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Ouverture de crédit et prêt : le critère de la liberté de prélèvement ou l'illusion de l'absolu, R.D.C.-T.B.H., 2017/10, p. 1110-1114

BANQUE ET CRÉDIT
Opérations bancaires - Généralités - Ouverture de crédit/prêt - Critères distinctifs
Lorsque l'emprunteur ne dispose pas d'une réelle liberté de prélèvement, la convention doit être qualifiée de prêt. Tel est le cas si le prélèvement doit intervenir dans les 9 mois suivant l'ouverture, si une commission de réservation est prévue dès le 1er jour du 3e mois qui suit la date de la signature de la lettre de crédit et si les fonds ne sont mis à disposition qu'à la condition de constituer les garanties convenues.
L'article 1907bis du Code civil s'applique à tout remboursement anticipé même si celui-ci n'était originairement pas autorisé.
BANK- EN KREDIETWEZEN
Bankverrichtingen - Algemeen - Kredietopening - Onderscheidende criteria
Wanneer de kredietnemer geen reële vrijheid heeft om krediet op te nemen, moet de overeenkomst als lening worden gekwalificeerd. Dit is het geval wanneer de opneming moet plaatsvinden binnen 9 maanden na de kredietopening, wanneer voorzien is in een boekingsvergoeding vanaf de 1ste dag van de 3de maand na de datum van ondertekening van de kredietbrief en wanneer de fondsen slechts ter beschikking worden gesteld op voorwaarde dat de overeengekomen zekerheden worden gesteld.
Artikel 1907bis van het Burgerlijk Wetboek is van toepassing op eventuele vervroegde terugbetaling, zelfs indien deze oorspronkelijk niet was toegestaan.
Ouverture de crédit et prêt: le critère de la liberté de prélèvement ou l'illusion de l'absolu

1.La décision du tribunal de commerce de Liège, division Verviers, concerne l'indemnité dite de funding loss réclamé par la banque en cas de remboursement anticipé.

Les montants - parfois substantiels - réclamés par les banques conduisent les emprunteurs à saisir les tribunaux en vue d'obtenir la limitation de l'indemnité réclamée à 6 mois d'intérêts par application de l'article 1907bis du Code civil.

Cette décision est l'occasion d'aborder deux questions: (a) quel est l'office du juge en matière de qualification du contrat et (b) quel(s) critère(s) utiliser pour distinguer un contrat de prêt d'une ouverture de crédit. Nous n'examinerons en revanche pas la question de l'application de l'article 1907bis du Code civil aux indemnités réclamées par la banque lors d'un remboursement anticipé alors que la convention interdisait un tel remboursement [1].

2.L'office du juge. La Cour de cassation a décidé, dans un arrêt du 14 avril 2005, que « le juge est tenu de trancher le litige conformément à la règle de droit applicable; qu'il a l'obligation, en respectant les droits de la défense, de relever d'office les moyens de droit dont l'application est commandée par les faits spécialement invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions ». Cet enseignement a été répété à plusieurs reprises depuis lors.

Dans un arrêt du 16 mars 2006, la Cour confirme cet enseignement avec quelques nuances: il n'est plus question d'une obligation mais d'une faculté de relever d'office les moyens de droit [2]. La Cour décide en effet que: « Le juge est tenu d'examiner la nature juridique des faits invoqués par les parties et, quelle que soit la qualification juridique que celles-ci leur ont donnée, il peut suppléer d'office aux motifs invoqués devant lui dès lors qu'il n'élève aucune contestation dont les parties ont exclu l'existence par leurs conclusions, qu'il se fonde uniquement sur des éléments régulièrement soumis à son appréciation, qu'il ne modifie ni l'objet ni la cause de la demande et qu'il respecte les droits de la défense. » [3].

Ceci ne signifie cependant pas que le pouvoir du juge est sans borne. Il doit notamment respecter les droits de la défense et la foi due aux actes.

Dans l'exercice de ce pouvoir, le juge demeure soumis au contrôle de la Cour de cassation.

3.Office du juge (suite). Dans un arrêt du 17 décembre 2007, la Cour de cassation a décidé que: « Lorsque les éléments soumis à son appréciation ne permettent pas d'exclure la qualification donnée par les parties à la convention qu'elles ont conclue, le juge du fond ne peut y substituer une qualification différente. » [4].

