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Arbitrabilité des litiges concernant la résiliation des concessions de vente exclusive soumises à la loi belge du 27 juillet 1961: la bouteille à encre est-elle enfin épuisée?, R.D.C.-T.B.H., 2007/9, p. 890-898

ARBITRAGE
Généralités - Arbitrage et tierce décision obligatoire - Convention de New York du 10 juin 1958 - Déclinatoire de juridiction - Conditions - Appréciation - Concession de vente exclusive à durée indéterminée
L'article 2 de la Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères n'indique pas au regard de quelle loi le juge doit vérifier l'arbitrabilité du litige au stade du déclinatoire de juridiction.
Cet article permet au juge d'examiner cette question au regard de sa lex fori.
Lorsque la convention d'arbitrage est soumise à une loi étrangère, le juge saisi d'un déclinatoire de juridiction doit exclure l'arbitrage si en vertu de sa lex fori le litige ne peut être soustrait à la juridiction des tribunaux étatiques.
ARBITRAGE
Algemeen - Arbitrage en bindende derdenbeslissing - Verdrag van New York van 10 juni 1958 - Exceptie van rechtsmacht - Voorwaarden - Beoordeling - Concessie van alleenverkoop van onbepaalde duur
Artikel 2 van het Verdrag van New York van 10 juni 1958 houdende erkenning en tenuitvoerlegging van buitenlandse scheidsrechterlijke uitspraken bepaalt niet op grond van welke wet de rechter die kennisneemt van een exceptie van rechtsmacht, de arbitreerbaarheid van het geschil moet nagaan.
Dit artikel laat de rechter toe om deze vraag volgens de lex fori te beoordelen.
Wanneer het arbitragebeding onderworpen is aan een vreemde wet, dient de overheidsrechter aan wie een exceptie van rechtsmacht wordt opgeworpen de arbitreerbaarheid uit te sluiten wanneer het geschil op basis van de lex fori niet aan de rechtsmacht van de nationale rechtbanken mag worden onttrokken.
Arbitrabilité des litiges concernant la résiliation des concessions de vente exclusive soumises à la loi belge du 27 juillet 1961: la bouteille à encre est-elle enfin épuisée?
Laurent Mertens
Introduction
Contexte

1.La loi belge du 27 juillet 1961 relative à la résiliation des concessions de vente exclusive à durée indéterminée [1] (la “Loi”) ne comprend que 6 articles et vise à régler une problématique bien particulière, suffisamment dévoilée par son intitulé.

2.Plus encore que son application par les cours et tribunaux belges, dont la fréquence justifie la publication de nombreuses décisions et examens de jurisprudence (auxquels il est renvoyé) [2], c'est peut-être la question de l'applicabilité de la Loi qui a engendré le plus d'hésitations jurisprudentielles et de débats parmi la doctrine. La Loi peut en effet s'enorgueillir de constituer une célèbre bouteille à encre doctrinale lorsqu'on en vient à examiner les possibilités et les limites de son écartement intentionnel par les parties à un contrat de concession de vente exclusive tombant en principe dans son champ d'application.

3.Conceptuellement, afin d'écarter l'application de la Loi, les parties au contrat pourraient tenter de (i) soumettre leur contrat à un droit étranger, (ii) soumettre leur contrat à la juridiction d'un tribunal étranger ou (iii) soumettre leur contrat à l'arbitrage.

4.Nous évoquerons très brièvement et incidemment les deux premières voies après avoir analysé la portée de l'arrêt de la Cour de cassation reproduit ci-dessus, qui apporte une contribution décisive à la troisième voie suggérée, celle de l'admissibilité par les juridictions belges de la soumission à l'arbitrage international d'un contrat de concession de vente exclusive tombant en principe dans le champ d'application de la Loi.

5.Cette question, à laquelle il est souvent fait référence en termes d'“arbitrabilité des concessions de vente exclusive”, a fait l'objet d'une controverse particulièrement nourrie, qui a divisé tant les juridictions belges que leurs observateurs. Cette controverse sera seulement brièvement rappelée dans cette note, l'exposé de ses tenants et aboutissants ainsi que des partisans et arguments respectifs de l'une ou l'autre thèse ayant été fait à de nombreuses reprises, et notamment [3], encore très récemment et de manière fort complète, dans cette revue [4].

6.Nous tenterons par contre, en analysant la position adoptée par la Cour de cassation dans l'arrêt annoté, d'en dégager la portée sur le plan des principes mis en oeuvre par cette controverse en matière de contrôle de l'arbitrabilité des litiges en général, d'une part, et d'en mesurer les implications pratiques sur la question de l'arbitrabilité des concessions de vente exclusive, d'autre part.

Position du problème - Rappel des termes de la controverse

7.La Loi a été adoptée dans l'intention de protéger le concessionnaire, considéré comme la “partie faible” du contrat par rapport au concédant, dans l'hypothèse de la résiliation d'un contrat de concession de vente exclusive à durée indéterminée. À cette fin, la Loi assortit pareille résiliation de l'obligation pour le concédant de donner au concessionnaire un préavis raisonnable ou une indemnité compensatoire, lesquels sont déterminés au moment de la résiliation soit par les parties à l'amiable, soit par un juge (art. 2 de la Loi); la Loi (art. 3) prévoit en outre la possibilité de l'octroi dans certaines circonstances d'une indemnité complémentaire au concessionnaire. Afin de s'assurer que le concessionnaire pourra se prévaloir de sa protection, notamment dans une situation où la loi étrangère aurait pu trouver à s'appliquer, la Loi prévoit dans son article 4:

“Le concessionnaire lésé, lors d'une résiliation d'une concession de vente produisant ses effets dans tout ou partie du territoire belge, peut en tout cas assigner le concédant, en Belgique, soit devant le juge de son propre domicile, soit devant le juge du domicile ou du siège du concédant.

