Article

Tribunal de commerce Bruxelles, 22/11/2012, R.D.C.-T.B.H., 2016/3, p. 259-263

Tribunal de commerce de Bruxelles 22 novembre 2012

INSTITUTIONS ET INTERMÉDIAIRES FINANCIERS
Gestion de fortune et conseiller en placements - « Swap » de taux d'intérêts (IRS) - MiFID - Conseil en investissement - Erreur - « Suitability test » - Sanction - Nullité
Le client qui a pris l'initiative de demander à sa banque un swap d'intérêts (IRS), qui en a décrit, par e-mail, le fonctionnement et qui en a payé sans réserve la première échéance, ne peut soutenir qu'il a été la victime d'une erreur sur la substance, au sens de l'article 1110 du Code civil.
Si la banque a fourni un conseil en investissement relativement à un IRS sans procéder, au « suitability test » imposé par l'article 27, § 4, de la loi du 2 août 2002 (transposant la directive MiFID en droit belge), la sanction est la nullité du contrat IRS, sans qu'il y ait lieu de s'interroger sur l'adéquation de cet instrument financier au profil du client.
FINANCIËLE INSTELLINGEN EN TUSSENPERSONEN
Vermogensbeheer en beleggingsadviseurs - “Intrest rate swap” (IRS) - MiFID - Beleggingsadvies - Dwaling - “Suitability test” - Sanctie - Nietigheid
De klant die het initiatief genomen heeft een intrest rate swapcontract (IRS) aan zijn bank te vragen, die de werking ervan, in een e-mail, beschreven heeft en die bij de eerste vervaldag ervan betaalde zonder voorbehoud, kan niet beweren dat hij het slachtoffer was van een substantiële dwaling (nl. omtrent de zelfstandigheid van de zaak), in de zin van artikel 1110 van het Burgerlijk Wetboek.
Als de bank een beleggingsadvies over een IRS heeft verstrekt zonder de “suitability test” uit te voeren die door artikel 27, § 4 van de wet van 2 augustus 2002 (die MiFID in de Belgische wetgeving omzet) is opgelegd, is de sanctie ervan de nietigheid van de overeenkomst van het IRS-contract, zonder dat de geschiktheid van dat financieel instrument met het profiel van de klant moet worden onderzocht.

CBC Banque SA / Maison de repos La passerinette SA

Siég.: F. Jacques de Dixmude (juge), A. Dufays (juge consulaire) et C. Bleiman (juge consulaire suppléant)
Pl.: Mes V. Marquette et L. Frankignoul loco L. Orban
Affaire: A/11/04845

(…)

1. Objet des demandes

Au terme de ses dernières conclusions, la demanderesse poursuit la condamnation de la défenderesse à exécuter le contrat IRS conclu entre parties le 18 mars 2008;

Elle demande en outre la condamnation de la défenderesse aux dépens et un jugement exécutoire;

Sur reconvention, la défenderesse demande que l'annulation de la convention IRS du 18 mars 2008 soit prononcée;

Elle postule également la condamnation de la demanderesse à lui rembourser la somme de 1 EUR provisionnel, à majorer des intérêts;

Elle demande enfin le paiement des dépens et le renvoi de la cause au rôle pour le surplus.

2. Contexte du litige

La défenderesse exploite une maison de repos;

En septembre 2007, elle a formé le projet d'acheter un immeuble afin d'agrandir ses installations;

Le 18 mars 2008, la défenderesse a conclu avec la CBC Banque, actuelle demanderesse, un contrat IRS (Interest Rate Swap), avant de conclure le 31 mars 2008 un contrat de crédit prévoyant d'une part un crédit d'investissement de 300.000 EUR, et d'autre part une ligne de crédit « roll over » de 2.330.000 EUR;

Le 9 avril 2008, les parties ont signé les conditions générales (convention-cadre ISDA) régissant le contrat IRS;

Il était convenu entre parties que le contrat IRS entrerait en vigueur le 15 mai 2010 pour une durée de 15 ans; la première échéance de remboursement du contrat de crédit « roll over » était également fixée au 15 mai 2010;

L'opération immobilière projetée par la défenderesse n'a en définitive pas été réalisée; les conditions suspensives affectant la convention de crédit n'ayant pas été satisfaites, la défenderesse a renoncé aux contrats d'investissement et de « roll over »;

Cette renonciation a été confirmée par un courriel de la défenderesse du 19 mars 2010; dans ce même courriel, la défenderesse a écrit ce qui suit : « Concernant la couverture de taux, voudriez-vous bien me confirmer qu'il s'agit bien d'un produit dont la société est propriétaire et que cette couverture de taux pourrait être utilisée pour une autre opération financière, quelle que soit l'institution bancaire?

