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L'interprétation du droit sui generis sur les bases de données par la Cour de justice des Communautés européennes: à propos des arrêts British Horseracing Board et Fixtures Marketing du 9 novembre 2004, R.D.C.-T.B.H., 2005/7, p. 734-745

L'interprétation du droit sui generis sur les bases de données
par la Cour de justice des Communautés européennes:
à propos des arrêts British Horseracing Board et Fixtures Marketing
du 9 novembre 2004

François Dubuisson [1]

TABLE DES MATIERES

Introduction

I. Les conditions de reconnaissance du droit sui generis

II. L'étendue des prérogatives du titulaire du droit sui generis a) La définition de la notion d' “extraction et/ou réutilisation”

b) La définition de la notion de “partie substantielle” du contenu de la base de données

c) La définition de la notion d'extraction “systématique et répétée”

Conclusions

RESUME
La Cour de justice des Communautés européennes a rendu quatre arrêts le 9 novembre 2004, qui permettent de résoudre les principales questions d'interprétation soulevées par l'application du droit sui generis établi par la directive 96/9 du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données. Les cas d'espèce soumis à la Cour concernaient la reprise d'informations par des sociétés de paris, à partir de bases de données sportives, concernant des calendriers de matches de football (affaires Fixtures Marketing Ltd) ou de courses de chevaux (affaire British Horseracing Board Ltd). La Cour a procédé à une interprétation stricte du droit sui generis, et ce tant en ce qui concerne les conditions de sa reconnaissance que la définition de l'étendue des prérogatives du fabricant de la base de données. Les solutions retenues par la Cour permettent d'écarter le risque que le droit sui generis débouche sur une appropriation de l'information, considérée en tant que telle. Elles obligeront par ailleurs les juges nationaux à modifier leur jurisprudence, qui en Belgique et en France notamment, révèle une interprétation du droit sui generis beaucoup plus large que celle réalisée par la Cour.
SAMENVATTING
Op 9 november 2004 velde het Hof van Justitie van de Europese Gemeenschappen vier arresten op grond waarvan de belangrijkste interpretatieproblemen in verband met de toepassing van het recht sui generis uit de richtlijn 96/9 van 11 maart 1996 betreffende de rechtsbescherming van databanken opgelost kunnen worden. De geschillen die aan het Hof werden voorgelegd, hadden betrekking op de overname van informatie in verband met de wedstrijdkalenders voor voetbalwedstrijden (zaak Fixtures Marketing Ltd) en paardenrennen (zaak British Horseracing Board Ltd) door wedkantoren uit sportdatabanken. Het Hof besluit tot een strikte interpretatie van het recht sui generis, zowel op het gebied van de voorwaarden voor de erkenning van het recht als inzake de bepaling van de draagwijdte van de rechten van de maker van de databank. Met de oplossing van het Hof wordt vermeden dat de toepassing van het recht sui generis uitmondt in de toeëigening van de informatie zelf. Zij dwingt de nationale rechtsinstanties echter wel tot een aanpassing van hun rechtspraak inzake de interpretatie van het recht sui generis. Deze is met name in België en in Frankrijk veel ruimer dan in de rechtspraak van het Hof.
Introduction

1.L'apport principal de la directive européenne 96/9 du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données a été d'instituer un “droit sui generis”, portant sur le contenu même des bases de données [2]. Ce droit exclusif nouveau a été établi à partir du constat que le droit d'auteur n'avait pas vocation à protéger ce qui fait la valeur essentielle des bases de données, c'est-à-dire la somme d'informations qu'elles contiennent [3] et vise à encourager les investissements consentis pour la constitution de telles bases de données [4]. En Belgique, la directive européenne a été transposée en droit interne par la loi du 31 août 1998 [5].

2.La reconnaissance du droit sui generis est subordonnée à la condition que la fabrication de la base de données ait donné lieu à “un investissement substantiel” [6]. Les prérogatives reconnues par la directive et la loi belge de transposition au producteur [7] de la base de données consistent dans “le droit d'interdire l'extraction et/ou la réutilisation de la totalité ou d'une partie, qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de cette base de données”. Au sens de la directive et de la loi belge de transposition, l'extraction s'entend du “transfert permanent ou temporaire […] sur un autre support par quelque moyen ou sous quelque forme que ce soit” et la réutilisation, de “toute forme de mise à la disposition du public” [8].

3.Dès l'adoption de la directive, les commentateurs ont relevé que le caractère “souple” de certains concepts au coeur du droit sui generis ne manquerait pas de soulever des difficultés d'interprétation et de mise en oeuvre. Il en va ainsi tout particulièrement du critère de “substantialité”, qui constitue à la fois l'élément central de la définition de l'objet du droit sui generis (la partie “substantielle” du contenu de la base de donnée) et la condition fondamentale à laquelle est subordonnée la reconnaissance du droit (l'existence d'un investissement “substantiel”). La directive indique que le caractère substantiel de la partie du contenu de la base de données ou de l'investissement relatif à la fabrication de la base doit s'apprécier sur le plan quantitatif ou qualitatif, mais cette précision ne résout pas, loin s'en faut, les questions soulevées quant aux critères d'évaluation des conditions de “substantialité”.

4.D'autres interrogations ont vu le jour à l'occasion de la soumission aux juridictions nationales des États membres de l'Union européenne des premiers litiges concernant le droit sui generis [9]. On a vu ainsi apparaître dans la doctrine néerlandaise une théorie dite de la “spin-off”, consistant à exclure du bénéfice du droit sui generis les bases de données qui ne sont que l'accessoire nécessaire d'une activité principale du producteur (par exemple, la confection d'un annuaire par un opérateur téléphonique) [10].

5.C'est à l'occasion de quatre litiges portés devant des juridictions nationales [11] que la Cour de justice des Communautés européennes a été saisie de demandes préjudicielles portant sur de nombreuses questions d'interprétation du texte de la directive de 1996, qui ont donné lieu aux quatre arrêts rendus le 9 novembre 2004 [12]. Les cas d'espèce soumis à la Cour concernaient tous des bases de données sportives, intégrant des informations relatives aux matches de football (affaires Fixtures Marketing Ltd) ou aux courses de chevaux (affaire British Horseracing Board Ltd), bases de données fabriquées par les organisateurs de ces activités. Ceux-ci se plaignaient du fait que certaines informations issues de leurs bases de données étaient régulièrement extraites et réutilisées par des sociétés de jeux d'argent, pour les besoins de leurs activités de paris, et ce sans leur autorisation.

6.La présente étude aura pour objet d'analyser l'apport des décisions de la Cour de justice quant à l'interprétation du droit sui generis, notamment au regard des jurisprudences nationales, belge et française en particulier. Schématiquement, deux ordres de questions faisaient l'objet des recours préjudiciels. D'une part, il était demandé à la Cour de préciser les conditions de reconnaissance de la protection du droit sui generis, en déterminant à quels types d'activités doivent se rapporter les investissements réalisés par le producteur de la base de données afin de pouvoir être pris en compte dans la vérification de l'existence d'un “investissement substantiel” (I). D'autre part, la Cour était invitée à fixer l'étendue exacte des prérogatives du titulaire du droit sui generis (II).

I. Les conditions de reconnaissance du droit sui generis

7.La reconnaissance du droit sui generis suppose tout d'abord que l'on se trouve en présence d'une base de données, telle que définie à l'article 1er de la directive. Au sens de cette disposition, la base de donnée est entendue comme un recueil d'oeuvres, de données ou d'autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou d'une autre manière. Cette définition couvre les bases de données fixées tant sur support électronique que sur support papier [13]. Dans les affaires dont la Cour était saisies, la qualité de base de données des recueils à la source desquels étaient puisées les informations réutilisées par les sociétés de jeux n'étaient pas mise en cause par les parties. Appelée toutefois à expliciter la portée de la notion de “base de données”, la Cour de justice des Communautés européennes a précisé, dans l'un de ses arrêts du 9 novembre 2004, qu'elle “vise tout recueil comprenant des oeuvres, des données ou d'autres éléments, séparables les uns des autres sans que la valeur de leur contenu s'en trouve affectée, et comportant une méthode ou un système, de quelque nature que ce soit, permettant de retrouver chacun de ses éléments constitutifs” [14].

