Article

Cour du travail Liège, 08/02/2010, R.D.C.-T.B.H., 2011/2, p. 159-165

Cour du travail de Liège 8 février 2010

ASSURANCE
Assurance terrestre - Assurance groupe - Violation du principe de non-discrimination - Différence de traitement dans le calcul de la pension complémentaire, en fonction de la date d'adhésion à l'assurance groupe - Action en responsabilité extracontractuelle contre l'assureur - Prescription - Défaut de mise en garde de l'employeur contre l'éventualité d'une violation de la loi
L'action intentée par d'anciens travailleurs affiliés à un plan d'assurance groupe à l'encontre de l'assureur, sur la base de l'article 1382 ou de l'article 1383 du Code civil, pour tierce complicité dans la violation par l'employeur de dispositions légales interdisant les discriminations entre travailleurs relevant d'une même catégorie de personnel, est soumise au délai de prescription quinquennal prévu à l'article 2262bis, § 1er, 2ème alinéa, du Code civil.
Des dispositions d'un règlement d'assurance groupe qui, au sein d'une même catégorie de personnel, réservent, sans justification objective et raisonnable, le bénéfice d'une formule de calcul plus favorable, entrée en vigueur à une date déterminée, aux travailleurs adhérant au plan d'assurance groupe à partir de cette même date, à l'exclusion des travailleurs qui y avaient adhéré antérieurement à celle-ci, violent le principe de non-discrimination inscrit à l'article 45, 1er alinéa, de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, ainsi qu'à l'article 4, § 1er, de la loi du 6 avril 1995 relative aux pensions complémentaires ('loi Colla').
Adopte un comportement négligent, au sens de l'article 1383 du Code civil, l'assureur qui n'attire pas l'attention de l'employeur, à tout le moins, sur l'éventualité d'une incompatibilité de dispositions d'un règlement d'assurance groupe avec le principe de non-discrimination.
VERZEKERING
Landverzekering - Groepsverzekering - Schending van het niet-discriminatiebeginsel - Verschil in behandeling bij de berekening van het aanvullend pensioen afhankelijk van de toetredingsdatum tot de groepsverzekering - Buitencontractuele vordering tegen de verzekeraar - Verjaring - Geen waarschuwing van de werkgever over een mogelijke schending van de wet
De vordering ingesteld tegen de verzekeraar op grond van de artikelen 1382 en 1383 van het Burgerlijk Wetboek door oud-werknemers aangesloten bij een groepsverzekeringsplan wegens derdemedeplichtigheid van de werkgever bij de schending van de wettelijke bepalingen ter bestrijding van discriminatie tussen werknemers die tot dezelfde personeelscategorie behoren, is onderworpen aan de vijfjarige verjaringstermijn voorzien in artikel 2262bis, § 1, 2de alinea, van het Burgerlijk Wetboek.
Bepalingen in het reglement van de groepsverzekering die binnen eenzelfde personeelscategorie het voordeel van een gunstigere berekeningsformule die op een bepaalde datum in werking is getreden, zonder objectieve en redelijke verantwoording, voorbehouden aan werknemers die vanaf diezelfde datum tot dit verzekeringsplan toegetreden zijn, met uitsluiting van werknemers die reeds voorafgaand aan deze datum toegetreden waren, maken een schending uit van het niet-discriminatiebeginsel bepaald in artikel 45 van de wet van 27 juni 1969 ter herziening van de besluitwet van 28 december 1944 betreffende de maatschappelijke zekerheid der arbeiders, alsook in artikel 4, § 1, van de wet van 6 april 1995 betreffende de aanvullende pensioenen ('wet Colla').
De verzekeraar die nalaat de aandacht van de werkgever te vestigen minstens op het feit dat bepalingen van een reglement van een groepsverzekering mogelijks onverenigbaar zijn met het niet-discriminatiebeginsel, gedraagt zich nalatig in de zin van artikel 1383 van het Burgerlijk Wetboek.

D.H. et T.J. / SA AG Insurance

Siég.: J.-C. Germain (président), J. Devillers (conseiller social) et M.-R. Fortuny-Sanchez (conseiller social)
Pl.: Mes O. Strypstein loco Y. Strypstein et V. Petry, A.-S. Martens

(…)

I. Rappel
1. La cause

L'appelant au principal, monsieur T., et l'appelante au principal, madame D., ont été employés par l'ASBL Cliniques universitaires Saint-Luc (ci-dessous: l'ASBL) à partir, respectivement, du 1er avril 1971 et du 1er mai 1976.

Dès 1975, l'ASBL a conclu un contrat d'assurance de groupe accordant notamment une pension extra-légale au personnel de cadre des services administratifs et techniques. Monsieur T. a été 'affilié' à cette assurance le 1er juin 1975 et madame D. le 1er avril 1985 (c'est-à-dire qu'ils ont répondu, à ces dates, aux conditions d'affiliation fixées par le règlement d'assurance).