Si j'ai bien compris le mécanisme de ce produit, la situation serait ainsi:

tant que nous en sommes propriétaire, nous devons trimestriellement payer une somme correspondant à la différence entre le taux couvert et le taux 'euribor'. Merci de me confirmer ces points.

Bien à vous. »

Cette confirmation a été donnée par la demanderesse par lettre du 25 mars 2010 en ces termes: « (...) Nous comprenons de votre mail que vous désirez maintenir cette opération indépendamment de la suppression du contrat de crédit qu'il devait couvrir. Ce faisant, les termes du contrat d'échange de taux resteront d'application comme vous le synthétisez dans votre mail susmentionné. (…) »

En août 2010, la première échéance trimestrielle du contrat IRS, d'un montant de 22.775,56 EUR, est venue à échéance et a été payée sans discussion par la défenderesse; Ensuite, par courrier du 17 septembre 2010, le conseil de la défenderesse émettra des réserves quant à ce paiement;

Les parties ont par la suite échangé plusieurs courriers, la défenderesse soutenant qu'elle devrait être déliée sans frais du contrat IRS, tandis que la demanderesse en a réclamé l'exécution;

Aucune solution amiable ne pouvant être trouvée, la cause a été introduite par procès-verbal de comparution volontaire daté du 9 juin 2011;

Dans l'attente du jugement, la défenderesse a repris ses paiements des échéances trimestrielles, tout en faisant valoir qu'elle effectuait les paiements sans reconnaissance préjudiciable.

3. Discussion

La demanderesse poursuit la condamnation de la défenderesse à exécuter le contrat IRS conclu entre parties le 18 mars 2008;

La défenderesse repousse la demande et conclut à son non-fondement pour les motifs suivants:

- elle n'aurait pas reçu de la demanderesse une information claire, complète et précise lui permettant de conclure le contrat en parfaite connaissance de cause; elle en déduit que les montants payés doivent lui être restitués car son consentement aurait été vicié dès la signature du contrat;

- la demanderesse aurait violé l'article 27, § 4 à 6, de la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, ce qui justifierait l'annulation de la convention;

En conséquence, la défenderesse a introduit une demande reconventionnelle tendant à l'annulation du contrat litigieux et au remboursement des sommes payées à la demanderesse.

3.A. Quant au défaut d'information

La défenderesse fait grief à la demanderesse de ne pas lui avoir fourni des informations correctes, claires et non trompeuses sur le produit proposé, ce qui aurait affecté son consentement, celui-ci n'ayant pas été suffisamment éclairé sur les éléments déterminants de la convention, au moment de sa conclusion;

Elle en déduit que le contrat litigieux doit être annulé en raison de l'erreur ayant vicié son consentement;

En vertu de l'article 1110 du Code civil, l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet;

La défenderesse soutient qu'elle n'aurait pas été informée des « éléments déterminants ” de la convention, mais elle ne détaille ni n'établit cette affirmation;

En l'espèce, les parties ont conclu un contrat d'échange de taux et c'est bien ce type de convention que la défenderesse recherchait et voulait conclure; la défenderesse ne conteste pas la pièce 7 de la demanderesse, étant un e-mail interne de la demanderesse dans lequel le directeur de l'agence CBC de Fléron écrit à sa collègue: « Pouvez-vous établir la LOC le plus rapidement possible? Monsieur Lenelle souhaite en effet que l'on puisse bloquer les taux dès maintenant »; il est ainsi démontré que la défenderesse voulait conclure un contrat permettant de bloquer les taux d'intérêts, ce qui est le but d'un contrat IRS;

En outre, par e-mail du 19 mars 2010, la défenderesse a écrit: « (...) Si j'ai bien compris le mécanisme de ce produit, la situation serait ainsi:

Tant que nous en sommes propriétaire, nous devons trimestriellement payer une somme correspondant à la différence entre le taux couvert et le taux 'euribor'. (...) », ce qui était bien l'effet du contrat IRS conclu entre parties;

Il peut encore être relevé que la première échéance contractuelle a été payée par la défenderesse sans aucune discussion, ce qui démontre que, in tempore non suspecto, la défenderesse connaissait la nature et la portée de son engagement contractuel;

La défenderesse ne peut dès lors soutenir qu'elle aurait été la victime d'une erreur sur la substance du contrat conclu le 18 mars 2008; le consentement de la défenderesse n'a pas été vicié lors de la conclusion du contrat.

