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La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) au regard des pratiques commerciales, R.D.C.-T.B.H., 2015/7, p. 654-665

La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) au regard des pratiques commerciales

Laurie Caucheteux [1] et Michaëla Roegiers [2]

TABLE DES MATIERES

I. Introduction

II. Concept de la responsabilité sociétale de l'entreprise 1. Codes de conduite

2. ISO 26000

3. Labels

4. Agences de notation sociétales

5. Rapportage RSE

III. Recours en cas de violation par une entreprise de sa politique RSE 1. Action en cessation A. Pratiques à l'égard des consommateurs a. Actes interdits

b. Titulaires de l'action

B. Pratiques entre entreprises a. Actes interdits

b. Titulaires de l'action

2. Action en dommages et intérêts A. Objet de l'action

B. Titulaires de l'action

IV. Applications 1. Jurisprudence américaine

2. Jurisprudence européenne (directive n° 2005/29/CE) A. Pratiques interdites en toutes circonstances visées par la liste noire

B. Pratiques déloyales trompeuses (norme semi-générale)

V. Efficacité des moyens d'action, une question de transparence

VI. Conclusion

RESUME
Nombreuses sont les entreprises qui adoptent volontairement des engagements sociétalement responsables (RSE) dans le cadre de leur pratique commerciale. Néanmoins, certaines entreprises peuvent être tentées de ne pas les respecter.
Notre contribution fournit au lecteur un aperçu des voies d'actions possibles en vue de faire cesser ou de sanctionner de telles pratiques commerciales déloyales.
SAMENVATTING
Het aantal ondernemingen die zich vrijwillig inzetten om de verplichtingen van het maatschappelijk verantwoord ondernemerschap (MVO) na te leven, neemt toe. Desalniettemin zijn sommige ondernemingen geneigd deze verplichtingen niet te eerbiedigen.
Onze bijdrage geeft de lezer een overzicht van de vorderingsmogelijkheden om zulke oneerlijke handelspraktijken te doen stoppen of te sanctioneren.
I. Introduction

Se distinguer les unes des autres sur un marché où la concurrence règne, voilà l'apanage quotidien des entreprises. Tantôt axée sur l'environnement, sur les conditions de travail ou le respect des droits de l'homme, … la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) fait maintenant partie du vocabulaire et de la stratégie de nombreuses entreprises.

Les consommateurs n'y sont pas indifférents; ils aiment acheter sociétalement responsable et sont même prêts à payer plus pour des produits issus d'entreprises adoptant une politique RSE [3].

Néanmoins, on peut craindre que les entreprises exagèrent le contenu de leurs pratiques RSE ou ne les respectent pas. Souvenons-nous de l'effondrement au Bangladesh en 2013 du bâtiment Rana Plaza qui abritait des ateliers de confection de fournisseurs de grandes marques occidentales en violation des normes sociales et de sécurité. Ces marques s'étaient pourtant engagées par leur code de conduite à respecter des conditions de travail minimales.

La législation belge propose divers moyens d'action afin d'empêcher, sinon de sanctionner, de telles pratiques commerciales déloyales ou malhonnêtes.

II. Concept de la responsabilité sociétale de l'entreprise

Le concept « Corporate Social Responsability » s'est développé dans le courant des années 1970 aux Etats-Unis. Il repose sur l'idée que l'entreprise doit servir non seulement les intérêts des actionnaires et de l'économie (Shareholders Theory) mais également le bien commun au sein de la société [4] dont elle est membre à part entière (Stakeholder Theory[5].

L'entreprise est dès lors évaluée au regard de trois types de performances: environnementales, sociales et économiques.

La Corporate Social Responsability désigne par conséquent l'ensemble des moyens par lesquels l'entreprise intègre ces dernières à la stratégie de son entreprise [6].

Il n'existe pas de définition légale de la responsabilité sociétale de l'entreprise dans la mesure où il s'agit d'un concept à contenu variable.

Traditionnellement, les engagements RSE [7] se caractérisent par une démarche volontaire de l'entreprise (soft law) et donc non contraignante (hard law).

En Belgique, le Plan d'action développé par la Commission interdépartementale du développement durable (CIDD) définit la RSE comme: « un processus d'amélioration dans le cadre duquel les entreprises intègrent de manière volontaire, systématique et cohérente des considérations d'ordre social, environnemental et économique dans leur gestion en concertation avec leurs parties prenantes » [8].

Il arrive néanmoins de plus en plus souvent que le fondement de la RSE résulte d'une réglementation contraignante [9].

La distinction entre hard law et soft law ou en d'autres termes « droit contraignant/droit non contraignant » est remise en cause par certains auteurs [10] qui considèrent qu'il y a lieu de tenir compte des effets produits par la RSE, lesquels varieront en fonction des paramètres suivants:

    • la formulation du code de conduite ou de la recommandation;
    • l'origine privée ou publique de l'initiative de la soft law;
    • le contrôle du suivi plus ou moins contraignant [11].

    C'est d'ailleurs la ligne droite empruntée par la communication de la Commission européenne du 25 octobre 2011 sur la nouvelle stratégie en matière de RSE, communication qui prévoit que la RSE se résume à « la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu'elles exercent sur la société » [12].

    Cette nouvelle définition modifie les engagements de l'entreprise en termes de RSE dans la mesure où cette dernière doit non seulement respecter la législation en vigueur, mais également prendre les mesures adéquates en vue d'atteindre l'objectif qu'elle s'est donné. L'entreprise reste néanmoins libre de choisir les moyens. En d'autres termes, la souplesse de la RSE réside dans le choix des moyens pour mener sa politique [13]. La responsabilité sociétale des entreprises est mise en oeuvre au moyen de différents instruments et ce tant à l'initiative de l'entreprise concernée que par des tiers.

    Ces instruments tendent à exprimer les règles et les valeurs que l'entreprise entend suivre, à mettre ces dernières en application, à diffuser les informations sur cette mise en oeuvre et, éventuellement, à faire valider ces informations par des tiers [14]. Nous présentons les plus récurrents.

    1. Codes de conduite

    Il existe plusieurs définitions de cette notion. En 2001, la Commission européenne définissait le code de conduite comme étant une « déclaration officielle des valeurs et pratiques commerciales d'une entreprise et, parfois, de ses fournisseurs. Un code énonce des normes minimales et atteste de l'engagement pris par l'entreprise de les observer et de les faire observer par ses contractants, sous-traitants, fournisseurs et concessionnaires. Ce peut être un document extrêmement élaboré exigeant le respect de normes précises et prévoyant un mécanisme coercitif complexe » [15].

    S'inspirant de la directive n° 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur [16], le Code de droit économique détermine le code de conduite comme étant « un accord ou un ensemble de règles qui ne sont pas imposés par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives et qui définissent le comportement des entreprises qui s'engagent à être liées par lui en ce qui concerne une ou plusieurs pratiques commerciales ou un ou plusieurs secteurs d'activité » [17].

    Cette définition renvoie à deux types de codes qui s'inscrivent dans le cadre d'une pratique commerciale, à savoir ceux faisant l'objet d'un consensus par leurs adhérents (« les accords ») et ceux adoptés par une personne tierce à leurs adhérents (« un ensemble de règles ») [18]. Le responsable du code est l'auteur du code, soit celui qui est chargé d'en surveiller le respect [19].

    Les codes de conduite expriment ainsi les engagements volontaires d'une entreprise. Ces derniers varient grandement d'une entreprise à l'autre car ils découlent généralement de la mission et de la vision de l'entreprise [20].

