Article

Cour d'appel Bruxelles, 13/05/2004, R.D.C.-T.B.H., 2005/4, p. 408-412

Cour d'appel de Bruxelles 13 mai 2004

SOCIÉTÉS
Société anonyme - Conflits internes - Retrait - Action en responsabilité - Distinction entre les deux actions
L'action en reprise forcée et l'action en exclusion ne sont pas des actions en responsabilité et ne constituent pas une alternative à une action en responsabilité qui pourrait elle-même être prescrite. Les justes motifs qui peuvent fonder une mesure d'exclusion ou de retrait ne doivent d'ailleurs pas être des comportements fautifs.
SOCIÉTÉS
Société anonyme - Conflits internes - Retrait - Détermination du prix des actions - Date de référence - Article 642 C.soc.
Le fait que le droit au retrait existe dès l'instant où des justes motifs peuvent être invoqués ne suffit pas pour justifier la fixation du prix des actions sur la base de leur valeur antérieure à la survenance des justes motifs.
SOCIÉTÉS
Société anonyme - Conflits internes - Retrait - Détournement de procédure - Affranchissement du risque social
Si la procédure de retrait permet sous certaines conditions à un actionnaire de se retirer en évitant de devoir encore supporter les risques liés à la poursuite des activités, cette procédure n'a pas été conçue pour permettre à un actionnaire d'échapper aux conséquences d'un arrêt d'activité de la société lorsqu'il n'a rien été entrepris pour éviter une telle situation, et lorsque l'on n'a pas manifesté, avant qu'elle ne se concrétise, sa volonté de se retirer. La procédure de retrait est détournée de sa finalité si elle est introduite seize mois après les faits invoqués comme justes motifs, dans la mesure où les demandeurs entendent ainsi s'affranchir du risque social qui s'est réalisé.




VENNOOTSCHAP
Naamloze vennootschap - Geschillenregeling - Uittreding - Aansprakelijkheidsvordering - Onderscheiden vorderingen
De vordering tot gedwongen overname en de vordering tot uitsluiting zijn geen aansprakelijkheidsvorderingen en vormen geen alternatief voor een aansprakelijkheidsvordering die zelfs verjaard zou kunnen zijn. De gegronde redenen die de grond vormen voor een maatregel tot uitsluiting of uittreding hoeven trouwens geen foutieve handelingen te zijn.
VENNOOTSCHAP
Naamloze vennootschap - Geschillenregeling - Uittreding - Bepaling van de prijs van de aandelen - Referentiedatum - Artikel 642 W.Venn.
Het feit dat het recht tot uittreding bestaat vanaf het ogenblik dat gegronde redenen kunnen worden ingeroepen, volstaat niet om de vaststelling van de prijs van de aandelen op basis van hun waarde vóór het ontstaan van de gegronde redenen te rechtvaardigen.
VENNOOTSCHAP
Naamloze vennootschap - Geschillenregeling - Uittreding - Afwending van procedure - Bevrijding van het maatschappelijk risico
De vordering tot uittreding maakt het mogelijk dat een aandeelhouder onder bepaalde voorwaarden uittreedt en dat hij hierdoor niet verder de risico's verbonden aan de voortzetting van de activiteiten draagt. Deze procedure werd toch niet ontwikkeld teneinde aan een aandeelhouder toe te staan te ontsnappen aan de gevolgen van de stopzetting van de activiteiten van een vennootschap wanneer hij niets heeft ondernomen om dergelijke situatie te vermijden, en wanneer hij niet, vooraleer deze situatie zich voordeed, te kennen heeft gegeven dat hij wou uittreden. De procedure van uittreding wordt afgewend van haar doel als ze zestien maanden na de feiten die als gegronde redenen werden ingeroepen wordt ingediend, in de mate dat de verzoekers zich op die manier proberen te bevrijden van het maatschappelijk risico dat zich heeft voorgedaan.
(...)

R. Blockx, SA Arca Consult, SPRL Yvax et SA Finesco / A. Van Dessel, E. Van Dessel, S. Van Dessel, J. De Schepper en V. Burckett Saint Laurent

Siég.: M. Regout (conseiller ff président), H. Mackelbert (conseiller) et S. Van Ommeslaghe (conseiller suppléant)
Pl.: Mes K. Geens, B. Duquesne, Ph. Jenné, P.A. Chabot, O. Van Fraeyenhoven et R. de San

(...)