Dans le cas où le litige est porté devant un tribunal belge, celui-ci appliquera exclusivement la loi belge.”

La Loi prévoit enfin qu'elle trouve à s'appliquer “nonobstant toute convention contraire convenue avant la fin du contrat de concession” (art. 6).

8.En adoptant ces mesures, le législateur avait clairement en vue que la combinaison des articles 4 et 6 de la Loi aboutisse à ce que le juge belge puisse toujours connaître d'un litige visé par la Loi lorsque le concessionnaire est domicilié en Belgique et qu'il doive toujours appliquer la Loi aux questions réglées par celle-ci. Cependant, praticiens et auteurs se sont très vite interrogés sur la possibilité de soumettre un litige tombant dans le champ d'application de la Loi à l'arbitrage (surtout dans une situation internationale), interrogeant par là l'arbitrabilité de la résiliation des concessions de vente visées par la Loi.

9.La question de l'arbitrabilité d'un litige doit être distinguée de la question de la validité de la convention d'arbitrage. La convention d'arbitrage est en effet un contrat ambivalent. Celui-ci implique un élément privé, positif, par lequel les parties conviennent contractuellement de confier la résolution de leurs litiges à un tiers, arbitre; cet aspect contractuel relèvera en droit international privé du principe d'autonomie de la volonté. Par conséquent, il est admis que pour les aspects concernant la validité contractuelle de la convention d'arbitrage, le juge belge considérera la lex contractus choisie par les parties [5]. Une convention d'arbitrage contient cependant également un aspect public [6], négatif, par lequel elle “fait perdre leur compétence aux organes judiciaires” [7], ce qui a mené certains auteurs à sortir l'aspect juridictionnel de la convention d'arbitrage du domaine purement contractuel [8]. C'est là qu'ils situent la question de l'arbitrabilité d'un litige soumis à arbitrage par une convention parfaitement valable contractuellement [9].

10.La question de l'arbitrabilité d'un litige, qui peut donc être décrite comme la possibilité de résoudre un litige particulier par la voie de l'arbitrage, peut se poser dans trois situations différentes: (i) devant l'arbitre désigné par une clause d'arbitrage, examinant sa compétence [10], (ii) devant le juge étatique devant lequel est invoqué un déclinatoire de juridiction au profit d'un arbitre et (iii) devant un juge étatique saisi d'une demande d'exequatur d'une sentence arbitrale ayant été rendue et dont on cherche la reconnaissance et l'exécution.

11.Dans le cadre d'un litige à dimension internationale, se pose la question de savoir au regard de quelle loi l'arbitrabilité du litige doit être envisagée: lex contractus, lex fori ou les deux à la fois? La question est évoquée dans deux instruments internationaux auxquels la Belgique est partie:

    • la Convention du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères, faite à New York (la “Convention de New York”) [11]; et
    • la Convention de Genève du 21 avril 1961 sur l'arbitrage commercial international (la “Convention de Genève”) [12].

    12.À dire vrai, lorsque la Convention de Genève trouve à s'appliquer, la question se résout assez aisément à la lecture de son article 6 § 2 qui prévoit que chaque fois que le juge d'un État contractant est confronté à une exception de juridiction prise de l'existence d'une convention d'arbitrage, il statuera sur l'existence et la validité de cette convention d'arbitrage:

      • en ce qui concerne la capacité des parties à ladite convention, selon la loi qui leur est applicable (c'est-à-dire la loi de leur statut personnel) [13];
    1. et en ce qui concerne les autres questions:
        • selon la loi à laquelle les parties ont soumis la convention d'arbitrage (c'est-à-dire la lex contractus);
        • à défaut d'une indication à cet égard, selon la loi du pays où la sentence doit être rendue (aussi appelée lex situs);
        • à défaut d'indication sur la loi à laquelle les parties ont soumis la convention et, si au moment où la question est soumise à un tribunal judiciaire il n'est pas possible de prévoir quel sera le pays où la sentence sera rendue, selon la loi compétente en vertu des règles de conflit du tribunal saisi. Le juge saisi pourra ne pas reconnaître la convention d'arbitrage si, selon la loi du for [14], le litige n'est pas susceptible d'arbitrage (il s'agit ici de la lex fori).
      1. Il est dès lors généralement reconnu que la Convention de Genève soumet à une application cumulative de la lex contractus et de la lex fori la question de l'arbitrabilité du litige dont un juge doit connaître en exécution de la convention [15].

        13.La solution est en revanche moins évidente en ce qui concerne la Convention de New York et c'est autour de celle-ci que s'est cristallisée la controverse sur l'arbitrabilité des concessions visées par la Loi. La Convention de New York envisage en effet la question de l'arbitrabilité du litige dans deux dispositions différentes et selon deux formulations distinctes.

        14.La Convention prévoit expressément qu'au stade de la reconnaissance et de l'exécution d'une sentence arbitrale étrangère, le juge requis pourra refuser l'exequatur si, au regard de sa lex fori, le litige n'était pas susceptible de faire l'objet d'un arbitrage:

        Article 5 § 1er:

        “La reconnaissance et l'exécution de la sentence ne seront refusées, sur requête de la partie contre laquelle elle est invoquée, que si cette partie fournit à l'autorité compétente du pays où la reconnaissance et l'exécution sont demandées, la preuve:

        a) que les parties à la convention visée à l'article 2 étaient, en vertu de la loi à elles applicable, frappées d'une incapacité, ou que ladite convention n'est pas valable en vertu de la loi à laquelle les parties l'ont subordonnée ou, à défaut d'une indication à cet égard, en vertu de la loi du pays où la sentence a été rendue ;”

        Article 5 § 2:

        “La reconnaissance et l'exécution d'une sentence arbitrale pourront aussi être refusées si l'autorité compétente du pays où la reconnaissance et l'exécution sont requises constate:

        a) que, d'après la loi de ce pays, l'objet du différend n'est pas susceptible d'être réglé par voie d'arbitrage; ou

        b) que la reconnaissance ou l'exécution de la sentence serait contraire à l'ordre public de ce pays.”

