, auquel cas elle doit faire l'objet d'une publication adéquate ultérieure, avant le début de la stabilisation;
                                                              • l'existence de toute faculté de surallocation ou option de couverture des surallocations, le nombre maximal de titres couverts par cette faculté ou cette option, la période durant laquelle cette option peut être exercée et toute condition d'utilisation de la faculté ou d'exercice de l'option; et
                                                              • l'endroit où la stabilisation peut être effectuée, y compris, s'il y a lieu, le nom de la ou des plate-formes de négociation concernées.
                                                            • Durant la période de stabilisation, la personne désignée comme point central responsable assure la publication adéquate du détail de toutes les opérations de stabilisation au plus tard à la fin de la 7e journée boursière suivant la date d'exécution de ces opérations.
                                                          2. Enfin, dans la semaine qui suit la fin de la période de stabilisation, la personne désignée comme point central responsable assure la publication adéquate des informations suivantes:
                                                              • si la stabilisation a eu lieu ou non;
                                                              • la date à laquelle la stabilisation a commencé;
                                                              • la date à laquelle la dernière opération de stabilisation a été effectuée;
                                                              • la fourchette de prix dans laquelle la stabilisation a eu lieu, pour chaque date à laquelle des opérations de stabilisation ont été réalisées;
                                                              • s'il y a lieu, la ou les plate-formes de négociation sur lesquelles des opérations de stabilisation ont été réalisées.
                                                              • De plus, les émetteurs, les offreurs, ou les entités réalisant la stabilisation agissant ou non pour le compte de ces personnes, notifient les détails de toutes les opérations de stabilisation à la FSMA, au plus tard à la fin de la 7e journée boursière suivant la date d'exécution de ces opérations;

                                                              des limites adéquates sont respectées en ce qui concerne les prix;

                                                              Il convient ici d'opérer une distinction d'après le type de titres sur lesquels porte l'offre [239]:

                                                                • dans le cas d'une offre d'actions ou d'autres titres équivalents à des actions, la stabilisation ne s'effectue en aucun cas à un prix supérieur à celui de l'offre;
                                                                • dans le cas d'une offre de titres de créance convertibles ou échangeables en actions ou en autres titres équivalents, la stabilisation ne s'effectue en aucun cas à un prix supérieur au prix de marché de ces titres au moment où les conditions définitives de la nouvelle offre ont été publiées;

                                                                ces opérations respectent les conditions relatives à la stabilisation prévues par les normes techniques de réglementation  [240].

                                                                Le règlement délégué n° 2016/1052 reconnaît dans son préambule qu'afin de fournir des ressources et une couverture à l'activité de stabilisation, il convient d'autoriser la stabilisation complémentaire, sous forme d'exercice de facultés de surallocation ou des options de couverture correspondantes [241]. L'option de couverture des surallocations (greenshoe option) est définie comme une option accordée par l'offreur aux banques impliquées dans l'offre dans le but de couvrir les surallocations, en vertu de laquelle ces banques peuvent acquérir jusqu'à un certain montant des titres au prix de l'offre durant une certaine période suivant l'offre des titres [242].

                                                                L'article 8 du règlement délégué n° 2016/1052 énonce certaines conditions relatives à cette stabilisation complémentaire:

                                                                  • la surallocation des titres n'a lieu que durant la période de souscription et au prix de l'offre;
                                                                  • une position résultant de l'exercice d'une faculté de surallocation par la banque qui n'est pas couvert par l'option de couverture correspondante ne dépasse pas 5% de l'offre initiale;
                                                                  • les bénéficiaires d'une option de couverture ne peuvent exercer celle-ci que lorsqu'il y a eu surallocation des titres;
                                                                  • l'option de couverture ne dépasse pas 15% de l'offre initiale;
                                                                  • la période durant laquelle l'option de couverture peut être exercée est identique à la période de stabilisation prévue à l'article 5;
                                                                  • l'exercice de l'option de couverture est rendu public sans délai, en même temps que toutes les informations appropriées, en particulier la date d'exercice de l'option et le nombre et la nature des titres concernés.
                                                                  [1] Avocat au barreau de Bruxelles, Solicitor (England and Wales) (Linklaters LLP).
                                                                  [2] Avocat au barreau de Bruxelles, Solicitor (England and Wales) (Linklaters LLP), maître de conférences à l'UCL.
                                                                  [3] Avocat au barreau de Bruxelles (Linklaters LLP), collaborateur scientifique à l'ULg.
                                                                  [4] Avocat aux barreaux de Bruxelles et de New York (Linklaters LLP).
                                                                  [5] La matière est à jour au 31 mars 2017.
                                                                  [6] Règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (règlement relatif aux abus de marché) et abrogeant la directive n° 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil et les directives nos 2003/124/CE, 2003/125/CE et 2004/72/CE de la Commission, J.O.U.E., 12 juin 2014, L. 173/1.
                                                                  [7] Loi du 27 juin 2016 modifiant, en vue de transposer la directive n° 2013/50/UE et de mettre en oeuvre le règlement n° 596/2014, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, la loi du 16 juin 2006 relative aux offres publiques d'instruments de placement et aux admissions d'instruments de placement à la négociation sur des marchés réglementés, ainsi que la loi du 2 mai 2007 relative à la publicité des participations importantes dans des émetteurs dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé et portant des dispositions diverses, M.B., 1er juillet 2016, p. 40.063.
                                                                  [8] Arrêté royal du 25 avril 2016 modifiant, en vue de mettre en oeuvre le règlement n° 596/2014, l'arrêté royal du 14 novembre 2007 relatif aux obligations des émetteurs d'instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé et l'arrêté royal du 21 août 2008 fixant les règles complémentaires applicables à certains systèmes multilatéraux de négociation, M.B., 19 mai 2016, p. 32.234.
                                                                  [9] Arrêté royal du 11 septembre 2016 modifiant, en vue de transposer la directive n° 2013/50/UE, l'arrêté royal du 14 novembre 2007 relatif aux obligations des émetteurs d'instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé et l'arrêté royal du 14 février 2008 relatif à la publicité des participations importantes, et modifiant les arrêtés royaux du 27 avril 2007 relatif aux offres publiques d'acquisition et relatif aux offres publiques de reprise et l'arrêté royal du 21 août 2008 fixant les règles complémentaires applicables à certains systèmes multilatéraux de négociation, M.B., 27 septembre 2016, p. 67.274.