Le 7 avril 1988, l'ASBL a conclu, avec la compagnie d'assurances à laquelle succède l'actuelle intimée au principal (ci-dessous: l'assureur), une nouvelle 'Convention d'assurance de groupe pension extra-légale', assortie d'un nouveau règlement d'assurance. Celui-ci, en son article 3, fixe la formule de calcul de la rente viagère dont le capital est versé au bénéficiaire à l'âge normal de la retraite (65 ans ou 60 ans selon le sexe). Cette formule tient compte d'une durée de carrière différente pour les hommes (45 ans) et pour les femmes (40 ans). Ces dispositions ont été appliquées, à compter du 1er janvier 1988, à tous les affiliés au régime d'assurance antérieur.

Le 23 février 1990, l'ASBL et l'assureur ont souscrit, avec effet au 1er janvier précédent, une 'Annexe n° 3' au règlement d'assurance, qui modifie, dans l'article 3 de ce dernier, la formule de calcul de la rente viagère “pour les membres du personnel affiliés à partir du 1er janvier 1988”. Il semble que la nouvelle formule était plus avantageuse que la précédente.

Le 24 juin 1996, l'ASBL et l'assureur ont signé, avec effet au 1er janvier précédent, une 'Annexe n° 11' au règlement d'assurance. Celle-ci visait à remédier à la différence de traitement entre hommes et femmes, conformément à l'article 5 de la loi du 6 avril 1995, entrée en vigueur le 1er janvier 1996, relative aux régimes de pensions complémentaires (dite 'loi Colla'). Elle uniformisait, pour les bénéficiaires tant féminins que masculins, sur la base d'une carrière normale de 45 ans, la formule de calcul de la rente viagère, telle que prévue dans le règlement d'assurance du 7 avril 1988 pour les bénéficiaires affiliés avant le 1er janvier 1988 ou dans l'annexe n° 3 du 23 février 1990 pour les bénéficiaires affiliés depuis le 1er janvier 1988.

Le 1er décembre 1998, monsieur D. a accédé à la retraite, à l'âge de 65 ans; il avait perçu, le 30 novembre, un capital brut de 1.637.490 FB. Le 1er juin 1999, madame D. a pris sa retraite à son tour, à l'âge de 61 ans; elle a perçu, le 5 juillet suivant, un capital brut de 280.879 FB. Ces montants ont été calculés conformément au prescrit de l'article 3 du règlement d'assurance du 7 avril 1988, modifié par l'annexe n° 11 du 24 juin 1996.

Le 26 septembre 2001, monsieur T. et madame D., par un exploit de citation commun, ont assigné conjointement l'ASBL et l'assureur à comparaître devant le tribunal du travail de Bruxelles. Ils demandaient que les parties citées soient condamnées, solidairement ou in solidum ou l'une à défaut de l'autre, à payer à monsieur T. un capital brut de 2.289.829 FB (ou 56.639,43 EUR) et à madame D. un capital brut de 3.728.470 FB (soit 92.426,36 EUR), ainsi que les intérêts judiciaires et les dépens.

D'après eux, les montants réclamés correspondaient à la différence entre le capital de la rente calculé selon la formule figurant dans l'annexe n° 3, modifiée par l'annexe n° 11 en ce qui concernait Mme D., et le capital qui leur a été effectivement versé.

Dans leur acte introductif d'instance, ils invoquaient une discrimination entre les membres du personnel affiliés à l'assurance de groupe avant le 1er janvier 1988 et ceux affiliés depuis cette date, “bénéficiaires d'un régime beaucoup plus favorable”.

Ultérieurement, dans le cours de la procédure, ils ont fait plus précisément grief à l'ASBL, ainsi qu'à l'assureur en tant que tiers complice de l'ASBL, de la violation de:

1) l'article 45, 1er alinéa, de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs, aux termes duquel “Tout employeur qui accorde volontairement à son personnel des avantages d'ordre social complémentaires de ceux qui résultent de la présente loi, doit les accorder sans distinction à tous les travailleurs de son entreprise appartenant à une même catégorie”;

2) l'article 4, § 1er, de la 'loi Colla' précitée (actuellement abrogée et remplacée par la loi du 28 avril 2003 relative aux pensions complémentaires et au régime fiscal de celles-ci et de certains avantages complémentaires en matière de sécurité sociale), suivant lequel “Tout employeur qui conclut un engagement de pension au profit des travailleurs ou d'une partie des travailleurs, ne peut créer de distinctions illicites entre les travailleurs de son entreprise qui appartiennent à une même catégorie.”