Les faits

1. La SA Finesco a été constituée par acte du 11 février 2000 avec un capital social fixé à 17.687.500 euros, représenté par 176.875 actions nominatives.

Sa création a été précédée par une convention conclue le 10 février 2000 entre, d'une part, la société Sercoval et ses actionnaires et, d'autre part, les actionnaires de la société Toptrade, convention par laquelle Sercoval a acquis 30% du capital de Toptrade.

Cette convention prévoit la création de la société holding Finesco en vue de favoriser le développement des activités respectives des sociétés Sercoval et Toptrade qui s'adressaient à la même clientèle. Elle contient des clauses de garantie en cas de non-respect par les parties de leurs engagements.

Au jour de la constitution de Finesco, une convention d'actionnaires a également été conclue.

2. La société Sercoval éditait la feuille d'informations boursières “L'Investisseur”.

La société Toptrade, anciennement dénommée Gestrabel, était une société de bourse qui, au moment de la constitution de la SA Finesco, offrait à ses clients un accès online à la bourse de Bruxelles et espérait pouvoir offrir très rapidement à sa clientèle un accès online multimarché.

3. Les appelants sub 1, 2 et 3 ont fait apport à la société Finesco de 5.975 actions de la SA Sercoval, représentant 90% du capital de cette société.

En rémunération de cet apport, il leur a été attribué 122.500 actions de la nouvelle société, soit près de 70% des titres.

La société Van Dessel Finances, l'intimé sub 4 et la SA Sercoval ont fait apport à la société Finesco de 23.700 actions de Toptrade, représentant 75% du capital de cette société.

En rémunération de cet apport, il a été attribué 43.750 actions de la nouvelle société à la société Van Dessel Finances et à l'intimé sub 4, soit près de 25% des titres.

La SA Sercoval qui avait fait apport de 1.580 des 9.480 parts de la société Toptrade qu'elle avait acquises la veille de la constitution de Finesco, s'est vu attribuer 3.125 actions de la SA Finesco.

Les 7.500 actions restantes ont été souscrites en espèces par l'intimé sub 5.

La société Van Dessel Finances a ensuite été dissoute.

4. Le projet de rapprochement entre Sercoval et Toptrade s'est soldé après quelques mois par un échec dont les deux groupes s'imputent mutuellement la responsabilité.

Fin 2000, Finesco cédait sa participation dans la société Sercoval au groupe Tijd. Les intimés s'étaient opposés à cette opération lors de l'assemblée générale de Finesco du 13 novembre 2000.

Par lettre du 7 décembre 2000, les appelants confirmaient leur intention de convoquer, dans un délai de six mois à dater de la cession effective de Sercoval, une assemblée générale extraordinaire de la société Finesco en vue de proposer la mise en liquidation de la société Finesco, et annonçaient qu'ils se prononceraient en faveur de la liquidation de celle-ci.

Cette assemblée générale n'a jamais eu lieu.

En juin 2001, le portefeuille clients de Toptrade était vendu à RealBank et Toptrade se voyait retirer son autorisation d'opérer comme société de bourse. Toptrade n'avait donc plus d'autres activités que de gérer ses avoirs.

5. Le 29 août 2001, les appelants ont lancé une citation contre les intimés dans le but d'obtenir:

a) la condamnation des intimés à réparer le dommage qu'aurait subi Finesco en raison de la prétendue violation par les intimés de leur engagement, repris dans la convention du 10 février 2000, de doter la société Toptrade de l'accès online à la bourse de Paris, aux marchés Nasdacq et Nyse pour le 28 février 2000, ainsi que la désignation d'un expert afin d'évaluer ce dommage.

À l'appui de cette demande, les appelants font valoir que l'absence d'accès online multimarché est à l'origine de l'échec du projet et de la perte de valeur des participations de Finesco dans le capital des sociétés Sercoval et Toptrade.