8.Comme rappelé plus haut, le contenu d'une base de données bénéficie de la protection du droit sui generis à la condition spécifique que “l'obtention, la vérification ou la présentation de ce contenu attestent un investissement qualitativement ou quantitativement substantiel” (art. 7 de la directive) [15]. Selon la directive, la nature de l'investissement peut consister “dans la mise en oeuvre de moyens financiers et/ou d'emploi du temps, d'efforts et d'énergie” [16]. La Cour de justice des Communautés européennes a indiqué que “[l]'appréciation quantitative fait référence à des moyens chiffrables et l'appréciation qualitative à des efforts non quantifiables, tels qu'un effort intellectuel ou une dépense d'énergie” [17].

9.Les recours préjudiciels soumis à la Cour de justice des Communautés européennes soulevaient la délicate question de savoir quels éléments doivent être pris en compte afin d'apprécier l'existence d'un investissement substantiel consacré à la constitution d'une base de données. Il était demandé à la Cour si les investissements effectués par les producteurs des bases de données sportives en cause afin de créer les données nécessaires à leurs activités principales (l'organisation de championnats de football ou de courses hippiques) étaient susceptibles d'être pris en considération dans l'évaluation de l'existence d'un investissement substantiel effectué pour “l'obtention, la présentation ou la vérification” du contenu de la base de données. Il s'agissait ainsi de déterminer si la création de données était susceptible d'entrer dans la notion d'“obtention” du contenu de la base, au sens de la directive, afin d'être prise en compte pour la comptabilisation des investissements réalisés pour la fabrication de la base de données. À cette question, la Cour a répondu par la négative, en procédant à une stricte interprétation du texte de la directive.

10.La Cour a tout d'abord écarté la théorie dite de la “spin-off” [18], selon laquelle devraient être écartées de la protection du droit sui generis les bases de données qui ne constituent que le prolongement accessoire et naturel d'une activité principale:

“la circonstance que la constitution d'une base de données soit liée à l'exercice d'une activité principale dans le cadre de laquelle la personne qui constitue la base est également le créateur des éléments contenus dans cette base n'exclut pas, en tant que telle, que cette personne puisse revendiquer le bénéfice de la protection par le droit sui generis […]” [19].

11.La Cour a ensuite établi que la création de données ne constituait pas un élément à prendre en compte pour établir la protection du droit sui generis:

“la notion d'investissement lié à l'obtention du contenu d'une base de données doit […] s'entendre comme désignant les moyens consacrés à la recherche d'éléments indépendants existants et à leur rassemblement dans ladite base, à l'exclusion des moyens mis en oeuvre pour la création même d'éléments indépendants. Le but de la protection par le droit sui generis organisée par la directive est en effet de stimuler la mise en place de systèmes de stockage et de traitement d'informations existantes, et non la création d'éléments susceptibles d'être ultérieurement rassemblés dans une base de données.

[…]

La notion d'investissement lié à la vérification du contenu de la base de données doit être comprise comme visant les moyens consacrés, en vue d'assurer la fiabilité de l'information contenue dans ladite base, au contrôle de l'exactitude des éléments recherchés, lors de la constitution de cette base ainsi que pendant la période de fonctionnement de celle-ci. La notion d'investissement lié à la présentation du contenu de la base de données concerne, pour sa part, les moyens visant à conférer à ladite base sa fonction de traitement de l'information, à savoir ceux consacrés à la disposition systématique ou méthodique des éléments contenus dans cette base ainsi qu'à l'organisation de leur accessibilité individuelle.

[…]

À cet égard, si la recherche des données et la vérification de leur exactitude au moment de la constitution de la base de données ne requièrent pas, en principe, de la personne qui constitue cette base la mise en oeuvre de moyens particuliers puisqu'il s'agit de données qu'elle a créées et qui sont à sa disposition, il reste que le rassemblement de ces données, leur agencement systématique ou méthodique au sein de la base, l'organisation de leur accessibilité individuelle et la vérification de leur exactitude tout au long de la période de fonctionnement de la base peuvent nécessiter un investissement substantiel, sur le plan quantitatif et/ou qualitatif, au sens de l'article 7 § 1er de la directive” [20].

12.Ces principes ont amené la Cour à exclure de la protection du droit sui generis les bases de données sportives auxquelles elle était confrontée, faute d'investissement substantiel qui soit dissociable de l'opération de création des données. Les fabricants des bases de données sportives faisaient valoir que le processus d'établissement et de vérification des informations relatives à l'élaboration des calendriers de courses ou de matches de football avait supposé l'engagement d'importants moyens financiers et humains. La Cour a toutefois considéré que l'opération de détermination, aux fins de l'organisation de courses hippiques ou de championnats de football, des dates, des horaires des courses ou des matches, ou encore de l'identité des chevaux ou des équipes participantes avait directement trait à la création de données, et devait, par conséquent, être exclue de l'appréciation de l'existence d'un investissement substantiel [21]. Cette exclusion s'étend également, selon la Cour, au travail de vérification et d'encodage des informations, lorsqu'il intervient lors de la phase de création des données. Cette interprétation de la notion d' “obtention” implique que l'ensemble des investissements liés au processus de création de données est écarté de l'évaluation de l'existence d'un investissement substantiel. Lorsque la base de données est composée d'éléments produits par le fabricant de la base lui-même, seuls les investissements consacrés à l'organisation de ces données dans la base ou à leur mise à jour (vérification “continue”) sont susceptibles de donner lieu au droit sui generis, s'ils s'avèrent substantiels [22].

13.Les premiers commentateurs de la décision de la Cour ont reproché à cette dernière la “rigueur” et le “manque de pragmatisme” de son interprétation de la notion d'“obtention”, arguant du fait que la solution retenue aboutissait en pratique à exclure de la protection les bases de données dont le contenu est créé par le fabricant lui-même [23]. Cette critique ne nous semble guère justifiée, la Cour étant chargée d'interpréter le texte de la directive tel qu'il se trouve, et non tel qu'on aimerait qu'il se trouve au nom de telle ou telle conception de ce qui convient au marché des bases de données. C'est au regard de la méthode et de la logique de l'interprétation opérée par la Cour qu'il y a lieu d'évaluer la pertinence du résultat obtenu, et sur ce point, il faut remarquer que la décision nous paraît difficilement attaquable [24].

14.Conformément à sa jurisprudence, la Cour a fondé son interprétation sur le libellé [25] de la directive, eu égard au sens habituel des termes [26], en tenant compte de l'historique législatif, des travaux préparatoires et des rapports explicatifs [27], ainsi que de l'objectif poursuivi ou de l'économie générale et de la finalité de la réglementation dont la disposition concernée constitue un élément [28]. La Cour a ainsi relevé qu' “aux termes des neuvième, dixième et douzième considérants de la directive [29], la finalité de celle-ci est […] d'encourager et de protéger les investissements dans des systèmes de “stockage” et de “traitement” de données qui contribuent au développement du marché de l'information” [30]. Elle en a déduit l'exclusion de la prise en considération des investissements liés à la création de données, dont l'encouragement n'est pas inscrit dans les objectifs de la directive [31]. La Cour a corroboré cette conclusion par l'analyse du sens du terme “obtention”, tel qu'il se dégageait de divers considérants de la directive. L'avocat général avait déjà relevé, dans ses conclusions, que la signification habituelle de la notion d' “obtention”, dans différentes langues officielles, s'opposait à celle de “création” [32]. La Cour a fait sienne cette analyse, en se fondant principalement sur le libellé du trente-neuvième considérant de la directive, “selon lequel l'objectif du droit sui generis est de garantir une protection contre l'appropriation des résultats obtenus de l'investissement financier et professionnel consenti par la personne qui a “recherché et rassemblé le contenu” d'une base de données” [33]. La recherche et le rassemblement d'un contenu suppose, en effet, que ce contenu préexiste. La Cour tire également argument du considérant 19 de la directive aux termes duquel “normalement, la compilation de plusieurs fixations d'exécutions musicales sur un CD n'entre pas dans le champ d'application de la présente directive […] parce qu'elle ne représente pas un investissement assez substantiel pour bénéficier du droit sui generis”. Selon la Cour, “il en ressort en effet que les moyens mis en oeuvre pour la création même des oeuvres ou des éléments figurant dans la base de données, en l'occurrence sur un CD, ne sont pas assimilables à un investissement lié à l'obtention du contenu de ladite base et ne peuvent par conséquent entrer en ligne de compte pour apprécier le caractère substantiel de l'investissement lié à la constitution de cette base” [34]. Cette interprétation nous semble moins convaincante: rien dans le libellé du considérant 19 ne permet de limiter l'hypothèse qui y est visée aux CD composés d'oeuvres originales, à l'exclusion des “compilations” au sens strict du terme, qui se limitent à rassembler des enregistrements déjà existants. Les termes utilisés laissent d'ailleurs plutôt penser le contraire (“compilation de plusieurs fixations d'exécutions musicales sur un CD”).

