Article

Cour d'appel Bruxelles, 04/03/2010, R.D.C.-T.B.H., 2013/2, p. 108-112

Cour d'appel de Bruxelles 4 mars 2010

CONCESSION
Concession de vente exclusive - Succession de contrats - Contrat à durée déterminée succédant à un contrat à durée indéterminée
Lorsqu'une concession de vente a été consentie pour une durée indéterminée et que les parties concluent ultérieurement une nouvelle convention, à durée déterminée, les obligations contractuelles du concédant ne sont pas exclusivement régies par la convention ultérieure, à moins qu'il n'ait été régulièrement mis fin au préalable à la concession conclue pour une durée indéterminée. La conclusion d'un nouveau contrat entre les mêmes parties qui remplacerait tout accord verbal conclu antérieurement, ne peut être considéré comme une rupture régulière de celui-ci.
ARBITRAGE
Conditions - Clause inapplicable
Un litige relatif à la résiliation d'une concession de vente produisant ses effets dans tout ou partie du territoire belge n'est pas susceptible d'être réglé par la voie d'un arbitrage convenu avant la fin du contrat et qui a pour but et pour effet d'entraîner l'application d'une loi étrangère.
CONCESSION
Concession de vente exclusive - Indemnité de clientèle - Mode de calcul
La clientèle est un actif dont la valeur est fonction de son aptitude à produire des bénéfices. L'indemnité de clientèle peut être calculée sur la base du bénéfice net annuel. Eu égard à l'importance de la clientèle apportée par le concessionnaire, l'indemnité de clientèle peut en l'espèce être évaluée raisonnablement à deux années de bénéfice net moyen.
CONCESSIE
Concessie van alleenverkoop - Opeenvolging van contracten - Overeenkomst van bepaalde duur na contract van onbepaalde duur
Als een concessie van alleenverkoop voor onbepaalde duur werd gesloten en partijen later een nieuwe overeenkomst sluiten, van bepaalde duur, zijn de contractuele verbintenissen van de concessiegever niet uitsluitend beheerst door de latere overeenkomst, tenzij uitdrukkelijk een einde werd gesteld aan de overeenkomst gesloten voor onbepaalde duur. De totstandkoming van een nieuwe overeenkomst die elk eerder mondeling akkoord zou vervangen, kan niet beschouwd worden als een regelmatige beëindiging van de eerdere overeenkomst van onbepaalde duur.
ARBITRAGE
Voorwaarden - Arbitragebeding niet toepasselijk
Een geschil met als voorwerp een verkoopconcessie die zich uitstrekt op het geheel of een deel van het Belgische grondgebied kan niet geregeld worden via arbitrage overeengekomen voor het einde van de overeenkomst en die als gevolg heeft de toepassing van een buitenlands recht.
CONCESSIE
Concessie van alleenverkoop - Cliënteelvergoeding - Berekeningswijze
Het cliënteel is een actief waarvan de waarde afhangt van het potentieel om winst te genereren. De cliënteelvergoeding kan berekend worden op basis van de netto jaarwinst. Gelet op het belang van het cliënteel aangebracht door de concessiehouder kan de cliënteelvergoeding redelijk geraamd worden op twee jaar gemiddelde nettowinst.

Meunier Group SA / Happich Fahrzeug und Industrieteile GmbH

Siég.: H. Mackelbert (conseiller f.f. président), M.-F. Carlier et M. Moris (conseillers)
Pl.: Me P. Vermeire
I. La décision attaquée

L'appel est dirigé contre le jugement prononcé le 10 avril 2006 par le tribunal de commerce de Bruxelles.

Les parties ne produisent pas d'acte de signification de ce jugement.

(...)

III. Les faits et antécédents de la procédure

1. La société Ets A. Buhler, constituée en 1953, a pour activité la représentation et la fourniture en général de tous produits industriels, manufacturés ou non pour toutes industries et spécialement pour l'industrie de la carrosserie automobile, avions et matériel roulant, la fabrication, la vente, l'achat en gros et en détail, la transformation, l'exportation et l'importation de ces mêmes produits.