Il y a donc lieu de distinguer la manière dont le juge va exercer les prérogatives qui sont les siennes selon que les parties ont elles-mêmes qualifier ou non leur convention.

Lorsque les parties n'ont pas nommé leur accord ou ont accolé à leur accord une qualification [5], « le juge doit, à la lumière de la volonté des parties et de tous les éléments intrinsèques ou extrinsèques à la convention déterminer la qualification à donner à celle-ci » [6].

En revanche, lorsque les parties ont elles-mêmes donné une qualification à leur contrat, le pouvoir du juge de substituer à la qualification donnée par les parties une autre qualification, s'il existe toujours, n'est plus aussi libre: il « n'a (…) pas les coudées franches lorsqu'il se livre à ce travail de requalification. Saisi d'une convention écrite que les parties ont qualifiée expressis verbis, il ne peut procéder à une rectification qu'à la condition de déceler dans le contrat ou dans son exécution des éléments qui sont radicalement incompatibles avec la qualification adoptée » [7]. Si tel est le cas, le juge peut donner à la convention sa bonne qualification, étant entendu que cette dernière ne peut elle-même contenir des éléments radicalement incompatibles avec le contrat ou son exécution. Il s'ensuit que « dans tous les cas limites, la qualification expresse par les parties peut (…) faire pencher la balance dans un sens décisif » [8] puisque le juge devra alors préférer celle-ci à toute autre qualification.

4.L'office du juge (fin). En l'espèce, la décision ne fait pas état d'une qualification donnée ou non par les parties au contrat. Cette étape, pourtant essentielle puisqu'on ne peut totalement ignorer l'expression par les parties d'une volonté à ce sujet, semble avoir été totalement occulté.

Sur ce plan, la décision appelle donc quelques réserves.

5.Prêt et ouverture de crédit - Définition. On rappellera qu'il est traditionnellement admis tant en doctrine [9] qu'en jurisprudence [10] que le contrat de prêt, qui est « un contrat par lequel l'une des parties livre à l'autre une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à la charge par cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité » [11], est un contrat réel. Cette solution découle de la définition même du contrat de prêt contenue à l'article 1875 du Code civil et la remise de la chose est une caractéristique essentielle du contrat [12].

Il se distingue de l'ouverture de crédit, contrat innomé et consensuel, qui est « le contrat par lequel la banque (ou 'créditeur') met temporairement à la disposition de son client (ou 'crédité') ses fonds ou son crédit personnel, à concurrence d'un certain montant. En contrepartie, le crédité s'engage à payer une commission et en outre, si le crédit est réalisable en argent, à rembourser les avances reçues augmentées d'un intérêt » [13].

Cette définition permet néanmoins de mettre en lumière les éléments essentiels de l'ouverture de crédit, à savoir (a) la naissance immédiate d'obligations dans le chef du créditeur (mettre à disposition des fonds ou son crédit personnel) et du crédité (rembourser le montant du crédit prélevé), (b) le caractère limité de l'engagement du créditeur que ce soit dans le temps ou dans le montant, (c) la possibilité pour les parties de convenir librement des formes et conditions d'utilisation.

S'agissant d'un contrat innomé synallagmatique soumis aux principes généraux des obligations contractuelles dont l'autonomie de la volonté, « les parties sont libres de fixer à l'opération qu'elles entendent conclure sous le nom d'ouverture de crédit, les contours que leur suggère leur fantaisie » [14], et ce dans le respect des lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs [15].

6.La remise de la chose, critère déterminant de la qualification. Le contrat réel est celui qui « outre le consentement (exige) la tradition de la chose qui en est l'objet » [16]. C'est pourquoi « on ne conçoit pas de prêt sans tradition de la chose prêtée » [17]. La tradition doit être immédiate [18] et non pas « contemporaine » à l'échange de consentement. Aucune « appréciation souple » [19] ne peut être admise.

Elle est en effet totalement incompatible avec la notion de contrat réel. L'existence même du contrat de prêt dépend de la tradition, ce sur quoi tout le monde s'accorde. Autrement dit, avant cette tradition, il n'y a tout simplement pas de contrat. Cette thèse de l'« appréciation souple » tend en réalité à faire du contrat de prêt un contrat consensuel.