À ce titre, les appelants réclament au profit de Finesco et sur la base de la convention précitée, la condamnation des intimés à réparer le dommage invoqué en “restituant” à la société Finesco un nombre d'actions représentatives du capital de Finesco correspondant en valeur à 70% du dommage que Finesco aurait subi, étant entendu que la valeur d'une action Finesco doit être fixée à 100 euros en vertu de l'article 10 de la convention;

b) la condamnation des intimés à payer à Finesco, en sa qualité de cessionnaire des droits et obligations de Sercoval au titre de la convention du 10 février 2000, un montant devant couvrir le dommage lié à la perte de valeur de la participation de Sercoval dans le capital de Toptrade;

c) la résolution de la convention d'actionnaires aux torts des intimés, en raison du non-respect de l'engagement de doter Toptrade d'un accès online multimarché;

d) la condamnation des intimés à payer aux appelants la somme provisionnelle de 111.552,08 euros à titre de dommages et intérêts du chef de la violation de l'obligation de doter Toptrade d'un accès online multimarché, pour lesquels ils se seraient portés fort.

6. Le 5 novembre 2001, Toptrade a lancé une action en responsabilité dirigée contre Stéphane Van Dessel en sa qualité d'administrateur de Toptrade.

Elle lui réclame la réparation du dommage qu'elle prétend avoir subi en raison des démarches intempestives que Stéphane Van Dessel aurait faites auprès de la CBF.

Antécédents de la présente procédure

7. Les demandes originaires des intimés tendaient à entendre condamner les appelants sub 1, 2 et 3 à accepter, dans un délai de 7 jours à compter de la signification du jugement à intervenir, les actions représentatives du capital de la SA Finesco détenues par les intimés, soit au total 51.250 actions, contre paiement du prix qui aura été fixé en fonction de la valeur des actions à la date du 11 décembre 2000.

Les intimés sollicitaient en outre la condamnation des appelants sub 1, 2 et 3 au paiement d'un montant provisionnel de 91,43 euros par action;

Il y a lieu de noter que la demande a été introduite le 12 avril 2002 en ce qui concerne les intimés sub 1 à 4, et le 31 mai 2002 en ce qui concerne l'intimé sub 5, soit plusieurs mois après la vente de Sercoval et la décision de trouver un repreneur pour Toptrade.

8. Le jugement attaqué fait droit aux demandes de rachat et désigne Monsieur Michel Bikar en qualité d'expert en lui confiant la mission de déterminer la valeur des actions de la SA Finesco à la date du 11 décembre 2000 ainsi qu'à la date du prononcé du jugement.

9. Formant appel de cette décision, les appelants concluent au non-fondement des demandes originaires.

À titre subsidiaire, ils demandent à la cour de dire que le prix des actions doit être évalué sur la base de leur valeur au jour du prononcé du jugement attaqué.

Formant appel incident, les intimés demandent à la cour de dire pour droit que le prix des actions doit être fixé à leur valeur à la date du 11 décembre 2000, veille de la convention de cession des actions de la société Sercoval conclue entre la SA Finesco et le groupe Tijd.

Les intimés sub 1 à 4 font valoir, à titre subsidiaire, que le prix doit être fixé à la valeur des actions à la date du 12 juin 2001, soit à la date à laquelle les appelants s'étaient engagés à convoquer l'assemblée générale de la société Finesco pour décider de sa mise en liquidation.

L'intimé sub 5 reproche en outre au premier juge de ne pas avoir fait droit à sa demande de condamnation des appelants sub 1 à 4 au paiement d'une somme provisionnelle de 685.725 euros.

Discussion
- Sur la demande en réouverture des débats

10. Les appelants sollicitent la réouverture des débats en faisant valoir que le dépôt de son rapport par l'expert désigné par le premier juge constituerait un fait nouveau.

Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande au soutien de laquelle les appelants se bornent à indiquer que le rapport viendrait confirmer leur argumentation.

Les appelants n'indiquent en effet pas en quoi l'avis rendu par l'expert pourrait avoir une incidence sur l'appréciation du droit au rachat forcé des actions que les intimés font valoir, et subsidiairement du moment à prendre en considération pour la fixation du prix.

En outre, la cour ne pourrait fonder sa décision sur l'appréciation des résultats de la mesure d'instruction dont le premier juge est seul appelé à connaître (Cass. 24 décembre 1987, Pas. 1988, I, 505; Cass. 30 avril 2001, n° S990084F).