Le 18 juin 1973, M. Buhler, fondateur des Ets A. Buhler, cède à MM. d'Udekem d'Acoz et Lieutenant les 600 actions au porteur qu'il possède dans cette société.

La société Buhler, qui deviendra en cours de procédure la SA Meunier Group, expose être en relation d'affaires avec la société allemande Happich depuis 1947 à l'intermédiaire de M. Buhler et que cette société lui a confié la vente exclusive de ses produits en Belgique.

2. Le 28 novembre 1977, les sociétés Buhler et Happich signent une convention. Il y est notamment convenu que:

- Happich charge Buhler de la vente de ses produits sur le territoire de la Belgique;

- six clients nommément désignés sont exclus de la prospection par Buhler;

- Buhler achète et vend en son propre nom et pour son propre compte;

- le contrat entre en vigueur le 1er janvier 1978 pour une durée de trois ans; après ce délai, il se prolongera pour une durée indéterminée, à moins qu'il ne soit résilié par un des contractants avec un préavis d'un an par lettre recommandée;

- le contrat est régi par le droit allemand et tout litige sera réglé par arbitrage selon le règlement de la Chambre de commerce internationale; la procédure arbitrale aura lieu en République fédérale d'Allemagne, auprès de la Chambre de commerce de Wüppertal (art. 12).

Le 7 janvier 1993, MM. d'Udekem d'Acoz et Lieutenant cèdent à M. Meunier/la SA Bel MBA l'ensemble des actions de la société Ets A. Buhler.

Le 8 mars 1993, les sociétés Buhler et Happich signent une nouvelle convention. Il y est prévu entre autres que:

- le contrat qui entre en vigueur le 1er janvier 1993, est conclu pour une durée de trois ans, soit jusqu'au 31 décembre 1995; s'il n'a pas été résilié avec un préavis de six mois avant cette date, il devient un contrat à durée indéterminée qui pourra être résilié moyennant un préavis d'un an chaque année pour le 30 juin ou le 31 décembre (art. 14);

- la convention du 8 mars 1993 remplace la convention du 27 novembre 1977; après l'entrée en vigueur de la convention du 8 mars 1993, plus aucun droit ne pourra être tiré de la convention de distribution précédente (art. 15);

- le contrat est régi par le droit allemand et tout litige sera réglé conformément au règlement de la Chambre de commerce internationale par un ou plusieurs arbitres nommés selon ce règlement; la procédure d'arbitrage aura lieu en République fédérale d'Allemagne auprès de la Chambre de commerce et de l'industrie de Wüppertal (art. 17).

Le même jour, la société Buhler accorde une option d'achat à Happich d'une participation de 25 à 49% dans son capital.

Dans le courant de l'année 1994, les sociétés Happich et Buhler discutent d'une prise de participation de la première dans le capital de la seconde.

3. Par deux courriers du 29 mai 1995, Happich met fin au contrat au 30 juin 1995, voire au 31 décembre 1995.

Par courrier du 14 juin 1995, Buhler conteste avoir admis de faire rétroagir les effets de la résiliation au 30 juin 1995 et se prévaut de la loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation unilatérale des concessions exclusives de vente à durée indéterminée (ci-après dénommée la loi du 27 juillet 1961).

4. Le 5 juillet 1996, la société Ets A. Buhler fait citer Happich devant le tribunal de commerce de Bruxelles. Se fondant sur la loi belge du 27 juillet 1961, elle réclame le paiement d'une indemnité compensatoire de préavis, une indemnité complémentaire pour plus-value notable de clientèle ainsi que la désignation d'un expert judiciaire.

Par le jugement entrepris, le premier juge se déclare sans juridiction.

(...)

IV. Discussion
1. Sur le pouvoir de juridiction des cours et tribunaux belges

6. Le contrat du 8 mars 1993 ainsi que celui du 28 novembre 1977 attribuent compétence à un tribunal arbitral étranger tenu d'appliquer une loi étrangère.

Happich en déduit que les cours et tribunaux belges sont sans juridiction pour connaître du litige, et ce d'autant plus que le contrat du 8 mars 1993 est une convention à durée déterminée en sorte qu'il ne tombe pas dans le champ d'application de la loi du 27 juillet 1961.