        15.Par contre, le texte de la Convention de New York ne précise pas au regard de quelle loi doit être appréciée l'arbitrabilité d'un litige quand le juge national est saisi d'un déclinatoire de juridiction:

        Article 2 § 1er:

        “Chacun des états contractants reconnaît la convention écrite par laquelle les parties s'obligent à soumettre à un arbitrage tous les différends ou certains des différends qui se sont élevés ou pourraient s'élever entre elles au sujet d'un rapport de droit déterminé, contractuel ou non contractuel, portant sur une question susceptible d'être réglée par voie d'arbitrage ;”

        Article 2 § 3:

        “Le tribunal d'un état contractant, saisi d'un litige sur une question au sujet de laquelle les parties ont conclu une convention au sens du présent article, renverra les parties à l'arbitrage, à la demande de l'une d'elles, à moins qu'il ne constate que ladite convention est caduque, inopérante ou non susceptible d'être appliquée.”

        16.Dans son célèbre arrêt du 28 juin 1979 (dit arrêt “Audi-NSU[16], la Cour de cassation a eu l'occasion de se prononcer nettement sur la question de la loi applicable à l'examen de l'arbitrabilité d'un litige au stade de la reconnaissance et de l'exécution d'une sentence arbitrale par un juge belge en déclarant que cette question était soumise à la loi belge en tant que lex fori. Enonçant de la sorte un principe général de reconnaissance en matière de sentences arbitrales étrangères, la Cour de cassation a précisé en outre que cette règle était “confirmée par la Convention de New York”.

        17.La Cour n'avait par contre pas eu l'occasion de trancher de manière définitive la question de savoir au regard de quelle loi l'arbitrabilité du litige devait être examinée selon l'article 2 de la Convention de New York, c'est-à-dire au stade du déclinatoire de juridiction soulevé devant le juge belge. La controverse opposait les partisans de la seule lex contractus, à ceux de la lex fori, et ceux qui penchaient en faveur d'une application cumulative de la lex contractus et de la lex fori.

        18.La Cour de cassation n'a pas réuni l'unanimité autour de son arrêt du 22 décembre 1988 [17] qui semblait pencher vers l'applicabilité de la lex fori au stade du déclinatoire de juridiction, mais dans des termes trop peu explicites que pour emporter l'adhésion de tous. En revanche, cet arrêt apportait une clarification sur l'état de la question de la lex fori: les litiges visés par la Loi ne sont arbitrables selon le droit belge que si la convention d'arbitrage contient l'obligation pour les arbitres d'appliquer la Loi dans ses dispositions pertinentes.

        19.Dans son arrêt du 15 octobre 2004 [18], la Cour a déçu plus d'espoirs qu'elle n'a apporté de certitudes et laissa les commentateurs dans l'indécision. Tout en affirmant que l'article 2.3. de la Convention de New York ne désignait pas expressément la loi déterminant l'arbitrabilité d'un litige examinée au stade du déclinatoire de juridiction, la Cour poursuit en déclarant que saisi de cette question, le juge belge ne peut “a priori” exclure l'application de sa lex fori. Cependant, certains ont cru voir dans ce même arrêt une amorce d'un changement de jurisprudence de la Cour concernant l'état même de cette lex fori, soit la possibilité existant en droit belge de soumettre les litiges tombant dans le champ d'application de la Loi à l'arbitrage, au motif d'une curieuse réflexion faite par la Cour sur la possibilité par le juge belge d'écarter un déclinatoire de juridiction s'il est porté atteinte “à l'ordre public de son système juridique/de openbare orde van zijn rechtsstelsel”. La référence à l'ordre public laisse songeur parce que la Loi n'a jamais été considérée d'ordre public, ni interne, ni, a fortiori, international; en revanche son caractère impératif en droit interne et de police ou d'application immédiate en droit international privé n'est pas contesté.

        20.En d'autres termes, aucun de ces deux arrêts n'a pu éteindre complètement la controverse relative à l'interprétation de l'article 2 de la Convention de New York. Selon nous, l'arrêt commenté devrait quant à lui y parvenir.

        I. L'arrêt de la Cour de cassation du 16 novembre 2006

        21.L'arrêt rendu par la Cour de cassation le 16 novembre 2006 (l'“Arrêt”) [19] clôt une épopée judiciaire dont chaque étape a fait l'objet d'une publication et/ou d'un commentaire: l'Arrêt casse l'arrêt rendu le 7 février 2002 par la cour d'appel de Bruxelles [20] qui avait confirmé le jugement du tribunal de commerce de Bruxelles du 5 octobre 1994 [21].

        22.Selon nous, l'Arrêt tranche définitivement la controverse liée à la détermination par la Convention de New York de la loi applicable à l'arbitrabilité d'un litige lorsque cette question est soulevée au stade du déclinatoire de juridiction. De par la généralité et la concision de sa formulation, la portée de l'Arrêt dépasse par ailleurs le cadre de l'arbitrabilité de la résiliation des concessions de vente exclusive tombant dans le champ d'application de la Loi. En réalité, la Cour de cassation tranche aussi dans son Arrêt une question générale d'interprétation de l'article 2 de la Convention de New York.

        23.Implicitement, et en ce qui concerne la Loi, l'Arrêt peut aussi être lu comme une confirmation de ce que les litiges tombant dans le champ d'application de la Loi ne sont pas susceptibles d'arbitrage dès lors que les arbitres ne sont pas tenus d'appliquer la Loi, confirmant ainsi la position adoptée par la Cour dans son arrêt Audi-NSU.

