Tribunal du commerce de Charleroi 3 mars 2014
SOCIÉTÉS
SPRL - Durée et dissolution - Dissolution judiciaire - Article 333 C. soc. - Action en dissolution introduite par le parquet - Notion d'intéressé - Intérêt direct et concret - Ordre public économique
En vertu de l'article 333 C. soc., tout intéressé peut demander la dissolution d'une SPRL devant le tribunal de commerce compétent lorsque l'actif net est réduit à un montant inférieur à 6.200 EUR. Le parquet est considéré comme une partie « intéressée » au sens de cette disposition. L'intérêt doit toutefois être direct et concret. Dans le cas d'espèce, le parquet ne démontre pas que le fait que l'actif net de la société soit inférieur à 6.200 EUR constitue une menace pour l'ordre public économique. En effet, le parquet n'apporte pas la preuve, d'une part, qu'un quelconque tiers soit lésé et d'autre part, qu'il soit porté atteinte aux droits des créanciers. Quant à ce dernier point, au contraire, les comptes annuels des 2 derniers exercices sociaux reflètent une situation financière de la société en voie de rétablissement. La dissolution sur base de l'article 333 C. soc. ne peut donc pas être accordée.
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VENNOOTSCHAPPEN
BVBA - Duur en ontbinding - Gerechtelijke ontbinding - Artikel 333 W.Venn. - Vordering tot ontbinding ingesteld door het parket - Begrip belanghebbende - Rechtstreeks en daadwerkelijk belang - Openbare economische orde
Iedere belanghebbende kan op grond van artikel 333 W.Venn. de ontbinding van een BVBA vorderen voor de bevoegde rechtbank van koophandel indien het netto-actief van de vennootschap gedaald is tot minder dan 6.200 EUR. Het parket valt in het kader van deze bepaling onder het begrip “belanghebbende”. Het belang dient evenwel rechtstreeks en daadwerkelijk te zijn. In casu toont het parket niet aan dat het feit dat het netto-actief van de vennootschap lager ligt dan 6.200 EUR een bedreiging vormt voor de openbare economische orde. Het parket kan niet het bewijs leveren dat hierdoor aan derden schade berokkend wordt noch dat afbreuk wordt gedaan aan de rechten van schuldeisers. Wat dit laatste aspect betreft blijkt integendeel uit de jaarrekeningen van de laatste 2 boekjaren dat de vennootschap financieel herstellende is. De vordering tot ontbinding op grond van artikel 333 W.Venn. kan dan ook niet worden ingewilligd.
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Procureur du Roi / SPRL Ramses
Siég.: J.-Ph. Lebeau (président), Y. Willemet (juge consulaire) et M. Balsat (juge consulaire suppléant) |
Pl.: Me A. Fiasse |
Le tribunal a constaté la production en formes régulières des pièces de procédure prévues par la loi.
Monsieur O. David, substitut du procureur du Roi, ainsi que maître A. Fiasse pour la partie défenderesse ont été entendus à l'audience du 3 février 2014.
Après avoir délibéré, le tribunal prononce le jugement suivant:
Exposé du litige |
La SPRL Ramses a été constituée le 18 août 1995 et pourvue d'un capital social de 18.600 EUR totalement libéré; elle a pour objet social toutes activités d'intermédiaire commercial et preste des services principalement axés sur la consultance, la publicité et la communication.
La société est en perte mais celles-ci sont compensées par des avances en compte courant du gérant.
Par acte d'huissier du 31 mai 2013, monsieur le procureur du Roi a cité la société en faillite et subsidiairement en dissolution, par application de l'article 333 du Code des sociétés, du fait de l'insuffisance des fonds propres.
Dans ses conclusions, le ministère public se limite aujourd'hui à demander la dissolution de la société.
Discussion |
L'article 333 du Code des sociétés stipule que:
« Lorsque l'actif net est réduit à un montant inférieur à 6.200 EUR, tout intéressé peut demander au tribunal la dissolution de la société. Le tribunal peut, le cas échéant, accorder à la société un délai en vue de régulariser sa situation (...). »
Jurisprudence et doctrine ont balancé sur la question de savoir si le ministère public était un « intéressé » au sens de l'article 333 C. soc.