    2. ISO 26000

    L'organisation internationale de normalisation (ISO) définit une norme comme étant « un document qui définit des exigences, des spécifications, des lignes directrices ou des caractéristiques à utiliser systématiquement pour assurer l'aptitude à l'emploi des matériaux, produits, processus et services » [21].

    La norme ISO 26000 a été édictée afin de donner aux entreprises et organisations des lignes directrices pour opérer de manière sociétalement responsable, soit « agir de manière éthique et transparente de façon à contribuer à la bonne santé et au bien-être de la société » [22]. Cette norme ISO constitue une étape majeure dans le développement de la RSE.

    3. Labels

    Les labels sont des mots et des symboles appliqués sur des produits ou affichés en relation avec une entreprise, concernant un certain nombre de caractéristiques des produits ou de l'entreprise et destinés à être portés à la connaissance des consommateurs.

    Les entreprises essayent, en utilisant ces labels, d'influencer les consommateurs dans leurs habitudes de consommation et ce, à une époque où les consommateurs sont de plus en plus nombreux à prendre en considération les conditions de travail, l'environnement, le tiers-monde, la santé, etc. lors de leurs achats [23].

    Le crédit donné à ces labels provient de l'autorité, de l'association ou de l'organisation qui les décernent et de la procédure de certification, laquelle est plus ou moins complète et complexe [24].

    Toutefois, la prolifération et l'hétérogénéité des labels, ainsi que l'absence de contrôle, entraînent une perte de confiance de la part des consommateurs dans la labellisation [25],  [26].

    Sont ainsi reconnus pour leur qualité et leur crédibilité, les labels qui font l'objet d'un contrôle externe (labels « Ecocert équitable », « Fairtrade Max Havelaar » ou encore le « label social belge ») en garantissant au consommateur le respect des principes de base de l'Organisation internationale du Travail dans la filière de production [27].

    4. Agences de notation sociétales

    Ces agences déterminent l'engagement RSE de l'entreprise en fonction du développement durable. Ces agences ont pour objectif d'aider les investisseurs à choisir les entreprises les plus responsables au regard des aspects environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance [28].

    5. Rapportage RSE

    Le rapportage RSE (ou « reporting ») consiste à publier les performances de l'entreprise en matière RSE et plus particulièrement au niveau social et environnemental - ce qui est appelé le « rapport triple approche » [29].

    Depuis 2006, le rapport annuel (rapport de gestion) établi par les administrateurs et les gérants de société rend ce mécanisme obligatoire [30].

    Ces rapports publiés auprès de la Banque Nationale sont accessibles à toute personne intéressée.

    III. Recours en cas de violation par une entreprise de sa politique RSE

    Dans le présent chapitre, nous exposons les actions possibles en cas de non-respect des engagements qu'une entreprise a volontairement adoptés (soft law) dans le cadre de sa pratique commerciale [31].

    Plusieurs actions se présentent à la personne lésée afin d'obtenir la cessation de cette pratique commerciale et/ou l'obtention de dommages et intérêts.

    1. Action en cessation

    En vertu de l'article XVII.1 du Code de droit économique, le président du tribunal de commerce est seul compétent pour constater l'existence d'un acte contraire aux dispositions relatives aux pratiques commerciales et en ordonner la cessation [32].

    Ce code dresse une différence de régime entre les pratiques déloyales commises à l'égard des consommateurs (art. VI.92 à VI.103) et celles pratiquées à l'égard de « personnes autres que les consommateurs », soit les entreprises (art. VI.104 à VI.109) [33].

    L'on rappellera au lecteur que:

      • le « consommateur » est défini par le Code de droit économique comme étant « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale » [34];
      • l'« entreprise » est définie par le Code de droit économique comme étant « toute personne physique ou personne morale poursuivant de manière durable un but économique, y compris ses associations » [35]. Cette notion ne déroge pas au terme de « professionnel » utilisé par la directive n° 2005/29/CE [36] et n'est pas plus restrictive [37]. Il s'agit d'un concept ouvert qui est susceptible de s'appliquer à un nombre indéterminé d'entités [38],  [39].
      A. Pratiques à l'égard des consommateurs
      a. Actes interdits

      L'article VI.95 du Code de droit économique stipule que « les pratiques commerciales déloyales à l'égard des consommateurs sont interdites ».

      Pour s'en assurer, trois paliers d'interdiction doivent être examinés (« test de loyauté en cascade » [40]): le premier vise une norme générale d'interdiction (art. VI.93), le second des normes semi-générales qui interdisent les pratiques trompeuses et agressives (art. VI. 97 et VI.101) et le troisième énumère une série de pratiques réputées déloyales en toutes circonstances (« liste noire », art. VI.100) [41],  [42].

      i. Liste noire

      Afin de garantir la protection des consommateurs, la directive n° 2005/29/CE a établi une liste de 31 pratiques réputées déloyales en toutes circonstances (annexe 1 de la directive).

      Cette liste noire (« black list ») a été transposée en droit belge aux articles VI.100 (pratiques trompeuses) et VI.103 (pratiques agressives [43]) du Code de droit économique.

      En matière RSE, l'article VI.100 considère notamment comme déloyales en toutes circonstances, les pratiques commerciales à l'égard des consommateurs qui ont pour objet de:

        • se prétendre signataire d'un code de conduite alors que ce n'est pas le cas (art. VI.100, 1°);
        • afficher un certificat, un label de qualité ou un équivalent sans avoir obtenu l'autorisation nécessaire (art. VI.100, 2°) [44];
        • affirmer qu'un code de conduite a reçu l'approbation d'un organisme public ou autre alors que ce n'est pas le cas (art. VI.100, 3°);
        • affirmer qu'une entreprise, y compris ses pratiques commerciales, ou qu'un produit a été agréé, approuvé ou autorisé par un organisme public ou privé alors que ce n'est pas le cas ou sans respecter les conditions de l'agrément, de l'approbation ou de l'autorisation reçue (art. VI.100, 4°).

        Ces quatre points font directement référence à certains instruments mettant en oeuvre la responsabilité sociétale des entreprises; ils traduisent la volonté du législateur de préciser le rôle que les titulaires de ces instruments RSE peuvent jouer dans l'application de la loi et de s'assurer que les entreprises fassent un usage responsable de ces derniers dans le cadre de leurs activités de marketing [45].

        Les pratiques commerciales citées ci-avant sont interdites dès que les éléments matériels de l'interdiction sont réunis, sans appréciation au cas par cas [46]. Il suffit donc au praticien de rapporter la preuve que la condition matérielle prévue par l'article VI.100 du Code de droit économique est rencontrée (interdiction per se[47]. La charge de la preuve s'en trouve incontestablement allégée puisque le juge n'a pas de pouvoir d'appréciation sur les effets qu'une telle pratique a sur les consommateurs [48].

        L'article VI.100 est toutefois silencieux sur la violation effective par une entreprise de ses engagements RSE, soit par exemple les règles contenues dans le code de conduite visé par cet article VI.100 [49]. Une telle violation peut néanmoins être sanctionnée sur le pied des normes semi-générales.

        ii. Norme semi-générale

        L'article VI.97 du Code de droit économique fixe un double critère pour réputer une pratique commerciale comme étant trompeuse et déloyale:

        (a) Etablir le caractère trompeur de la pratique

        Une pratique commerciale est dite trompeuse « si elle contient des informations fausses et qu'elle est donc mensongère ou que, d'une manière quelconque, y compris par sa présentation générale, elle induit ou est susceptible d'induire en erreur le consommateur moyen en ce qui concerne un ou plusieurs des éléments suivants [50], même si les informations présentées sont factuellement correctes (...) » (art. VI.97).