- Sur le bien-fondé des demandes originaires des intimés

11. Aux termes de l'article 642 du Code des sociétés, tout associé peut, pour des justes motifs, demander en justice que les associés à l'origine de ces justes motifs reprennent toutes les actions qu'il détient.

Cette procédure de retrait a été introduite par la loi du 13 avril 1995 comme un mode de règlement des conflits entre associés permettant même en l'absence de blocage des organes ou en l'absence de faute, à un actionnaire de se retirer lorsque ses droits ou ses intérêts sont préjudiciés par le comportement d'un ou plusieurs autres actionnaires, en manière telle que l'on ne peut plus raisonnablement exiger de lui qu'il reste actionnaire.

Cette procédure permet également, le cas échéant, d'éviter la menace que constitue la dissolution judiciaire de la société pour la continuité de l'entreprise et d'assurer la reprise d'une vie sociale normale, ce qui suppose toutefois que la poursuite des activités soit encore possible (B. Tilleman, Ontbinding van vennootschappen, Jan Ronse Instituut, K.U.Leuven, Série Rechtspersonen en vennootschappen, n° 10, Biblo, 1997, pp. 194-227).

Une mesure de retrait entraînant la cession forcée des titres ne peut se justifier lorsqu'il est établi que nonobstant la restructuration de l'actionnariat, la poursuite de l'exploitation n'est pas envisagée.

Si la reprise forcée des actions permet de tenir compte des intérêts de l'actionnaire souhaitant se retirer, elle n'a en revanche pas été conçue comme un moyen pour un actionnaire de valoriser sa participation dans une société qui, malgré le retrait de certains associés, est vouée à disparaître, et d'obtenir pour ses actions un prix calculé sur la base d'une hypothèse de continuité ou de croissance alors qu'il y a arrêt d'exploitation.

12. En l'espèce, il ressort de la chronologie des faits que les appelants ont eu recours à la procédure en reprise forcée de leurs actions à un moment où il était depuis longtemps établi que la société Finesco n'avait plus de raison d'être, de sorte que sa mise en liquidation était la seule solution à l'impasse devant laquelle l'ensemble des actionnaires se trouvait à la suite de la vente de Sercoval et du retrait de l'agrément de Toptrade comme société de bourse.

En effet, les parties s'entendent pour reconnaître que la société Finesco n'a pas d'activité propre et qu'elle n'a été créée que pour permettre des synergies entre les deux sociétés Sercoval et Toptrade dont elle avait acquis le contrôle lors de sa constitution.

Les actifs de la société sont constitués par les liquidités générées par la vente de Sercoval et de la clientèle de Toptrade dont une partie aurait été placée à terme et par les actions de Toptrade qui a néanmoins cessé toute activité.

La situation dans laquelle se trouvait Finesco au jour de l'introduction de la demande et la mésentente entre les parties rendaient par ailleurs impossible le lancement de nouveaux projets.

Eu égard à l'ensemble de ces éléments, le refus des appelants sub 1, 2 et 3 de convoquer une assemblée générale pour décider de la dissolution de la société Finesco ne peut constituer un juste motif pour le rachat forcé de leurs actions. Ce refus pourrait en revanche être invoqué par les intimés à l'appui d'une action en dissolution de la société pour justes motifs.

13. Par ailleurs, dès le 13 octobre 2000, le conseil d'administration de Finesco dont Stéphane Van Dessel faisait partie, était informé d'une offre d'acquisition de Sercoval par le groupe Tijd comme de l'intérêt que la majorité portait à cette offre.

Alors que les intimés soutiennent, à tort ou à raison, que la vente de Sercoval s'est faite à des conditions très défavorables pour Finesco, dans l'unique intérêt des actionnaires majoritaires et de surcroît, sans aucune transparence, et que cette opération signifiait nécessairement la fin du projet pour lequel Finesco avait été constituée, les intimés n'ont introduit aucune action en justice pour l'empêcher, ni avant, ni après les réunions de l'assemblée générale et du conseil d'administration de Finesco qui ont approuvé l'opération le 13 novembre 2000.