Cette thèse ne peut être suivie.

D'une part, lorsqu'une concession a été consentie pour une durée indéterminée et que le concédant et le concessionnaire stipulent ultérieurement que la concession n'est conclue que pour une durée déterminée, les obligations contractuelles du concédant ne sont pas exclusivement régies par la convention ultérieure, à moins qu'il n'ait régulièrement été mis fin au préalable à la concession conclue pour une durée indéterminée (Cass. 16 septembre 1999, Pas. 1999, I, p. 464).

En égard au caractère impératif de l'article 2 de la loi du 27 juillet 1961 qui n'autorise la résiliation d'une concession de vente exclusive à durée indéterminée, hors le manquement grave, que moyennant un préavis raisonnable ou une juste indemnité, la conclusion d'un nouveau contrat entre les mêmes parties qui remplacerait tout autre accord verbal conclu préalablement ne peut être considéré comme une rupture régulière de celui-ci.

Le changement de la personne dirigeant la société concessionnaire en raison du changement de son actionnariat et l'ignorance du concédant des mérites de cette nouvelle direction et de ce nouvel actionnaire ne constituent pas une exception aux principes rappelés ci-avant.

Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les parties auraient convenu de l'octroi d'un préavis raisonnable ou d'une juste indemnité lors de la résiliation de la convention du 28 novembre 1977 par Happich, convention qui s'analyse en un contrat de concession de vente exclusive à durée indéterminée.

Vainement Happich affirme-t-elle que les parties auraient mis fin de commun accord au contrat du 28 novembre 1977. C'est manifestement pour satisfaire aux exigences de son banquier de bénéficier de l'assurance que les relations contractuelles avec Happich dureraient au moins trois ans - cette relation faisant la valeur de la société Ets Buhler et assurant la capacité de remboursement de Meunier -, que cette dernière s'est vue contrainte d'accepter la signature de la convention du 8 mars 1993 imposée par Happich. Il eut, en effet, suffi à Meunier de disposer de l'engagement de Happich de continuer les relations contractuelles pendant au moins trois ans pour satisfaire à la demande de la banque. La conclusion d'une nouvelle convention ne s'imposait pas dans le chef de Meunier.

Il s'en déduit que les articles 14 et 15 de la convention du 8 mars 1993 relatifs à la durée du contrat, à sa rupture et à la fin de la convention du 28 novembre 1977 n'ont aucune force obligatoire et ne peuvent avoir d'effet, dès lors qu'ils se heurtent à la loi du 27 juillet 1961 (cf. Cass. 8 juin 1977, Pas. 1977, I, p. 1033).

D'autre part, lorsque la convention d'arbitrage est, comme en l'espèce, soumise à une loi étrangère, le juge saisi d'un déclinatoire de juridiction doit exclure l'arbitrage si, en vertu de sa lex fori, le litige ne peut être soustrait à la juridiction des tribunaux étatiques (Cass. 16 novembre 2006, RDC-TBH 2007, p. 889; Cass. 14 janvier 2010, C.08.0503.N).

Un litige relatif à la résiliation d'une concession de vente produisant ses effets dans tout ou partie du territoire belge n'est pas susceptible d'être réglé par la voie d'un arbitrage convenu avant la fin du contrat et qui a pour but et pour effet d'entraîner l'application d'une loi étrangère (P. Kileste et P. Hollander, “Examen de jurisprudence, juillet 2002 à décembre 2008”, RDC-TBH 2009, 240, n° 162). La soumission à l'arbitrage des litiges tombant dans le champ d'application de la loi n'est admise par les juges belges que s'ils constatent que les arbitres ont l'obligation d'appliquer les dispositions de la loi belge (L. Mertens, “Arbitrabilité des litiges concernant la résiliation des concessions de vente exclusive soumises à la loi belge du 27 juillet 1961: la bouteille à encre est-elle enfin épuisée”, RDC-TBH 2007, p. 898, n° 51), ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Il s'en déduit que la clause d'arbitrage est contraire à l'article 4 de la loi du 27 juillet 1961 et qu'elle ne peut trouver application.