        En matière RSE, l'article VI.98, alinéa 1er, 2° étend (en réalité, précise) le caractère trompeur d'une pratique commerciale lors de l'adoption par l'entreprise d'un code de conduite.

        Bien que le terme « code de conduite » apparaisse dans la loi, il convient de ne pas s'arrêter à ce vocable pour déterminer si, en pratique, les engagements RSE pris par l'entreprise répondent ou non à la définition donnée du code de conduite. On pourra en effet également avoir égard aux « chartes », « règlements internes », « codes de déontologie » ou plus largement aux recommandations et engagements.

        Par conséquent, l'on peut considérer que le code de conduite aura les effets d'une norme devant être prise en compte lors de l'évaluation d'une pratique commerciale trompeuse [51] à une double condition, soit lorsque (art. VI.98, al. 1er, 2°):

        1. L'engagement de l'entreprise est ferme et vérifiable

        Sont ici visés les codes de conduite contenant des engagements prescriptifs et non des déclarations d'intention:

          • les déclarations d'intention constituent un simple voeu et restent très incantatoires ou ne font que reprendre des exigences légales déjà existantes et faisant l'objet de sanction étatique (comme le fait de déclarer être contre la pollution ou en faveur de l'égalité entre hommes et femmes);
          • les engagements prescriptifs (concrets et vérifiables) utilisent un vocabulaire plus précis.
          2. L'entreprise indique qu'elle est liée par le code de conduite dans le cadre d'une pratique commerciale

          En d'autres termes, les engagements RSE ne peuvent constituer un simple outil d'autorégulation. Ils doivent participer à la communication commerciale de l'entreprise et être rendus publics. L'entreprise doit en outre indiquer être liée par le code de conduite.

          (b) Cette pratique doit amener ou être susceptible d'amener le consommateur à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement

          Les engagements RSE entrent en ligne de compte dans la décision commerciale du consommateur moyen d'aujourd'hui, qui est normalement informé, raisonnablement attentif et avisé [52] et qui se dit prêt à payer plus pour de tels produits ou services [53].

          Si ces deux conditions sont remplies, la personne lésée pourra obtenir la cessation de la pratique commerciale de l'entreprise qui viole ses engagements RSE. Tel sera le cas si une entreprise, dans sa stratégie commerciale, communique qu'elle s'engage à limiter la production de gaz à un certain pourcentage pour la production de ses produits (engagements prescriptifs). Il en va autrement lorsqu'une entreprise s'engage à respecter le principe de non-discrimination en son sein ou à avoir une production environnementale durable car il s'agit de simples déclarations d'intention.

          Notons que le juge bénéficie d'un large pouvoir pour apprécier le caractère trompeur de la pratique commerciale et la décision finale du consommateur [54]. La charge de la preuve est donc plus importante dans le chef du demandeur.

          iii. Norme générale

          Le Code de droit économique contient enfin une norme générale permettant de sanctionner toute autre pratique commerciale, pour autant qu'elle respecte le double critère prévu par l'article VI.93 du code: premièrement, la pratique doit être contraire aux exigences de la diligence professionnelle et, deuxièmement, elle doit altérer substantiellement le comportement économique du consommateur moyen [55].

          Pour apprécier la diligence professionnelle et le caractère honnête d'une pratique, on pourra aisément s'inspirer des codes de conduite non contraignants développés par certains secteurs professionnels ou interprofessionnels. Ils constituent effectivement « un des meilleurs révélateurs de ce qui, à l'intérieur même des professions concernées, est considéré comme acceptable ou en revanche comme inadéquat » [56] par rapport à des principes de responsabilité sociétale.

          Dans les faits, cette norme générale sera rarement invoquée car la plupart des pratiques commerciales pourront être sanctionnées en suivant les autres étapes du test.

          b. Titulaires de l'action

          Toute personne intéressée constatant l'existence d'une pratique déloyale peut agir en cessation [57].

          Dans le cadre des pratiques déloyales à l'égard des consommateurs, ces derniers sont les principaux intéressés et doivent disposer d'un intérêt né et actuel au sens des articles 17 et 18 du Code judiciaire [58].

          Une association ayant pour objet la défense des intérêts des consommateurs et représentée au sein du Conseil de la Consommation [59] peut également introduire une action en cessation [60].

          Dans ce cas, un intérêt direct au sens des articles 17 et 18 du Code judiciaire n'est pas requis: une association pourra ainsi agir pour la défense de ses intérêts collectifs si ceux-ci sont statutairement définis. Tel est le cas par exemple de Test-Achats [61].

          L'article XVII.7, alinéa 1er, 3°, prévoit encore que le ministre compétent pour la matière concernée ou le directeur général de la direction générale Contrôle et Médiation du Service public fédéral Economie, P.M.E., Classes moyennes et Energie peuvent également agir pour protéger les intérêts des consommateurs [62].

          L'entreprise pourra également se prévaloir des dispositions applicables « à l'égard des consommateurs » (art. VI.92 à VI.103) lorsqu'une pratique, ainsi réputée déloyale à l'égard des consommateurs, affecte non seulement les consommateurs mais également les entreprises (art. VI.104 C.D.E.) [63].

          Rares sont les consommateurs qui intentent une action en cessation d'une pratique commerciale déloyale [64] car le fait que l'infraction soit consommée et les coûts d'une telle procédure les en dissuadent.

          B. Pratiques entre entreprises
          a. Actes interdits

          L'article VI.104 du Code de droit économique stipule qu'est interdit « tout acte contraire aux pratiques honnêtes du marché par lequel une entreprise porte atteinte ou peut porter atteinte aux intérêts professionnels d'une ou de plusieurs autres entreprises ».

          Cet article constitue une véritable « norme de loyauté » [65].

          Le comportement d'une entreprise est considéré comme déloyal au regard de deux éléments:

            • premièrement, en ayant égard au contexte ou à l'environnement dans lequel l'honnêteté doit être jugée; pour apprécier la nature honnête d'une pratique du marché, l'on peut s'inspirer des codes sectoriels [66];
            • deuxièmement, en ayant égard au caractère honnête de la pratique du marché considérée, soit par rapport au standard minimum de loyauté dont les entreprises doivent faire preuve [67].

            Une entreprise pourra également se prévaloir des dispositions relatives aux pratiques commerciales déloyales à l'égard des consommateurs. Précisons que l'article VI.104 du Code de droit économique permet également d'interdire une pratique publicitaire [68].

            b. Titulaires de l'action

            De la même manière qu'à l'égard des consommateurs, seules les entreprises intéressées au regard des articles 17 et 18 du Code judiciaire pourront intenter une telle action (art. XVII.7, al. 1er, 1°, C.D.E.) [69].

            Conformément à l'article I.1er, 1°, du code, il est nécessaire que ces entreprises poursuivent de manière durable un but économique [70].

            En matière RSE, ces entreprises intéressées seront notamment les entreprises concurrentes à celle violant sa responsabilité sociétale ou les cocontractants fournisseurs ou acheteurs.

            Un organisme de contrôle de qualité - tel que FLO-CERT GmbH pour le label Max Havelaar [71] ou Bureau Veritas pour le label FSC [72] - a été reconnu comme ayant un intérêt à agir dans le cadre de la défense de ses labels [73].

            Une autorité professionnelle et un groupement professionnel ou interprofessionnel ayant la personnalité juridique peuvent également introduire une telle action et ce par dérogation aux articles 17 et 18 du Code judiciaire, sans démontrer un intérêt professionnel mais pour autant qu'ils agissent pour la défense de leurs intérêts collectifs statutairement définis (art. XVII.7, dernier al.) [74]. Il en va ainsi par exemple de l'Institut professionnel des agents immobiliers [75] ou de l'Institut professionnel des comptables et fiscalistes agréés.