Il s'ensuit que lorsqu'il existe un délai entre la conclusion du contrat et le prélèvement, délai qui se matérialise habituellement dans ce que les parties appellent une période de prélèvement, il ne peut y avoir de contrat de prêt.

Il est cependant parfois soutenu que « le caractère réel du contrat réel (…) relève de son régime (…) et non de sa qualification » en sorte que l'existence d'un délai entre l'échange de consentement et la remise de la chose prêtée, serait insuffisant à écarter la qualification de prêt [20].

Ceci ne nous paraît pas exact.

Certes, on peut imaginer un délai entre l'échange de consentement et la remise de la chose. Mais à peine de méconnaître la nature même du contrat de prêt, qui est un contrat réel, ce simple échange de consentements ne produit aucun effet juridique [21] puisque, par hypothèse, faute de remise de la chose, condition indispensable à l'existence même du contrat, il n'y a pas de contrat [22].

Par ailleurs, admettre qu'une convention puisse être qualifiée sans avoir égard à ses conditions de formation, conduit à une situation pour le moins curieuse. Elle aboutit en effet à pouvoir qualifier un acte de prêt à une époque où juridiquement, ce contrat n'existait pas.

Enfin, il faudrait encore pouvoir combiner cette solution admettant un décalage entre le consentement et la remise de la chose avec le principe suivant lequel les éléments constitutifs du contrat (objet, cause, capacité, consentement) s'apprécient au jour de la formation du contrat [23], c'est-à-dire lorsque le contrat est un contrat réel, au jour de la remise de la chose.

Il s'ensuit que le critère de la remise immédiate des fonds est un critère essentiel permettant de distinguer le contrat de prêt de l'ouverture de crédit. Ceci a du reste été souligné par la Cour constitutionnelle dans son arrêt du 7 août 2013 pour souligner la différence entre le contrat de prêt et l'ouverture de crédit: « Le contrat d'ouverture de crédit permet au crédité de différer la mise en possession effective des fonds et, partant, le paiement des intérêts. (…).  »

Sauf à abandonner le caractère réel du contrat de prêt, il n'apparaît pas possible de qualifier de tel un contrat dont la chose prêtée ne serait pas immédiatement remise.

Partant, après avoir constaté que par une convention sous seing privé du 12 juillet 2010 les parties avaient consenti une ouverture de crédit et que le prélèvement avait eu lieu le 6 septembre 2010, le tribunal ne pouvait qualifier ni le contrat ni l'usage qui en était fait [24], de prêt.

7.La « liberté de prélèvement » - Préambule. Dans le jugement commenté, le tribunal retient cet unique critère pour opérer la qualification du contrat. Il constate que le crédité ne jouissait pas d'une « réelle liberté de prélèvement » au motif qu'il existe une période de prélèvement de 9 mois, une commission de réservation due après 3 mois et que la mise à disposition ne serait réalisée qu'après constitution des sûretés.

Avant même d'examiner la pertinence du critère, il faut constater que la simple existence d'une commission de réservation devait conduire le tribunal à ne pas retenir la qualification de prêt. Une telle commission est en effet destinée à indemniser la banque de la mise à disposition des fonds et partant, de leur indisponibilité notamment pour d'autres crédits. Or, dans un prêt, il n'y a techniquement pas d'indisponibilité des fonds avant la remise des fonds puisqu'il n'y a pas de contrat.

8.« Liberté » de prélèvement ou droit de prélever? Parée de toutes les vertus, la notion de liberté de prélèvement apparaît quelque peu discutable à la lumière de la définition de l'ouverture de crédit. Celle-ci souligne en effet la naissance d'une obligation dans le chef du créditeur. Certes, il est admis que le crédité n'a pas l'obligation de prélever l'ouverture de crédit et que partant, le créditeur n'a pas le droit de l'y contraindre [25]. Cependant, ceci n'est que la conséquence de ce que fondamentalement c'est le créditeur qui souscrit une obligation (mettre ses fonds ou son crédit personnel à disposition du crédité).