15.L'interprétation réalisée par la Cour peut donc se prévaloir d'une analyse rigoureuse des termes de la directive, compte tenu des objectifs assignés à celle-ci. En excluant de manière radicale les travaux relatifs à la création de données des investissements à prendre en considération afin de reconnaître la protection du droit sui generis, la Cour a pleinement tiré les conséquences de son interprétation de la notion d'obtention. Sur ce point, l'avocat général avait fait preuve de moins de cohérence, puisqu'elle avait admis que les investissements liés à la création de données pouvaient néanmoins être retenus, lorsque cette création était concomitante au traitement et à l'inclusion des informations dans la base [35], sans que cette interprétation soit justifiée sur un élément précis du texte de la directive.

16.Il reste que la distinction entre création et obtention de données, qui est au coeur du raisonnement de la Cour, peut s'avérer délicate à opérer en pratique, comme n'ont pas manqué de le relever l'avocat général [36] ou certains commentateurs [37]. Il est toutefois possible de dégager des critères plus précis en examinant l'application concrète de la distinction qu'en a faite la Cour dans les cas d'espèce qui lui étaient soumis. Dans l'affaire British Horseracing, les informations intégrées dans la base de données concernaient notamment le “nom, le lieu et la date de la course, la distance à parcourir, les critères d'admission, la date de clôture des inscriptions, le montant de la commission d'entrée et celui à concurrence duquel l'hippodrome contribuera au prix décerné à l'issue de la course” [38]. Certaines de ces informations étaient enregistrées auprès des propriétaires de chevaux, d'autres attribuées ou composées par la société chargée d'alimenter et de gérer la base de données [39]. Dans les affaires Fixtures Marketing, la confection des calendriers des matches par les ligues professionnelles anglaises et écossaises de football supposait de prendre certaines informations préalables auprès des clubs, de la police ou des associations de supporters [40]. La circonstance que certaines informations nécessaires à la confection des listes de courses ou des calendriers de matches soient récoltées auprès de tiers n'a donc pas amené la Cour à considérer que les “éléments” intégrés dans la base de données étaient le résultat d'une “obtention”. Pour pouvoir mener à bien leurs activités, les organisateurs de courses de chevaux ou de championnats de football doivent créer des données spécifiques, à partir d'informations qu'ils récoltent mais également en fonction d'informations qu'ils déterminent eux-mêmes (dates et ordres des courses ou des matches,…). Cela signifie que ce qu'il faut prendre en considération, c'est la donnée spécifique telle qu'elle est élaborée pour les besoins de l'activité principale en cause. Au regard de ce critère, le départ entre la création et l'obtention d'éléments apparaît moins flou. Par exemple, une donnée téléphonique devrait être tenue comme une “création” de l'opérateur de télécommunications pour les besoins de son activité, même si certains éléments d'informations sont fournis par l'abonné lui-même (nom et adresse). De la même manière, on peut penser que des données “enregistrées” à partir de phénomènes naturels, comme les données météorologiques ou génétiques doivent être tenues pour des données ayant fait l'objet d'une “création” [41].

17.Lorsque l'on jette un regard rétrospectif sur la jurisprudence rendue en Belgique ou en France en matière de protection des bases de données, force est de constater que la distinction entre la création et l'obtention de données, retenue par la Cour de justice des Communautés européennes, n'a généralement pas été prise en compte pour la vérification de l'existence d'un investissement substantiel. Le tribunal civil de Bruxelles a ainsi admis la protection d'un inventaire des groupes d'entraide en Communauté française, créé par une association mutualiste pour les besoins de sa mission, et ce en fonction d'investissements consacrés à la constitution des données figurant dans l'inventaire [42]. Dans la jurisprudence française, on trouve également plusieurs décisions ayant admis l'application du droit sui generis à raison d'investissements se rapportant manifestement à la création des éléments intégrés dans la base de données en cause [43]. On peut mentionner à cet égard l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris dans l'affaire Reed Expositions. La société Reed Expositions France avait pour activité l'animation de salons d'exposition. Pour chaque salon, elle éditait un annuaire comportant les informations utiles afférentes aux exposants. Il s'agissait manifestement de données créées pour les besoins de l'activité principale de la Société Reed. La cour a pris non seulement en compte les investissement liés à l'intégration de ces éléments dans l'annuaire, mais elle a également eu égard à l'ensemble des frais relatifs à l'organisation même des salons d'expositions, comme les frais de publicité ou d'établissement des plans de communication [44]. Les investissement pris en considération par la cour allaient ainsi très largement au-delà de ceux consacrés à la création de la base de données proprement dite.

II. L'étendue des prérogatives du titulaire du droit sui generis

18.La Cour de justice des Communautés européennes était également saisie de plusieurs questions portant sur la définition de l'étendue et du contenu exact des prérogatives du fabricant de la base de données, qui l'ont amenée à préciser la portée de trois expressions employées dans le texte de la directive.

a) La définition de la notion d'“extraction et/ou réutilisation”

19.Il s'agissait, tout d'abord, de déterminer si les extractions et les réutilisations indirectes du contenu d'une base de données étaient susceptibles de porter atteinte au droit sui generis du fabricant de la base de données. Dans l'affaire British Horseracing Board (BHB), les informations relatives aux courses de chevaux avaient été reprises par la société de paris William Hill, non directement à partir de la base de données de BHB, mais à partir de feuilles d'informations auxquelles elle était abonnée, qui reprenaient des données issues de la base de données de BHB [45]. La Cour a jugé que l'utilisation du contenu d'une base de données obtenue par l'utilisateur auprès d'autres sources que celle-ci entrait dans le champ des prérogatives conférées au fabricant par le droit sui generis:

“[…] les notions d'extraction et de réutilisation ne sauraient être circonscrites aux cas d'extraction et de réutilisation opérées directement à partir de la base d'origine, et ce sous peine de laisser la personne qui a constitué la base de données sans protection à l'égard d'actes non autorisés de copiage opérés à partir d'une copie de sa base. Cette interprétation est confirmée par l'article 7 § 2, sous b), de la directive, selon lequel la première vente d'une copie d'une base de données dans la Communauté par le titulaire du droit, ou avec son consentement, épuise le droit de contrôler 'la revente' de cette copie dans la Communauté, mais non celui de contrôler l'extraction et la réutilisation du contenu de cette copie.

Étant donné que des actes d'extraction et/ou de réutilisation non autorisés, effectués par un tiers à partir d'une source autre que la base de données concernée, sont de nature, tout autant que de tels actes effectués directement à partir de ladite base, à porter atteinte à l'investissement de la personne qui a constitué cette base, il y a lieu de considérer que les notions d'extraction et de réutilisation ne supposent pas un accès direct à la base de données concernée” [46].