            2. Action en dommages et intérêts

            La violation par une entreprise des engagements RSE adoptés volontairement peut également ouvrir la voie à une action en dommages et intérêts.

            A. Objet de l'action

            Le but ici est tout autre: il ne s'agit pas de demander la cessation d'une pratique mais la réparation pécuniaire du préjudice que l'entreprise a causé à la suite de la violation de sa politique RSE [76].

            L'action en dommages et intérêts est fondée sur les articles 1382 et suivants du Code civil.

            Il revient au juge du fond d'apprécier l'illicéité de la pratique déloyale ou de l'acte contraire aux pratiques honnêtes du marché, tant sous l'angle de la faute [77] que sous celui de la violation de la loi et d'en accorder la réparation. Les dispositions précitées du Code de droit économique ne sont en effet pas l'apanage de l'action en cessation.

            S'il existe un ordre de cessation prononcé par le président du tribunal de commerce compétent, la faute ne devra plus être démontrée; cet ordre s'impose au juge du fond dès qu'il est coulé en force de chose jugée.

            B. Titulaires de l'action

            Ainsi qu'on le sait, l'action ordinaire se distingue de l'action en cessation en raison de la preuve de l'existence d'un préjudice ainsi qu'en l'absence d'allègement de l'intérêt au sens des articles 17 et 18 du Code judiciaire pour certaines personnes [78].

            Le juge du fond devra s'attacher à déterminer le préjudice réellement subi par la personne lésée.

            Le dommage peut consister par exemple en la perte de bénéfices en corrélation avec la pratique commerciale déloyale dans le chef d'une entreprise, en une atteinte à la réputation d'un organisme de contrôle ou d'une entreprise titulaire d'un label, certificat ou code de conduite utilisé à mauvais escient par une entreprise (concurrente) qui n'en respecte par exemple pas les règles, …

            Le juge pourra ordonner une mesure d'expertise et/ou la production de documents par l'entreprise fautive afin d'évaluer le préjudice. A défaut de pouvoir être évalué, ce dernier devra être déterminé ex aequo et bono [79].

            Quant au consommateur, il conviendra de déterminer son préjudice économique. En l'absence d'un tel préjudice ou à défaut de pouvoir l'évaluer, il sera, à notre estime, plus difficile de prouver un dommage par essence individuel, dès lors qu'en matière RSE, le dommage causé aux consommateurs revêt la forme d'un préjudice d'intérêt collectif ou d'intérêt « public ».

            Le consommateur devrait, à notre sens, se montrer à notre sens plus frileux à introduire une telle action car:

              • la charge de la preuve se trouve alourdie par: (i) la preuve d'une violation des engagements RSE d'une entreprise, laquelle pourra plus ou moins facilement être rapportée selon le degré de transparence de ces engagements [80] et (ii) la preuve de l'existence d'un préjudice;
              • aucun allègement d'intérêt n'est prévu;
              • le coût de la procédure constitue, encore et toujours, un frein pour le consommateur individuel.

              L'action collective, entrée en vigueur depuis le 1er septembre 2014 et introduite par la loi du 28 mars 2014 [81], modifiera éventuellement cette situation dans les relations « C2B » (consumers to business[82].

              Le champ matériel de cette action est limité aux litiges de consommation énumérés limitativement par la loi (art. XVII.37 C.D.E.). Les pratiques du marché et la protection du consommateur y sont expressément visées.

              L'action collective permet à un représentant d'agir en justice pour le compte de plusieurs consommateurs afin d'obtenir la réparation d'un préjudice collectif [83] de victimes et ce, dans le cadre d'une seule et même action. Le consommateur n'est pas formellement partie à la procédure mais il sera lié par la décision à intervenir [84]. Cette action se distingue de l'action en cessation introduite par une association ou un groupe professionnel ou interprofessionnel dans la mesure où ces derniers, ayant la personnalité juridique, agissent en leur nom et pour le propre compte.

              Cette action permet aux consommateurs de ne pas assumer les frais d'une telle procédure grâce à l'intervention du représentant qui n'est pas rémunéré.

              Toutefois, pour cette même raison, certains auteurs estiment que l'action collective ne sera que très rarement utilisée car peu d'associations décideront de supporter ces frais [85]. L'action collective manquera dès lors sa cible.

              IV. Applications

              Il existe peu de jurisprudence en raison de la faculté donnée par le législateur national aux secteurs professionnels et interprofessionnels ainsi qu'aux entreprises de s'autoréguler au moyen des instruments RSE (soft law) plutôt que de les réglementer (hard law[86].

              En effet, le législateur encourage les acteurs altruistes à avoir, dans leur stratégie commerciale, des préoccupations sociétalement responsables et des mécanismes de contrôle et de sanctions internes.

              Nous avons néanmoins épinglé une décision américaine ainsi que certaines décisions belges et néerlandaises [87] relatives à la liste noire des pratiques commerciales interdites en toutes circonstances (art. VI.100 C.D.E.) et à la norme semi-générale (art. VI.98, al. 1er, 2°, du même code) [88].

              1. Jurisprudence américaine

              Comme de nombreuses entreprises multinationales, Nike fait signer à ses sous-traitants un code de conduite leur demandant de respecter une série de règles en matière sociale (salaire minimum, conditions de salaire décentes, etc.).

              Dans la cause Kasky / Nike [89], Nike a établi un rapport afin de prouver que ses sous-traitants respectaient les règles contenues dans ce code. Néanmoins, diverses ONG prétendaient que le rapport était de pure complaisance.

              M. Kasky, un consommateur insatisfait, a porté la cause devant les tribunaux californiens en alléguant que la grande marque avait posé des actes de concurrence déloyale et faisait de la publicité trompeuse [90]. Selon ce dernier, Nike a omis de divulguer certaines informations ou a communiqué des informations erronées relatives aux conditions de travail des travailleurs employés par ses sous-traitants dans le but de garantir ou de maintenir ses ventes.

              Nike prétendait au contraire que le code de conduite ne relevait pas de la publicité commerciale mais de la liberté d'expression (Free Speech) garantie par la Constitution américaine (le First Amendment).

              La Cour de Californie a jugé, en l'espèce, que ces déclarations relevaient de la publicité commerciale en ce qu'elles étaient utilisées comme un outil de marketing, sachant que « pour un segment significatif du public acheteur, des thèmes comme les conditions de travail importent dans le choix du consommateur » [91] aux fins d'améliorer l'image de la grande marque.

              2. Jurisprudence européenne (directive n° 2005/29/CE)
              A. Pratiques interdites en toutes circonstances visées par la liste noire

              Par une ordonnance du 4 juin 2010, le président du tribunal de commerce de Turnhout a considéré que la mise sur le marché d'un produit avec la mention d'une reconnaissance de qualité (DIN et numéro d'enregistrement) d'un producteur, alors que les produits ne proviennent pas de ce producteur, est un acte contraire aux usages honnêtes en matière commerciale [92].

              Il s'agit d'une application de l'article VI.100, 2°, du Code de droit économique dès lors qu'une entreprise appose un label de qualité qui n'a pas été délivré pour ses produits.

              B. Pratiques déloyales trompeuses (norme semi-générale)

              a. Dans le cadre d'une affaire portée devant le tribunal de Leeuwarden du 11 septembre 2009 [93], un code de conduite avait été conclu entre un opérateur de téléphonie mobile (T-Mobile) et un fournisseur de services de SMS (Lindorff), à l'exclusion du consommateur final.