La Cour constitutionnelle ne dit du reste rien d'autre lorsqu'elle précise que « les fonds ne sont pas mis à la disposition immédiate du crédité, mais peuvent être utilisés lorsque et dans la mesure où ce dernier le jugerait nécessaire ». Elle souligne là, ce qui était admis de manière constante, l'absence d'obligation dans le chef du crédité de faire usage des fonds mis à sa disposition mais un droit d'en faire usage [26].

Le critère « liberté de prélever » apparaît dès lors inapproprié, et ce d'autant qu'un créancier est, en règle, libre d'exercer ou non le droit que lui confère une convention [27]. Ce langage inapproprié n'est cependant pas sans incidence car il induit l'idée que le crédité aurait une liberté absolue [28] en sorte qu'il ne pourrait y avoir d'ouverture de crédit sans celle-ci.

On relèvera enfin que la « liberté de prélever » est une notion qui est totalement étrangère au contrat de prêt. Dans le contrat de prêt, une telle liberté n'existe pas et ne se conçoit même pas puisque s'il n'y a pas de remise de la chose prêtée, il n'y a tout simplement pas de contrat. Au regard du prêt, il y a dès lors quelque chose d'incongru à examiner s'il y a ou non une « liberté de prélever » ou si cette liberté, bien qu'elle existe, n'est pas « réelle » car limitée.

9.Obligation de mettre à disposition et droit corrélatif de prélever. Création de la pratique, le contrat d'ouverture de crédit est entièrement soumis aux règles et principes gouvernant les obligations contractuelles, dont l'autonomie de la volonté. Rien n'interdit donc aux parties de modaliser, comme elles le souhaitent, l'obligation pesant sur le créditeur et, corrélativement, le droit dont dispose le crédité.

On n'aperçoit dès lors pas ce qui, en application du droit commun des contrats auquel l'ouverture de crédit est intégralement soumise, empêche les parties de convenir que l'obligation du créditeur n'existera que pendant un certain temps [29], qu'elle ne sera exécutable qu'après constitution de sûreté ou que pour la réalisation d'un projet déterminé.

Certes, les droits du créancier (le crédité) en seront impactés. Mais aucun créancier ne peut demander à son débiteur autre chose que ce à quoi il s'est obligé dans les conditions dans lesquelles il s'est obligé.

10.Conclusion. Il résulte de ce qui précède que le critère de la « liberté de prélever » pour distinguer le contrat de prêt de l'ouverture de crédit n'apparaît pas pertinent.

Ce qui importe en réalité est de savoir si les parties ont entendu s'obliger irrévocablement dès la conclusion de la convention [30]. Si tel est bien le cas, la remise différée des fonds ne peut que conduire à écarter la qualification de prêt.

Le tribunal ne peut être suivi lorsqu'il décide que le contrat conclu entre la banque et sa cliente doit être qualifié d'ouverture de crédit parce que le crédité ne disposerait pas d'une « réelle » liberté de prélèvement aux motifs que la convention prévoit un délai de prélèvement, qu'elle lie l'exécution par le créditeur de son obligation à la constitution de sûretés ou encore qu'elle n'est pas réutilisable.

Au contraire, le simple constat de l'existence d'une liberté de prélever, fut-elle réduite, devait conduire le tribunal à qualifier le contrat d'ouverture de crédit.

André-Pierre André-Dumont

Avocat, Maître de conférences à l'U.C.L.