                                                                  [10] Circ. FSMA_2016_08 du 18 mai 2016 (mise à jour du 21 février 2017) et Circ. FSMA_2016_07 du 18 mai 2016 (mise à jour du 30 juin 2016).
                                                                  [11] Circ. FSMA_2012_01 du 11 janvier 2012 (mise à jour du 13 décembre 2016), Circ. FSMA_2011_06 du 6 octobre 2011 (mise à jour du 27 septembre 2016) et Circ. FSMA_2011_07 du 11 octobre 2011 (mise à jour du 18 mai 2016).
                                                                  [12] Les dispositions relatives aux sondages de marché et aux recommandations d'investissement et statistiques ne sont pas analysées dans le présent article. Concernant celles-ci, voy. G. Platteau, « Les sondages de marché sous le règlement abus de marché », Cah.jur., 2017, p. 1.
                                                                  [13] Les dispositions du règlement relatives aux quotas d'émission et aux opérations sur matières premières ne sont pas analysées dans le présent article. Nous renvoyons à la section 9 en ce qui concerne quelques règles spéciales dans le cadre des manipulations de marché.
                                                                  [14] Voir le site web de la FSMA pour la liste complète: www.fsma.be/en/Supervision/fm/ma/moma/Article/lijsten/mtfexp.aspx (consulté le 31 mars 2017).
                                                                  [15] Directive n° 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et modifiant la directive n° 2002/92/CE et la directive n° 2011/61/UE, J.O.U.E., 12 juin 2014, L. 173/349.
                                                                  [16] Voir l'art. 3 du règlement, renvoyant à l'art. 4 de MiFID II (plus précisément, la section C de l'annexe 1 de MiFID II).
                                                                  [17] En Belgique, l'activation d'un instrument financier sur l'Expert Market (anciennement, le Marché des Ventes Publiques) à la demande d'un membre d'Euronext Brussels SA n'entraîne pas l'application du régime administratif en matière d'abus de marché à l'émetteur de l'instrument financier concerné (cf. Circ. FSMA 2016_08 du 18 mai 2016, note de bas de page 3).
                                                                  [18] Voir l'art. 3 du règlement, renvoyant à l'art. 4 de MiFID II.
                                                                  [19] M.B., 3 septembre 2002, p. 39.121 (ci-après, la « loi surveillance »).
                                                                  [20] Loi du 2 mai 2007 relative à la publicité des participations importantes dans des émetteurs dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé et portant des dispositions diverses, M.B., 12 juin 2006, p. 31.588.
                                                                  [21] Directive n° 2014/57/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux sanctions pénales applicables aux abus de marché, J.O.U.E., 12 juin 2014, L. 173/179.
                                                                  [22] M. Berlingin et P. De Pauw, « Le caractère précis de l'information privilégiée: encore un peu plus d'incertitude à la suite de l'arrêt Lafonta de la C.J.U.E. du 11 mars 2015 », R.D.C., 2017, p. 247; L. Legein, « Le nouveau règlement Abus de Marché et ses conséquences pour les sociétés cotées belges », R.P.S.-T.R.V., 2016, p. 484.
                                                                  [23] Règlement d'exécution (UE) n° 2016/1055 de la Commission établissant des normes techniques d'exécution relatives aux modalités techniques de publication et de report des informations privilégiées conformément au règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil, J.O.U.E., 30 juillet 2016, L. 173/47 (ci-après, « règlement d'exécution n° 2016/1055 »).
                                                                  [24] Rapport du Comité Européen des Régulateurs (Committee of European Securities Regulators, ci-après, « CESR ») de juillet 2007, Market Abuse Directive. Level 3 - second set of CESR guidance and information on the common operation of the Directive to the market, CESR/06-562B, p. 5, § 1.9 (ci-après, « rapport CESR/06-562B »).
                                                                  [25] M. Berlingin, « L'utilisation abusive d'informations privilégiées », Séminaire Vanham & Vanham, 27 mai 2015, p. 20, § 4.1.2.1 et les références citées; L. Legein, o.c., p. 487.
                                                                  [26] Paris, 3 avril 2014, Bulletin Joly Bourse, 1er juin 2014, n° 6, p. 297.
                                                                  [27] FCA Handbook, MAR 1.2.12.
                                                                  [28] J.L. Hansen, « Say when: when must an issuer disclose inside information? », Nordic and European Company Law, LSN Research Paper Series, 2016/03, p. 7.
                                                                  [29] Proposition de la Commission, COM (2011) 651, Bruxelles, 20 octobre 2011.
                                                                  [30] C.J.U.E., 28 juin 2012, Geltl / Daimler AG, C-19/11.
                                                                  [31] E. Vandendriessche, « De ruime interpretatie van het concept 'voorwetenschap' door het Europese Hof van Justitie in het Geltl-arrest - De vereiste graad van nauwkeurigheid van koersgevoelige informatie in een in de tijd gespreid proces », R.D.C., 2013, pp. 179 et s.; B. Feron et M. Berlingin, « Le caractère précis de l'information privilégiée à l'aune de l'arrêt Geltl de la CJUE du 28 juin 2012 », D.B.F., 2013, pp. 57 et s.; L. Legein, o.c., p. 485.
                                                                  [32] C.J.U.E., 23 décembre 2009, C-45/08, Spector / CBFA.
                                                                  [33] Avis de l'avocat général, 21 mars 2012, § 89 et s.
                                                                  [34] Position du Parlement européen en première lecture du 14 mars 2002 sur la proposition de directive du Conseil sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (abus de marché) (COM(2001) 281 - C5-0262/2001) - 2001/0118(COD), P5_TC1-COD(2001)0118.
                                                                  [35] B. Feron et M. Berlingin, o.c., p. 60.
                                                                  [36] K. Geens et M. Wauters, « Insider trading en andere vormen van marktmisbruik » in Jan Ronse Instituut (dir.), Financiële wetgeving. De Tussenstand, Kalmthout, Biblo, 2004, p. 393; B. Feron et P. De Chatelet, « Les délits de marchés » in Chr. Jassogne, D. Blommaert et D. Raes, Traité pratique de droit commercial, t. 5, Droit bancaire et financier, Bruxelles, Kluwer, 2016, p. 265; X. Dieux et D. Willermain, o.c., p. 9; Y. De Cordt et G. Schaeken, La transparence en droit des sociétés et en droit financier, Bruxelles, Larcier, 2008, pp. 360-361; A. Sotiropoulou, Les obligations d'informations des sociétés cotées en droit de l'Union européenne, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 216.