        Les faits

        24.Les faits de l'affaire ayant donné lieu à l'Arrêt, assez classiques, peuvent être résumés comme suit:

        une société de droit américain dont le siège est établi en Californie, a concédé à une société de droit belge dont le siège est sis à Bruxelles une concession de vente exclusive, destinée à produire ses effets en partie sur le territoire belge.

        Le contrat de concession (i) prévoit qu'il est régi par les lois des États-Unis d'Amérique et de l'État de Californie et (ii) contient une clause d'arbitrage soumettant tout différend relatif au contrat à un arbitrage devant se dérouler à Palo Alto, Californie, États-Unis d'Amérique, conformément aux règles de l'American Arbitration Association.

        Le concédant met fin au contrat de concession pour un motif de résiliation prévu par ledit contrat.

        25.Passant outre la clause d'arbitrage et le choix contractuel du droit américain, le concessionnaire belge assigne le concédant devant le tribunal de commerce de Bruxelles (son propre domicile), en paiement d'une indemnité compensatoire de préavis, d'une indemnité pour apport de clientèle et de diverses autres indemnités réclamées sur la base de la Loi. Ce faisant, le concessionnaire fonde la compétence du juge belge et l'applicabilité du droit belge sur les articles 4 et 6 de la Loi.

        26.Le premier juge décline sa juridiction pour connaître du litige, au motif qu'il ne peut appliquer les articles précités de la loi du 27 juillet 1961, ceux-ci étant incompatibles avec une norme supérieure. Il poursuit en énonçant qu'en l'occurrence c'est la Convention de New York qui est applicable au litige et que celle-ci “reconnaît le principe de l'autonomie contractuelle (art. 5.1.a.) et donne en réalité la liberté aux parties de se mettre d'accord sur le droit applicable”; puisque la clause d'arbitrage était valable au regard du droit californien auquel elle était soumise, le juge considère que l'article 2 de la Convention de New York impose au juge belge de reconnaître la validité de cette clause d'arbitrage et, en conséquent, de se déclarer sans juridiction.

        27.Dans son arrêt du 7 février 2002, la cour d'appel de Bruxelles confirme le jugement dont appel et se déclare sans juridiction pour connaître du litige. Selon la cour d'appel, lorsque le défendeur, se prévalant d'une clause d'arbitrage, décline la juridiction du juge d'un état partie à la Convention de New York, la question se règle conformément aux articles 2 § 3 et 5 § 1 et 2 de la Convention de New York qui “ne laissent aucune place à l'application de la loi du for pour l'appréciation de la question de l'arbitrabilité du litige, et que cette question doit être réglée par la loi applicable au contrat” [d'arbitrage].

        La question posée

        28.La question soumise par le pourvoi à la censure de la Cour dans la première branche de son moyen unique forçait la Cour de cassation à prendre position sur l'interprétation des dispositions de la Convention de New York concernant la loi applicable à l'examen par le juge belge de l'arbitrabilité d'un litige effectué au stade du déclinatoire de juridiction.

        29.Mettant en lumière le caractère laconique de certaines dispositions de la Convention de New York, le moyen faisait valoir que celles-ci (i) n'excluaient pas l'application de la lex fori à la question de l'arbitrabilité du litige soulevée au stade du déclinatoire de juridiction, (ii) pas plus qu'elles n'imposaient que seule la lex contractus puisse régler cette question. Au contraire, la Convention de New York prévoyait expressément que la lex fori puisse déterminer l'arbitrabilité d'un litige au stade de la reconnaissance et l'exécution de la sentence arbitrale étrangère. Étant donné que la même précision expresse n'existait pas au stade du déclinatoire de compétence, le moyen appelait la Cour de cassation à interpréter le silence de la Convention de New York. Pour ce faire, le moyen faisait valoir qu'aucune disposition de la Convention de New York ne justifiait que l'arbitrabilité d'un litige soit appréciée différemment selon que la question se pose au stade du déclinatoire de juridiction ou de la reconnaissance et de l'exécution de la sentence arbitrale.

        30.Dans la seconde branche de son moyen unique, le pourvoi faisait valoir qu'à supposer même que l'arbitrabilité du litige doive être envisagée à la lumière de la lex contractus au stade du déclinatoire de juridiction (quod non), encore ne serait-ce qu'une lex contractus échancrée par les dispositions de la Loi, qui s'imposent au juge belge au titre de loi d'application immédiate. Dès lors, l'arbitrabilité du litige devrait s'effectuer au regard de la Loi, c'est-à-dire qu'elle serait sujette à l'existence d'une obligation pour le tribunal arbitral d'appliquer les dispositions substantielles de la Loi [22].

        31.La Cour de cassation n'a pas eu l'opportunité de se prononcer sur cette dernière question dans son Arrêt [23].

        L'enseignement de l'Arrêt

        32.L'Arrêt offre une interprétation sans équivoque de l'article 2 de la Convention de New York relatif à l'appréciation de l'existence et de la validité d'une convention d'arbitrage par le juge étatique auquel est opposé un déclinatoire de juridiction.

        33.La Cour n'était pas amenée à se prononcer explicitement sur la loi devant régir l'analyse du caractère caduc, inopérant ou non susceptible d'être appliqué de la convention d'arbitrage, au sens de l'article 2.3., ces éléments touchant à la validité de la convention d'arbitrage, ils appartiennent en effet au domaine de la lex contractus et on comprend que ce soit la loi d'autonomie qui régisse la caducité ou l'inopérabilité de la convention. En revanche, la Cour souligne que l'obligation de renvoi pesant sur le juge étatique ne vaut que pour les litiges qui sont susceptibles d'être réglés par voie d'arbitrage, c'est-à-dire cette cause plus étroite de refus de renvoi, contenue à l'article 2.1. et reprise en termes identiques à l'article 5.2. Autrement dit, une des raisons de la caducité ou de l'inopérabilité de la convention d'arbitrage peut être l'inarbitrabilité du litige qui en est l'objet.

