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Actualité : Cour de justice de l'Union européenne, 17/12/2015, R.D.C.-T.B.H., 2016/3, p. 323-324

Cour de justice de l'Union européenne 17 décembre 2015

Imtech Marine Belgium

Affaire: C-300/14
DROIT JUDICIAIRE EUROPÉEN ET INTERNATIONAL
Titre exécutoire européen pour les créances non contestées - Règlement (CE) n° 805/2004 - Conditions de la certification - Droits du débiteur - Réexamen de la décision


EUROPEES EN INTERNATIONAAL GERECHTELIJK RECHT
Europese executoriale titel - Verordening nr. 805/2004 - Vereisten voor certificatie - Nieuw onderzoek van de beslissing


Dans l'arrêt du 17 décembre 2015, la Cour de justice a clarifié certaines questions relatives à la certification d'un jugement rendu en Belgique en tant que titre exécutoire européen au sens du règlement (CE) n° 805/2004 du 21 avril 2004, portant création d'un titre exécutoire européen pour les créances incontestées. Ces questions ont pour toile de fond l'absence en droit belge des dispositions mettant en oeuvre ledit règlement, notamment, en ce qui concerne l'instauration d'une procédure de réexamen conforme aux exigences établies dans son article 19, selon lequel ce réexamen doit être possible pour le destinataire d'un titre exécutoire européen, notamment, lorsque la signification ou la notification de l'acte introductif de l'instance n'est pas intervenue en temps utile pour lui permettre de préparer sa défense et lorsque le débiteur a été empêché de contester la créance pour des raisons de force majeure ou par suite de circonstances extraordinaires. Cette carence législative est source d'insécurité juridique, dans la mesure où la question de savoir si les procédures d'opposition et d'appel, telles qu'elles sont organisées, respectivement, par les articles 1047 et suivants et 1050 et suivants du Code judiciaire belge sont conformes aux exigences de l'article 19 du règlement (CE) n° 805/2004, fait l'objet des discussions doctrinales. Par conséquent, jusqu'à présent, malgré l'effet direct du règlement, les tribunaux belges se sont montrés peu disposés à certifier leurs jugements rendus par défaut en tant que titres exécutoires européens.

L'affaire au principal constitue une illustration de cette réticence. En effet, saisi pas une société belge Imtech Marine d'une demande visant à condamner le cocontractant de cette dernière au paiement des sommes dues au titre des contrats exécutés, le tribunal de commerce d'Anvers, statuant dans les conditions de l'application du règlement n° 805/2004, a fait droit à l'action de la demanderesse tout en refusant de certifier son jugement en tant que titre exécutoire européen au sens dudit règlement. Imtech Marine a fait appel devant la cour d'appel d'Anvers qui a déféré à la Cour une série des questions préjudicielles.

En réponse à ces questions la Cour a dit pour droit, en premier lieu, que le règlement (CE) n° 805/2004 n'impose pas aux Etats membres d'instaurer, en droit interne, une procédure spécifique de réexamen telle que visée à l'article 19 de ce règlement. Il impose, toutefois, au juge national, en absence d'une procédure spécifique instaurée par législateur, d'examiner la question de savoir si le droit interne permet effectivement et sans exception de demander un réexamen de la décision en cause dans les hypothèses prévues à son article 19.

En second lieu, la Cour s'est penchée sur l'interprétation de cette disposition afin de donner à la juridiction de renvoi des indications permettant de déterminer si les procédures d'opposition et d'appel existant en droit belge sont conformes aux exigences qu'elle pose. A cet égard, la Cour a constaté que les voies des recours internes doivent permettre un réexamen complet de la décision en droit et en fait. Elles doivent, en outre, permettre au débiteur de demander un tel réexamen au-delà des délais ordinaires prévus par le droit national pour former opposition ou appel de la décision. Tel est le cas, notamment, si le droit national prévoit la possibilité de proroger ces délais, de telle sorte que ceux-ci courent à nouveau, au plus tôt, à compter du jour où le débiteur a effectivement eu la possibilité de prendre connaissance du contenu de la décision ou d'exercer un recours. La Cour a précisé, également qu'afin de satisfaire, spécifiquement, aux exigences de l'article 19, 1., sous b), du règlement n° 805/2004, le droit interne doit permettre une telle prorogation des délais de recours tant en cas de force majeure qu'en présence de circonstances extraordinaires indépendantes de la volonté du débiteur, et sans qu'il y ait eu faute de sa part.

En troisième lieu, la Cour a précisé que l'acte de certification d'un jugement en tant que titre exécutoire européen exige un examen juridictionnel des conditions prévues par le règlement n° 805/2000. En revanche, l'acte formel de délivrance du certificat qui est visé à l'article 9 dudit règlement peut être confié au greffier.