                                                                  [37] Décision de la Commission des Sanctions du 21 mai 2010, Rapport annuel de la CBFA 2009-10, p. 68.
                                                                  [38] B. Feron et M. Berlingin, o.c., pp. 60 et 61; H. Kraus et M. Berellochs, « Insider trading and the disclosure of inside information after Geltl v. Daimler - A comparative analysis of the ECJ decision in the Geltl v. Daimler case with a view to the future European Market Abuse Regulation », Capital Markets Law Journal, 2013, vol. 8, n° 3, p. 294.
                                                                  [39] L. Legein, o.c., p. 486.
                                                                  [40] C.J.U.E., 11 mars 2015, Lafonta / AMF, C-628/13; voir V. Simonart, « Le caractère précis de l'information privilégiée: une condition nébuleuse », Rev. prat. soc., 2015, p. 108, spéc. nos 39 et s.; M. Berlingin et P. De Pauw, o.c., pp. 247 et s.
                                                                  [41] M. Berlingin et P. De Pauw, o.c., p. 257.
                                                                  [42] L. Legein, o.c., p. 487.
                                                                  [43] Règlement, considérant 14.
                                                                  [44] B. Fischhoff, « For Those Condemned To Study the Past: Heuristics and Biases in Hindsight » in D. Kahneman, P. Slovic, A. Tversky (dir.), Judgment Under Uncertainty: Heuristics and Biases, Cambridge, Cambridge University Press, pp. 335 et s.
                                                                  [45] Voir S.A. Hawkins et R. Hastie, « Hindsight: Biased Judgments of Past Events After the Outcomes Are Known », cité par G. Mitu Gulati et al., « Fraud by hindsight », Northwestern University Law Review, 2003-04, vol. 98, n° 3, p. 778. Ces auteurs identifient un nombre substantiel d'études consacrées au biais rétrospectif, ce qui en fait une découverte « bien établie » (a «  well-established » finding).
                                                                  [46] B. Deffains et S. Ferey, « Economie comportementale du droit: quelle place pour la neuroéconomie? », Economie et Institutions 2011, n° 16, septembre 2011, p. 153.
                                                                  [47] Rapport de l'enquête particulière sur le fonctionnement de l'ordre judiciaire dans le cadre de l'affaire relative au meurtre d'Annick Van Uytsel, approuvé par l'assemblée générale du Conseil supérieur de la Justice le 27 juin 2012, p. 9, disponible sur www.csj.be/sites/5023.b.fedimbo.belgium.be/files/press_publications/r0032f_0.pdf (consulté le 31 mars 2017).
                                                                  [48] M.J. Kroeze, « De Historian's fallacy en Fortis », Rechtsgeleerd Magazijn Themis 2012/3, p. 113; P. Valery, Regards sur le monde actuel, Paris, Stock - Delamain et Boutelleau, 1931.
                                                                  [49] Directive n° 2004/109/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 2004 sur l'harmonisation des obligations de transparence concernant l'information sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et modifiant la directive n° 2001/34/CE, J.O.U.E., 31 décembre 2004, L. 390/38.
                                                                  [50] Rapport de l'AEMF du 20 octobre 2016, ESMA/2016/1478, MAR Guidelines. Delay in the disclosure of inside information.
                                                                  [51] Rapport CESR/06-562B, p. 9.
                                                                  [52] Art. 17, 7., du règlement.
                                                                  [53] Rapport de l'AEMF du 28 septembre 2015, ESMA/2015/1455, Final report. Draft technical standards on the Market Abuse Regulation (ci-après, « rapport ESMA/2015/1455 »), § 224 et s.
                                                                  [54] Rapport ESMA/2015/1455, § 239.
                                                                  [55] Rapport ESMA/2015/1455, § 241.
                                                                  [56] A. Sotiropoulou, o.c., pp. 226 et 227; L. Legein, o.c., p. 500.
                                                                  [57] Rapport Lagarde, 4 février 2008, disponible sur www.challenges.fr/entreprise/20080204.CHA8768/les-principaux-points-du-rapport-lagarde.html (consulté le 31 mars 2017).
                                                                  [58] C.P. Siritto, « Transparency and Bank Runs », NYU Research Papers, juin 2010, p. 20.
                                                                  [59] N. Allenspach, « Banking and Transparency: Is More Information Always Better? », Swiss National Bank Working Paper, 2009-11, disponible sur www.papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1524702 (consulté le 31 mars 2017); E. Wymeersch, « The Structure of Financial Supervision in Europe: About Single, Twin Peaks and Multiple Financial Supervisors », European Business Organization Law Review, 2007, vol. 8, pp. 237-306.
                                                                  [60] Rapport ESMA/2015/1455, § 252.
                                                                  [61] Rapport ESMA/2015/1455, § 252-255.
                                                                  [62] C.J.U.E., 23 décembre 2009, Spector / CBFA, C-45/08; Ph. Lambrecht et M. Duplat, « L'utilisation de l'information privilégiée dans une opération d'initié: une présomption réfragable », Rev. prat. soc., 2010, p. 66; M. Tison et E. Vandendriessche, « Het Spector-arrest van het Hof van Justitie van de Europese Unie en het vermoeden van het gebruik van voorkennis. Een zegen voor de (administratieve) handhaving van handel met voorkennis? », D.B.F., 2010, p. 367; L. Legein, o.c., 2016, p. 488.
                                                                  [63] Règlement, considérant 24.
                                                                  [64] Art. 8, 2., du règlement.
                                                                  [65] Voir point 4.1., supra et L. Legein, o.c., p. 490.
                                                                  [66] Art. 3 de la directive MAD I.
                                                                  [67] O. Clevenbergh, « La communication d'informations confidentielles dans le cadre des 'due diligence', en particulier dans le cas des sociétés cotées », R.D.C., 2005, p. 115; X. Dieux, « Questions relatives aux opérations préparatoires et au lancement d'une OPA volontaire », in X, Liber Amicorum Guy Horsmans, Bruxelles, Bruylant, 2004, pp. 413 et s.; L. Legein, o.c., p. 490.