        34.L'Arrêt poursuit en rappelant [24] que l'article 2 de la Convention de New York ne précise nullement au regard de quel droit national le juge saisi d'un déclinatoire de juridiction examine la question précise de l'arbitrabilité de l'objet d'une convention d'arbitrage. Il s'agit là d'une lecture exacte et non sollicitée de l'article 2, contrastant avec l'affirmation de l'arrêt entrepris selon lequel “les articles 2 § 3, et 5 § 1er et 2 de la Convention de New York ne laissent aucune place à l'application de la loi du for pour l'appréciation de la question de l'arbitrabilité du litige”. On cherche en vain le support de pareille affirmation dans le texte des articles 2 et 5 de la Convention [25].

        35.Au contraire, et tranchant avec les incertitudes du passé, l'Arrêt confirme que l'article 2 de la Convention de New York (“cette disposition conventionnelle”) permet [26] au juge d'examiner l'arbitrabilité du litige à la lumière de la lex fori. Il faut selon nous y voir une confirmation de la pertinence de la lecture conjuguée des articles 2 et 5 de la Convention, selon laquelle il est admis que si la lex contractus intervient au stade du déclinatoire et de l'exequatur pour déterminer la validité de la convention, elle n'exclut pas que la lex fori intervienne également à chacun de ces stades pour l'analyse de la question de l'arbitrabilité du litige [27].

        36.L'Arrêt confirme ainsi que c'est bien la loi nationale du juge saisi qui déterminera si le litige est ou non de ceux qui peuvent valablement faire l'objet d'un arbitrage et échapper à la juridiction des tribunaux. Il précise en outre et pour autant que de besoin qu'en pareille hypothèse, le juge saisi doit [28] examiner la question au regard de la lex fori. La contradiction entre les termes “permet” et “doit” n'est qu'apparente selon nous: de même lorsque l'article 5 de la Convention “permet” de refuser l'exequatur en cas d'inarbitrabilité du litige, il ne fait aucun doute que la permission s'adresse aux signataires de la convention, à savoir les États contractants. Forts de cette permission, les États adoptent les règles obligatoires déterminant l'arbitrabilité qui s'imposent à leurs juges nationaux. La “permission” laissée aux États se traduit alors par une “obligation” de constater imposée à leurs autorités compétentes. Confronté à une convention d'arbitrage portant sur un litige inarbitrable selon le droit belge, le juge belge doit exclure sa reconnaissance dès qu'il constate que le litige n'est pas de ceux que l'État belge accepte de voir échapper à la juridiction des tribunaux étatiques.

        37.Enfin, en ce qui concerne l'état de la lex fori en matière d'arbitrabilité des litiges visés par la Loi, l'Arrêt paraît confirmer implicitement dans un énoncé un peu alambiqué, la jurisprudence Audi-NSU en énonçant que la loi du for s'oppose à ce que le litige visé par la Loi soit soumis à l'arbitrage si la convention est soumise à la loi étrangère. La référence à la Loi n'est qu'indirecte (“en certaines matières”, “comme en l'espèce”).

        38.Comme pour l'arrêt Audi-NSU, l'apport de l'Arrêt se situe à deux niveaux: (i) sur le plan de l'interprétation de la Convention de New York, il établit que l'arbitrabilité du litige doit toujours s'apprécier suivant la lex fori, que ce soit au stade de la reconnaissance de la convention d'arbitrage ou de la sentence étrangère et (ii) sur le plan de l'interprétation de la Loi, il confirme que litiges visés par la Loi ne pourront valablement être soustraits à la connaissance des juridictions étatiques que pour autant que les arbitres désignés aient l'obligation d'appliquer la Loi.

        II. Application de l'enseignement de l'Arrêt en matière de concession de vente exclusive à durée indéterminée

        39.Nous proposons ci-dessous de décomposer les étapes du cheminement juridique ayant permis d'aboutir à la conclusion de l'Arrêt. La plupart des arguments ci-dessous ont en effet été utilisés à un moment ou un autre de la controverse et appliqués dans un sens ou l'autre par les juridictions du fond.

        Examen de son pouvoir de juridiction par le juge belge

        40.La règle suivant laquelle un juge étatique examine toujours sa compétence internationale/son pouvoir de juridiction en fonction de ses propres lois du for est l'une des plus anciennes règles de conflit de lois connues [29].

        41.Ce faisant, le juge belge appliquera à cette question l'ensemble des règles contenues dans son droit positif servant à établir ou à décliner sa compétence internationale/son pouvoir de juridiction, en respectant la hiérarchie de ces normes. S'il appert que certaines de ces règles sont d'origine internationale et sont directement applicables, il sera tenu de leur conférer préséance en vertu du principe de primauté du droit international sur le droit interne, principe consacré de manière emblématique par la Cour de cassation belge depuis son célèbre arrêt “Le Ski” [30] (et par ailleurs expressément rappelé par l'article 2 du Code de droit international privé [31], dans les limites du champ d'application du Code de droit international privé).