2. La procédure
2.1. Le jugement du tribunal du travail de Bruxelles

(…)

2.2. L'arrêt de la cour du travail de Bruxelles

(…)

2.3. L'arrêt de la Cour de cassation

A la suite du pourvoi de l'assureur, partie demanderesse en cassation, monsieur T. et madame D. étant défendeurs, la Cour de cassation, en son arrêt du 12 mars 2007, fait les constatations et prend les décisions libellées comme suit:

“Après avoir énoncé que la demande des défendeurs contre la demanderesse est 'fondée sur la tierce complicité de la violation par l'employeur de l'article 45 de la loi du 27 juin 1969 et de l'article 4 de la 'loi Colla', et donc sur la responsabilité professionnelle extracontractuelle de l'assureur', l'arrêt, pour dire cette demande non prescrite, considère que 'aux termes de l'article 2262bis du Code civil, une telle demande en réparation d'un dommage fondée sur les articles 1382 et 1383 du même code (...) se prescrit par cinq ans à partir du jour qui suit celui où la personne lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l'identité de la personne responsable'.

Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que la demanderesse a soutenu que l'action était prescrite en vertu de l'article 15 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail tandis que les défendeurs ont fait valoir que leur action n'est pas soumise à la prescription annale prévue à cette disposition mais à la prescription triennale de l'article 34 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, sans qu'aucune des parties ait allégué que s'appliquait l'article 2262bis du Code civil.

En élevant d'office le moyen déduit de cette disposition, sans le soumettre à la contradiction des parties, la cour du travail a méconnu le droit de défense de la demanderesse.”

Partant, en son dispositif, la Cour “casse l'arrêt attaqué en tant qu'il dit 'non prescrite et donc recevable' la demande de chacun des défendeurs contre la demanderesse” et “renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour du travail de Liège”.

II. Saisine de la Cour

Lorsque la Cour de cassation prononce une cassation partielle et renvoie la cause dans une mesure limitée, le dispositif non cassé de la décision attaquée ne peut plus être remis en question devant le juge de renvoi (Cass. 13 février 2006, Pas. 2006, I, p. 359).

Il suit que l'arrêt de la cour du travail de Bruxelles ne peut être ici contesté en ce qu'il déclare prescrites les demandes de monsieur T. et madame D. à l'encontre de l'ASBL et non fondée leur demande tendant à solliciter l'avis de la Commission bancaire, financière et des assurances.

Ainsi que l'indique l'arrêt de la Cour de cassation, il appartient à la présente cour de statuer sur le point de savoir si, oui ou non, la demande de chacun des deux intéressés contre l'assureur est 'non prescrite et donc recevable'. Il lui appartient aussi de statuer, le cas échéant, sur le fondement de chacune desdites demandes, à l'égard duquel la cour du travail de Bruxelles ne s'est pas prononcée.

Plus précisément encore, comme l'arrêt de la Cour de cassation a pour effet de remettre les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt attaqué, sur les points qui peuvent encore être contestés, la présente cour est tenue de statuer sur le fondement de l'appel incident, qui querelle le jugement du tribunal du travail de Bruxelles en ce qu'il reçoit les demandes contre l'assureur et, si cet appel n'est pas fondé, sur le fondement de l'appel principal, en tant qu'il critique le jugement dans la mesure où celui-ci déclare non fondées les demandes contre l'assureur.

III. Fondement des appels

Il est donc logique d'examiner le fondement de l'appel incident de l'assureur avant celui de l'appel principal de monsieur T. et madame D.

1. Fondement de l'appel incident

Contrairement à ce que l'assureur soutient, les demandes dirigées contre lui ne sont pas prescrites en vertu de l'article 15, 1er alinéa, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail.

En effet, cette disposition légale concerne la prescription des 'actions naissant du contrat'. Il est vrai que celles-ci peuvent découler, non seulement directement, mais aussi indirectement du contrat de travail. Mais elles ne visent que les actions exercées entre parties à ce contrat.

Il suit que les demandes litigieuses ne sont pas des actions naissant du contrat, car elles sont mues par monsieur T. et madame D. contre l'assureur, lequel n'était pas partie à leur contrat de travail conclu avec l'ASBL.

Par ailleurs, c'est à tort aussi que monsieur T. et madame D. continuent à argumenter que leurs demandes contre l'assureur seraient soumises à l'article 34 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, en ce qu'il dispose que “Le délai de prescription de toute action dérivant du contrat d'assurance est de trois ans.”

En effet, leurs demandes ne dérivent pas du contrat d'assurance de groupe, même par le biais de la stipulation pour autrui dont ils sont les bénéficiaires, étant donné qu'elles ne tendent pas à obtenir l'exécution de ce contrat, ni des dommages et intérêts pour inexécution de l'une de ses clauses. C'est que l'assureur leur a payé très exactement ce qui était convenu, aux conditions convenues.