                                                                  [68] Voir point 3.2.
                                                                  [69] L. Legein, o.c., p. 490, qui cite également le projet de l'Autorité des marchés financiers française (ci-après, « AMF »), « Position-recommandation DOC-2016-XX: Guide de l'information permanente et de la gestion de l'information », contenu dans la Consultation publique de l'AMF sur les modifications à apporter à la doctrine « Emetteur » sur les interventions des émetteurs cotés sur leurs propres titres et l'abandon de certaines pratiques de marché admises dans la perspective de l'entrée en application du règlement européen sur les abus de marché.
                                                                  [70] Règlement d'exécution (UE) n° 2016/959 de la Commission du 17 mai 2016 définissant des normes techniques d'exécution pour les sondages de marché en ce qui concerne les systèmes et les modèles de notification à utiliser par les participants au marché communicants et le format des enregistrements conformément au règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil, J.O.U.E., 17 juin 2016, L. 160/23.
                                                                  [71] Règlement délégué (UE) n° 2016/960 de la Commission du 17 mai 2016 complétant le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation en ce qui concerne les mesures, systèmes et procédures adéquats applicables aux participants au marché communicants réalisant des sondages de marché, J.O.U.E., 17 juin 2016, L. 160/29.
                                                                  [72] Règlement, art. 9.
                                                                  [73] Règlement, considérant 29.
                                                                  [74] Règlement, art. 9, 6.
                                                                  [75] Règlement, art. 9, 1.
                                                                  [76] Voir le considérant 30 du règlement: « Lorsque des personnes morales ont pris toutes les mesures raisonnables pour éviter qu'un abus de marché ne se produise, mais que des personnes physiques qu'elles emploient se livrent à un abus de marché au nom de la personne morale, cela ne devrait pas être réputé constituer un abus de marché par une personne morale. » Voir L. Legein, o.c., p. 489, n° 24.
                                                                  [77] Voir M. Blazhyyevska et B. Van Camp, « Preventive measures by financial institutions - Market Abuse », in Market Abuse - Les abus de marché, Cahiers AEDBF, Limal-Anvers-Cambridge, Intersentia-Anthemis, 2016, p. 214.
                                                                  [78] o.c.
                                                                  [79] Règlement, art. 9, 2.
                                                                  [80] Terme défini à l'art. 4, 1., 7), de MiFID II comme « une personne qui est présente de manière continue sur les marchés financiers pour négocier pour son propre compte et qui se porte acheteuse et vendeuse d'instruments financiers en engageant ses propres capitaux, à des prix fixés par elle ».
                                                                  [81] La FCA britannique a énoncé des exemples de comportements légitimes dans le chef de teneurs de marchés (FCA Handbook, MAR 1.3.10).
                                                                  [82] Règlement, considérant 29.
                                                                  [83] Règlement, considérant 30.
                                                                  [84] Ibid.
                                                                  [85] Selon le glossaire financier du NASDAQ, cette pratique est définie comme « entering into an equity trade, options or futures contracts with advance knowledge of a block transaction that will influence the price of the underlying security to capitalize on the trade ».
                                                                  [86] Règlement, art. 9, 3.
                                                                  [87] Art. 622, § 2, 4° jo. art. 621, 2° et 3°, C. soc.
                                                                  [88] De même, les actions acquises en vertu de l'art. 621, 4°, C. soc. doivent l'être dans un délai de trois ans à compter de leur acquisition (art. 622, § 2, 4° et 5°, C. soc.). Voir A. Coibion et A. de Selys Longchamps, Acquisition de titres propres et participations croisées, Bruxelles, Larcier, 2016, p. 28.
                                                                  [89] Art. 622, § 2, 3°, C. soc.
                                                                  [90] Avant les modifications apportées par la loi du 27 juin 2016, précitée.
                                                                  [91] Voir aussi X. Dieux et D. Willermain, « La transposition en droit belge de la directive 'abus de marché' et de ses mesures d'exécution », D.B.F., 2007, p. 13; P.A. Foriers et C. Tubeuf, « La transposition de la Directive Abus de Marché en matière de délit d'initié: arrêtés royaux du 24 août 2005 et du 5 mars 2006 », Séminaire Vanham & Vanham, 28 septembre 2006 sur « Le nouveau droit des marchés financiers »; M. Tison et F. Ravelingen, « Preventie en repressie van misbruik van voorwetenschap in Belgisch Recht na de omzetting van richtlijn 2003/6 inzake marktmisbruik » in M. Tison (ed.), Belgisch kapitaalmarktrecht op Europese leest, Anvers, Intersentia, 2007, p. 372.
                                                                  [92] Un tel rétablissement de l'égalité d'information peut être réalisé par une inclusion dans le prospectus d'offre ou par la diffusion d'un communiqué de presse par la société cible. Voir notamment J. Meunier et N. De Crombrugghe, « La position de la société cible sous la législation OPA », Rev. Banq., 2009, p. 134; A. Coibion et M. Bredimus, « Rôle et responsabilité du conseil d'administration dans le cadre de certaines opérations financières (deuxième partie) », Rev. prat. soc., 2014, pp. 468-469; L. Legein, o.c., p. 505, n° 61.
                                                                  [93] Règlement, art. 9, 4.
                                                                  [94] FCA Handbook, MAR 1.3.17.
                                                                  [95] Règlement, art. 9, 5.
                                                                  [96] L. Legein, o.c., p. 505, n° 63.
                                                                  [97] Voir P.A. Foriers, « Autour et alentour de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 7 mai 2001. Réflexions d'un civiliste sur le délit d'initié », in Liber amicorum Lucien Simont, Bruxelles, Bruylant, 2002, p. 695.
                                                                  [98] Dans le même sens, voir la Question 24 du Q&A du City of London Law Society and Law Society Company Law Committees' Joint Working Parties on Market Abuse, Share Plans and Takeovers Code (ci-après, le « Q&A de la Law Society »).
                                                                  [99] Sur la possibilité de réaliser une due diligence sur une société cotée préalablement au lancement d'une offre publique d'acquisition, voir notamment O. Clevenbergh, o.c., p. 115; J. Meunier et N. De Crombrugghe, o.c., p. 130; A. Coibion et M. Bredimus, o.c., p. 461 et pp. 464 et s.
