Cour de justice de l'Union européenne 13 mai 2015
Affaire: C-516/13 |
Saisie d'un renvoi préjudiciel par le Bundesgerichtshof, la Cour de justice de l'Union européenne a interprété, dans son arrêt du 13 mai 2015, l'article 4, 1., de la directive n° 2001/29/CE sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information.
Le contexte de l'affaire était celui d'une violation alléguée du droit exclusif de distribution d'une société de droit italien suite à la reproduction, par une autre société de droit italien, de meubles protégés par le droit d'auteur, dans le cadre d'une campagne de publicité par Internet dirigée vers l'Allemagne. Dans le cadre du litige opposant les deux sociétés, le Bundesgerichtshof a interrogé la Cour sur la question de savoir si le droit de distribution prévu à l'article 4, 1., de la directive n° 2001/29 comprend également le droit d'offrir à la vente au public l'original ou une copie d'une oeuvre protégée. En d'autres termes, demande le Bundesgerichtshof, le titulaire du droit exclusif de distribution d'une oeuvre protégée peut-il s'opposer à une offre de vente ou à une publicité concernant l'original ou une copie de cette oeuvre, quand bien même il ne serait pas établi que cette offre ou cette publicité a donné lieu à l'acquisition de l'objet protégé par un acheteur de l'Union?
La Cour va répondre par l'affirmative.
Elle rappelle tout d'abord sa jurisprudence Donner, par laquelle elle a constaté que la « distribution au public », au sens de la directive n° 2001/29/CE, se caractérise par une série d'opérations allant, à tout le moins, de la conclusion d'un contrat de vente à l'exécution de celui-ci par la livraison à un membre du public. Dans ce cadre, il n'est pas exclu, selon la Cour, que des opérations ou des actes précédant la conclusion d'un contrat de vente puissent également relever de la notion de distribution.
Dès lors, il peut y avoir atteinte au droit de distribution lorsqu'un commerçant met en vente des oeuvres protégées ou des copies de celles-ci et adresse une publicité, par son site Internet, par publipostage ou dans la presse, aux consommateurs situés sur le territoire de l'Etat membre dans lequel ces oeuvres sont protégées afin d'inciter ceux-ci à en faire l'acquisition. Dans ce contexte, il est pour la Cour sans incidence, pour qu'une atteinte au droit de distribution soit constatée, que cette publicité ne soit pas suivie du transfert de propriété de l'oeuvre protégée ou de sa copie à l'acquéreur.
La Cour en conclut donc que l'article 4, 1., de la directive n° 2001/29/CE doit être interprété « en ce sens qu'il permet à un titulaire du droit exclusif de distribution d'une oeuvre protégée de s'opposer à une offre de vente ou à une publicité ciblée concernant l'original ou une copie de cette oeuvre, quand bien même il ne serait pas établi que cette publicité a donné lieu à l'acquisition de l'objet protégé par un acheteur de l'Union, pour autant que ladite publicité incite les consommateurs de l'Etat membre dans lequel ladite oeuvre est protégée par le droit d'auteur à en faire l'acquisition ».