Mais monsieur T. et madame D. plaident aussi, et très clairement depuis l'arrêt de la cour du travail de Bruxelles et l'arrêt de la Cour de cassation, que leurs demandes contre l'assureur constituent des actions en responsabilité extracontractuelle, basées sur les articles 1382 et 1383 du Code civil. Cette qualification peut être admise puisqu'ils sollicitent la reconnaissance de la tierce complicité de l'assureur dans la violation par l'ASBL des dispositions légales, citées plus haut, qui imposaient à celle-ci l'égalité de traitement entre bénéficiaires d'une même catégorie. Ils ajoutent réclamer en conséquence la réparation du dommage issu de la discrimination dont ils prétendent avoir été victimes.

Partant, il y a effectivement lieu d'appliquer aux demandes examinées l'article 2262bis du Code civil, du moins pour la période prenant cours le 27 juillet 1998, date de l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1998 qui a introduit cet article.

Ce dernier énonce en son § 1er, 1er alinéa: “Toutes les actions personnelles sont prescrites par dix ans”. Il prévoit en son § 1er, 2ème alinéa: “Par dérogation à l'alinéa 1er, toute action en réparation d'un dommage fondée sur une responsabilité extracontractuelle se prescrit par cinq ans à partir du jour qui suit celui où la personne lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l'identité de la personne responsable.”

Si, en l'espèce, le délai de prescription débute le lendemain du versement du capital, jugé insuffisant par monsieur T. et madame D., qui est intervenu pour le premier le 30 novembre 1998 et pour la seconde le 5 juillet 1999, leur action commune intentée le 26 septembre 2001 n'est pas prescrite.

Si le départ de la prescription se situe, au plus tôt d'ailleurs, le lendemain de la signature, le 23 février 1990, de l'annexe n° 3 au règlement d'assurance du 7 avril 1998, considérée comme discriminatoire, l'action n'est pas non plus prescrite. En effet, avant la mise en application de l'article 2262bis, cette action se prescrivait par trente ans en vertu de l'ancien article 2262 du même code. Puis la loi du 10 juin 1998, introduisant l'article 2262bis, a adopté en son article 10 la disposition transitoire suivante: “Lorsque l'action a pris naissance avant l'entrée en vigueur de la présente loi (soit le 27 juillet 1998), les nouveaux délais de prescription qu'elle institue ne commencent à courir qu'à partir de son entrée en vigueur. Toutefois, le délai total de prescription ne peut dépasser trente ans.”

Il faut ainsi conclure que la demande tant de monsieur T. que de madame D. contre l'assureur est 'non prescrite et donc recevable'. Dès lors, l'appel incident est non fondé.

2. Fondement de l'appel principal

Avant d'apprécier la responsabilité de l'assureur dans la violation par l'ASBL des dispositions légales concernées, il faut commencer par examiner si celles-ci ont été ou non effectivement violées par l'ASBL. Ce fut au demeurant la démarche suivie par le premier juge puis par la cour du travail de Bruxelles.

2.1. Sur la violation de la loi
2.1.1. Les dispositions légales invoquées

L'article 45, 1er alinéa, de la loi du 27 juin 1969, en vigueur lors de l'adoption des annexes n° 3 et n° 11 au règlement d'assurance, dispose donc que “Tout employeur qui accorde volontairement à son personnel des avantages d'ordre social complémentaires de ceux qui résultent de la présente loi doit les accorder sans distinction à tous les travailleurs de son entreprise appartenant à une même catégorie.”

L'article 45, 2ème alinéa, ajoute: “Dans les entreprises qui occupent plus de vingt travailleurs, ces avantages doivent être accordés suivant un règlement établi avec le concours des représentants du personnel qui seront désignés selon une procédure fixée par arrêté royal.” Celui-ci, semble-t-il, n'a jamais été adopté. Cette carence constitue un obstacle, non pas à l'octroi des avantages visés, mais aux modalités de cet octroi telles qu'annoncées par l'article 45, 2ème alinéa. Elle n'a donc pas pour effet de rendre inapplicable la règle de non-discrimination énoncée dans l'article 45, 1er alinéa. Partant, c'est à tort que l'assureur prétend que l'article 45, tout entier, “ne peut pas être retenu comme base juridique pour les entreprises occupant plus de vingt travailleurs” (dern. concl. synth., p. 30).

Pour mettre en oeuvre l'article 45, 1er alinéa, l'opération prioritaire consiste à déterminer la catégorie à laquelle appartiennent les travailleurs bénéficiaires des avantages complémentaires. Une fois cette catégorie circonscrite, l'employeur a l'obligation d'accorder les mêmes avantages à tous les travailleurs qui en font partie, sans aucune distinction. Si l'employeur crée néanmoins quelque distinction que ce soit, il n'y a pas lieu de rechercher si elle est licite ou non: elle est toujours illicite du seul fait qu'elle est contraire au prescrit de l'article 45, 1er alinéa.