[1] Sur cette question, voy. not. Cass., 24 novembre 2016, J.T., 2016, p. 298; L. Frankignoul, « Indemnité et remboursement anticipé d'un prêt à intérêt », J.T., 2016, p. 292; J.-P. Buyle et T. Metzger, « L'indemnité de remploi en matière de prêt à intérêt » (note sous Cass., 24 novembre 2016 (à paraître)).
[2] On peut également relever que l'arrêt de 2006 fait référence à la contestation exclue par les parties, ce que ne faisait pas l'arrêt de 2005. Sur la portée à donner à la formule, voy. J.-F. Van Drooghenbroeck, « Le juge et le contrat », D.C., 2007, p. 605, nos 24 à 33.
[3] Cass., 16 mars 2006, C.0240267.N, www.juridat.be. Depuis lors, la règle est réaffirmée dans des termes qui peuvent cependant varier (voy. not. Cass., 14 décembre 2012, J.T., 2013, p. 480; Cass., 31 octobre 2013, C.13.0005.N, www.juridat.be; Cass., 3 décembre 2015, C.15.0210.N, www.juridat.be; Cass., 22 janvier 2016, C.15.0259.F, www.juridat.be).
[4] Cass., 17 décembre 2007, S.06.0109.F, www.juridat.be. Dans un arrêt du 9 juin 2008 (J.L.M.B., 2008, p. 1824), la Cour confirme cette solution mais en utilisant une formule « positive »: « Lorsque les éléments soumis à son appréciation permettent d'exclure la qualification donnée par les parties à la convention qu'elles ont conclue, le juge du fond peut y substituer une qualification différente. » La formule « négative » est à nouveau utilisé par la Cour dans son arrêt du 23 mars 2009 (S.08.0136.F, www.juridat.be), ou dans un arrêt du 10 octrobre 2011 (Pas., 2011, I, n° 536).
[5] Il importe à cet égard peu que le contrat soit dans le chef du crédité un contrat d'adhésion. Par son adhésion au contrat, celui-ci a marqué son accord sur celui-ci, dans toutes ses clauses.
[6] P.  Wery, Droit des obligations, vol 1, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 410, n° 434. Dans l'avant-projet portant insertion du Livre VI « Les obligations » dans le nouveau Code civil publié sur le site du Ministère de la Justice, l'article 71 consacre en la renforçant cette solution: « La qualification donnée par les parties ne peut être écartée que lorsqu'elle est incompatible avec les clauses de celui-ci ou avec les règles impératives ou d'ordre public ».
[7] P. Wery, Droit des obligations, vol 1, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 410, n° 435. En ce sens, P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations, t. I, Bruxelles, Bruylant, 2010, p. 623, n° 408; Cass., 28 avril 2003, J.T.T., 2003, p. 261; Cass., 17 décembre 2007, S.06.0109.F, www.juridat.be; Cass., 9 juin 2008, J.L.M.B., 2008, p. 1824; Cass., 23 mars 2009, S.08.0136.F, www.juridat.be; Cass., 10 octobre 2011, S.10.0185.F, www.juridat.be; C. trav. Anvers, 23 novembre 1989, Pas., 1990, II, p. 110; Comm. Liège (div. Namur), 15 mars 2016, inédit, A/15/00410.
[8] P.-A. Foriers, « Le droit commun des intermédiaires commerciaux: courtiers, commissionnaires, agents », in Les intermédiaires commerciaux, Bruxelles, Ed. du Jeune Barreau, 1990, p. 37.
[9] Voy. not. F. Laurent, Principes de droit civil français, t. 26, Bruxelles, Bruylant, 1876, p. 501, n° 486; L. Fredericq, Traité de droit commercial belge, t. IV, Gand, Feycher, 1952, p. 271, n° 164; H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. V, Bruxelles, Bruylant, 1975, p. 115, n° 109; J. Van Ryn et J. Heenen, Principes de droit commercial, t. IV, Bruxelles, Bruylant, 1988, p. 403, n° 527; J. Demblon, « Honoraires », Rép. not., t. XI, Bruxelles, Bruylant, 1995, p. 390, n° 595-1; J. Cattaruzza, « Le crédit bancaire », Guide juridique de l'entreprise, Livre 45, Waterloo, Kluwer, p. 12, n° 060; J.-F. Romain, « Le contrat de prêt à intérêt en matière bancaire », in Liber amicorum A. Bruyneel, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 309, n° 3.1.; D. Blommaert, « Les opérations de crédit », in Droit bancaire et financier, T.P.D.C., Kluwer, 2016, p. 355, n° 416; M.