3.B. Quant au respect de la loi du 2 août 2002

La défenderesse reproche d'autre part à la demanderesse de n'avoir pas respecté les obligations pesant sur elle en application des règles issues de la loi belge du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, et de la directive « MiFID »;

En particulier, elle constate que la demanderesse lui a fourni un service de conseil en investissement en lui proposant le contrat IRS, et elle lui fait grief de n'avoir pas procédé au « suitability test » imposé par l'article 27, § 4, de la loi précitée, avant de conclure la convention;

La demanderesse conteste la fourniture d'un tel service; elle se réfère aux termes du contrat, lequel dispose: [traduction] « CBC Bank a conclu cette transaction sans donner aucun conseil en investissement. CBC Bank vous a informé que l'information que vous nous avez fournie n'était pas suffisante pour déterminer si cette transaction était appropriée pour vous. »;

La défenderesse soutient que cette dénégation contractuelle (« disclaimer ») ne peut recevoir aucun effet, dans la mesure où la demanderesse est tenue au respect des règles impératives de la loi de 2002 dès qu'elle se trouve dans leur champ d'application;

Il convient dès lors d'examiner préalablement la nature du service presté par la demanderesse, afin de déterminer dans quelle mesure les règles précitées trouvent à s'appliquer et quel sort réserver au « disclaimer » invoqué par la demanderesse;

Le conseil en investissement est défini par l'article 2, 41°, de la loi du 2 août 2002, renvoyant à l'article 46, 9°, de la loi du 8 avril 1995; il s'agit de « la fourniture de recommandations personnalisées à un client, soit à sa demande, soit à l'initiative de l'entreprise d'investissement, en ce qui concerne une ou plusieurs transactions portant sur des instruments financiers »;

L'article 46, 10°, de la loi du 8 avril 1995 dispose quant à lui qu'une recommandation personnalisée est « une recommandation qui est présentée comme adaptée à cette personne, ou est fondée sur l'examen de la situation propre à cette personne, et qui recommande la réalisation d'une opération relevant des catégories suivantes:

- l'achat, (...) d'un instrument financier particulier;

- (...) »;

Enfin, l'instrument financier est quant à lui défini par l'article 2, 1°, d), de la loi du 2 août 2002 comme « tout instrument appartenant à l'une des catégories suivantes: les contrats d'option, contrats à terme, contrats d'échange, accords de taux futurs et tous autres contrats dérivés relatifs à des valeurs mobilières, des monnaies, des taux d'intérêts (...) »;

Le contrat IRS litigieux est un instrument financier au sens de l'article précité; ce point n'est pas contesté par les parties;

La demanderesse soutient en revanche qu'il ne peut être considéré qu'elle aurait fourni une recommandation à la défenderesse, et encore moins une recommandation personnalisée, en sorte qu'il ne peut être question en l'espèce de conseil en investissement; la demanderesse plaide qu'elle a fourni un service d'exécution d'ordres, en mettant en place, à la demande de la défenderesse, le contrat IRS avec les termes souhaités;

Selon l'article 46, 6°, de la loi du 6 avril 1995, l'exécution d'ordres pour le compte de client est définie comme « le fait de conclure des accords d'achat ou de vente d'un ou de plusieurs instruments financiers pour le compte de clients »;

Le service fourni en l'espèce par la demanderesse n'entre pas dans cette définition; elle n'a rien acheté ou vendu pour le compte de la défenderesse; la demanderesse n'a pas exécuté un ordre de la défenderesse;

Vainement, la demanderesse tente de démontrer qu'elle n'aurait joué qu'un rôle de simple exécutante d'ordres qui lui auraient été donnés par la défenderesse; ainsi, elle écrit en conclusions qu'elle a « mis en place le contrat IRS avec les termes souhaités » ou encore qu'elle a « uniquement structuré une opération conformément aux termes qui avaient été posés par sa cliente »;