L'article 4 de la loi du 6 avril 1995 ('loi Colla'), lequel était d'application lors de l'adoption de l'annexe n° 11 qui n'a pas supprimé la distinction litigieuse figurant dans l'annexe n° 3, énonçait en son § 1er: “Tout employeur qui conclut un engagement de pension au profit des travailleurs ou d'une partie des travailleurs, ne peut créer de distinctions illicites entre les travailleurs de son entreprise qui appartiennent à une même catégorie.”

A première vue, une différence importante sépare cet article 4, § 1er, et l'article 45, 1er alinéa, précité: celui-ci oblige l'employeur à accorder les mêmes avantages complémentaires à tous les travailleurs d'une même catégorie, sans distinction quelconque; celui-là interdit à l'employeur, qui conclut un engagement de pension, de créer, entre travailleurs d'une même catégorie, des distinctions illicites. Cette différence n'est cependant qu'apparente, comme exposé ci-dessous.

La loi du 6 avril 1995, comme son arrêté royal d'exécution du 10 janvier 1996, ne définit pas la notion de distinctions illicites. Elle en donne simplement, dans son article 4, § 2, trois exemples, dont aucun n'était d'ailleurs vérifié en l'espèce.

D'après une circulaire ministérielle du 2 août 1996 (MB 7 août 1996), “précisant quelques notions et dispositions de la loi du 6 avril 1995 (...) et de l'arrêté royal du 10 janvier 1996 (...)”, est considérée comme une distinction illicite: “(...) 3° toute distinction contraire au principe d'interdiction d'une distinction quelconque entre les travailleurs appartenant à la même catégorie, repris à l'article 45 de la loi du 27 juin 1969 (...)” (la circulaire tient aussi pour illicite toute distinction contraire à d'autres lois, ou encore “qui ne repose pas sur un critère objectif et qui n'est pas raisonnablement justifiée”).

Il est adéquat de s'inspirer de cette circulaire, même si elle ne lie pas le juge, pour déduire que l'article 45, 1er alinéa, et l'article 4, § 1er, chacun pour les avantages d'ordre social qu'il concerne, interdisent à l'employeur de créer une distinction quelconque, toujours illicite en soi, entre travailleurs appartenant à une même catégorie. C'est donc avec raison qu'il est reconnu que ces deux articles doivent être interprétés de façon similaire (cf. J.-M. Binon et M.-A. Crijns, L'assurance groupe en Belgique, Bruxelles, Bruylant, 1996, pp. 180-181).

2.1.2. La détermination de la catégorie

Il convient de cerner, au regard de l'article 45, 1er alinéa, de la loi du 27 juin 1969, la catégorie à laquelle monsieur T. et madame D. appartenaient, dans l'entreprise gérée par l'ASBL, lors de l'adoption de l'annexe n° 3 au règlement d'assurance. La notion de catégorie n'est pas définie par cette loi. Il est admis qu'elle désigne, en termes généraux, un groupe homogène de travailleurs, auxquels il est raisonnable d'accorder les mêmes avantages d'ordre social.

Ce groupe est le plus souvent identifié en fonction de la nature du travail ou du niveau de responsabilité des travailleurs, suivant les catégories traditionnelles du droit social (ouvriers, employés, mais aussi personnel de maîtrise, cadres, personnel de direction, ou encore représentants de commerce, etc.). Des critères d'identification plus restrictifs peuvent, le cas échéant, être pris en considération, comme un régime spécifique de rémunération (cf. C. De Voedt, “Assurance, discrimination et différenciation”, Le droit de la lutte contre la discrimination en tous ses états, Liège, CUP, 2009, p. 99).

En l'espèce, il est clair que la catégorie à laquelle ressortissaient monsieur T. et madame D. était celle correspondant au personnel de cadre des services administratifs et techniques de l'ASBL. Cette catégorie a été jugée suffisamment homogène pour lui accorder à partir de 1975 le bénéfice de la même pension extra-légale par assurance de groupe. Nul autre critère d'identification de la catégorie ne s'impose à la lumière des éléments du dossier.

Il suit que la distinction introduite par l'annexe n° 3 du 23 février 1990 parmi les membres de ce personnel de cadre pour le calcul du montant de leur pension extra-légale, selon qu'ils étaient affiliés à l'assurance de groupe avant le 1er janvier 1988 ou depuis cette date, était une distinction contraire à l'article 45, 1er alinéa, de la loi du 27 juin 1969.

Le maintien de la même distinction par l'annexe n° 11 du 24 juin 1996 était contraire, non seulement audit article, mais aussi à l'article 4, § 1er, de la loi du 6 avril 1995, dans lequel la notion de catégorie se définit bien sûr de manière identique.

2.1.3. Le jugement attaqué

Pour sa part, le premier juge a choisi d'apprécier, dans le cadre de l'article 45, 1er alinéa, l'opportunité de distinguer, parmi les membres du personnel de cadre visé, deux catégories séparées: les membres affiliés à l'assurance de groupe avant le 1er janvier 1988 et ceux affiliés depuis cette date. Il a alors soulevé la question de savoir si ce critère de distinction, qui constitue un critère objectif, était 'raisonnablement justifié' et répondait à une 'fin légitime'.

