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Actualité : Cour de justice de l'Union européenne, 15/04/2010, R.D.C.-T.B.H., 2010/9, p. 900-901

Cour de justice de l'Union européenne 15 avril 2010

PRATIQUES DU COMMERCE - MÉTHODES DE VENTE - VENTE À DISTANCE
Directive 97/7/CE - Protection des consommateurs - Contrats à distance - Droit de rétractation - Imputation des frais d'expédition de la marchandise au consommateur
Aff.: C-511/08

La directive 97/7/CE concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance prévoit un délai de rétractation d'au moins sept jours ouvrables en faveur du consommateur. Pendant ce délai, celui-ci peut exercer ce droit sans pénalités et sans indication de motif et le fournisseur doit lui rembourser les sommes versées, sans frais. Les seuls frais qui peuvent être mis à sa charge sont les frais directs de renvoi des marchandises.

En Allemagne, la société Heinrich Heine prévoyait dans ses conditions générales que le consommateur supportait à titre de frais d'expédition, un montant forfaitaire de 4,95 EUR. Les conditions prévoyaient que ce montant était définitivement acquis à Heinrich Heine, même en cas d'exercice, par le consommateur, de son droit de rétractation. Une association allemande de protection des consommateurs contesta une telle pratique sur la base du droit allemand et introduisit une action en cessation. Selon le Bundesgerichtshof, amené à se prononcer en dernier ressort, le droit allemand ne prévoit explicitement aucun remboursement des frais d'expédition de la marchandise commandée en cas d'exercice du droit de rétractation. Ayant toutefois des doutes sur la compatibilité du droit allemand avec la directive 97/7/CE, le Bundesgerichtshof saisit la Cour de justice, à titre préjudiciel, afin que celle-ci se prononce sur l'interprétation à donner à la directive. La question posée à la Cour revenait, en substance, à déterminer si la question de l'imputation des frais d'expédition en cas de rétractation du consommateur était couverte par la directive.

Dans son arrêt rendu le 15 avril 2010, la Cour va répondre par l'affirmative. Pour la Cour, les termes 'sommes versées', que le fournisseur doit rembourser au consommateur qui exerce son droit de rétractation, doivent être interprétés comme couvrant non seulement le prix payé par le consommateur, mais également les frais supportés par celui-ci. Une telle interprétation est, selon la Cour, conforme à l'objectif de l'article 6 de la directive - portant sur le droit de rétractation - qui est de ne pas décourager le consommateur d'exercer un tel droit. Cette interprétation assure par ailleurs une répartition équilibrée des risques dans le contrat à distance entre le professionnel et le consommateur en faisant peser sur ce dernier les frais de livraison de la marchandise.

La Cour en conclut dès lors que la directive 97/7/CE s'oppose à une réglementation nationale qui permet au fournisseur, dans un contrat conclu à distance, d'imputer les frais d'expédition des marchandises au consommateur lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation.

Le lecteur mettra cet arrêt en parallèle avec la récente proposition de directive sur les droits des consommateurs [1]. L'arrêt rendu par la Cour trouve en effet un écho favorable à l'article 16, alinéa 1er, de la proposition, qui dispose que “le professionnel rembourse tout paiement reçu de la part du consommateur dans les trente jours suivant la date de réception de la communication de la rétractation”.

[1] Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux droits des consommateurs, Com. (2008) 614 final, 2008/0196 (COD), 8 octobre 2008.