              Lindorff avait réclamé au consommateur final des montants impayés pour un service SMS. En réalité, le client de téléphonie mobile avait répondu à une annonce publicitaire par sms, ce qui lui avait valu de recevoir, sans le demander et en l'espace de 2 semaines, des milliers de sms pour un montant total de 900 EUR.

              Au regard du code de conduite, l'opérateur de téléphonie mobile devait informer le consommateur final sur le tarif du service de SMS et contrôler que cette procédure était bien respectée.

              Le tribunal de Leeuwarden a considéré que le consommateur final ne devait pas payer ce surcoût de facturation pour le service SMS dans la mesure où l'opérateur de téléphonie mobile n'avait pas vérifié que le consommateur avait bien reçu les informations relatives au tarif du service de sms, conformément au code de conduite.

              L'on observe que le juge a considéré que l'entreprise a violé les engagements contenus dans un code de conduite dont certaines dispositions visaient à protéger le consommateur.

              b. Dans un litige similaire, un consommateur a été surfacturé par son opérateur de téléphonie mobile (T-Mobile) pour un service SMS fourni par Lindorff.

              Le consommateur invoquait les dispositions fixées par le code de conduite conclu entre l'opérateur téléphonique et son fournisseur (Lindorff) afin d'éviter le surcoût généré par le service SMS.

              Le juge a estimé que le code de conduite conclu entre l'opérateur de téléphonie mobile et son fournisseur était d'application dans la mesure où le consommateur ne s'y était pas opposé (en vertu de l'art. 253 du Livre VI du Code civil néerlandais, une clause est réputée acceptée par un tiers dès lors qu'il ne s'est pas opposé immédiatement à son application à partir du moment où il en a eu connaissance).

              Les dispositions du code de conduite étaient favorables au consommateur dans la mesure où elles prévoyaient que l'opérateur de téléphonie mobile aurait dû s'informer auprès de Lindorff de l'intention du client de recevoir le service sms pour un montant total de 2.000 EUR. L'opérateur de téléphonie mobile n'ayant pas respecté la procédure, la surfacturation a été écartée par le tribunal [94].

              c. Dans un litige porté devant le tribunal de Rotterdam [95], il était reproché à une société de ne pas avoir respecté le code de conduite d'un réseau professionnel.

              Dans les faits, la société Keukenkampioen s'était affiliée à une association professionnelle regroupant des magasins du secteur de l'aménagement d'intérieur dénommée CBW (« Centrale Brancheorganisatie Wonen ») qui permettait à l'entreprise d'apposer un label CBW. Un code de conduite prévoyait des dispositions visant à une plus grande protection du consommateur, notamment en cas de faillite d'une entreprise faisant partie de ce réseau.

              La société défenderesse obligeait le consommateur à régler le solde du prix avant la livraison du bien. Or, le code de conduite de la CBW prévoyait que le paiement de l'entièreté du prix devait avoir lieu au plus tôt lors de la livraison du bien.

              La société ne contestait pas qu'elle fût liée par le code de conduite mais estimait qu'il ne s'agissait pas d'un engagement concret et vérifiable dans la mesure où le client pouvait au plus tard procéder au paiement lors de la livraison.

              L'autorité de la consommation, qui a été amenée à statuer sur ce cas, a considéré que les conditions générales de la société relatives aux modalités de paiement ne respectaient pas les dispositions du code de conduite de l'association et que l'entreprise avait par conséquent violé l'article 6193c du Code civil néerlandais (transposant l'art. 6 de la directive [96]).

              Le juge a suivi cette argumentation et a considéré que les conditions générales de l'entreprise ne respectaient pas le code de conduite de l'organisation professionnelle qui prévoyait une protection élevée en faveur du consommateur.

              V. Efficacité des moyens d'action, une question de transparence

              Ainsi que nous l'avons exposé, la RSE reste une démarche essentiellement volontaire et largement promue.

              En conséquence, cette notion devient, au fil du temps, une notion « fourre-tout », sans réel outil d'évaluation, si ce n'est ceux développés par les entreprises elles-mêmes en interne.

              Par un avis du 18 mai 2006, le Conseil de la Consommation a fait apparaître les positions des parties prenantes (consommateurs et entreprises) concernant les engagements RSE.

              Selon les représentants des organisations des consommateurs, il est souhaitable de mettre en place un contrôle indépendant qui permettrait d'évaluer et de constater les engagements RSE et, partant, d'assurer une certaine transparence. Le souci des consommateurs est d'empêcher toute violation de leur droit fondamental à l'information, étant entendu que, selon eux, « certaines entreprises utilisent ce qu'elles présentent comme étant de la RSE comme un moyen complémentaire à la publicité pour communiquer avec les consommateurs et améliorer leur image de marque » [97].

              En revanche, les représentants de la production, de la distribution et des classes moyennes s'opposent à l'instauration d'un instrument de contrôle unique en rappelant que les initiatives RSE constituent un processus dynamique et que les demandes de contrôle doivent nécessairement procéder d'une démarche volontaire de l'entreprise, sous peine de se heurter au caractère volontaire du concept de RSE [98].

              Depuis lors, aucun instrument de contrôle externe n'a été adopté par les pouvoirs publics.

              L'efficacité de la législation belge et, partant, des moyens d'action à la disposition de la personne lésée, est au coeur de la problématique de la transparence des engagements RSE.

              En effet, la violation par les entreprises de leurs engagements RSE ne pourra être considérée, et partant sanctionnée, comme une pratique commerciale déloyale que si elle répond à une exigence de transparence.

              Comme on l'a vu, le consommateur moyen est sensible aux engagements RSE tant économiques, sociaux ou environnementaux. Il est dès lors en droit d'attendre une grande clarté sur ces engagements qui participent à sa décision commerciale.

              Les instruments énoncés ci-dessus qui mettent en oeuvre la RSE permettent une information à l'égard du consommateur, laquelle variera toutefois en fonction de ce que l'entreprise est disposée ou non à communiquer. Certains labels sont ainsi plus exigeants que d'autres. De même, certaines entreprises déclarent être signataires d'un code de conduite alors que d'autres iront plus loin en dévoilant également le contenu de ce code (via un accès spécifique p. ex.).

              Une telle information permettra, selon son degré de communication, d'apprécier s'il s'agit d'une pratique commerciale déloyale et aura un impact sur la charge de la preuve dans le chef du demandeur.

              C'est dans ce cadre que la ligue internationale du droit de la concurrence (LIDC) recommandait de prévoir, en cas d'action en justice contre une entreprise qui violerait ses engagements RSE sans communiquer spontanément certaines données, que la cour ou le tribunal compétent ordonne à l'entreprise de fournir toutes les informations pertinentes à cet égard [99].

              A notre estime, et au regard de la problématique soulevée dans l'avis du Conseil de la Consommation, l'enjeu est de trouver un juste équilibre permettant de préserver le caractère volontaire de la démarche RSE tout en assurant une certaine transparence.

              Par conséquent, nous pourrions considérer que, si les engagements RSE constituent un outil d'autorégulation interne, ils ne doivent pas nécessairement être révélés au grand public dès lors qu'ils ne constituent pas une pratique commerciale. Il en va ainsi d'un règlement interne à l'entreprise visant à promouvoir un comportement écologique dans le chef de ses employés en les incitant au covoiturage.

              Par contre, si les entreprises utilisent les instruments RSE pour promouvoir leur image de marque, tant à l'égard des consommateurs que des entreprises - cocontractantes ou concurrentes ces derniers sont en droit d'attendre un minimum d'informations de sa part pour pouvoir s'assurer que les engagements RSE sont respectés.