Là-dessus, le jugement attaqué constate ce qui suit: “Aucune information n'est donnée à ce sujet au tribunal. Le conseil de l'assureur et de l'employeur, interrogé à l'audience, n'a pas précisé quel a été l'objectif poursuivi à l'époque par la distinction faite entre les travailleurs affiliés avant ou à partir du 1er janvier 1988. Ceci ne suffit pas à démontrer que la distinction aurait été dépourvue de motif et donc arbitraire”.

Puis le premier juge en tire la conclusion ci-après: “Les demandeurs, à qui incombe la charge de la preuve (l'assureur et l'employeur devant néanmoins y collaborer), ne démontrent pas qu'un objectif illicite aurait été poursuivi ou que le critère de distinction retenu n'aurait pas été raisonnablement justifié par rapport à l'objectif poursuivi.” Telle est la motivation principale sur base de laquelle les demandes de monsieur T. et madame D. ont été déclarées non fondées.

Il convient de formuler toutes réserves sur les considérations du premier juge concernant la charge de la preuve. Certes, il admet que l'assureur et l'employeur sont tenus d'y collaborer. Mais en réalité, c'est sur ceux-ci qu'elle repose essentiellement. En effet, ils sont bien mieux placés pour fournir et démontrer les raisons qui ont déterminé le choix du critère litigieux, alors que monsieur T. et madame D. n'ont, à l'époque, aucunement participé à ce choix.

La cour du travail de Bruxelles, comme le premier juge, a estimé utile de connaître ces raisons. Par son arrêt du 18 avril 2006, elle a rouvert les débats “afin de permettre aux parties intimées, et plus particulièrement à (l'assureur), de préciser plus clairement les 'motifs historiques' qui ont conduit à adopter des régimes différents de pensions complémentaires pour les travailleurs affiliés avant le 1er janvier 1988 et pour ceux affiliés après cette date (...)”.

Devant la cour de céans, l'assureur rapporte deux explications émanant de l'ASBL, l'une ayant déjà été présentée à la cour du travail de Bruxelles et l'autre étant ajoutée.

La première explication est la suivante: “A l'origine des cliniques universitaires, le personnel était rémunéré par l'Université, avec un statut relevant du secteur public. Lors de la constitution des Cliniques Universitaires St-Luc en ASBL, la 1ère formule d'assurance groupe a été construite de manière à garantir au personnel transféré de l'UCL à St-Luc, des avantages et une participation personnelle équivalents à ceux dont il bénéficiait à l'UCL. Lorsque sont arrivés les premiers affiliés avec participation personnelle, engagés avec les nouveaux barèmes et statuts St-Luc relevant du secteur privé, il est apparu que leur participation personnelle était supérieure à celle de l'employeur. Pour rétablir l'intervention de l'employeur pour les nouveaux travailleurs à un niveau comparable à celui des anciens, les avantages ont été augmentés avec l'introduction de la 2ème formule. Le but était d'accorder aux nouveaux travailleurs une contribution patronale comparable à celle des anciens.” (dern. concl. synth., p. 48).

Quant à la seconde explication, elle est formulée comme suit: “(...) la justification de la différence entre les plans d'assurance de groupe pourrait (sic) résulter de la volonté de fidéliser, autant que faire se peut, les nouveaux travailleurs pour éviter un trop grand turnover de personnel ainsi que des départs dans les hôpitaux leur octroyant des avantages salariaux plus importants. A l'époque de la conclusion de ces plans d'assurance de groupe, la situation des hôpitaux de Bruxelles n'était pas des plus florissante et le secteur 'non marchand' ne disposait (et c'est toujours le cas actuellement) pas des mêmes ressources financières que le secteur de l'économie traditionnelle” (ibid., p. 49).

La première de ces explications est abstruse, voire techniquement incompréhensible. La seconde, évoquant le souci d'avantager les nouveaux membres du personnel par rapport aux anciens pour des raisons de concurrence, constitue une justification presque provocante de l'inégalité de traitement entre les uns et les autres.

En réalité, ces explications n'autorisent pas à distinguer, dans la catégorie du personnel de cadre bénéficiaire de l'assurance de groupe, deux sous-catégories constituées respectivement par les affiliés à l'assurance avant ou à partir du 1er janvier 1988. A dire vrai, ce critère chronologique n'est pas un critère d'identification de la catégorie telle que visée par l'article 45, 1er alinéa, de la loi du 27 juin 1969 et par l'article 4, § 1er, de la loi du 6 avril 1995; c'est véritablement le critère de séparation entre les deux traitements inégaux appliqués.

2.1.4. Conclusion

En leurs conclusions de synthèse, monsieur T. et madame D. démontrent clairement que la nouvelle formule de calcul de la pension extra-légale est plus favorable que l'ancienne, qui a été mise en oeuvre à leur égard.