7. Happich soutient dans un second temps que les cours et tribunaux belges seraient en toute hypothèse sans juridiction pour connaître de la demande fondée sur l'article 3 de la loi du 27 juillet 1961.

Ce moyen ne peut pas davantage être retenu.

Dès lors que les parties en litige sont établies dans deux pays de la Communauté européenne (la Belgique et l'Allemagne), l'article 4 de la loi de 1961 s'efface devant le règlement (CE) n° 44 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale.

En l'espèce, il y a lieu d'appliquer l'article 5 du règlement qui dispose que:

Une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite, dans un autre Etat membre:

1) a) en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée;

b) aux fins de l'application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est:

- pour la vente de marchandises, le lieu d'un Etat membre ou, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées;

- pour la fourniture de services, le lieu d'un Etat membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis.

Le contrat de concession doit être considéré comme une fourniture de services puisqu'il y a lieu de le distinguer de la succession des contrats successifs d'achat et de vente (P. Hollander, “L'arrêt Leathertex Shenavai revisité”, RDC-TBH 2000, 178; P. Kileste et P. Hollander, “Examen de jurisprudence 1997-2002”, RDC-TBH 2003, p. 450; M. Wagemans et C. Levy, “Concession exclusive de vente”, RPDB, T. IX, 2004, p. 967).

L'obligation de respecter un préavis raisonnable s'exécute en Belgique et fonde la compétence du juge belge (Gand 2 mai 2005, Revue@dipr.be, 2006/4, p. 64). Par ailleurs, en cas de résiliation par le concédant, celui-ci est tenu d'allouer une indemnité compensatoire de la perte que le concessionnaire subit à défaut de préavis raisonnable; l'obligation d'allouer une telle indemnité constitue non une obligation contractuelle autonome, mais une obligation se substituant à l'obligation contractuelle de respecter un préavis raisonnable qui n'est pas remplie (Cass. 4 décembre 2003, C.01.0439.N).

Il en est de même pour l'indemnité complémentaire pour plus-value notable de clientèle qui est une demande accessoire de l'indemnité compensatoire de préavis (Bruxelles 3 avril 1997, D.A. O.R. 1997, p. 93; Mons 21 décembre 1999, JT 1999, p. 275). Il importe en effet de centraliser toutes les demandes au lieu d'exécution de la demande principale (CJCE 15 janvier 1987, C-286/86, Shenaval).

2. Sur l'indemnité compensatoire de préavis

8. Il est constant et du reste non contesté que les parties étaient liées par un contrat de concession de vente exclusive.

Il découle des considérations émises précédemment que ce contrat était conclu pour une durée indéterminée et que vainement Happich se réfère à l'article 14 de la convention du 8 mars 1993 pour soutenir que la résiliation de la relation contractuelle était régulière.

Happich estime que le délai de sept mois alloué à Meunier, soit entre le 29 mai 1995 et le 31 décembre 1995, est largement suffisant. Meunier réclame 35 mois supplémentaires, 42 mois constituant à ses yeux un préavis raisonnable.

9. Le préavis raisonnable doit permettre au concessionnaire d'exécuter les obligations qu'il a contractées envers les tiers et de se procurer une source de revenus nets équivalente à celle qu'il a perdue, le cas échéant moyennant reconversion totale ou partielle de ses activités. Le préavis doit, au minimum, laisser au concessionnaire le temps de supprimer certains frais fixes ou de retrouver une source de revenus couvrant les frais incompressibles. Le concessionnaire ne peut prétendre à un délai de préavis lui permettant dans tous les cas de retrouver une concession produisant des effets équivalents à la concession perdue et ce, quel que soit l'aléa de cette recherche (Cass. 10 février 2005, RG C.03.0418.F).

Il ressort des explications fournies par Meunier que si en 1991/1992, les produits Happich représentaient 96% de son chiffre d'affaires, ce pourcentage est cependant descendu en 1995 à 51%. Meunier précise que le volume a en effet régressé dès après la cession du 7 janvier 1993, car l'intimée a rapidement manifesté l'intention de lever l'option d'achat sur les actions pour une majorité du capital, ce que Meunier n'a pas accepté, en sorte qu'elle a commencé à se réorienter, craignant un changement dans les relations commerciales.