20.Pour qu'il y ait atteinte au droit sui generis, il suffit dès lors d'établir que les éléments réutilisés trouvent leur source originaire dans la base de données protégée [47]. Il faut cependant préciser que le droit sui generis ne saurait empêcher une personne de se procurer des informations intégrées dans une base de données à partir de sources originaires alternatives et par ses propres moyens [48]. Autrement dit, le contenu informationnel de la base de données est protégé par le droit sui generis [49], mais uniquement à partir de la source que constitue cette base de données, et pour autant qu'il en forme une partie substantielle. Ce principe a été rappelé par une décision du tribunal civil de Bruxelles, dans un litige opposant deux sites web diffusant la programmation de l'ensemble des salles de cinéma en Belgique:

“Il est exact que la demanderesse ne peut empêcher des sociétés concurrentes de publier les programmes et horaires de cinéma et de lui faire dès lors concurrence. La demanderesse ne dispose bien sûr d'aucun droit sur les éléments eux-mêmes des informations reprises dans sa base de données et n'a aucun monopole sur ceux-ci. Ces informations sont d'ailleurs disponibles au public par ailleurs” [50].

21.La Cour de justice des Communautés européennes a par ailleurs précisé que les prérogatives du titulaire du droit sui generis ne portaient pas sur les actes de consultation de la base de données. Une fois que l'accès à la base de données a été rendu public avec le consentement du fabricant de la base, ce dernier ne peut s'opposer à la consultation de cette base par des tiers [51]. Seules la réutilisation ou la réutilisation d'éléments du contenu de la base par ces tiers ressortissent au monopole du fabricant de la base de données, pour autant que ces actes portent sur des “parties substantielles” [52].

b) La définition de la notion de “partie substantielle” du contenu de la base de données

22.La seconde question en relation avec la définition des prérogatives du fabricant de la base de données concernait ainsi la définition de la notion de “partie substantielle” au sens de la directive. Comme on l'a indiqué, cette notion est fondamentale pour distinguer les actes d'extraction ou de réutilisation que l'utilisateur légitime de la base de données est, en principe, en droit de poser librement - qui portent sur une partie non substantielle de la base [53] - des actes qui relèvent de l'autorisation de l'ayant-droit, et qui portent eux sur une partie substantielle. Selon le texte de la directive, le caractère substantiel d'une partie du contenu de la base de données doit s'évaluer de manière quantitative ou qualitative [54]. La directive ne contient pas d'indication plus précise quant aux critères devant guider l'appréciation du caractère “substantiel” d'une partie du contenu de la base de données [55]. Le caractère imprécis de la notion de “partie substantielle” a fait craindre à une partie de la doctrine un risque de dérive du droit sui generis vers une appropriation de l'information prise en tant que telle. Il était en particulier redouté que l'appréciation qualitative du caractère substantiel d'une partie du contenu de la base de données permette de viser la reprise d'informations en quantité très restreinte lorsqu'elles sont fondamentales dans l'économie générale de la base de données [56].

23.Concernant la définition de la notion de “partie substantielle”, la Cour est partie du principe selon lequel “l'appréciation, sous l'angle qualitatif, du caractère substantiel de la partie en cause doit, comme l'appréciation sous l'angle quantitatif, se référer à l'investissement lié à la constitution de la base de données et à l'atteinte portée à cet investissement par l'acte d'extraction et/ou de réutilisation concernant cette partie” [57]. Elle en a déduit des critères d'évaluation, qualitatifs et quantitatifs, exprimés de la façon suivante:

“La notion de partie substantielle, évaluée de façon quantitative, du contenu de la base au sens de l'article 7 § 1 de la directive se réfère au volume de données extrait et/ou réutilisé de la base et doit être appréciée par rapport au volume du contenu total de celle-ci.

[…]

La notion de partie substantielle, évaluée de façon qualitative, du contenu de la base de données se réfère à l'importance de l'investissement lié à l'obtention, à la vérification ou à la présentation du contenu de l'objet de l'acte d'extraction et/ou de réutilisation, indépendamment du point de savoir si cet objet représente une partie quantitativement substantielle du contenu général de la base de données protégée. Une partie quantitativement négligeable du contenu d'une base de données peut en effet représenter, en termes d'obtention, de vérification ou de présentation, un important investissement humain, technique ou financier” [58].

24.Ayant circonscrit la notion de “partie substantielle”, la Cour en a logiquement déduit que “s'agissant de la notion de partie non substantielle du contenu d'une base de données, il y a lieu de considérer que relève de cette notion toute partie ne répondant pas à la notion de partie substantielle d'un point de vue tant quantitatif que qualitatif” [59]. La Cour tire comme conséquence de ces éléments que la valeur inhérente des données concernées par un acte d'extraction ou de réutilisation est indifférente pour l'appréciation de leur nature de “partie substantielle”:

“Il convient d'ajouter que, l'existence du droit sui generis ne donnant pas lieu, selon le quarante-sixième considérant de la directive, à la création d'un nouveau droit sur les oeuvres, données ou éléments mêmes de la base de données, la valeur intrinsèque des éléments concernés par l'acte d'extraction et/ou de réutilisation ne constitue pas un critère pertinent pour apprécier le caractère substantiel de la partie en cause [60].

25.À cet égard, British Horseracing Board (BHB), le producteur de la base de données, faisait valoir que les données extraites et réutilisées par la société de paris (la liste des chevaux participants à chaque course) étaient “capitales”, parce qu'indispensables à la tenue des courses hippiques [61]. Cet argument a été écarté par la Cour, au motif suivant:

“Il convient cependant de rappeler […] que la valeur intrinsèque des données concernées par l'acte d'extraction et/ou de réutilisation ne constitue pas un critère pertinent pour apprécier le caractère substantiel, d'un point de vue qualitatif, de la partie en cause. Le fait que les données extraites et réutilisées par William Hill soient essentielles à l'organisation des courses hippiques dont BHB e.a. sont en charge est donc sans pertinence pour apprécier si les actes de William Hill portent sur une partie substantielle du contenu de la base de données de BHB” [62].

26.On constate que l'hypothèse d'une information isolée formant une partie qualitativement substantielle est exclue de manière fondamentale par la Cour. Seule l'existence d'investissements substantiels concernant l'obtention, la vérification ou la présentation des données est à prendre en considération, ce qui devrait normalement écarter les groupes très restreints de données.

27.Cette interprétation a été contestée par certains auteurs, qui ont critiqué la corrélation établie par la Cour entre le caractère qualitativement substantiel d'une partie du contenu de la base de données et l'existence d'un investissement substantiel se rapportant à cette partie du contenu [63]. Cette corrélation ne nous semble, toutefois, en aucune manière une “confusion” ou un “mélange des genres” [64], mais découle clairement de l'historique législatif de la directive.

28.Les premiers projets de directive accordaient au producteur d'une base de données le droit d'interdire l'extraction ou la réutilisation “du contenu d'une base de données, en tout ou en partie” [65]. La définition de l'objet de la protection semblait donc devoir viser “la copie de données quelle que soit son ampleur” [66]. Dans la version finale du texte de la directive, il a été clairement précisé que le droit sui generis ne portait que sur la totalité ou une partie substantielle du contenu de la base de données, laissant dès lors hors du droit exclusif les parties non substantielles [67]. Cette modification a été précisément justifiée par le fait que la reprise d'une partie non substantielle de la base de données ne porterait pas atteinte à l'investissement consacré à la constitution de la base de données:

“Le Conseil, dans sa position commune, a préféré limiter l'étendue de la protection du droit sui generis à la totalité ou à une partie substantielle du contenu de la base, évaluée de façon qualitative ou quantitative, étant d'avis que l'extraction et/ou la réutilisation de parties non substantielles de ce contenu ne devraient pas porter préjudice à l'investissement du fabricant” [68].