        Règles de compétence internationales d'origine internationale directement applicables

        42.Schématiquement, il s'agit des normes internationales régissant (i) l'arbitrage, comme c'est le cas de la Convention de New York et de la Convention de Genève et (ii) la compétence et la reconnaissance internationale, comme c'est le cas notamment du Règlement européen dit “Bruxelles I” [32] (le “Règlement Bruxelles I”) [33]. Il est certain que dans les limites de leur applicabilité respective [34], le juge belge examinera son pouvoir de juridiction en priorité à la lumière de ces actes, et non de ses règles de droit interne, quelle que soit la nature particulière qui soit reconnue à ces règles en droit interne belge (impérative ou d'ordre public), ou en droit international privé belge (loi d'application immédiate ou d'ordre public international belge). Comme le font observer F. Rigaux et M. Fallon [35], “à défaut de réserve expresse contenue dans un traité, il est inadmissible que chacun des États contractants puisse faire céder l'exécution du traité international devant son ordre public judiciaire”.

        Hiérarchie des normes

        43.Certes, en son article 4, la Loi contient une disposition de compétence internationale en faveur du juge belge. Toutefois et pour les raisons exposées ci-dessus, il ne fait aucun doute que la Loi, comme toute norme légale de droit interne belge, cède le pas devant une norme de droit international directement applicable [36]. Quelle que soit donc sa nature particulière en droit interne belge ou en droit international privé belge, le juge belge n'a pas d'autre choix que d'écarter une éventuelle application de la Loi lorsque cet écartement résulte d'une norme de droit international directement applicable ayant force obligatoire en Belgique.

        44.Le point paraît particulièrement évident dans le cadre des litiges dits “communautaires” où le Règlement Bruxelles I trouve à s'appliquer et nul ne songe à remettre en question que l'application des dispositions de la Loi en matière de compétence internationale doive dans ce cas être écartée au profit des dispositions du Règlement Bruxelles I [37]. Dans un litige de ce type, le juge belge par hypothèse saisi par le concessionnaire sur la base de l'article 4 de la Loi devra décliner sa juridiction dès lors que l'autre partie peut faire état d'une clause d'élection de for au profit des tribunaux d'un autre État membre qui serait valable au regard de l'article 23 du Règlement Bruxelles I [38]. Dans l'hypothèse où aucune des parties ne peut faire état d'une clause de juridiction valable au regard de ces instruments, le juge belge poursuivra l'examen de sa compétence internationale à l'aune des autres chefs de compétence prévus audit Règlement (notamment art. 2: for du domicile du défendeur ou art. 5.1: tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande doit être exécutée) [39] et non au regard de la Loi.

        45.C'est pour la même raison que par le jeu combiné d'une prorogation volontaire de compétence au profit des tribunaux d'un autre État membre conforme au Règlement Bruxelles I et d'une clause de droit applicable indiquant un droit national autre que le droit belge conforme aux dispositions de l'article 3 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles [40], toutes deux normes internationales ayant préséance sur la Loi, le juge belge n'aura d'autre solution que de s'incliner face à cet écartement légal de l'application de la Loi. Avec le paradoxe souvent constaté que la Loi peut valablement être écartée au profit d'un droit national étranger appliqué par un juge étranger, ou selon la formule célèbre: “le juge belge accepte (...) que ses collègues étrangers ignorent la loi de 1961 mais ne tolère pas d'arbitres étrangers” [41].

        46.De même, le juge belge examinera en premier ordre le déclinatoire de juridiction fondé sur l'existence d'une clause d'arbitrage au regard de la Convention de New York ou de Genève et non au regard de la Loi.

        Intervention des normes de droit interne, à titre subsidiaire

        47.L'application prioritaire des normes de droit international directement applicables à la détermination de son pouvoir de juridiction n'implique cependant pas que le juge belge ne pourra en aucun cas tenir compte de ses règles (de compétence internationale) d'origine interne. Encore faudrait-il en effet que les normes internationales en question ne réservent pas elles-mêmes l'application d'une norme de droit interne qu'elles désignent directement ou permettent de désigner. L'intervention d'une norme de droit interne se fait alors en exécution et dans les limites fixées par la norme de droit international et non en contradiction avec cette dernière. C'est ainsi que le Règlement de Bruxelles I permet de refuser la reconnaissance d'une décision judiciaire en cas de contrariété avec les normes d'ordre public international de l'État membre requis (art. 34.1.); ou encore, en matière de conflit de lois, que la Convention de Rome réserve expressément l'application, dans certaines circonstances, des normes impératives de droit interne (art. 3.3., 5.2. et 6.1.), des normes impératives de droit international privé/lois d'application immédiate (art. 7) ou permet aux normes touchant à l'ordre public international de l'état du juge saisi d'écarter la loi étrangère normalement applicable en vertu de la convention (art. 16).

        48.Il n'en va pas différemment de la Convention de New York, qui prévoit dans quelles limites est requise l'intervention d'un droit interne pour déterminer la reconnaissance d'une convention d'arbitrage ou d'une sentence arbitrale étrangère par le juge de l'État requis. Ainsi, au stade de la reconnaissance de la sentence étrangère, le juge requis examinera non seulement la capacité des parties à compromettre au regard de leurs lois nationales respectives, mais également la validité de la convention au regard de la lex contractus ou de la lex situs (art. 5.1.) et l'arbitrabilité du litige au regard de sa propre loi, au titre de lex fori (art. 5.2.).

        49.Depuis l'Arrêt, il est désormais indiscutable que c'est également au regard de la lex fori que l'arbitrabilité d'un litige devra être examinée au stade du déclinatoire de juridiction (c'est-à-dire en ce qui concerne la reconnaissance de la convention d'arbitrage) (art. 2.1.). Le juge belge saisi d'une demande de reconnaissance d'une convention d'arbitrage ou d'une sentence arbitrale étrangère devra donc toujours examiner la question de l'arbitrabilité d'un litige au regard du droit belge.