-D. Weinberger, « Funding loss … in translation », D.B.F., 2014/I-II, p. 16, n° 35; D. Verhaegen et D. Purnal, « De vervroegde terugbetaling van commerciële kredieten: de « funding loss »-vergoeding revisited », in Liber amicorum A. Cuypers, Bruxelles, Larcier, 2009, p. 321, n° 38; G.-L. Ballon, « Over de kwalificatie als lening van een kredietopening t.v.v. een onderneming », D.A.O.R., 2016/4, p. 90, n° 2; P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations, t. I, Bruxelles, Bruylant, 2010, p. 129, n° 67; Comp.: B. Du Laing, (Geld)lening en krediet(opening) - Theoretische gronslagen en praktishe gevolgen van de verbruiklening van geld op interest als gemeenrechtelijke onmiddellijke thesauriekredietovereenkomst, Bruges, die Keure, 2005; C. Biquet-Mathieu, « La législation sur le prêt à intérêt », Chroniques notariales, n° 59, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 184, n° 231. Ces deux auteurs plaident pour l'abandon du caractère réel du prêt qu'ils jugent à notre époque inutile.
[10] Voy. not. C.C., 7 août 2013.
[11] Art. 1892 C. civ.
[12] F. Laurent, Principes de droit civil français, t. 15, Bruxelles, Bruylant, 1876, p. 501, n° 445; J. Cattaruzza, « Le crédit bancaire », Guide juridique de l'entreprise, Livre 45, Waterloo, Kluwer, 2015, p. 12, n° 060; H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. V, Bruxelles, Bruylant, 1975, p. 115, n° 109.
[13] J. Heenen et A. Bruyneel, Droit bancaire et boursier, Ed. techniques juris-classeur, Paris, pp. 20-21. Pour des variantes de la définition, voy. égal., J. Van Ryn et J. Heenen, Principes de droit commercial, t. IV, Bruxelles, Bruylant, 1988, p. 403, n° 526; F. Laurent, Principes de droit civil français, t. 30, Bruxelles, Bruylant, 1878, p. 493, n° 528; J. Cattaruzza, « Le crédit bancaire », Guide juridique de l'entreprise, Livre 45, Waterloo, Kluwer, 2015, p. 12, n° 070. Les quelques variantes de la définition de l'ouverture de crédits s'explique par la multiplicité des situations que ce contrat permet d'appréhender. Cette multiplicité est sans doute à l'origine de la réserve du législateur à « fixer en des règles définitives une institution mouvante » (A. Dieryck, Les ouvertures de crédits, Bruxelles, Bruylant, 1945, p. 6, n° 1).
[14] A. Dieryck, Les ouvertures de crédits, Bruxelles, Bruylant, 1945, p. 8, n° 4.
[15] Sur cette notion, voy., L. Cornelis, « Mal aimé, mal armé: l'ordre public en droit privé » (note sous Cass., 30 janvier 2015), R.C.J.B., 2017, pp. 1190-1226.
[16] F. Laurent, Principes de droit civil français, t. 15, Bruxelles, Bruylant, 1876, p. 501, n° 445. Voy. égal. H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. V, Bruxelles, Bruylant, 1975, p. 126, n° 117.
[17] F. Laurent, Principes de droit civil français, t. 15, Bruxelles, Bruylant, 1876, p. 501, n° 445. Cette exigence est commune et essentielle à tous les contrats réels. Ainsi, il ne peut y avoir de don manuel si le donataire n'a pas la possession réelle de la chose (F. Laurent, Principes de droit civil français, t. 12, Bruxelles, Bruylant, 1874, p. 347, n° 277. Pour les dons manuels, voy. P. Moreau, Les libéralités et les successions, Bruxelles, Larcier, 2016, p. 24, n° 9).
[18] L. Fredericq, Traité de droit commercial belge, t. IV, Gand, Feycher, 1952, p. 271, n° 164. A défaut, il n'y a tout simplement pas de contrat.
[19] Voy. C. Alter et Van Muylem, « Article 1907bis du Code civil et (re)qualification de l'ouverture de crédit » (obs. sous Comm. Charleroi, 11 octobre 2013), R.D.C., 2015, p. 194, n° 6; J. Cattaruzza, « L'indemnité de remploi au coeur des débats », J.T., 2013, p. 721, n° 2 (qui relève la difficulté et indique que certains tentent de la résoudre en ayant recours à la notion de promesse de prêt). La justification donnée à la nécessité d'une « appréciation souple » de la tradition est purement romantique et repose sur l'idée que le contrat nommé qu'est le prêt devrait nécessairement être utilisé dans la pratique