Ainsi,


Années C.A. Happich/C.A. total
1991 96%
1992 96%
1993 88%
1994 76%
1995 51%

Ces chiffres démontrent qu'en moins de trois années, Meunier a réduit de 45% la part des produits Happich dans son chiffre d'affaires et ce, de manière exponentielle d'année en année.

Au regard de ces éléments, il y a lieu de considérer qu'un préavis de 18 mois est raisonnable. Meunier a donc droit à une indemnité équivalente à 11 mois supplémentaires.

10. Quant au montant auquel Meunier peut prétendre, l'indemnité compensatoire de préavis doit être égale au bénéfice semi-net moyen que le concessionnaire aurait réalisé pendant la période de préavis non respecté.

Ce bénéfice semi-net est égal au bénéfice net augmenté des frais généraux incompressibles exposés en rapport avec la concession.

Il y a lieu de prendre pour période de référence les deux années précédant la fin de la concession, celles-ci reflétant le mieux la valeur économique de la concession avant la rupture, soit les années 1993 et 1994.

Il n'y a aucun motif de recourir aux lumières d'un expert, comme le demande Happich, dès lors qu'il n'y a pas lieu de douter de la véracité des bilans dressés pour Meunier par le comptable Cogestfico (cf. pièces 13 du dossier de Meunier).

Le montant dû à Meunier est dès lors de 111.836,98 EUR. Il se calcule comme suit:

([(94.287,05 EUR + 99.944,77 EUR) + (128.493,35 EUR + 155.721,82 EUR)] x 11 x 51%]/24

3. Sur l'indemnité complémentaire pour plus-value notable de clientèle

11. L'article 3, 1° de la loi du 27 juillet 1961 pose trois conditions à l'octroi de l'indemnité pour plus-value de clientèle:

1. l'exploitation de la concession doit avoir entraîné une plus-value notable de clientèle;

2. cette plus-value doit avoir été apportée par le concessionnaire;

3. et la clientèle ainsi apportée doit rester acquise au concédant à la fin de la concession.

Pour établir l'existence d'une plus-value notable de clientèle, il est souvent procédé à une comparaison entre le début et la fin de la concession en ce qui concerne notamment le nombre de clients, le volume de vente des produits concédés et le chiffre d'affaires réalisé par la vente des produits concédés, en tenant compte dans ce cas de l'évolution des prix des produits concédés, du taux de change de la monnaie et du marché (J.-P. Fierens et A. Mottet Haugaard, “La loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation des concessions de vente exclusive à durée indéterminée (1987-1996)”, JT 1998, p. 117; J.-P. Fierens, A. Mottet Haugaard, Th. Faelli et S. Griess, “La loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation des concessions de vente exclusive à durée indéterminée (1987-2007)”, Les dossiers du JT, Larcier, 2008, p. 89).

En l'espèce, il est constant que Buhler, devenue Meunier, fut le premier distributeur des produits Happich sur le territoire belge, en sorte que la clientèle provient nécessairement de son activité.

Cette plus-value est également notable, puisqu'il n'est pas contesté que Buhler est partie de rien.

De même, eu égard à l'importance du chiffre d'affaires réalisé encore par Meunier avant la rupture, cette clientèle lui restera acquise ou, à tout le moins, est susceptible de le rester.

Meunier a en conséquence droit à une indemnité de clientèle.

12. S'il n'existe pas une méthode unique imposée par le législateur pour le calcul de celle-ci, il n'est pas contestable que la clientèle est un actif dont la valeur est fonction de son aptitude à produire des bénéfices. L'indemnité peut être calculée sur la base du bénéfice net annuel que cette clientèle a engendré, comme le demande Meunier.

Eu égard à l'importance de la clientèle apportée par Meunier, l'indemnité de clientèle peut être évaluée raisonnablement à deux années de bénéfice net moyen, soit 99.058,23 EUR calculée comme suit: (94.287,05 EUR + 99.944,77 EUR) x 51%.

(...)