                                                                  [100] Voir L. Legein, o.c., p. 506 et la référence au § 1.3.2 du Code of Market Conduct de la FCA au Royaume-Uni.
                                                                  [101] Règlement d'exécution n° 2016/347 du 10 mars 2016 définissant des normes techniques d'exécution précisant le format des listes d'initiés et les modalités de la mise à jour de ces listes conformément au règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil, J.O.U.E., 11 mars 2016, L. 65/49 (ci-après, « règlement d'exécution n° 2016/347 »).
                                                                  [102] Règlement, considérant 56.
                                                                  [103] Art. 18, 7., du règlement. Des règles allégées ont été prévues pour les émetteurs opérant sur les marchés de croissance des PME. Ceux-ci sont exemptés de l'obligation d'établir et de mettre à jour une liste d'initiés. Ils doivent cependant fournir une liste d'initiés à la demande des autorités compétentes (art. 18, 6., du règlement).
                                                                  [104] En ce sens: L. Legein, o.c., p. 502.
                                                                  [105] Considérant 4 du règlement d'exécution n° 2016/347.
                                                                  [106] D. Janssens et J.-W. Geeroms, « Revised rules in Belgium on (delaying) disclosure of inside information, insider lists and PDMR/PCA dealings », in Market Abuse - Les abus de marché, Cahiers AEDBF, Limal-Anvers-Cambridge, Intersentia-Anthemis, 2016, p. 78.
                                                                  [107] Voir L. Legein, o.c., p. 503.
                                                                  [108] Considérants 5 et 6 du règlement d'exécution n° 2016/347.
                                                                  [109] D. Janssens et J.-W. Geeroms, o.c., p. 82.
                                                                  [110] Voir L. Legein, o.c., p. 507 et comparer D. Janssens et J.-W. Geeroms, o.c., p. 83.
                                                                  [111] En ce sens, L. Legein, o.c., p. 507 et les références citées.
                                                                  [112] Ou à une autre personne exerçant des responsabilités dirigeantes.
                                                                  [113] Règlement, considérant 58.
                                                                  [114] Règlement, considérants 58 et 59.
                                                                  [115] Règlement, considérant 58.
                                                                  [116] Règlement, considérant 58.
                                                                  [117] Rapport de l'AEMF du 3 février 2015, ESMA/2015/224, Final Report. ESMA's technical advice on possible delegated acts concerning the Market Abuse Regulation (ci-après, « Rapport ESMA/2015/224 »), § 106.
                                                                  [118] Rapport ESMA/2015/224, § 132.
                                                                  [119] Une règle particulière est prévue par le point 2. lorsque l'émetteur n'a pas de siège social dans un Etat membre.
                                                                  [120] Circ. FSMA_2016_08 du 18 mai 2016, section 4.
                                                                  [121] Règlement d'exécution (UE) n° 2016/523 de la Commission du 10 mars 2016 définissant les normes techniques d'exécution relatives au format et au modèle de notification et de publication des transactions effectuées par les personnes exerçant des responsabilités dirigeantes, conformément au règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil, J.O.U.E., 5 avril 2016, L. 88/19 (ci-après, le « règlement d'exécution n° 2016/523 »).
                                                                  [122] Le modèle présente les transactions séparément ainsi que sous une forme agrégée. Les informations agrégées doivent indiquer le volume de toutes les transactions de même nature effectuées sur le même instrument financier, le même jour de négociation et sur la même plate-forme de négociation, ou en dehors de toute plate-forme de négociation, sous la forme d'un seul chiffre représentant la somme arithmétique du volume de chaque opération. Elles doivent également indiquer le prix moyen pondéré en fonction du volume correspondant. Les transactions de nature différente, telles que les achats et les ventes, ne doivent jamais être agrégées ni compensées entre elles (considérant 2 du règlement d'exécution n° 2016/523).
                                                                  [123] Mise à jour le 21 février 2017.
                                                                  [124] Voir à ce sujet: rapport ESMA/2015/224, § 107.
                                                                  [125] Règlement délégué (UE) n° 2016/522 de la Commission du 17 décembre 2015 complétant le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la dérogation de certains organismes publics et banques centrales de pays tiers, les indicateurs de manipulations de marché, les seuils de publication d'informations, l'autorité compétente pour les notifications de reports, l'autorisation de négociation pendant les périodes d'arrêt et les types de transactions à notifier par les dirigeants, J.O.U.E., 5 avril 2016, L. 88/1 (ci-après, le « règlement délégué n° 2016/522 »).
                                                                  [126] Rapport ESMA/2015/224, § 309.
                                                                  [127] Rapport ESMA/2015/224, § 105.
                                                                  [128] Règlement, considérant 58.
                                                                  [129] Art. 19, 7., al. 2, du règlement.
                                                                  [130] Art. 19, 7., al. 1er, b), du règlement.
                                                                  [131] Art. 19, 7., al. 3, du règlement. Cette disposition a été introduite dans le règlement par l'article 56 du règlement (UE) n° 2016/1011 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2016 concernant les indices utilisés comme indices de référence dans le cadre d'instruments et de contrats financiers ou pour mesurer la performance de fonds d'investissement et modifiant les directives nos 2008/48/CE et 2014/17/UE et le règlement (UE) n° 596/2014, J.O.U.E., 29 juin 2016, L. 171/1 (ci-après, le « règlement n° 2016/1011 »).
                                                                  [132] Rapport ESMA/2015/224, § 133 et 134.
                                                                  [133] Rapport ESMA/2015/224, § 133.
                                                                  [134] o.c.
                                                                  [135] o.c.
                                                                  [136] o.c.
                                                                  [137] Voir D. Janssens et J.-W. Geeroms, o.c., p. 86.
                                                                  [138] Cette disposition a été introduite dans le règlement par l'article 56 du règlement n° 2016/1011.
                                                                  [139] Le Code belge de gouvernance d'entreprise 2009 contient une disposition prévoyant que le conseil d'administration institue un dealing code et préconise quelques lignes de conduite à ce sujet (disposition 3.7 et annexe B).
                                                                  [140] Question 2.
                                                                  [141] Q&A de la Law Society, pp. 2 et 3.
                                                                  [142] D. Janssens, et J.-W. Geeroms, o.c., p. 93.
                                                                  [143] Rapport ESMA/2015/224, § 105.