bancaire. Rien n'est moins vrai. Le fait que le contrat soit nommé signifie simplement que ce contrat est régi pas les règles établies pour lui par le Code civil et ensuite par celles applicables à toutes les obligations contractuelles. En revanche, les parties ne sont nullement tenues de recourir à contrat nommé, spécialement si ce contrat ne répond pas à leurs besoins. Il existe d'ailleurs plusieurs contrats nommés qui sont tombés en désuétude, le cas échéant, de manière temporaire. Songeons p. ex. à l'antichrèse. Faut-il dès lors s'émouvoir si le prêt disparaît ou a disparu de la pratique bancaire? Certainement pas! C'est tout simplement qu'il ne répond pas aux besoins, que ce soit des clients ou de la banque.
[20] C. Biquet-Mathieu, « Crédit hypothécaire et crédit d'investissement. Indemnités, frais et pénalités », Le crédit hypothécaire, Limal, Anthemis, 2015, p. 114, n° 9.
[21] Ou plus précisément, les effets juridiques recherchés ne peuvent être ceux d'un contrat de prêt. Certains ont tenté de voir dans cet échange de consentement une promesse de prêt (H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. V, Bruxelles, Bruylant, 1975, p. 126, n° 117). De Page suit en cela Laurent qui enseignait déjà que « ce n'est pas un contrat de prêt puisqu'il n'y a pas de tradition; ce n'est pas un contrat nommé, c'est un contrat innomé qui donne une action au créancier, le futur emprunteur, contre le débiteur, le futur prêteur  » (F. Laurent, Principes de droit civil français, t. 15, Bruxelles, Bruylant, 1876, p. 501, n° 445). Cette thèse, qui s'inscrit dans une analyse parfois défendue de l'ouverture de crédit comme une simple promesse de prêt suivie, lorsque la tradition a lieu, d'un prêt, ne peut être retenue en ce qu'elle est totalement artificielle. Elle suppose en effet que les parties ont voulu conclure deux contrats distincts (une promesse de prêt et ensuite un prêt) faisant naître des obligations différentes (conclure un autre contrat versus rembourser l'argent prêté), ce qui suppose deux échanges de consentement (un pour chaque contrat). L'existence de ces deux contrats successifs (Cass., 25 octobre 1973, Pas., 1973, I, p. 212) implique également qu'une analyse différenciée soit réalisée en ce qui concerne la validité des consentements. On aperçoit immédiatement que telle n'est en règle pas la volonté des parties et relève de la fiction comme l'avait déjà démontré madame Stranart en 1976 (A.-M. Stranart, « Le gage, contrat réel: une fiction », J.T., 1976, pp. 237-243. En ce sens, voy. D. Philippe, « A propos de l'indemnité de remploi. Note sous Bruxelles, 13 mai 2016 et Mons, 25 avril 2016 », D.A.O.R., 2016/3, p. 42). Madame Stranart ajoutait en outre que « la reconnaissance de la force obligatoire de pareille promesse constitue la négation même de la notion de contrat réel » (A.-M. Stranart, « Le gage, contrat réel: une fiction », J.T., 1976, pp. 237-243). Les limites du recours à la promesse de prêt sont par ailleurs connues: elle ne permet pas d'obtenir que le prêteur qui refuserait de délivrer les fonds promis, soit condamné à s'exécuter en nature (C. Biquet-Mathieu, « Le droit des obligations et du crédit », Chron. not., vol. 59, 2014, p. 186, n° 232). Dans sa nouvelle édition, De Page souligne lui aussi le caractère artificiel du recours à la promesse de prêt, ceci ne correspondant pas à la volonté des parties (H. De Page, Traîté élémentaire de droit civil belge, T. III/4, Bruxelles, Bruylant, 2017, p. 210, n° 196).
[22] P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations, t. I, Bruxelles, Bruylant, 2010, p. 129, n° 67: « La nature réelle du contrat a une incidence lorsqu'il s'agit de déterminer le moment exact de la formation du contrat, par exemple dans le cas d'un gage pour déterminer les conditions de son opposabilité aux tiers ou de sa validité, notamment s'il est conclu pendant la période suspecte précédant la faillite. »