29.On constate le lien établi par le Conseil entre le caractère substantiel de la partie du contenu de la base de données et l'investissement réalisé par le producteur de la base. Une partie est substantielle lorsque son extraction ou sa réutilisation porte préjudice à l'investissement (substantiel) du fabricant de la base de données. L'interprétation retenue par la Cour nous paraît, dès lors, parfaitement conforme aux motifs qui ont été avancés pour justifier la limitation du droit sui generis à la partie substantielle du contenu de la base de données, et permet de souligner pleinement le fait que le droit sui generis ne porte pas directement sur les données considérées isolément [69], et ce quelle que soit la valeur intrinsèque que ces données peuvent présenter.

30.La méthode d'évaluation appliquée jusqu'ici par les tribunaux belge et français se révèlent à nouveau en porte-à-faux avec les critères établis par la Cour de justice. Une affaire française est assez emblématique à cet égard, puisqu'était en cause la reprise d'un nombre très limité d'informations, extraites en plusieurs fois de surcroît. Le litige opposait deux entreprises spécialisées dans la diffusion d'informations financières. La société New Invest avait recueilli des informations provenant de la base de données créées par la société PR Line, en particulier dix communiqués de presse et deux rapports annuels de sociétés cotées en bourse, et les avait intégrés dans sa propre base de données, diffusée en ligne. En première instance, le tribunal de commerce de Nanterre a jugé que les éléments qui avaient été repris constituaient une partie qualitativement substantielle, au motif qu'ils avaient “permis d'enrichir” la base de données de la société News Invest [70]. Cette décision a été réformée par la cour d'appel de Versailles, qui a écarté toute violation du droit sui generis [71], en définissant la notion de “substantialité qualitative” d'une manière plus restreinte que le premier juge, mais en réservant le cas de données “particulièrement stratégiques ou d'actualité” [72]. Dans d'autres affaires, c'est également au regard des caractéristiques propres des données en cause que le caractère qualitativement substantiel d'un ensemble de données a été apprécié [73]. Ce type d'approche s'avère en totale contradiction avec l'interprétation retenue par la Cour de justice des Communautés européennes, qui écarte de l'appréciation qualitative de la substantialité les qualités intrinsèques des données concernées dans le cadre de la base de données d'origine.

c) La définition de la notion d'extraction “systématique et répétée”

31.Dans l'affaire British Horseracing Board, la Cour était confrontée à une dernière question importante concernant la détermination de l'étendue des prérogatives du producteur de la base de données. Les informations hippiques reprises par la société de paris étaient extraites de manière périodique, chaque semaine. Il était dès lors demandé à la Cour de définir la notion d'extraction “systématique et répétée”, qui permet de sanctionner au titre du droit sui generis des reprises de parties non substantielles de données, lorsque ces actes contreviennent à une exploitation normale de la base de données, ou causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du fabricant de la base [74].

32.S'agissant des actes visés par “l'extraction systématique et répétée de parties non substantielles”, la Cour indique que sont ainsi désignés:

“les actes d'extraction effectués par des utilisateurs de la base de données, qui, par leur caractère répété et systématique, aboutiraient à reconstituer, sans autorisation de la personne qui a constitué cette base, la base de données dans son ensemble ou, à tout le moins, une partie substantielle de celle-ci, que ce soit en vue de la constitution d'une autre base de données ou en vue de l'exercice d'une activité autre que la constitution d'une telle base” [75].

33.En conséquence de cette interprétation, la Cour décide que, bien que les actes de reprise d'informations relatives aux courses hippiques aient présenté un caractère répété et systématique dans le chef de la société de paris, ces actes ne sont pas contraires au droit sui generis. Elle estime en effet qu' “il est exclu que, par l'effet cumulatif de ses actes, [la société de paris] William Hill reconstitue et mette à la disposition du public la totalité ou une partie substantielle du contenu de la base de données de BHB et porte ainsi gravement atteinte à l'investissement consacré par BHB à la fabrication de cette base” [76].

34.L'interprétation développée par la Cour de justice des Communautés européennes est à nouveau très stricte, et indique qu'il est permis de reprendre de manière régulière des informations puisées dans une base de données, dès lors que le cumul de ces reprises n'aboutit pas la mise à disposition du public de l'équivalent de la partie substantielle de la base de données d'origine. Appliqué aux bases de données mises à jour de manière quotidienne ou hebdomadaire, ce critère revient à exclure pratiquement toute possibilité d'atteinte au droit sui generis par le biais de reprises de parties non substantielles, même régulières.

35.Sur ce point, il apparaît une fois de plus que les jurisprudences belge et française ont développé des conceptions peu compatibles avec l'enseignement de la décision de la Cour. Il existe notamment une tendance à assimiler toute reprise récurrente de données à une violation du droit sui generis, sans vérifier que, de la sorte, l'équivalent d'une partie substantielle serait reconstituée. Dans l'affaire Spot, déjà évoquée ci-dessus, le tribunal civil de Bruxelles a pratiquement posé pour principe que toute reprise régulière de données, quelle qu'en soit la proportion, entraînait une violation du droit sui generis:

“La demanderesse a cependant le droit, en vertu de la loi sur la protection juridique des bases de données, d'empêcher une personne d'extraire, de façon systématique et répétée, des informations de sa base de données afin de les réutiliser dans une base de données qui lui fait directement concurrence. Un tel comportement porte atteinte aux intérêts légitimes du producteur de la base de données” [77].

36.Selon cet attendu, la simple intégration récurrente d'éléments dans une base de données concurrente suffit pour qu'il y ait violation du droit sui generis, sans qu'il soit nécessaire d'autrement caractériser l'atteinte aux intérêts légitimes du producteur et à l'exploitation normale de la base de données. En l'espèce, Canal Numédia reprenait chaque semaine, à partir du site Internet géré par la société Spot (Cinébel), les informations concernant la programmation des salles de cinéma qu'il ne parvenait pas à obtenir directement de la part des exploitants, et ce afin de les insérer dans sa propre base de données. On se trouve à cet égard, dans un cas tout à fait similaire à celui rencontré dans l'affaire British Horseracing Board, où la violation du droit sui generis a été exclue par la Cour de justice, dès le moment où les informations reprises, qui représentaient une fraction non substantielle du contenu de la base, faisaient partie d'une base de données mise à jour de manière hebdomadaire, de telle sorte que l'accumulation des reprises ne permettaient pas de reconstituer une partie substantielle de la base d'origine.

Conclusions

37.Les quatre décisions rendues par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires British Horseracing Board et Fixtures Marketing sont d'une importance capitale pour l'application du droit sui generis instauré par la directive du 11 mars 1996, dans la mesure où, comme nous avons pu le montrer, elles tranchent les principales questions d'interprétation concernant la reconnaissance et l'étendue des droits du fabricant de bases de données. Ces décisions obligeront les juges nationaux à largement modifier leur jurisprudence et à justifier de manière beaucoup plus rigoureuse tant la reconnaissance de la protection du droit sui generis, en visant plus précisément les catégories pertinentes d'investissements susceptibles d'être pris en considération [78], que le constat de la violation du droit, en interprétant plus strictement l'étendue des prérogatives du fabricant [79]. Par ailleurs, il est important de souligner que les solutions retenues par la Cour permettent d'écarter le risque que le droit sui generis débouche sur une appropriation de l'information, considérée en tant que telle.

38.Les décisions de la Cour seront diversement accueillies, selon que l'on soit un fervent partisan de la protection du contenu des bases de données par le droit sui generis [80], ou que l'on soit plus sensible à la préservation d'un large domaine public dans le secteur de l'information [81]. Il nous paraît qu'en toute hypothèse, elles ont le mérite de la rigueur juridique et de la cohérence, et que si nécessité d'adaptation du texte de la directive il y a [82], c'est au législateur à se prononcer, et non au juge.