L'ASBL a donc violé l'obligation d'égalité de traitement et de non-discrimination que lui imposaient, en tant qu'employeur, les dispositions légales précitées.

2.2. Sur la responsabilité de l'assureur

Il s'impose maintenant d'apprécier si l'assureur a engagé sa responsabilité extracontractuelle envers monsieur T. et madame D., sur base des articles 1382 et 1383 du Code civil, à l'occasion de la violation par l'ASBL de la règle de non-discrimination examinée plus haut et plus précisément lors de l'adoption des annexes n° 3 et n° 11 au règlement d'assurance de groupe.

2.2.1. Sur la faute

Il est vrai que l'assureur, comme il le souligne, n'avait aucune obligation personnelle de respecter l'égalité de traitement entre les bénéficiaires de l'assurance, ni en vertu de l'article 45, 1er alinéa, ou de l'article 4, § 1er, précités, ni dans le cadre légal de l'assurance de groupe, notamment au regard de la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances et de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, ni non plus, contrairement à ce que soutiennent les appelants au principal, par l'effet de l'article 50, § 3 et 4, de l'arrêté royal du 17 décembre 1992 relatif à l'activité d'assurance sur la vie.

Il est exact aussi qu'avant l'entrée en vigueur de la loi Colla, l'employeur était seul responsable du contenu de la convention d'assurance de groupe. Il jouissait à ce sujet d'une entière liberté, sauf à respecter la règle de non-discrimination. Il n'était même pas tenu de consulter les représentants du personnel, en l'absence d'arrêté royal d'exécution de l'article 45, 2ème alinéa, de la loi du 27 juin 1969. Quant à l'assureur, il avait essentiellement pour mission de gérer et d'exécuter la convention d'assurance, sauf stipulation lui confiant des responsabilités plus étendues. Ce qui précède est du reste confirmé, en la présente espèce, par les dispositions des articles 12 et 16 du règlement d'assurance souscrit le 16 avril 1988.

Il est vrai enfin, ainsi que l'assureur se plaît également à l'observer, que la loi Colla a confirmé, en son article 3, § 1er, que “La décision d'instaurer, modifier ou abroger un régime de pension complémentaire relève de la compétence exclusive de l'employeur.” Celui-ci conservait la maîtrise du contenu de l'engagement de pension conclu au profit des travailleurs (cependant que la participation de ces derniers, par le truchement de leurs organes de représentation dans l'entreprise, était désormais prévue par l'art. 13 de la loi). En outre, comme indiqué plus haut, la règle de non-discrimination était confirmée et même amplifiée. En ce qui concernait 'l'organisme de pension', c'est-à-dire l'organisme assureur, il restait “chargé de la mise en oeuvre de l'engagement de pension”, selon les termes de l'article 2, 8°, de la loi.

Toutefois, les constatations ci-dessus n'empêchent pas d'envisager si l'assureur, lors de ses contacts avec le preneur d'assurance et dans l'exécution de sa mission, s'est montré normalement attentif et prudent alors que l'employeur lui soumettait des dispositions soulevant à tout le moins la question de leur compatibilité avec la règle de non-discrimination entre bénéficiaires de la même catégorie.

Certes, il faut établir que l'assureur connaissait, ou devait connaître, la règle violée. En tout cas, il en avait incontestablement connaissance dès qu'elle fut inscrite dans la loi Colla. Il apparaît au demeurant qu'après l'entrée en vigueur de celle-ci, l'assureur a pris l'initiative de proposer à l'ASBL un avenant, soit l'annexe n° 11, destiné à supprimer l'inégalité de traitement, qui découlait du règlement d'assurance, entre bénéficiaires masculins et féminins; cette inégalité était prohibée par l'article 5 de la loi, complémentaire de l'article 4. Pour la période antérieure, en tant que professionnel de l'assurance pratiquant régulièrement l'assurance de groupe au sein des entreprises, l'assureur devait aussi connaître cette règle fondamentale de non-discrimination figurant dans l'article 45, 1er alinéa, de la loi du 27 juin 1969.

Il suit que l'assureur aurait dû normalement avoir assez de vigilance et de prudence pour attirer l'attention de son cocontractant, l'ASBL, au minimum sur l'éventualité d'une infraction à ladite règle par l'adoption de deux formules différentes de calcul de la pension complémentaire. Or l'assureur ne nie pas qu'il n'en a rien fait, ni lors de l'adoption de l'annexe n° 3, qui introduisait cette différence, ni même lors de celle de l'annexe n° 11, qui la confirmait.

De la sorte, l'assureur a eu un comportement fautif, par négligence ou imprudence, comme prévu par l'article 1383 du Code civil. Ce comportement s'est révélé dommageable pour les bénéficiaires soumis à la formule désavantageuse, dont monsieur T. et madame D. Aussi, l'assureur engageait envers eux sa responsabilité, non pas contractuelle puisqu'il leur a payé exactement, en leur qualité de bénéficiaires de la stipulation pour autrui, ce qui avait été stipulé et promis, mais bien sa responsabilité extracontractuelle.