[23] P. Wery, Droits des obligations, vol. I, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 221, n° 218.
[24] Il est douteux qu'il soit possible de qualifier de manière différente l'ouverture de crédit et la forme d'utilisation, soit en l'espèce un crédit d'investissement. Comment en effet admettre que ce qui n'est qu'une forme d'utilisation de l'ouverture de crédit, puisse recevoir une qualification propre, identique ou distincte de l'ouverture de crédit elle-même dont elle n'est que l'exécution? Certes, l'ouverture de crédit peut être un contrat-cadre reprenant l'accord de principe de la banque sur une mise à disposition, dont les modalités précises devront cependant être précisées ultérieurement (J. Cattaruzza, « Le crédit bancaire », Guide juridique de l'entreprise, Livre 45, Waterloo, Kluwer, 2015, p. 15, n° 100). Il n'en demeure pas moins essentiel de constater que le créditeur est d'ores et déjà engagé à cette mise à disposition. Et s'il ne s'agit que d'arrêter, au travers de ce crédit-cadre, « les clauses et conditions destinées à régir, de façon générale, leurs relations contractuelles et de constituer les sûretés garantissant l'ensemble des engagements contractés par le crédité dans le cadre de l'ouverture de crédit » (J. Cattaruzza, « Le crédit bancaire », Guide juridique de l'entreprise, Livre 45, Waterloo, Kluwer, 2015, p. 15, n° 100), n'est-ce pas méconnaître l'intention des parties que d'attribuer à chaque utilisation une qualification distincte alors même que les parties ont conçu leur relation comme s'inscrivant dans un seul contrat? De surcroît, quel est le sens de cette distinction lorsque le contrat-cadre et le contrat d'application sont conclus le même jour et contenus dans le même instrumentum?
[25] R. Henrion, Aspects juridiques et économiques du crédit à court terme, Bruxelles, 1959, p. 178, n° 129; M. Falloise, Traité des ouvertures de crédit, Marcel Nierstrasz, Liège, 1891, p. 81, n° 89; L. Fredericq, Traité de droit commercial belge, t. IV, Gand, Feycher, 1952, p. 283, n° 173. Monsieur Fredericq souligne que le fait que le crédité use ou n'use pas du droit qui lui est offert par l'ouverture de crédit « ne fait pas obstacle à la possibilité de prévoir la débition conventionnelle d'une commission spéciale pour 'non-utilisation' ».
[26] La Cour de cassation a d'ailleurs décidé que l'ouverture de crédit faisait naître « un droit personnel de faire usage, à sa demande, de la ligne de crédit accordée par la convention de crédit » (Cass., 26 novembre 2009, D.B.F., 2010/2, p. 100, note D. Van der Mosen et J.-P. Buyle).
[27] On relèvera d'ailleurs que les auteurs classiques (M. Falloise, Traité des ouvertures de crédit, Liège, Marcel Nierstrasz, 1891; A. Dieryck, Les ouvertures de crédits, Bruxelles, Bruylant, 1945) parfois cités à l'appui de la consécration de cette liberté (cf. C. Alter et L. Van Muylem, « Article 1907bis du Code civil et (re)qualification de l'ouverture de crédit » (obs. sous Comm. Charleroi, 11 octobre 2013), R.D.C., 2015, p. 194, n° 6) insistent au contraire sur l'obligation pesant sur le créditeur. C'est cette obligation qui est au coeur de l'ouverture de crédit.
[28] M.-D. Weinberger, « Funding loss … in translation », D.B.F., 2014/I-II, p. 22, n° 51. Faire de « la liberté » de prélever un absolu, aboutit à un paradoxe. Alors que le critère qui est censé permettre de déterminer la volonté réelle des parties, il conduit en réalité à ne pas la rechercher. Rien n'interdit en effet que les parties aient voulu, dans une ouverture de crédit, encadrer cette « liberté ».
[29] N'est-ce pas là assortir l'obligation du créditeur d'un terme extinctif?
[30] On notera que dans deux vieux arrêts, le fait ou non de s'être irrévocablement obligé a permis à la Cour de cassation d'apprécier la validité ou non d'une hypothèque (Cass., 12 décembre 1844, Pas., 1845, I, p. 78; Cass., 1er février 1855, Pas, 1855, I, p. 76).