[1] Chargé d'enseignement à l'ULB et à l'Université Paris XI. Centre de droit de l'information et de la communication de l'ULB.
[2] Voy. V.-L. Benabou, Droit d'auteur, droits voisins et droit communautaire, Bruxelles, Bruylant, 1997, p. 272; T. Verbiest, “Entre bonnes et mauvaises références. À propos des outils de recherche sur Internet”, AM 1999, p. 43; L. Van Bunnen, “Examen de jurisprudence (1995 à 2001). Droit d'auteur et droits voisins, dessins et modèles”; C. Noël et I. Vernimme, “Le statut et la protection de la page Web en droit belge”,”, I.R. D.I. 2000, p. 183 et M.-C. Janssens, “Harmonisatie auteursrecht: van databanken naar informatiemaatschappij”, I.R. D.I. 1998, p. 125.
[3] Voy. C. Doutrelepont, “Le nouveau droit exclusif du producteur de bases de données consacré par la directive européenne 96/9/C du 11 mars 1996: un droit sur l'information?”, in Mélanges en l'honneur de Michel Waelbroeck, vol. II, Bruxelles, Bruylant, 1999, pp. 905-906; F. Havelange, “Transposition de la directive européenne relative à la protection des bases de données”, AM 1999, p. 24; J. Dragne et L. Guenot, “De la protection des créations à celle des investissements: la proposition de directive communautaire du 29 janvier 1992 relative à la protection juridique des bases de données”, Gaz. Pal. 1994, Doc., Dossier “Les banques de données”, p. 70; D. Richard, “La protection européenne des bases de données (Directive du 11 mars 1996)”, Revue du Marché commun 1997, p. 113; H. Vanhees, “De juridische bescherming van databanken”, R.W. 1999-2000, p. 1003; P.B. Hugenholtz, “De databankrichtlijn eindelijk aanvaard: een zeer kritisch commentaar”, Computerr. 1996/4, p. 134 et D. Delaval, “La directive du 11 mars 1996 relative à la protection juridique des bases de données”, Gaz. Pal. 1996, Doc., p. 1289.
[4] Voy. J.-L. Gaster, “La nouvelle directive européenne concernant la protection juridique des bases de données”, AM 1996, p. 190; P.B. Hugenholtz, “The New Database Right: Early case Law from Europe”, paper presented at Ninth Annual Conference on International IP Law & policy, New-York, Fordham University School of Law, 19-20 april 2001, http://www.ivir.nl/index-english.html , consulté le 18 décembre 2002, p. 2; M.-C. Janssens, o.c., p. 124 et H. Vanhees, o.c., p. 1002.
[5] Loi du 31 août 1998 transposant en droit belge la directive européenne du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données, M.B. 14 novembre 1998. Sur cette loi, voy. not. F. De Visscher et B. Michaux, Précis de droit d'auteur, Bruxelles, Bruylant, 2000, pp. 244 et s.; J. Corbet, “Cinq ans après. Première évaluation de la nouvelle loi belge sur le droit d'auteur”, R.I.D.A. 2000, n° 183, pp. 153-159; A. Strowel, “La loi du 31 août 1998 concernant la protection des bases de données”, J.T. 1999, pp. 299-301 ; A. Strowel et E. Derclaye, Droit d'auteur et numérique, Bruxelles, Bruylant, 2001, pp. 311 et s.; M.-C. Janssens, o.c., pp. 124 et s.; H. Vanhees, o.c., pp. 1001 et s. et M. Buydens, “Le nouveau régime juridique des bases de données (1re partie)”, I.R. D.I. 1999, pp. 4-12.
[6] Art. 7 § 1er de la directive, art. 3 de la loi du 31 août 1998.
[7] Le producteur s'entend comme “la personne physique ou morale qui prend l'initiative et assume le risque des investissements qui sont à l'origine de la base de données.” (art. 2 de la loi du 31 août 1998).
[8] Art. 2 de la loi du 31 août 1998; art. 7-2 de la directive.
[9] Voy. not. P.B. Hugenholtz, “Het Europese databankenrecht. Acht jaar later - en nu?”, AM 2004-5/6, pp. 439-443.
[10] Sur la portée de cette doctrine, voy. P.B. Hugenholtz, “Program Schedules, Event Data, and Telephone Subscriber Listings under the Database Directive”, paper presented at Ninth Annual Conference on International IP Law & policy, New-York, Fordham University School of Law, 14-25 april 2003, http://www.ivir.nl/files/database/index.html , consulté le 18 mars 2004; F. Pollaud-Dullian, (note sous Paris 12 septembre 2001), Société Tigest/Sociétés Reed expositions France, J.C.P., Éd. G., 2002, Jur., II 10 000, pp. 28-30; E. Derclaye, “Database “Sui Generis” Right: Should We Adopte the Spin-off Theory?”, E.I.P.R. 2004, pp. 402-413; G. Westkamp, “Protecting Databases Under US and european Law - Methodical Approaches of Investments Between Unfair Competition and Intellectual Proprerty Concepts”, I.I.C., vol. 34, 2003, pp. 784-785 et B. Warufsel, “La protection des bases de données en question: un autre débat sur la propriété intellectuelle européenne”, Propriétés Intellectuelles 2004, p. 900.
[11] Les questions préjudicielles posées à la Cour de justice des Communautés européennes l'ont été par des juridictions anglaise (Case C 203/02, High Court of Justice, Chancery Division, Patent Court 9 February 2001, The British Horseracing Board Limited, The Jockey Club, Weatherby Group Limited/William Hill Organization Limited), suédoise (Case C-338/02, Supreme Court of Sweden (Högsta Domstolen) 10 September 2002, Fixtures Marketing Ltd./AB Svenska Spel), grecque (Case C-444/02, Single-Judge Court of First Instance (Monomeles Protodikio Athinon) Athens 11 July 2002, Fixtures Marketing Ltd/Organismos Prognostikon Agonon Podosphairou AE) et finlandaise (Case C 46/02, District Court, Vantaa 1 February 2002, Fixtures Marketing LTD/Oy Veikkaus Ab) (voy. le texte des décisions, en anglais, in The Database Right File, http://www.ivir.nl/files/database/index.html , consulté le 22 mars 2004).
[12] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, C-203/02; C.J.C.E. 9 novembre 2004, Fixtures Marketing LTD/Oy Veikkaus Ab, C 46/02; C.J.C.E. 9 novembre 2004, Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, C-338/02; C.J.C.E. 9 novembre 2004, Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), C-444/02. Le texte de ces décisions est disponible à l'adresse suivante: http://www.europa.eu.int/comm/internal_market/copyright/prot-databases/jurisprudence_fr.htm .
[13] Exposé des motifs du Conseil, J.O.C.E. 30 octobre 1995, n° C-288/24. Voy. N. Mallet-Poujol, “La directive concernant la protection juridique des bases de données: la gageure de la protection privative”, D.I.T. 1996/1, p. 7; A. Lucas, “Aperçu rapide sur la directive 96/9/CE du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données”, J.C.P. 1996, Actualités, 29 mai 1996; J.-L. Gaster, “La nouvelle directive européenne concernant la protection juridique des bases de données”, o.c., p. 188; P.B. Hugenholtz, “The New Database Right: Early case Law from Europe”, o.c., p. 1 et G. Koumantos, “Les bases de données dans la directive communautaire”, R.I.D.A. janvier 1997, n° 171, p. 97.
[14] Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), § 32.
[15] Voy. A. Strowel et E. Derclaye, o.c., pp. 314-317; A. Strowel, o.c., p. 299; M. Depadt-Bels, “Réflexion sur la protection des investissements après trois années d'application de la loi sur les bases de données: une difficile mise en oeuvre”, Gaz. Pal. 2002, Doc., pp. 127-130; I. Matthyssens, (note sous Comm. Nanterre 16 mai 2000), S.A. PR Line/Sarl News Invest, Gaz. Pal. 2000, Jur., p. 1996; P.B. Hugenholtz, “De databankrichtlijn eindelijk aanvaard: een zeer kritisch commentaar”, o.c., p. 134 et H. Vanhees, o.c., p. 1003.
[16] Considérant 40 de la directive. La jurisprudence belge et française a admis la protection lorsque la récupération de l'information nécessite plusieurs heures de travail de vérification, de mise en forme et d'insertion dans la base de données avant sa diffusion (voy. Civ. Bruxelles (prés.) 16 mars 1999, Union Nationale des Mutualités Socialistes/Belpharma Communication, AM 1999, p. 370, J.T. 1999, p. 305 ; Paris 12 septembre 2001, Société Tigest/Sociétés Reed expositions France, J.C.P., Éd. G., 2002, Jur., II, 10 000; Comm. Nanterre 16 mai 2000, S.A. PR Line/Sarl News Invest, http://www.legalis.net , consulté le 28 octobre 2002; Paris 19 juin 1999, Sté Groupe Moniteur et Sté Action municipale/Sté Observatoire des marchés publics, R.I.D.A. janvier 2000, n° 183, p. 316), ou encore lorsqu'un effort humain et financier important a été consacré à la sollicitation des informations, leur réception et la vérification de leur origine, à leur indexation puis leur diffusion (voy. Versailles 11 avril 2002, Sarl News Invest/S.A. PR Line, http://www.legalis.net , consulté le 31 juillet 2002; Paris 12 septembre 2001, Société Tigest/Sociétés Reed expositions France, précité).
[17] Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), § 44; Fixtures Marketing Ltd/Oy Veikkaus Ab, § 38; Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, § 28.
[18] Sur la portée de cette doctrine, voy. encore les conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 8 juin 2004, Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, C-338/02, §§ 40 et s.
[19] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 35; Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), § 45; Fixtures Marketing LTD/Oy Veikkaus Ab, § 39; C.J.C.E. 9 novembre 2004, Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, § 29.
[20] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, §§ 31, 34, 36; Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), §§ 40, 43 et 46; Fixtures Marketing Ltd/Oy Veikkaus Ab, §§ 34, 37, 40; Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, §§ 24, 27, 30.
[21] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, §§ 38-41; Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), §§ 47-52; Fixtures Marketing Ltd/Oy Veikkaus Ab, §§ 41-47; Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, §§ 31-36.
[22] C'est sur cet aspect que l'interprétation établie par la Cour aboutit à un résultat qui se distingue de celui préconisé par la théorie de la “spin-off”, qui implique par principe le rejet de la protection aux bases de données qui constituent le prolongement d'une activité principale, quels que soient les investissements qui aient pu être réalisés pour la présentation ou la vérification des données. Sur la distinction, voy. E. Derclaye, o.c., p. 408.
[23] Voy. V. Fauchoux et E. Behr, “Étonnante interprétation du droit des producteurs de base de données par la Cour de justice des Communautés européennes”, Legalis.net 2004-4, p. 19 et S. Lemarchand et S. Rambaud, “La CJCE précise les règles du jeu”, Propriétés Intellectuelles 2005, p. 101.
[24] Il faut relever à cet égard que les commentateurs cités ci-dessus n'ont pas mis en cause sur le plan juridique la logique de l'interprétation effectuée par la Cour.
[25] Voy. not. C.J.C.E. 23 octobre 2003, C-245/01, RTL Television GmbH/Niedersächsische Landesmedienanstalt für privaten Rundfunk.
[26] Ibid., § 98.
[27] Ibid., § 97.
[28] Voy. not. C.J.C.E. 23 octobre 2003, C-245/01, RTL Television GmbH/Niedersächsische Landesmedienanstalt für privaten Rundfunk, §§ 58-66; C.J.C.E. 9 janvier 2003, Givane e.a., C-257/00, Rec., p. I-345, § 37.
[29] “(9) considérant que les bases de données constituent un outil précieux dans le développement d'un marché de l'information dans la Communauté; que cet outil sera également utile dans beaucoup d'autres domaines;