2.2.2. Sur le dommage

Le dommage issu de la faute de l'assureur ne consiste pas dans la perte du capital supplémentaire dû à monsieur T. et madame D. En effet, il n'est pas certain que l'ASBL, prévenue par l'assureur d'une possible discrimination interdite par la loi, aurait spontanément payé ce capital. Peut-être aurait-elle accepté de le faire; peut-être l'aurait-elle refusé, soit sans exprimer de raisons, soit en donnant des raisons qu'elle pouvait croire bonnes ou raisonnables. L'effet d'un tel refus, c'est qu'il ouvrait à monsieur T. et madame D. le droit de réclamer à l'ASBL elle-même la totalité de leur dû.

En réalité, le préjudice causé par l'abstention fautive de l'assureur a consisté, pour les deux intéressés, dans la perte d'une chance d'obtenir de l'ASBL, sans devoir l'attraire en justice, le capital complémentaire qui leur revenait. Le silence de l'assureur les a privés de cette chance. C'est la perte de celle-ci qu'il est dès lors tenu d'indemniser.

Cela étant, il faut par ailleurs admettre que cette perte de chance fut aussi imputable à d'autres silences, confirmés par les éléments du dossier.

D'abord, il apparaît que les représentants du personnel de cadre ne se sont pas manifestés. Ils auraient pu le faire dès la souscription de l'annexe n° 3, notifiée aux travailleurs; ils auraient dû le faire lors de la signature de l'annexe n° 11, adoptée à un moment où leur participation en la matière était légalement organisée.

Ensuite, il est étrange que l'annexe n° 3 du 23 février 1990 a été approuvée, sans réserves ni commentaire, par l'Office de contrôle des assurances le 12 décembre suivant. C'est d'autant plus curieux que ce même office, saisi d'une demande d'avis le 20 janvier 2000 par le syndicat de monsieur T., a déclaré par courrier du 8 février que, “selon sa doctrine”, serait illicite “la distinction qui est faite entre les travailleurs en fonction d'une date, étant donné qu'une amélioration du plan est accordée aux nouveaux entrants et non aux anciens”.

Enfin, il reste à s'étonner du silence observé par monsieur T. et madame D. eux-mêmes pendant plusieurs années après la notification de l'annexe n° 3 et longtemps encore après celle de l'annexe n° 11. De même ont-ils encore inexplicablement tardé à agir après l'expiration de leur contrat de travail et la réception de leur capital, au point de laisser prescrire leur demande à l'encontre de l'ASBL.

L'évaluation de ce préjudice résultant de la perte d'une chance doit être faite ex aequo et bono. Mais il faut aussi avoir à l'esprit la part de responsabilité propre à l'assureur dans cette perte. De plus, il convient de respecter un rapport de proportionnalité avec le montant net incontesté du capital complémentaire calculé en appliquant à chacun des intéressés la nouvelle formule de l'annexe n° 3 à partir du 1er janvier 1988, soit 17.921 EUR pour monsieur T. et 27.684 EUR pour madame D.

Il est, dans ces conditions, approprié d'estimer les dommages et intérêts dus par l'assureur aux montants de 7.000 EUR pour monsieur T. et de 11.000 EUR pour madame D., sommes à majorer des intérêts judiciaires. Il suit que leur appel principal est partiellement fondé.

IV. Les dépens

Les deux demandeurs originaires succombent en partie sur leurs demandes dirigées contre l'assureur, lesquelles apparaissent comme partiellement fondées. Après compensation faite en application de l'article 1017, 4ème alinéa, du Code judiciaire, il y a lieu de dire que l'assureur est redevable aux demandeurs originaires conjointement, au titre de dépens de la première instance, de la moitié des frais de citation de 131,16 EUR, à savoir 65,58 EUR, et de la moitié de l'indemnité de procédure de 205,26 EUR, à savoir 102,63 EUR, soit un total de 168,21 EUR.

Les deux défendeurs en cassation supportent, pour cette procédure, leurs propres dépens, à savoir 138,10 EUR (frais de signification du mémoire en réponse), et sont redevables à la demanderesse en cassation de ses dépens, liquidés au montant de 201,74 EUR (frais de signification du pourvoi).

Enfin, les appelants au principal succombent en partie sur leur appel et l'appelante sur incident totalement sur le sien. En conséquence, celle-ci leur doit, après compensation, les 3/4 de leurs frais de citation après cassation de 198,33 EUR, à savoir 148,75 EUR, et les 3/4 du montant de base de l'indemnité de procédure de 5.000 EUR, à savoir 3.750 EUR, soit un total de 3.898,75 EUR.

(…)