Aujourd'hui, cette qualité n'est plus discutée (voy. M. Lemal, Manuel de la liquidation des sociétés commerciales, Kluwer, Ed. 2013, p. 101; Y. De Cordt, « Dissolution des sociétés pour pertes prononcées du capital social » (note sous Gand, 28 juin 2010), R.D.C., 2012, p. 62; M. Coipel, « Le ministère public peut-il demander la dissolution d'une SCRL, d'une SA ou d'une SPRL, lorsque l'actif net est réduit à un montant inférieur au minimum légal de la libération du capital? », J.D.S.C., 2012, p. 216).
Dans quelle condition le parquet se voit-il reconnaître la qualité d'« intéressé »?
Lorsqu'il se prévaut de son droit à citer en dissolution par application de l'article 333 C. soc., le parquet agit en tant que garant de l'ordre public économique mais, comme tout autre intéressé, il doit justifier d'un intérêt concret et direct. En d'autres termes, la recevabilité de son action dépend de l'existence d'un intérêt légitime dans son chef à obtenir une mesure nécessaire et proportionnée (M. Lemal, Manuel de la liquidation des sociétés commerciales, Kluwer, 2013, p. 100, n° 142; Y. De Cordt, « Dissolution des sociétés pour pertes prononcées du capital social », note sous Gand, 28 juin 2010, R.D.C., 2012, p. 62).
Ainsi le parquet ne pourra se limiter à une argumentation générale et abstraite, aux termes de laquelle les avances en compte courant du gérant étant impuissantes à garantir les créanciers de la même manière que les fonds déposés en capital, l'intérêt à agir du ministère public devra toujours être admis tant que ces avances n'auront pas été converties en parts sociales.
Encore sera-t-il indispensable qu'à l'appui de la demande en dissolution qu'il forme contre telle société, le parquet dépasse cette argumentation de principe et démontre que les droits des créanciers sont concrètement impactés au moment où le tribunal est appelé à se prononcer, ou risquent de l'être à court terme.
En l'occurrence, la société défenderesse fait état des éléments de fait suivants:
- le bilan provisoire arrêté au 31 décembre 2013 révèle que les fonds propres négatifs sont réduits à 50.077,31 EUR alors qu'ils s'élevaient à 188.229 EUR au 31 décembre 2012;
- depuis le 1er janvier 2013, la société a dégagé un bénéfice d'exploitation de 102.677,81 EUR, les dettes envers les fournisseurs sont minimes (8.649,29 EUR) et s'expliquent par des encours normaux; il n'y a pas de crédits bancaires;
- les fonds propres négatifs sont compensés par des avances en compte courant du gérant;
- la SPRL Ramses n'occupe pas de personnel salarié; les prestations sont exécutées quasi exclusivement par son gérant, monsieur Ch.P.;
- aucun créancier ne demande la dissolution ou ne cite en faillite.
On l'a dit plus haut, le ministère public est tenu, au même titre que tout autre intéressé, de démontrer un intérêt légitime, concret et direct.
En l'espèce, l'ordre public économique n'est pas menacé puisqu'aujourd'hui il n'existe aucun tiers lésé et que le tribunal n'aperçoit pas d'atteintes potentielles aux droits des créanciers dès lors que, comme le révèlent les comptes 2012 et 2013, la situation financière de la société est en voie de rétablissement.
Le ministère public ne démontrant pas la réunion des conditions d'application de l'article 333 C. soc., il n'y a pas lieu de prononcer la dissolution de la SPRL Ramses.
Par ces motifs
Le tribunal de commerce
Statuant contradictoirement
Dit n'y avoir lieu de prononcer la faillite de la SPRL Ramses, non plus que sa dissolution par application de l'article 333 du Code des sociétés.
Compense les dépens entre parties.
Il a été fait application de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire.
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