              Ce caractère volontaire pourrait également être affecté par l'instauration d'un contrôle externe qui permettrait d'évaluer si les entreprises se conforment effectivement à leurs engagements RSE.

              En raison de ce contrôle, les entreprises pourraient être moins enclines à prendre des engagements RSE et se contenter de respecter les législations et réglementations impératives existantes.

              Afin de trouver un juste équilibre, ce contrôle devrait, à notre sens, être limité à l'information dont ont besoin les consommateurs ou les entreprises lors de leur choix de consommation ou commercial.

              VI. Conclusion

              La mise en oeuvre d'une politique RSE par les entreprises ne les empêche pas, même si cette démarche est volontaire, de se dérober à l'emprise du droit. Plusieurs voies d'action sont toutefois possibles. Un test par étape est ainsi proposé dans la présente contribution au praticien confronté à une pratique commerciale qui pourrait s'avérer déloyale.

              A plusieurs reprises, nous avons pointé le souci du législateur d'encadrer cette pratique commerciale - notamment en référence aux codes de conduite.

              Néanmoins, le manque de transparence doublé de l'absence de contrôle externe visant à s'assurer du respect d'une pratique commerciale en matière RSE entache l'arsenal législatif mis en place et, partant, complique la tâche des victimes prêtes à intenter une action pour voir cesser ou sanctionner cette pratique.

              [1] Avocate au barreau de Bruxelles.
              [2] Avocate au barreau de Bruxelles.
              [3] Livre Vert de la Commission européenne « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises », COM (2001)366, Bruxelles, 18 juillet 2001, p. 21.
              [4] F. Dorssemont, « Introduction », in « La responsabilité sociétale des entreprises », Ann.dr.Louvain, 2014/3, vol.74, p. 306.
              [5] R. Edward Freeman a développé la thèse des « stakeholders » ou « théorie des parties prenantes » suivant laquelle l'entreprise ne devrait pas se limiter à être attentive à ses actionnaires mais doit prendre en compte l'ensemble des catégories d'acteurs avec lesquels elle est en relation (l'Etat, les groupements et les individus).
              [6] R. Family, « La responsabilité sociétale de l'entreprise: du concept à la norme », D., 2013, n° 23, pp. 1559-1560.
              [7] Nous adoptons dans la présente contribution le vocable RSE pour désigner la « responsabilité sociétale des entreprises ».
              [8] Les autorités fédérales belges ont pris l'initiative de créer un Plan d'action fédéral visant à établir un « cadre de référence en matière de responsabilité sociétale des entreprises ». Cette définition se réfère à la distinction traditionnelle soft law/hard law. Plan d'action fédéral. Responsabilité sociétale des entreprises, 29 mars 2006, adopté par la CIDD.
              [9] Il en va ainsi de la loi du 28 avril 2003 relative aux pensions complémentaires et au régime fiscal de celles-ci et de certains avantages complémentaires en matière de sécurité sociale qui prévoit que les fonds de pension doivent prendre en compte des considérations sociales, environnementales ou éthiques dans leur stratégie d'investissement (M.B., 15 mai 2003, p. 26.407); la loi du 13 janvier 2006 modifiant le Code des sociétés (M.B., 20 janvier 2006, p. 3.118) qui impose d'inclure dans le rapport de gestion non seulement des données fiscales relatives à la performance de l'entreprise mais également des critères environnementaux ou sociaux; la loi du 27 février 2002 visant à promouvoir la production socialement responsable en vue de la création d'un label social (M.B., 26 mars 2002, p. 12.428).
              [10] A. Bochon et A. Van Waeyenberge, « La place des codes de conduite dans l'évaluation des pratiques commerciales déloyales », R.E.C.O., 2013, p. 187.
              [11] P. Deumier, « La responsabilité sociétale de l'entreprise et les droits fondamentaux », Dalloz, 2013, n° 23, p. 1564.
              [12] Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des Régions « Responsabilité sociale des entreprises: une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014 », COM (2011) 681 final, Bruxelles, 25 octobre 2011, p. 7. Voy. infra: cette définition diffère sensiblement de celle donnée par le Livre Vert intitulé « promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociétale des entreprises », (COM(2001) 366) qui met l'accent sur le caractère souple de la RSE, à savoir « la prise en compte de manière volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales dans leurs relations commerciales et avec leurs parties prenantes ».
              [13] R. Family, o.c., p. 1563.
              [14] E. de Cannart d'Hammale, « La responsabilité sociale des entreprises, soft law ou hard law », J.T., 2007, p. 415.
              [15] Livre vert de la Commission européenne « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises », COM (2001) 366, Bruxelles, 18 juillet 2001, p. 27.
              [16] Les engagements RSE relatifs aux pratiques du marché ont été consacrés dans l'arsenal juridique européen par le biais de la directive n° 2005/29/CE du Parlement et du Conseil européen du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive n° 84/450/CEE du Conseil et les directives nos 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement(CE) n° 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« Directive sur les pratiques commerciales déloyales »), J.O.U.E., n° L. 149/22 du 11 juin 2005, pp. 22-39.
              [17] Art. I.1 C.D.E.
              [18] A. Bochon et A. Van Waeyenberge, o.c., p. 204.
              [19] L'article 2, g), de la directive n° 2005/29/CE définit le responsable du code comme étant « toute entité, y compris le professionnel ou groupe de professionnels, responsable de l'élaboration et de la révision d'un code de conduite et/ou de la surveillance du respect du code par ceux qui se sont engagés à être liés par lui ».
              [20] Cadre de référence « La responsabilité sociétale des entreprises en Belgique », 29 mars 2006, disponible sur http://rse.wallonie.be/apps/spip/IMG/pdf/CadreRefRSE2006-3.pdf, annexe 2, p. 1.
              [21] www.iso.org/iso/fr/home/about.htm.
              [22] www.iso.org/iso/home/standards/iso26000.htm.
              [23] Cadre de référence, o.c., annexe 2, p. 5.
              [24] E. de Cannart d'Hammale, o.c., p. 416.
              [25] Cadre de référence, o.c., annexe 2, p. 6.
              [26] Dans cette perspective, la société belge Netwerk Bewust Verbruiken a réalisé un inventaire des labels; voy. www.infolabel.be.
              [27] Le label social belge a été créé par la loi du 27 février 2002 visant à promouvoir la production socialement responsable (M.B., 26 mars 2002, p. 12.428). Voy. www.labelsocial.be.
              [28] Leur intervention est cependant coûteuse et conditionnée par la publicité de la RSE car elle se base sur les documents publics, des questionnaires et des résultats d'entrevue avec les responsables de l'entreprise. En Belgique, il existe deux agences: Deminor ratings et forum Ethibel. Voy. www.ecosocdoc.be/static/module/bibliographyDocument/document/002/1633.pdf; www.deminor.com et www.forumethibel.org.
              [29] E. de Cannart d'Hammale, o.c., p. 415. Cette approche vise les aspects économiques, sociaux et environnementaux.
              [30] Art. 5 de la loi du 13 janvier 2006 modifiant le Code des sociétés (M.B., 20 janvier 2006, p. 3.118).
              [31] La pratique commerciale est définie comme étant « toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d'une entreprise, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d'un produit ». La jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne considère que cette notion est d'interprétation large et s'étend à toute pratique:

              - émanant d'un professionnel: le professionnel concerné est celui qui se livre à ladite pratique et non les pratiques destinées à promouvoir les produits d'une autre entreprise;