                                                                  [144] En ce sens: D. Janssens et J.-W. Geeroms, o.c., p. 93. Contra: L. Legein, o.c., pp. 512-513.
                                                                  [145] En ce sens, L. Legein, o.c., pp. 513-515 et D. Janssens et J.-W. Geeroms, o.c., pp. 93-94.
                                                                  [146] Rapport ESMA/2015/224, § 154.
                                                                  [147] Rapport ESMA/2015/224, § 152.
                                                                  [148] Rapport ESMA/2015/224, § 155.
                                                                  [149] Cl. Just, Th. Voß, C. Ritz et R. Becker, Wertpapierhandelsgesetz (WpHG), Munich, C.H. Beck, 2015, nos 380 et s.; N. Moloney, EU Securities and Financial Markets Regulation, Oxford, Oxford EU Law Library, 2014, p. 741; Fr. Allen et D. Gale, « Stock-Price Manipulation », Rev. Financ. Stud., 1992, vol. 5, n° 3, pp. 503 et s. Voir Kl. U. Schmolke, « Das Verbot der Marktmanipulation nach dem neuen Marktmissbrauchsregime. Ziele, Kennzeichen und Problemlagen der Neuregelung in Art. 12 f., 15 MAR », AG, 2016, n° 12, p. 441 concernant la nouvelle typologie à laquelle nous nous rallions pour les besoins du présent article.
                                                                  [150] Art. 12, 1., a) et b), du règlement.
                                                                  [151] Art. 12, 1., c) et d), du règlement. Nous verrons ci-dessous que l'inclusion de l'activité visée au point d) dépasse toutefois le concept de manipulation basée sur la diffusion ou la transmission d'informations.
                                                                  [152] T. Boedts, « Novelties on the prohibition of market manipulation under the Market Abuse Regulation and the Market Abuse Directive », in Market Abuse - Les abus de marché, Cahiers AEDBF, Limal-Anvers-Cambridge, Intersentia-Anthemis, 2016, p. 116.
                                                                  [153] Voir art. 12, 2., d), du règlement.
                                                                  [154] T. Boedts, o.c., p. 100.
                                                                  [155] Considérant 20 du règlement.
                                                                  [156] Voir aussi le considérant 20 du règlement: « Il n'est cependant pas approprié, ni concrètement possible, d'étendre le champ d'application du présent règlement à des comportements qui ne touchent pas à des instruments financiers, par exemple à la négociation de contrats au comptant sur matières premières concernant uniquement le marché au comptant. Dans le cas spécifique des produits énergétiques de gros, les autorités compétentes devraient tenir compte des caractéristiques spécifiques des définitions contenues dans le règlement (UE) n° 1227/2011 lorsqu'elles appliquent les définitions de l'information privilégiée, de l'opération d'initié et de la manipulation de marché prévues dans le présent règlement aux instruments financiers liés aux produits énergétiques de gros. » Le règlement (art. 3, 1., 15)) définit le concept de contrat au comptant sur matières premières comme suit: « un contrat de fourniture de matières premières négociées sur un marché au comptant qui sont livrées rapidement lorsque la transaction est réglée, et un contrat de fourniture de matières premières qui n'est pas un instrument financier, y compris un contrat à terme avec livraison physique ». Le point 16) de la même disposition définit le marché au comptant: « un marché de matières premières sur lequel les matières premières sont vendues contre espèces et livrées rapidement lorsque la transaction est réglée, et d'autres marchés non financiers, comme les marchés à terme pour les matières premières ». Le concept de matière première est défini par référence à l'article 2, 1), du Règlement (CE) n° 1287/2006 de la Commission du 10 août 2006 portant mesures d'exécution de la directive n° 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les obligations des entreprises d'investissement en matière d'enregistrement, le compte rendu des transactions, la transparence du marché, l'admission des instruments financiers à la négociation et la définition de termes aux fins de ladite directive, J.O.U.E., 2 septembre 2006, L. 241/1: « tout bien fongible pouvant être livré, en ce compris les métaux et leurs minerais et alliages, les produits agricoles et les fournitures énergétiques, telles que l'électricité ».
                                                                  [157] Art. 3, 1., 18), du règlement, qui se réfère à l'art. 4, 1., 39), de MiFID II. Voir aussi T.C.W. Lin, « The New Investor », UCLA L. Rev., 2013, p. 689; T. Boedts, o.c., pp. 103-104.
                                                                  [158] Art. 3, 1., 33), du règlement, qui se réfère à l'art. 4, 1., 40), de MiFID II. Voir aussi T.C.W. Lin, o.c., p. 691; T. Boedts, o.c., pp. 103-104.
                                                                  [159] T. Boedts, o.c., p. 105.
                                                                  [160] En ce sens: Kl. U. Schmolke, o.c., p. 441.
                                                                  [161] Une analyse de ce type de manipulation de marché dépasserait le cadre du présent article. Dans la mesure où l'art. 114 TFUE, sur la base duquel le règlement a été adopté, prévoit toutefois une harmonisation totale d'une matière à travers l'Union, une question se pose sur la validité continue de cette disposition en l'absence d'une éventuelle notification à la Commission européenne par la Belgique conformément à cet article du traité.
                                                                  [162] Nous soulignons. Voir aussi l'art. 5, 1., de la directive sanctions pénales: « Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour faire en sorte que la manipulation de marché visée au paragraphe 2 constitue une infraction pénale, au moins dans les cas graves et lorsqu'elle est commise intentionnellement. »
                                                                  [163] Nous soulignons. Voir Rapport ESMA/2015/224, p. 78.
                                                                  [164] B. Feron et A. Fink, « Market abuse - The Belgian general legal framework », in Market Abuse - Les abus de marché, Cahiers AEDBF, Limal-Anvers-Cambridge, Intersentia-Anthemis, 2016, p. 32.
                                                                  [165] Projet de loi relative a la surveillance du secteur financier et aux services financiers et projet de loi complétant, en ce qui concerne les voies de recours, contre les décisions prises par le ministre, par la CBF, par l'OCA et par les entreprises de marche et en ce qui concerne l'intervention de la CBF et de l'OCA devant les juridictions répressives, la loi du [...] relative a la surveillance du secteur financier et aux services financiers et modifiant diverses autres dispositions légales, Doc. parl., Chambre, 2001-02, nos 1842/001 et 1843/001, p. 61.