        Déclinatoire de juridiction soumis à la lex fori et inarbitrabilité du litige

        50.C'est une chose de proclamer que l'arbitrabilité d'un litige doit être examinée à la lueur de la lex fori, mais ce n'est pas pour autant condamner tout litige à l'inarbitrabilité [42]: la solution dépendra évidemment de la nature du litige et du contenu de la lex fori. Pour le juge belge, la question de l'arbitrabilité d'un litige est introduite par l'article 1676, 1. du Code judiciaire, qui dispose:

        “Tout différend déjà né ou qui pourrait naître d'un rapport de droit déterminé et sur lequel il est permis de transiger, peut faire l'objet d'une convention d'arbitrage.

        2. (…)

        3. Les dispositions qui précèdent sont applicables sous réserve des exceptions prévues par la loi.”

        51.En l'occurrence, concernant la résiliation des concessions de vente exclusive à durée indéterminée, la loi particulière à laquelle se réfère le Code judiciaire sont les articles 4 et 6 de la Loi. Si une première lecture des articles 4 et 6 laissait à penser que la Loi excluait purement et simplement le recours à l'arbitrage en matière de résiliation de concession de vente exclusive à durée indéterminée produisant ses effets dans tout ou partie du territoire belge [43] (dès lors que la convention d'arbitrage avait été conclue avant la fin du contrat de concession), l'interprétation sans équivoque qui en fut faite par l'arrêt Audi-NSU [44] limita la protection de l'article 4 de la Loi à la possibilité pour le concessionnaire de pouvoir toujours se voir appliquer les dispositions de la Loi, quitte à ce que ce soit par un arbitre [45]. La soumission à l'arbitrage des litiges tombant dans le champ d'application de la Loi est donc admise par les juges belges, dès lors qu'ils constatent que les arbitres ont l'obligation d'appliquer les dispositions de la Loi [46].