(10) considérant que l'augmentation exponentielle, dans la Communauté et ailleurs dans le monde, du volume d'informations générées et traitées chaque année dans tous les secteurs du commerce et de l'industrie demande des investissements dans des systèmes avancés de traitement de l'information dans tous les États membres; […]

(12) considérant qu'un tel investissement dans des systèmes modernes de stockage et de traitement de l'information ne se fera pas dans la Communauté en l'absence d'un régime juridique stable et homogène protégeant les droits des fabricants de bases de données”.
[30] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 30; Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), § 39; Fixtures Marketing Ltd/Oy Veikkaus Ab, § 33; Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, § 23.
[31] Cette exclusion peut être également déduite de l'exposé des motifs du Conseil: “Le Conseil a estimé que l'objectif du droit sui generis devrait être de protéger les fabricants de bases de données contre l'appropriation des résultats obtenus de l'investissement déployé pour rechercher et rassembler le contenu de la base; il a par conséquent, limité le bénéfice de ce droit au cas où l'obtention, la vérification ou la présentation de ce contenu attestent un investissement substantiel du point de vue qualitatif ou quantitatif” (exposé des motifs du Conseil, J.O.C.E. 30 octobre 1995, n° C-288/26, nous soulignons).
[32] Conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 8 juin 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 42.
[33] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 32; Fixtures Marketing Ltd/Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP), § 41; Fixtures Marketing Ltd/Oy Veikkaus Ab, § 35; Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, § 25.
[34] The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 33.
[35] Conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 49.
[36] Voy. les conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 8 juin 2004, Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, C-338/02, § 58.
[37] Voy. V. Fauchoux et E. Behr, o.c., p. 19; S. Lemarchand et S. Rambaud, o.c., p. 101 et P.B. Hugenholtz et M.J. Davison, “Football fixtures, horseraces and spin-offs: the ECJ domesticates the database right”, E.I.P.R. 2005-3, également disponible à l'adresse http://www.ivir.nl/files/database/index.html .
[38] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 10.
[39] Ibid., §§ 12-14.
[40] Voy. les conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 8 juin 2004, Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, C-338/02, § 58.
[41] Voy. P.B. Hugenholtz et M.J. Davison, o.c.
[42] Civ. Bruxelles (prés.) 16 mars 1999, Union Nationale des Mutualités Socialistes/Belpharma Communication, précité.
[43] Voy. Comm. Paris 18 juin 1999, S.A. France Télécom/S.A.R.L. MA Éditions et S.A.Fermic, http://www.legalis.net , consulté le 28 octobre 2002 (frais relatifs à la constitution des données relative aux abonnés de France Telecom); Trib. gr. inst. Paris 25 avril 2003, Sonacotra/Syndicat Sud Sonacotra, http://www.legalis.net , consulté le 20 mars 2004 (investissements destinés à permettre le fonctionnement d'une messagerie interne, nécessitant l'intégration d'informations nominatives dans un annuaire d'adresses électroniques) ; Comm. Nanterre 14 mai 2004, Consultants immobilier/Aptitudes immobilier, http://www.legalis.net , consulté le 14 mars 2005 (frais relatifs à la constitution d'un fichier des biens immobiliers, des acquéreurs et des affaires en cours).
[44] Paris 12 septembre 2001, Société Tigest/Sociétés Reed expositions France, précité.
[45] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, §§ 16-18 et §§ 65-66.
[46] Ibid., §§ 52-53.
[47] Voy. également Civ. Bruxelles (prés.) 16 mars 1999, Union Nationale des Mutualités Socialistes/Belpharma Communication, précité.
[48] Voy. l'exposé des motifs relatif au projet de loi transposant en droit belge la directive européenne du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données, Doc. Ch. 1997-98, 1535/1-1536/1, pp. 20-21; F. Gotzen, “La protection internationale des bases de données non-créatives”, in Gestion et utilisation légitime de la propriété intellectuelle, Conférence Internationale de Strasbourg, 9-11 juillet 2000, Commission européenne, 2001, http://europa.eu.int/comm/internal_market/en/intprop/news/strasbourg2_fr.pdf , p. 79; G. Westkamp, o.c., p. 791.
[49] Voy. M. Buydens, o.c., p. 6.
[50] Civ. Bruxelles (prés.) 18 janvier 2002, S.P.R.L. Spot/S.A. Canal Numédia, I.R. D.I. 2002, p. 115.
[51] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, §§ 54-56.
[52] Ibid., § 58.
[53] Art. 8 § 1er de la directive, art. 8 de la loi du 31 août 1998.
[54] Art. 7 § 1er de la directive.
[55] Voy. P.B. Hugenholtz, “De databankrichtlijn eindelijk aanvaard: een zeer kritisch commentaar”, o.c., p. 135 et S. Lemarchand, O. Fréget et F. Sradain, o.c., p. 23.
[56] Sur cette question, voy. G. Koumantos, o.c., pp. 117-119; D. Richard, o.c., p. 117; F. Havelange, o.c., p. 26; H. Vanhees, o.c., p. 1005; C. Doutrelepont, “Le nouveau droit exclusif du producteur de bases de données consacré par la directive européenne 96/9/C du 11 mars 1996: un droit sur l'information?”, o.c., p. 909; E. Kindt, “Ownership of Information and Database Protection”, in J. Dumortier, F. Robben et M. Taeymans (eds.), A Decade of Research @ the Crossroads of Law and ICT, Bruxelles, Larcier, 2001, p. 152; J. Passa, “La propriété de l'information: un malentendu?”, in Dossier “Renouveau du droit de propriété?”, Droit & Patrimoine 2001, n° 91, p. 69; B. Warufsel, o.c., p. 900 et M. Vivant, “An 2000: approprier l'information?”, in Mélanges offerts à Jean-Jacques Burst, Paris, Litec, 1997, p. 664.