                                                                  [166] Nous renvoyons au texte de la norme pour les détails.
                                                                  [167] Notons qu'il s'agit bien de l'« exécution d'ordres, ou d'une série d'ordres, afin de découvrir les ordres des autres participants, puis passation d'un ordre afin de tirer profit des informations obtenues ». Dans son rapport du 11 juillet 2014, ESMA/2014/808, Consultation Paper. ESMA's draft technical advice on possible delegated acts concerning the Market Abuse Regulation (ci-après, « rapport ESMA/2014/808 »), pp. 22 et 57, l'AEMF avait initialement indiqué que « [i]n this context, 'phishing' should be understood as the attempt to acquire sensitive information, such as passwords or account details, by masquerading as a trustworthy entity in an electronic communication ». Cette pratique ne concerne évidemment pas les manipulations de marché et, en prenant en considération les réponses reçues dans le cadre de cette consultation des acteurs du marché, l'AEMF a amendé la description de « phishing » ultérieurement (voir rapport ESMA/2015/224, pp. 13, 70 et 80).
                                                                  [168] Au sujet du « trash and cash » par un investisseur ayant une position courte sur un instrument financier, voir T. Nikoleyczik et Ph. Peitsmeyer, « Wenn Short-Seller Kampagnen starten », B.Z., 2016, n° 130, pp. 9 et s.
                                                                  [169] Contra N. Moloney, o.c., p. 741: « Unlike Articles 12(a) and (b), an intention requirement applies [with regard to Article 12(c)] » (nous soulignons).
                                                                  [170] Kl. U. Schmolke, o.c., p. 443.
                                                                  [171] L. Legein, o.c., p. 516.
                                                                  [172] Voir aussi Kl. U. Schmolke, o.c., p. 443.
                                                                  [173] Nous soulignons.
                                                                  [174] Il s'agit de la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine.
                                                                  [175] Voir le site web de la SEC: www.sec.gov/about/laws/sea34.pdf (consulté le 31 mars 2017).
                                                                  [176] A savoir la Rule 10b-5 de la SEC.
                                                                  [177] Notons toutefois qu'une telle exigence de « scienter » ne devrait pas s'appliquer à l'article 12, 1., a), du règlement au vu de son libellé et la possibilité pour les comportements y visés d'être « légitimes ». L'approche européenne ne suit, ici, pas l'approche américaine.
                                                                  [178] Ernst & Ernst / Hochfelder, 425 U.S. 185 (1976) (www.supreme.justia.com/cases/federal/us/425/185/case.html (consulté le 31 mars 2017)).
                                                                  [179] Voir nos développements sur le chevauchement au point 9.2.3.
                                                                  [180] Voir p. ex. rapport ESMA/2014/808, p. 9; B. Feron et A. Fink, o.c., p. 33; T. Boedts, o.c., p. 101. Voir aussi le considérant 7 de la directive sanctions pénales.
                                                                  [181] Ce champ d'application élargi est confirmé par l'art. 2, 2., c), du règlement, qui prévoit que les art. 12 et 15 s'appliquent également aux comportements en rapport avec les indices de référence.
                                                                  [182] Voir p. ex. Kl. U. Schmolke, o.c., p. 441.
                                                                  [183] Voir T. Boedts, o.c., p. 102.
                                                                  [184] Art. 3, 1., 29), du règlement. Nous soulignons. Notons que la manipulation d'un indice - sans qu'il ne s'agisse d'un indice de référence - n'est pas visée par le règlement (T. Boedts, o.c., p. 103).
                                                                  [185] Règlement (UE) n° 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'intégrité et la transparence du marché de gros de l'énergie, J.O.U.E., 8 décembre 2011, L. 326/1.
                                                                  [186] Règlement (UE) n° 1031/2010 de la Commission du 12 novembre 2010 relatif au calendrier, a la gestion et aux autres aspects de la mise aux enchères des quotas d'émission de gaz a effet de serre conformément a la directive n° 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz a effet de serre dans la Communauté, J.O.U.E., 18 novembre 2010, L. 302/1.
                                                                  [187] Nous soulignons.
                                                                  [188] Contra L. Legein, o.c., p. 516.
                                                                  [189] Kl. U. Schmolke, o.c., p. 444.
                                                                  [190] L'annexe I, section B, du règlement couvre les « indicateurs de manipulations consistant à recourir à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d'artifice » et a été adopté « aux fins de l'application de l'article 12, 1., point b) » selon le texte même de l'annexe, alors que ce point b) vise, comme nous l'avons vu, les manipulations de marché à effet (potentiel) et moyens spécifiques.
                                                                  [191] Annexe II, section 2, 1., a), du règlement délégué n° 2016/522.
                                                                  [192] Nous soulignons.
                                                                  [193] Kl. U. Schmolke, o.c., p. 444.
                                                                  [194] Voir points 9.2.2., (ii) et 9.2.2., (iii).
                                                                  [195] Règlement délégué (UE) n° 2016/908 de la Commission du 26 février 2016 complétant le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation sur les critères, la procédure et les exigences concernant l'instauration d'une pratique de marché admise et les exigences liées à son maintien, à sa suppression ou à la modification de ses conditions d'admission, J.O.U.E., 10 juin 2016, L. 153/3 (ci-après, le « règlement délégué n° 2016/908 »).
                                                                  [196] L. Legein, o.c., p. 517.
                                                                  [197] Règlement, considérant 11.
                                                                  [198] Règlement (CE) n° 2273/2003 de la Commission du 22 décembre 2003 portant modalités d'application de la directive n° 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les dérogations prévues pour les programmes de rachat et la stabilisation d'instruments financiers, J.O.U.E., 23 décembre 2003, L. 336/33 (ci-après, le « règlement n° 2273/2003 »).
                                                                  [199] X. Dieux et D. Willermain, o.c., p. 17.
                                                                  [200] Voir le rapport ESMA/2015/1455.
                                                                  [201] Art. 5, 6., du règlement.
                                                                  [202] Règlement délégué (UE) n° 2016/1052 de la Commission du 8 mars 2016 complétant le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil par des normes techniques de réglementation concernant les conditions applicables aux programmes de rachat et aux mesures de stabilisation, J.O.U.E., 30 juin 2016, L. 173/34 (ci-après, le « règlement délégué n° 2016/1052 »).