La demanderesse se défend d'avoir fourni une recommandation personnalisée à la défenderesse; il convient toutefois de relever qu'elle a conclu un contrat de crédit et un contrat d'échange de taux avec sa cliente, selon des termes contractuels précis (montants empruntés, modalités de remboursement, dates de prise de cours, durée des contrats, hauteur des taux, hauteur du montant notionnel du contrat IRS, ...); elle ne démontre pas que la défenderesse se serait présentée chez elle en lui fournissant le contrat IRS déjà intégralement rédigé, sans qu'aucune négociation des éléments précités n'ait pu intervenir;

Au contraire, il ressort de l'unique pièce des dossiers des parties se situant dans le temps avant la signature des contrats, que des négociations ont bien eu lieu entre elles: « J'ai rencontré monsieur Lenelle de la SA Passerinette ce matin qui a pris la bonne décision de soumettre son projet à notre banque. Il accepte finalement toutes les conditions énoncées par le comité permanent (...) » (e-mail interne de la demanderesse du 3 mars 2008, pièce 7 de la demanderesse);

Même si la défenderesse ne conteste pas qu'elle a pris l'initiative de demander à la demanderesse la conclusion d'un contrat IRS en faisant état de ce qu'elle en avait déjà conclu un antérieurement avec une autre banque, il reste que la demanderesse ne peut prétendre qu'aucune discussion ni aucune négociation n'a précédé la conclusion du contrat IRS; ces négociations ayant conduit à la signature du contrat IRS, il faut considérer que lors de ces négociations, la demanderesse, en tant que professionnelle, a fourni ce que la loi appelle « une recommandation personnalisée » à la défenderesse, amenant cette dernière à contracter une convention IRS à des conditions précises, fixées en fonction des données du contrat de crédit, et donc fondée sur la situation propre de la défenderesse et présentée à elle comme adaptée au but qu'elle recherchait (fixer les taux);

Il se déduit de ce qui précède que le service fourni à la défenderesse par la demanderesse et consistant en la conclusion du contrat IRS était bien un service de conseil en investissement, soumis à la réglementation précitée et notamment à l'article 27, § 4, de la loi du 2 août 2002;

Dès lors, la dénégation (« disclaimer ») que la demanderesse a fait figurer dans le contrat ne peut recevoir aucune application, en ce qu'elle a pour effet d'écarter les règles impératives applicables en l'espèce; une telle initiative est du reste condamnée par l'article 17, § 3, de l'arrêté royal du 3 juin 2007: « Une entreprise réglementée s'abstient d'encourager un client ou client potentiel à ne pas fournir les informations requises en vertu de l'article 27, § 4 et 5, de la loi du 2 août 2002. »

Selon la doctrine citée par la demanderesse: « Un disclaimer inséré dans un contrat (...) énonçant que l'information recueillie auprès du client ne servira pas ou n'a pas servi comme base à une recommandation n'empêchera pas de constater le caractère personnalisé de la recommandation s'il est clair que le client a pu raisonnablement s'attendre à ce qu'elle soit basée sur l'examen de ses circonstances propres.

Rappelons encore une fois qu'en présentant une recommandation comme étant non personnalisée alors qu'en réalité elle l'est, l'intermédiaire financier violerait par ailleurs ses obligations d'agir de façon honnête et professionnelle et de ne pas communiquer d'information trompeuse. » (MiFID Questions spéciales, sous la coordination de Marc-David Weinberger, « Conseil et recherche en investissements », n° 49, p. 253);

A fortiori en va-t-il ainsi en l'espèce, la dénégation litigieuse ayant pour but d'écarter des règles de conduites impératives s'imposant à la demanderesse;

Selon l'article 27, § 4, de la loi du 2 août 2002: « Lorsqu'elle fournit du conseil en investissement ou des services de gestion de portefeuille, l'entreprise réglementée se procure auprès du client ou du client potentiel les informations nécessaires concernant ses connaissances et son expérience en matière d'investissement en rapport avec le type spécifique de produit ou de service, sa situation financière et ses objectifs d'investissement, de manière à pouvoir lui recommander les services d'investissement et les instruments financiers adéquats ou de lui fournir les services de gestion de portefeuille adéquats.