              - en lien direct avec la promotion, la vente ou la fourniture d'un produit de ces professionnels aux consommateurs, soit toutes les promotions commerciales ainsi que la publicité. C.J.U.E., 17 octobre 2013 (RLvS Verlagsgesellschaft mbH / Stuttgarter Wochenblatt GmbH), C-391/12, disponible sur www.curia.europa.eu; C.J.U.E., 14 janvier 2010 (Zentrale zur Bekämpfung unlauteren Wettbewerbs eV / Plus Warenhandelsgesellschaft mbH), C-304/08, Rec. C.J.U.E., 2010, p. I-00217; A. Puttemans et L. Marcus, « L'interdiction des pratiques déloyales envers les consommateurs », in Le droit de la consommation dans le nouveau droit économique, Bruxelles, Bruylant, 2014, p. 31.
              [32] Cet article poursuit « sous réserve des actions particulières aux livres VI, XI, XII et XIV, visées aux chapitres 3, 4, 5 et 5/1 du présent titre ».
              [33] Code de droit économique, Livre VI (« Pratiques du marché et protection du consommateur »), Titre 4, Chapitre 2.
              [34] Art. I.1, 2°, C.D.E.
              [35] Art. I.1, 1°, C.D.E.
              [36] Le « professionnel » est « toute personne physique ou morale qui, pour les pratiques commerciales relevant de la présente directive, agit à des fins qui entrent dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, et toute personne agissant au nom ou pour le compte d'un professionnel » (art. 2, b), de la directive).
              [37] Projet de loi portant insertion du Livre VI « Pratiques du marché et protection du consommateur » dans le Code de droit économique et portant insertion des définitions propres au Livre VI, et des dispositions d'application de la loi propres au Livre VI, dans les Livres I et XV du Code de droit économique, exposé des motifs, Doc. parl., Chambre, 2012-2013, n° 53-3018/1, p. 5.
              [38] Répondent ainsi à la définition d'entreprise, les commerçants et sociétés commerciales, les sociétés civiles à forme commerciale, les professions libérales, les autres indépendants, les agriculteurs et sociétés agricoles, les associations sans but lucratif, … N'y répondent par exemple pas les pouvoirs publics et les entités chargées d'une mission de service public. Pour ce qui concerne les professions libérales, sont soumises au Livre VI (« Pratiques du marché et protection du consommateur ») du Code de droit économique les prestations des professions libérales qui ne sont pas considérées comme étant « caractéristiques » (comme la vente de produits solaires par un pharmacien). Les prestations caractéristiques, elles, sont régies par le Livre XIV du Code de droit économique, lequel reprend en grande partie, sans les modifier, les articles VI.93 à VI.106 du Code de droit économique que nous analysons dans la présente contribution. A. Puttemans et L. Marcus, o.c., pp. 36-37. Il faut donc considérer que les principes exposés ici sont d'application aux titulaires de professions libérales et parler à leur égard de pratiques « professionnelles ». Nous vous invitons à vous reporter aux articles correspondants du Livre XIV (art. XIV.60 à XIV.72).
              [39] D. Mougenot, « Les nouvelles compétences du tribunal de commerce », J.T., 2014, p. 600.
              [40] J. Ligot, F. Vanbossele et O. Battard, in A. Tallon (dir.), Les pratiques loyales, Bruxelles, Larcier, 2012, 2e éd., p. 39.
              [41] A. Puttemans et L. Marcus, o.c., p. 39.
              [42] Le législateur n'ayant pas suivi l'architecture de la directive n° 2005/29/CE, cet examen doit s'effectuer à rebours. H. Jacquemin, « Les pratiques déloyales à l'égard des consommateurs ou des entreprises », in L. De Brouwer (dir.), Les pratiques du marché: une loi pour le consommateur, le concurrent et le juge, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 74.
              [43] Nous n'abordons pas, dans la présente contribution, les pratiques agressives car elles ne trouvent pas à s'appliquer aux pratiques commerciales menées dans le cadre de la RSE.
              [44] Voy. Prés. Bruxelles, 27 février 2010, R.G. n° 04624/2009, inédit cité par A. Hellemans, « Verboden praktijken », in De nieuwe wet marktpraktijken en consumentenbescherming: volledig overzicht van de oud en nieuw, Bruxelles, Larcier, 2010, p. 126.
              [45] Orientations de la Commission européenne pour la mise en oeuvre et l'application de la directive n° 2005/29/CE sur les pratiques commerciales déloyales, SEC (2009) 1666, Bruxelles, 3 décembre 2009, pp. 21-22.
              [46] C.J.U.E., 18 octobre 2012, C-428/11, Purely Creative Ltd / A.C. Office of Fair Trading, disponible sur www.curia.europa.eu.
              [47] Ceci est illustré par l'ordonnance du 4 juin 2010 du président du tribunal de commerce de Turnhout énoncée supra.
              [48] A. Puttemans et L. Marcus, o.c., p. 40.
              [49] H. Jacquemin, o.c., p. 83.
              [50] Ces éléments sont notamment les suivants: l'existence ou la nature du produit; les caractéristiques principales du produit; l'étendue des engagements de l'entreprise, la motivation de la pratique commerciale et la nature du processus de vente ainsi que toute affirmation ou tout symbole faisant croire que l'entreprise ou le produit bénéficie d'un parrainage ou d'un appui direct ou indirect; le prix ou le mode de calcul du prix ou l'existence d'un avantage spécifique quant aux prix; la nature, les qualités et les droits de l'entreprise ou de son intermédiaire (art. VI.97 C.D.E.).
              [51] A. Bochon et A. Van Waeyenberge, o.c., p. 202.
              [52] Directive n° 2005/29/CE, considérant n° 18.
              [53] Livre Vert de la Commission européenne, « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises », COM (2001) 366, Bruxelles, 18 juillet 2001, p. 21.
              [54] Tel était le cas suivant les décisions du tribunal de Arnhem du 26 mars 2008 et du tribunal de Leeuwarden du 11 septembre 2009 citées infra (Chapitre IV. Applications).
              [55] A. Puttemans et L. Marcus, o.c., pp. 40-41 et Prés. Bruxelles, 27 février 2010, R.G. n° 04624/2009, inédit cité par A. Hellemans, o.c., pp. 120-121.
              [56] J. Ligot, F. Vanbossele et O. Battard, in A. Tallon (dir.), Les pratiques loyales, Bruxelles, Larcier, 2012, 2e éd., p. 267.
              [57] Art. XVII.7, al. 1er, 1°, C.D.E.
              [58] L'intérêt ne s'identifie pas au préjudice car il peut être purement moral ou même potentiel. La pratique ne doit pas nécessairement être consommée, de sorte qu'une action déclaratoire de droit pourra être introduite si la pratique est imminente (art. XVII.9 C.D.E.). A. Tallon, « La procédure. Nouveautés et sanctions », in L. De Brouwer (dir.), Les pratiques du marché: une loi pour le consommateur, le concurrent et le juge, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 134.
              [59] Cette association doit, pour ce faire, jouir de la personnalité civile et être représentée au Conseil de la Consommation ou être agréée par le ministre, conformément aux critères déterminés par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres.
              [60] Art. XVII.7, al. 1er, 3°, C.D.E.
              [61] La cour d'appel de Liège a admis que Test-Achats était compétente pour intenter une action en cessation. Liège, 26 janvier 2007, D.C.C.R., 2008, p. 73.