        [1] Mon. b. 5 octobre 1961, telle que modifiée par la loi du 13 avril 1971, Mon. b. 21 avril 1971.
        [2] Voy. pour les plus récents, P. Kileste et P. Hollander, “Examen de jurisprudence. La loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation des concessions de vente exclusive à durée indéterminée (1997-2002)”, R.D.C. 2003, pp. 411 à 457; J.-P. Fierens et A. Mottet-Haugaard, “Chronique de jurisprudence. La loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation des concessions de vente exclusive à durée indéterminée (1987-1996)”, J.T. 1998, pp. 105 et s.
        [3] Voy. p. ex., H. Minjauw, “Relation entre la loi belge de 1961 relative à la résiliation des concessions de vente exclusive et l'arbitrage. Développements récents”, R.D.A.I./I.B.L.J., n° 1/2007, pp. 3 à 15; M. Piers, “Arbitreerbaarheid en toepasselijk recht; is de controverse nu ten einde,”, R.W. 2004-05, pp. 1049 à 1055; P. Hollander, “L'arbitrage et la distribution commerciale”, Actes du colloque du CEPANI du 17 novembre 2005, Bruxelles, Bruylant, 2005, pp. 27 à 58; A. Nuyts, “La loi belge du 27 juillet 1961 relative à la résiliation unilatérale des concessions de vente exclusive à durée indéterminée et les conventions d'arbitrage”, J.T. 1993, pp. 349 à 356; voy. aussi la thèse de N. Coipel-Cordonnier, Les conventions d'arbitrage et d'élection de for en droit international privé, Paris, L.G.D.J., 1999 et P-E Partsch, “L'arbitrabilité des litiges dans la Convention de New York”, Act. dr. 1992, pp. 1259 à 1276.
        [4] Voy. les notes respectives de M. Traest et P. Hollander après l'arrêt de Cass. 15 octobre 2004, T.B.H. 2005, pp. 492 à 504 et les nombreuses références y citées; pour un résumé de la question, voy. aussi H. Van Houtte, K. Cox et S. Cools, “Overzicht van rechtspraak. Arbitrage (1972-2006)”, R.D.C. 2007, pp. 116 à 120; voy. aussi A. Nuyts, ““Le contrôle de l'arbitrabilité selon la loi du for dans les Conventions de New York et Genève et les concessions de vente exclusive à durée indéterminée en Belgique” (note sous Comm. Bruxelles 29 octobre 1991), R.D.C. 1993, pp. 1122 à 1130.
        [5] Comme le font remarquer plusieurs auteurs citant P. de Bournonville, L'arbitrage, Rep. not., T. XIII, liv. 6, Bruxelles, Larcier, 2000, n° 316, il est assez rare que les parties prévoient une loi qui soit spécifiquement applicable à leur clause d'arbitrage, et qui soit différente de la loi choisie par elles pour régir l'ensemble du contrat. Théoriquement cependant, la lex contractus de la clause d'arbitrage peut parfaitement est distincte de celle régissant le fond du contrat et c'est à elle qu'il est référé dans les développements qui suivent sous le vocable “lex contractus”.
        [6] A. Nuyts, o.c., R.D.C. 1993, p. 1123, n° 5.
        [7] Ph. Fouchard, L'arbitrage commercial international, Paris, Dalloz, 1965, n° 193.
        [8] F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, Bruxelles, Larcier, 2005, 3ème éd., n° 14.17
        [9] P.-E. Partsch, o.c., p. 1271, n° 12.
        [10] Les auteurs se rejoignent pour dire que les critères d'examen ne sont toutefois pas les mêmes pour un arbitre que pour un juge, au motif assez compréhensible que pour l'arbitre, il n'y a pas vraiment de lex fori (contra toutefois: les conclusions de M. le procureur général E. Krings, alors avocat général devant l'arrêt de la Cour de cassation du 28 juin 1979, Pas. 1979, I, p. 1260). Nous n'envisageons pas plus avant cette problématique dans le cadre de cette note.
        [11] Convention du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères faite à New York, approuvée par la loi belge du 5 juin 1975 (Mon. b. 15 novembre 1975).
        [12] Convention européenne de Genève du 21 avril 1961 sur l'arbitrage commercial international, approuvée par la loi belge du 19 juillet 1975 (Mon. b. 17 février 1976).
        [13] F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, Bruxelles, Larcier, 2005, 3ème éd., n° 14.22.
        [14] Nous soulignons.
        [15] P. Hollander, o.c., p. 28, note infrapaginale 9.
        [16] Cass. 28 juin 1979, Pas. 1979, I.
        [17] Cass. 22 décembre 1988, Droit de la distribution 1987-92, Kluwer, 1994, p. 145.
        [18] Cass. 15 octobre 2004, R.D.C. 2005, pp. 488 et s. et les observations de M. Traest et P. Hollander.
        [19] Également publié dans la revue Tijdschrift@ipr.be, 2007, n° 4, pp. 25 et s.
        [20] Commenté dans P. Kileste et P. Hollander, o.c., n° 144.
        [21] Publié au J.T. 1995, pp. 344 et s. et commenté par B. Hanotiau, “Arbitrage et concessions de vente”, J.T. 1995, pp. 346 à 347.
        [22] Par hypothèse, exception faite des règles de compétences territoriales et de l'obligation de soumettre le litige au juge étatique belge.
        [23] Dans la mesure où, comme on le verra infra, l'Arrêt permet de conclure que selon la Convention de New York, l'arbitrabilité d'un litige doit toujours s'apprécier (aussi) au regard de la lex fori, peu importe que la question se pose au stade de la reconnaissance de la convention d'arbitrage (déclinatoire de juridiction) ou au stade de la reconnaissance de la sentence arbitrale (stade de l'exequatur), la question perd de son intérêt pratique.
        [24] Déjà affirmé dans son arrêt du 15 octobre 2004.
        [25] En ce sens déjà, F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, T. II, Bruxelles Larcier, 1993, 1415 et F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, Bruxelles, Larcier, 2005, 14.188.
        [26] Nous soulignons.
        [27] Thèse défendue dans le passé, notamment, par P.-E. Partsch et N. Coipel-Cordonnier.
        [28] Nous soulignons.
        [29] F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, 2005, 3ème éd., nos 9.6 et 11.3.
        [30] Cass. 27 mai 1971, Pas. 1971, I, p. 886, concl. W.-J. Ganshof van der Meersch; J. Salmon, “Les conflits entre le traité international et la loi interne en Belgique à la suite de l'arrêt rendu le 27 mai 1971 par la Cour de cassation”, J.T. 1971, pp. 509 et s. L'arrêt affirme la primauté sur la loi belge des dispositions directement applicables (self executing) issues de traités internationaux en vigueur dans l'ordre international et valablement approuvés par le pouvoir législatif belge et publiés au Moniteur belge.
        [31] Loi belge du 16 juillet 2004, Mon. b. 27 juillet 2004: art. 2: “Sous réserve de l'application des traités internationaux, du droit de l'Union européenne, (…), la présente loi régit, (…)”.
        [32] Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (J.O. L. 12, 16 janvier 2001).
        [33] Pour limiter notre propos, nous n'envisagerons pas ici la Convention de Lugano du 16 septembre 1988 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Mon. b. 8 janvier 1998), ni les divers autres actes internationaux en matière de procédure internationale auxquels la Belgique est partie.
        [34] Le Règlement Bruxelles I exclut expressément en son art. 1 § 2, d) son applicabilité à l'arbitrage.
        [35] F. Rigaux et M. Fallon, Droit international privé, 2005, 3ème éd., n° 9.8.
        [36] A. Kohl, note sous Bruxelles 4 octobre 1985, J.T. 1986, p. 95.
        [37] Cass. 21 juin 2001, C.99.0398.F/1, inédit, rapporté par P. Kileste et P. Hollander, o.c., n° 140; H. Minjauw, o.c., p. 5.
        [38] P. Kileste et P. Hollander, o.c., n° 139; A. Nuyts, o.c., J.T. 1993, p. 350, n° 6 à propos de l'art. 17 des Conventions de Bruxelles et Lugano.
        [39] À ce propos, on considérait sous le régime de la Convention de Bruxelles (et on le fait toujours dans le cadre de la Convention de Lugano) que l'obligation de donner un préavis raisonnable ou une indemnité compensatoire d'un tel préavis sont exécutées au domicile du concessionnaire, ce qui fondait le for du domicile du concessionnaire demandeur sur l'art. 5.1. des conventions.
        [40] Convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980 (80/934/CEE), Mon. b. 9 octobre 1987.
        [41] H. Van Houtte, “L'arbitrabilité de la résiliation des concessions de vente exclusive”, in Mélanges offerts à Raymond Vander Elst, Bruxelles, Nemesis, T. II, 1986, p. 831.
        [42] F. Rigaux et M. Fallon, o.c., n° 14.21.
        [43] Étant donné la référence faite par l'art. 4 au “juge belge”.
        [44] C'est le second enseignement de cet arrêt: à côté de son interprétation de l'art. 5 de la Convention de New York, l'arrêt éclaire aussi l'interprétation des art. 4 et 6 de la Loi.
        [45] Ou comme l'exprime admirablement J. Linsmeau, la nature impérative de la restriction de l'article 4 quant à la faculté de recourir à des arbitres “gît dans l'obligation d'appliquer le droit belge et non dans celle de porter le litige devant le juge étatique”, “L'arbitrage volontaire en droit privé belge”, R.P.D.B., compl. VII, 1990, n° 68.
        [46] Cass. 28 juin 1979, précité; Cass. 22 décembre 1988, partiellement inédit, rapporté par A. Nuyts, o.c., J.T. 1993, p. 351, n° 10; Cass. 15 octobre 2004.