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Actualité : Cour constitutionnelle, 24/11/2011, R.D.C.-T.B.H., 2012/1, p. 105-107

Cour constitutionnelle 24 novembre 2011

Aff.: n° 180/2011, RG 5063
ASSURANCE TERRESTRE
Assurance de personnes - Assurance maladie - Activités complémentaires des mutualités - Loi du 26 avril 2010 portant des dispositions diverses en matière d'organisation de l'assurance maladie complémentaire - Constitutionnalité


LANDVERZEKERING
Persoonsverzekering - Ziekteverzekering - Bijkomende activiteiten van de mutualiteiten - Wet van 26 april 2010 houdende diverse bepalingen inzake de organisatie van de aanvullende ziekteverzekering - Grondwettelijkheid


Par l'arrêt n° 180/2011 du 24 novembre 2011, la Cour constitutionnelle a rejeté le recours en annulation partielle de la loi du 26 avril 2010 portant des dispositions diverses en matière d'organisation de l'assurance maladie complémentaire (I) (MB du 28 mai 2010), introduit par l'association belge des assureurs Assuralia.

Cette loi a pour but d'assurer la mise en conformité au droit européen - particulièrement aux directives ayant conduit à l'avènement du marché unique des assurances - de la législation applicable aux activités d'assurance maladie complémentaire effectuées par les mutualités au-delà de leurs missions légales relevant du cadre de la sécurité sociale obligatoire. Elle prévoit, notamment, l'obligation pour les entités mutualistes désireuses de proposer des assurances maladie complémentaires de passer par une personne morale distincte (société mutualiste), soumise à des conditions d'agrément et d'exercice à l'instar des entreprises d'assurance autorisées à pratiquer la branche 'maladie' (branche 2 de la nomenclature figurant à l'annexe I du règlement général de contrôle du 22 février 1991).

Dans son recours, Assuralia soutenait qu'un certain nombre de dispositions de la loi du 26 avril 2010 violent le principe constitutionnel d'égalité et de non-discrimination, de même que certaines libertés consacrées par les droits belge et européen.

La Cour constitutionnelle a rejeté l'ensemble des moyens invoqués par Assuralia, en jugeant, en substance, que:

    • le fait que les articles 30 et 41 de la loi attaquée habilitent le pouvoir exécutif à tenir compte de la situation particulière des sociétés mutualistes pour écarter ou aménager l'application de dispositions de la loi sur le contrat d'assurance terrestre (LCAT) ou de la loi relative au contrôle des entreprises d'assurance à leur égard, ne porte pas atteinte au principe d'égalité et de non-discrimination;
    • le fait que, selon l'article 44 de la loi attaquée, le ministre des Affaires sociales soit associé au ministre de la Justice et au ministre qui a les assurances dans ses attributions pour aménager le statut des sociétés mutualistes au regard de la LCAT est raisonnablement justifié par la nature des entités concernées et des objectifs poursuivis par la loi attaquée;
    • la thèse d'Assuralia selon laquelle l'article 16 de la loi attaquée permet aux sociétés mutualistes, en cas de fusion, de modifier leurs droits et obligations, alors que les assureurs privés ne le peuvent pas, repose sur une lecture erronée de cet article;
    • contrairement aux allégations d'Assuralia, il ne découle pas de l'article 5, 7° de la loi attaquée que les sociétés mutualistes peuvent, par une simple modification de leurs statuts, modifier de leur plein gré les droits et obligations afférents aux assurances maladie qu'elles proposent;
    • l'article 46 de la loi attaquée n'instaure pas une différence de traitement entre les sociétés mutualistes et les entreprises d'assurance en ce qui concerne le nombre de responsables de la distribution de leurs produits;
    • le fait qu'un certain nombre de dispositions de la loi attaquée confient le contrôle du respect du droit des assurances par les sociétés mutualistes à l'Office de contrôle des mutualités (OCM), et non aux autorités en charge du contrôle des entreprises d'assurance, apparaît justifié par les principes fondamentaux encadrant l'activité de ces sociétés (assistance mutuelle, prévoyance, solidarité, absence de but lucratif);
    • le fait que la forme de la société mutualiste d'assurance soit réservée au seul secteur des mutualités, à l'exclusion du secteur des assurances privées, ne limite pas de manière injustifiée la liberté de commerce et d'industrie des entreprises d'assurance;
    • compte tenu de la différence existant entre l'épargne prénuptiale proposée sans but lucratif par les mutualités et les services offerts par les entreprises d'assurance, il est raisonnablement justifié de n'imposer aux unions nationales de mutualités que la constitution de fonds de réserve en relation avec cette épargne et d'imposer des obligations plus importantes (marge de solvabilité, fonds de garantie minimum) aux entreprises d'assurance;
    • les services visés à l'article 3, 1er alinéa, sous b) et c), de la loi relative aux mutualités [1] relèvent, ainsi que le prévoit à juste titre l'article 2 de la loi attaquée, des opérations exclues du champ d'application des directives européennes en matière d'assurance non-vie;
    • l'obligation faite, par l'article 67 de la loi attaquée, aux membres d'une mutualité de s'affilier auxdits services n'est pas contraire aux libertés d'établissement et de prestation de services consacrées par le droit primaire de l'Union, étant donné qu'elle est nécessaire à la réalisation de la solidarité qu'incarnent ces services, qui n'ont aucun caractère économique et sont soumis au contrôle étatique, au sens de la jurisprudence européenne;
    • le fait que la fourniture de ces services soit réservée, en vertu des articles 2 et 67 de la loi attaquée, aux mutualités n'entame pas la liberté des entreprises d'assurance de proposer des contrats complémentaires aux membres de ces mutualités.
    [1] Ces services sont les suivantes: “b) l'intervention financière pour le[s] membres [des mutualités] et les personnes à leur charge, dans les frais résultant de la prévention et du traitement de la maladie et de l'invalidité ou l'octroi d'indemnités en cas d'incapacité de travail ou lorsque se produit une situation en vertu de laquelle le bien-être physique, psychique ou social visé à l'art. 2 peut être encouragé; c) l'octroi d'aide, d'information, de guidance et d'assistance en vue de promouvoir le bien-être physique, psychique et social, entre autre par l'accomplissement des missions visées sous a) et b)”.