[57] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 69.
[58] Ibid., §§ 70-71.
[59] Ibid., § 73.
[60] Ibid., § 72.
[61] Ibid., § 77.
[62] Ibid., § 78.
[63] S. Lemarchand et S. Rambaud, o.c., pp. 103-104.
[64] Ibid.
[65] Proposition de directive du Conseil concernant la protection juridique des bases de données, 15 avril 1992, COM(92) 24 final - SYN 393, J.O.C.E. 23 juin 1992, n° C156/5 (art. 2, § 5) et proposition modifiée de directive du Conseil concernant la protection juridique des bases de données, 4 octobre 1993, COM(93) 464 final - SYN 393, J.O.C.E. 15 novembre 1993, n° C 308/1 (art. 10 § 1er), nous soulignons. Voy. not. F. Bloch, “Aspects de la protection des bases et banques de données électroniques en Europe au regard du projet de directive. Vers une synthèse du droit européen?”, R.D.A.I. 1994, n° 4, pp. 457-467 et J. Huet, “Accès à l'information primaire et possibilités d'abus de position dominante dans les services d'information: le point de vue communautaire”, D.I.T. 1993/4, pp. 10-11.
[66] J. Dragne et L. Guenot, o.c., p. 74. Voy. également J.-P. Triaille, “La protection juridique des bases de données. Situation en droit belge et propositions communautaires”, Rev. dr. U.L.B. 1994, vol. 9, p. 44.
[67] Voy. J.-L. Gaster, o.c., pp. 188-189; A. Strowel, o.c., p. 300 et M. Buydens, “Le projet de loi transposant en droit belge la directive européenne du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données”, AM 1997, p. 348.
[68] Exposé des motifs du Conseil, précité, 288/26.
[69] Ce principe a également été mis en exergue dans les conclusions de l'avocat général Mme C. Stix-Hackl, présentées le 8 juin 2004, Fixtures Marketing Ltd/Svenska Spel AB, C-338/02: “Il faut d'abord souligner sur ce point que la protection s'applique uniquement au contenu des bases de données et non aux données” (§ 90). Voy. encore l'exposé des motifs relatif au projet de loi transposant en droit belge la directive européenne du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données, Doc. Ch. 1997-98, 1535/1-1536/1, pp. 20-21; P.B. Hugenholtz, “Program Schedules, Event Data, and Telephone Subscriber Listings under the Database Directive”, o.c., p. 7; J.A. Bovenberg, “Should Genomics Companies set up Databases in Europe? The E.U. Database Protection Directive Revisited”, E.I.P.R. 2000, p. 363; H. Vanhees, o.c., p. 1004; B. Warufsel, o.c., p. 900; A. Strowel et E. Derclaye, o.c., p. 318; F. Havelange, o.c., p. 24; H. Vanhees, o.c., p. 1006; D. Richard, o.c., p. 117; J. Passa, p. 69 et S. Lemarchand et S. Rambaud, “Quelques clés d'application de la directive bases de données”, Propriétés intellectuelles 2004, p. 892. Contra, E. Kindt, o.c., p. 155.
[70] Comm. Nanterre 16 mai 2000, S.A. PR Line/Sarl News Invest, Gaz. Pal. 2000, Jur., p. 1991, note I. Matthyssens.
[71] Versailles 11 avril 2002, Sarl News Invest/S.A. PR Line, précité.
[72] Voy. C. Morlière, “Les articles de presse à l'ère numérique. Le cas de Google Actualités”, I.R. D.I. 2004, p. 11, qui procède selon nous à une interprétation trop large de la décision, lorsqu'elle estime qu'il suffit que les données aient conservé les qualités qui les rendaient intéressantes, comme leur caractère d'actualité, pour avoir un caractère substantiel. Rien dans la décision ne permet de penser que ce critère, pris de manière isolée, suffise à établir la substantialité de données, indépendamment de leur nombre.
[73] Comm. Paris 19 mars 2004, Société OCP Répartition/Société Salvéa, http://www.legalis.net , consulté le 16 juin 2004 (base de données composée de fiches pharmaceutiques “présentant un caractère propre”); Trib. gr. inst. Paris 14 novembre 2001, S.A. Les Éditions Néressis/S.A. France Télécom Multimédia Services, http://www.legalis.net , consulté le 28 octobre 2002 (informations contenues dans des petites annonces immobilières, jugées essentielles et indispensables pour la consultation même de celles-ci); Trib. gr. inst. Paris 5 septembre 2001, Cadremploi/Keljob, http://www.juriscom.net/txt/jurisfr/da/tgiparis20010905.htm , consulté le 24 février 2004 (informations dites de sélection et de référencement faisant la valeur de la base de données de recrutement).
[74] Voy. P.B. Hugenholtz, “The New Database Right: Early case Law from Europe”, o.c., p. 10; A. Strowel, o.c., p. 300 et B. Warufsel, o.c., p. 900.
[75] C.J.C.E. 9 novembre 2004, The British Horseracing Board Ltd e.a./William Hill Organization Ltd, § 87.
[76] Ibid., § 91.
[77] Civ. Bruxelles (prés.) 18 janvier 2002, S.P.R.L. Spot/S.A. Canal Numédia, précité.
[78] La plupart des décisions se contentent à l'heure actuelle de constater l'existence d'investissements importants, sans préciser si ceux-ci se rapportent strictement à des tâches d'obtention, de vérification ou de présentation du contenu de la base de données. Voy. par ex. Civ. Bruxelles (prés.) 18 janvier 2002, S.P.R.L. Spot/S.A. Canal Numédia, précité.
[79] Le caractère “substantiel” de la partie extraite ou réutilisée est rarement caractérisée de manière précise. Voy. par ex. Com. Paris 14 décembre 2001, Artprice.com/Crédinfor, http://www.legalis.net , consulté le 14 mars 2005.
[80] Voy. par ex. V. Fauchoux et E. Behr, o.c., pp. 15 et s.
[81] Voy. par ex. B. Warufsel, o.c., p. 906 et P.B. Hugenholtz et M.J. Davison, o.c.
[82] Un rapport sur la mise en oeuvre de la directive concernant la protection juridique des bases de données devrait être publié par la Commission à l'été 2005 (voy. Commission Staff Working Paper on the review of the EC legal framework in the field of copyright and related rights, 19 July 2004, SEC(2004) 995, p. 12).