                                                                  [203] Voir A. Coibion et A. de Selys Longchamps, o.c., pp. 62 et s.
                                                                  [204] Considérant 12 du Règlement. Voir également considérant 2 du règlement n° 2273/2003 et rapport ESMA/2015/1455, p. 12.
                                                                  [205] Voir rapport au Roi précédant l'arrêté royal du 24 août 2005, M.B., 9 septembre 2005, p. 39.505; X. Dieux et D. Willermain, o.c., p. 17; P. Hainaut-Hamende, Les sociétés anonymes, Opérations sur le capital, Emissions publiques, Transformation, Fusion et Scission, Larcier, 2009, n° 763, p. 319; CESR's Advice on Level 2 Implementing Measures for the proposed Market Abuse Directive, CESR/02 - 089d, décembre 2002, pp. 33 et s. (en particulier nos 113 et s.), www.europefesco.org.
                                                                  [206] FSMA - FAQ Abus de marché, question 21; voir également considérant 3 du règlement n° 2273/2003; voir aussi CESR/08-717, pp. 4 et s. et CESR /09-219, pp. 11 et s.
                                                                  [207] Art. 12, 1., a), in fine du règlement.
                                                                  [208] Directive n° 2012/30/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées dans les Etats membres des sociétés au sens de l'article 54, deuxième alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital, J.O.U.E., 14 novembre 2012, L. 315/74.
                                                                  [209] Deuxième directive n° 77/91/CEE du Conseil du 13 décembre 1976 tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les Etats membres des sociétés au sens de l'article 58, deuxième alinéa, du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital, J.O.C.E., 31 janvier 1977, L. 26/1.
                                                                  [210] Voir règlement délégué n° 2016/1052, considérant 2. A ce sujet, la position de l'AMF, le régulateur français, qui considère que les transactions qui résultent du débouclement de positions prises antérieurement au 3 juillet 2016 sur des instruments dérivés demeurent couvertes par le « safe harbour » si les conditions dans lesquelles les instruments dérivés ont été conclus respectant le règlement n° 2273/2003 et la doctrine applicable au moment de leur conclusion (Consultation publique de l'AMF sur les modifications à apporter à la doctrine « Emetteur », o.c., p. 8).
                                                                  [211] Règlement, art. 5, 1. et règlement délégué n° 2016/1052, art. 2 à 4.
                                                                  [212] Règlement, art. 5, 1., a).
                                                                  [213] Règlement délégué n° 2016/1052, art. 2, 1.
                                                                  [214] Règlement, art. 5, 1., b) et 5, 3.
                                                                  [215] Règlement délégué n° 2016/1052, art. 2, 2.
                                                                  [216] Règlement délégué n° 2016/1052, art. e 2, 3.
                                                                  [217] Règlement, art. 5, 1., c).
                                                                  [218] Règlement délégué n° 2016/1052, art. 3, 2.
                                                                  [219] Règlement délégué n° 2016/1052, art. 3, 3. Voir cette même disposition pour les détails du calcul du volume quotidien moyen.
                                                                  [220] Rapport ESMA/2015/1455, p. 16.
                                                                  [221] Art. 3, § 2 des Draft regulatory technical standards for the conditions that buy-back programmes and stabilisation measures must meet, Annexe VII au rapport ESMA/2015/1455, p. 234.
                                                                  [222] Rapport ESMA/2015/1455, p. 15.
                                                                  [223] Règlement, art. 5, 1., d).
                                                                  [224] Selon Laurent Legein, la formulation utilisée dans les règles anciennes, qui précisaient que l'objectif devait être de réduire le capital « en valeur ou en nombre d'actions » (règlement n° 2273/2003, art. 3), combinées à l'arrêté royal du 5 mars 2006 relatif aux abus de marchés, qui prévoyait qu'étaient visées les opérations de rachat « réalisées en application de l'article 620 du Code des sociétés », permettaient implicitement de faire bénéficier du « safe harbour » des rachats d'actions propres sans réduction de capital (L. Legein, o.c., p. 517). En tout état de cause, les nouvelles règles ne permettent plus une telle interprétation tolérante.
                                                                  [225] Rapport ESMA/2015/1455, p. 12.
                                                                  [226] Il s'agit d'ailleurs d'une recommandation de l'AMF (Consultation publique de l'AMF sur les modifications à apporter à la doctrine « Emetteur », o.c., p. 8).
                                                                  [227] Rapport ESMA/2015/1455, p. 17.
                                                                  [228] Voir point 8.
                                                                  [229] Voir point 3.
                                                                  [230] Règlement délégué n° 2016/1052, art. 4, 2.
                                                                  [231] Voir les deux exceptions énoncées aux art. 4, 3. et 4, 4., du règlement délégué n° 2016/1052.
                                                                  [232] Rapport ESMA/2015/1455, p. 13.
                                                                  [233] Règlement délégué n° 2016/1052, considérant 6.
                                                                  [234] Ibid.
                                                                  [235] L'on notera que le champ d'application de l'exemption liée à la stabilisation est donc plus large que celui de l'exemption portant sur les programmes de rachat d'actions puisque les instruments associés aux actions sont également visés. Voir aussi M. Blazhyyevska et B. Van Camp, o.c., p. 211.
                                                                  [236] Pour une description du mécanisme concerné, voir également X. Dieux et D. Willermain, o.c., p. 18; L. Legein, « Quelques questions spéciales de droit des sociétés en rapport avec les opérations d'appel au marché des capitaux », D.B.F., 2008/V, p. 252; R. Aggarwal,« Stabilization Activities by Underwriters after Initial Public Offerings », Journal of Finance, juin 2000, vol. LV, n° 3, p. 1075.
                                                                  [237] Règlement délégué n° 2016/1052, art. 5, 1.
                                                                  [238] Désignation conformément à l'art. 6, 5., du règlement délégué n° 2016/1052.
                                                                  [239] Règlement délégué n° 2016/1052, art. 7.
                                                                  [240] Voir à ce sujet règlement délégué n° 2016/1052, art. 8.
                                                                  [241] Règlement délégué n° 2016/1052, considérant 10.
                                                                  [242] Pour une description du fonctionnement de la greenshoe option, voir CESR, Stabilisation and Allotment, CESR/02-020b, avril 2002, p. 13; L. Legein, o.c., pp. 519 et s.