Dans les cas où une entreprise réglementée fournissant un service d'investissement relevant du conseil en investissement ou de la gestion de portefeuille n'obtient pas l'information requise en vertu de l'alinéa 1er, elle s'abstient de recommander au client ou client potentiel concerné des services d'investissement ou des instruments financiers et de lui fournir des services de gestion de portefeuille. ”;

En l'espèce, la demanderesse a revendiqué, par la dénégation contractuelle qu'elle a fait figurer dans le contrat, le fait qu'elle n'a pas recueilli auprès de la défenderesse l'information requise par l'alinéa 1er de l'article 27, § 4, précité: « CBC Bank vous a informé que l'information que vous nous avez fournie n'était pas suffisante pour déterminer si cette transaction était appropriée pour vous. »; il est dès lors établi qu'elle ne s'est pas conformée à l'obligation légale pesant sur elle en vertu de l'article 27, § 4, de la loi du 2 août 2002;

En conséquence, la demanderesse aurait dû s'abstenir de conclure le contrat IRS litigieux avec la défenderesse;

A juste titre, la défenderesse soutient que la sanction de la violation de l'article 27, § 4, précité tient dans la nullité de la convention; la demanderesse ne pouvait accepter de conclure le contrat IRS avec la défenderesse; la réparation la plus adéquate de ce manquement consiste à replacer les parties dans la position qui aurait été la leur si elles n'avaient pas contracté; il convient donc de prononcer l'annulation du contrat et d'ordonner la restitution des sommes payées;

La doctrine commentant les règles en cause en l'espèce confirme cette analyse: M.-D. Weinberger, Gestion de portefeuille et conseil en placement. Aspects contractuels et de responsabilité avant et après MiFID, Kluwer, 2008, p. 193, n° 279: « (...) il est permis de s'interroger quant aux conséquences qu'il convient de tirer de l'obligation faite aux gérants et conseillers de s'abstenir de prester leurs services s'ils ne disposent pas de l'information requise.

La règle est certainement édictée en vue de la protection des investisseurs, en raison de leur dépendance à l'égard de leur gérant ou de leur conseiller, et n'admet pas de conventions contraires, puisqu'en vertu de l'article 17, § 3, de l'arrêté royal du 3 juin 2007: 'Une entreprise réglementée s'abstient d'encourager un client ou client potentiel à ne pas fournir les informations requises en vertu de l'article 27, § 4 et 5, de la loi du 2 août 2002.'

Par conséquent, il y a lieu de considérer que la nullité relative s'impose lorsque le test est méconnu, sans préjudice d'éventuels dommages et intérêts. »; en ce sens également: F. de Patoul, « MiFID dans la pratique. Quelques réflexions au départ des décisions du Service de Médiation Banques-Crédit-Placements », Forum financier/Dr. banc. fin., Larcier, 2010/V, pp. 317 et 318: « (...) A défaut de test, la convention de service est nulle. »;

Vainement, enfin, la demanderesse tente de démontrer que le contrat litigieux était parfaitement adapté à la situation de la défenderesse; la demanderesse n'ayant pas respecté ses obligations légales, elle ne peut tenter de couvrir cette carence en soutenant l'adéquation du service presté: « Il importe peu de s'interroger sur l'adéquation du service au profil qui aurait éventuellement été établi si le client avait été interrogé (...). La loi soumet la prestation de service à la réalisation préalable du test de suitability. A défaut, la convention de service est nulle. » (F. de Patoul, o.c.);

Par ces motifs,

Le tribunal,

(…)

Statuant contradictoirement,

Reçoit les demandes, dit la demande reconventionnelle seule fondée et en conséquence,

Déboute la demanderesse de sa demande,

Prononce l'annulation de la convention IRS conclue entre parties le 18 mars 2008,

Condamne la SA CBC Banque à rembourser à la SA Maison de repos La passerinette la somme de 1 EUR provisionnel, à majorer des intérêts de retard au taux interbancaire Euribor 3 mois, majoré de 1%.

Condamne la SA CBC Banque aux dépens, liquidés pour la SA Maison de repos La passerinette à la somme de 1.320 EUR;

Renvoie la cause au rôle pour le surplus.

(…)