              [62] Et non ceux des entreprises. L'article XVII.7 du Code de droit économique exclut leur pouvoir d'action à l'égard des entreprises. Ce pouvoir d'action est conféré au ministre compétent en sa qualité d'organe du pouvoir exécutif, d'autant qu'il a le pouvoir de rechercher et de constater les actes qui peuvent faire l'objet d'une action en cessation (art. XV.12 C.D.E.).
              [63] J. Ligot, F. Vanbossele et O. Battard, in A. Tallon (dir.), o.c., pp. 54-55, 101-102 et A. Hellemans, o.c., p. 141.
              [64] P. De Vroede et H. De Wulf, « Overzicht van rechtspraak. Algemeen handelsrecht en handelspraktijken (1998-2002) », T.P.R., 2005, p. 283.
              [65] Il est admis que les pratiques honnêtes du marché couvrent les normes de comportement non formulées et celles formulées expressément dans un texte normatif.
              [66] J. Ligot, F. Vanbossele et O. Battard, in A. Tallon (dir.), o.c., p. 266; voy. supra.
              [67] H. Jacquemin, o.c., pp. 99-102.
              [68] Les pratiques pourront aussi être appréciées sur la base de l'article VI.105 du code ainsi que sur la base des dispositions relatives à la publicité. J. Ligot, F. Vanbossele et O. Battard, in A. Tallon (dir.), o.c., pp. 266 à 268.
              [69] A. Tallon, « La procédure. Nouveautés et sanctions », in L. De Brouwer (dir.), Les pratiques du marché: une loi pour le consommateur, le concurrent et le juge, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 134.
              [70] Soit tout caractère pécuniaire, quels qu'en soient les motifs et quelle que soit la manière dont il se manifeste. G.-L. Ballon, De wet marktpraktijken, Malines, Kluwer, 2011, p. 14.
              [71] www.fairtradebelgium.be.
              [72] www.fsc.be.
              [73] Prés. Comm. Marche, 6 avril 1976, Ing.-Cons., 1977, p. 38.
              [74] J. Stuyck, Handels-en economisch recht, Deel II, Mededigingsrecht, A, Handelspraktijken, Mechelen, E. Story-Scientia, 2ème éd., pp. 58-59.
              [75] Liège, 30 juin 2009, inédit, 2008/RG/1538 cité par J. Ligot, F. Vanbossele et O. Battard, in A. Tallon (dir.), o.c., p. 301.
              [76] Un ordre de cessation n'est pas requis pour l'introduction d'une telle action.
              [77] La faute devra être appréciée au regard de la norme de prudence et diligence, telle que nous l'avons développée ci-avant cf. III, 1, A., a), iii. Norme générale.
              [78] Voy. supra. Les associations de consommateurs, les associations sans but lucratif ou encore les associations professionnelles et interprofessionnelles introduisent par conséquent moins d'actions ordinaires.
              [79] L'auteur A. Tallon regrette à cet égard: « la tendance souvent trop lénitive des tribunaux qui, bien qu'il s'agisse des tribunaux de commerce en contact avec les réalités économiques, méconnaissent la hauteur des frais généraux industriels ou commerciaux en allouant des sommes dérisoires ». A. Tallon, La procédure, Bruxelles, Larcier, 2012, 2e éd., p. 172.
              [80] Voy. infra le chapitre V. sur l'efficacité des moyens d'action, une question de transparence.
              [81] Loi du 28 mars 2014 portant insertion d'un Titre 2 « De l'action en réparation collective » au Livre XVII « Procédures juridictionnelles particulières » du Code de droit économique et portant insertion des définitions propres au Livre XVII dans le Livre 1er du Code de droit économique (M.B., 29 avril 2014, p. 35.201).
              [82] En effet, l'action collective est limitée aux recours des consommateurs contre une entreprise. L'exclusion d'une telle action à l'égard des pratiques du marché entre entreprises est regrettable mais n'est pas définitive car les travaux préparatoires laissent entendre qu'il ne s'agirait actuellement que d'une première étape visant à s'assurer que « la figure juridique puisse être instaurée », d'autant que la loi sera évaluée en 2017 par le gouvernement, lequel pourra donner une portée générale à cette action en réparation collective. Projet de loi portant insertion d'un Titre 2 « De l'action en réparation collective » au Livre XVII « Procédures juridictionnelles particulières » du Code de droit économique et portant insertion des définitions propres au Livre XVII dans le Livre Ier du Code de droit économique, Doc. parl., Chambre, 2013-2014, n° 53-3300/4, p. 17.
              [83] L'article I.21, 1°, définit le préjudice collectif comme étant « l'ensemble des dommages individuels ayant une cause commune subis par les membres du groupe ».
              [84] E. Falla, « Le recours collectif en droit de la consommation. Présentation de la loi belge », in Le droit de la consommation dans le nouveau Code de droit économique, Bruxelles, Bruylant, 2014, p. 117.
              [85] E. Falla, o.c., p. 162.
              [86] A. Bochon et A. Van Waeyenberge, o.c., p. 208.
              [87] Jurisprudence néerlandaise citée par A. Bochon et A. Van Waeyenberge, o.c., p. 208.
              [88] Voy. supra.
              [89] Kasky / Nike, Inc., 45 P. 3d 243. (Cal. Sup. Ct 2002); 539 U.S. 654 [U.S. Sup. Ct.2003]), disponible sur http://appellatecases.courtinfo.ca.gov/search/case/mainCaseScreen.cfm?dist=1&doc_id=38035&doc_no=A086142.
              [90] Nous faisons remarquer que M. Kasky n'invoque aucun dommage personnel et direct; il a agi au nom du public de l'Etat de Californie « on information and belief », à savoir, au nom du droit de ce même public de se former une opinion fondée sur une représentation exacte de la réalité.
              [91] L'affaire s'est toutefois soldée par une transaction. R. Beauchard, « La responsabilité sociale de l'entreprise (RSE) », disponible sur www.academia.edu/1753532/Responsabilite_sociale_des_entreprises_la_communication_saisie_par_le_droit.
              [92] Prés. Comm. Turnhout, 4 juin 2010, Ann. prat. marché, 2010, p. 524.
              [93] Rb. Leeuwarden, 11 février 2009, Lindorff Purchase b.v., RN 261463CV EXPL 08-5304, disponible sur www.rechtspraak.nl.
              [94] Rb. Arnhem, 26 mars 2008, Lindorff Purchase b.v., RN 508972 CV EXPL 07-2870/ 163 PH, disponible sur www.rechtspraak.nl.
              [95] Rb. Rotterdam, 6 janvier 2010, Keukenconcurrent Nederland b.v., Consumentenautoriteit, RN AWB 09/3975 BC-T1 et AWB 09/4016 BC-T1, disponible sur www.rechtspraak.nl.
              [96] Art. 6, 2., de la directive: « Une pratique commerciale est également réputée trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances, elle amène ou est susceptible d'amener le consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement, et qu'elle implique:

              a) (…)

              b) le non-respect par le professionnel d'engagements contenus dans un code de conduite par lequel il s'est engagé à être lié, dès lors:

              i) que ces engagements ne sont pas de simples aspirations, mais sont fermes et vérifiables, et;

              ii) que le professionnel indique, dans le cadre d'une pratique commerciale, qu'il est lié par le code ».

              Voy. à cet égard art. VI.98, al. 1er, 2°, C.D.E.
              [97] Avis du 18 mai 2006 du Conseil de la Consommation sur le cadre de référence de la responsabilité sociétale des entreprises en Belgique (CIDD), p. 6.
              [98] Ibid.
              [99] G. Tritton, « International report » in Antitrust in the Groceries Sector & Liability Issues in Relation to Corporate Social Responsability, LIDC Contributions on Antitrust Law, Intellectual Property and Unfair Competition, P. Kobel, P. Këllezi et B. Kilpatrick (eds.), Berlin, Springer, 2015, p. 450.