Ils n'ont par ailleurs nullement manifesté à cette époque leur intention de se retirer et d'exiger la reprise de leurs actions par les actionnaires majoritaires, acceptant ainsi une situation qui devait conduire à la mise en liquidation de Finesco.

Ils ont au contraire approuvé, dès le 20 novembre 2000, la décision de céder Toptrade à un tiers, compte tenu de la vente de Sercoval qui signifiait l'échec du projet commun des parties.

Si la procédure de rachat forcé permet sous certaines conditions à un actionnaire de se retirer en évitant ainsi de devoir encore supporter les risques liés à la poursuite des activités, cette procédure n'a pas été conçue pour permettre à un actionnaire d'échapper aux conséquences d'un arrêt d'activité de la société lorsqu'il n'a rien entrepris pour éviter une telle situation ni manifester, avant qu'elle ne se concrétise, sa volonté de se retirer.

14. Il résulte enfin tant de l'objet des demandes originaires que des moyens invoqués par les intimés que ceux-ci entendent contraindre les appelants à racheter leurs actions à leur valeur au jour précédant la survenance des justes motifs qu'ils invoquent - à savoir la vente de Sercoval ayant rendu la réalisation du projet initial impossible -, de manière à neutraliser l'effet négatif de cette vente sur la valeur de leur participation.

Ils soutiennent que cette manière de procéder se justifie pour assurer une plus large protection des actionnaires dont les droits ou les intérêts sont préjudiciés par le comportement des autres actionnaires, en leur évitant de devoir lancer d'autres procédures pour obtenir, de manière directe ou indirecte, la réparation du préjudice lié à la perte de valeur de leur participation.

Or, le pouvoir d'appréciation dont dispose le juge statuant comme en référé sur une demande de reprise forcée des actions, lorsqu'il fixe le prix des actions, n'inclut pas celui de fixer le prix à un montant qui couvrirait non seulement la valeur des actions au jour de la cession forcée, mais également la perte de valeur des actions dont le rachat est ordonné et qui serait la conséquence des événements retenus par lui comme constituant de justes motifs de retrait.

Il ne résulte en effet ni des termes des articles 636 et suivants du Code des sociétés, ni des travaux préparatoires de la loi du 13 avril 1995, que l'exclusion ou le retrait d'un associé impliquant l'une comme l'autre une cession forcée, pourrait conduire à une évaluation des titres qui tienne compte de l'influence qu'auraient eu les comportements constitutifs de justes motifs sur la valeur des titres.

L'action en reprise forcée ou l'action en exclusion ne sont pas des actions en responsabilité et ne constituent pas une alternative à une action en responsabilité qui pourrait même être prescrite (I. Corbisier, “La société et ses associés”, in Droit des sociétés: les lois des 7 et 13 avril 1995, Bruylant, 1995, pp. 228-229). Les justes motifs qui peuvent fonder une mesure d'exclusion ou de retrait ne doivent d'ailleurs pas être des comportements fautifs.

Le fait que le droit au retrait existe dès l'instant où des justes motifs peuvent être invoqués ne suffit donc pas pour justifier la fixation du prix des actions sur la base de leur valeur avant la survenance des justes motifs.

15. Il résulte des considérations qui précèdent que c'est à bon droit que les appelants font valoir en l'espèce que les intimés détournent la procédure de reprise forcée de sa finalité. En effet, ils ont laissé s'écouler plus de 16 mois depuis la vente de Sercoval - invoquée par eux comme le motif principal de leur action - et la décision de rechercher un repreneur pour Toptrade qui était sous la surveillance rapprochée de la CBF pour introduire leur action. Celle-ci n'a en outre été précédée d'aucune mise en demeure des appelants de reprendre les actions qu'ils détiennent.

Ils entendent en réalité s'affranchir non du risque social futur, mais bien du risque social qui s'est déjà réalisé, en faisant supporter celui-ci par les appelants sub 1, 2 et 3 et en évitant de mettre en oeuvre des actions en responsabilité qu'ils avaient pourtant annoncées dès février 2001 et qui les auraient obligés à prouver l'existence, dans leur chef, d'un droit à la réparation du préjudice qu'ils ont subi par l'échec du projet de rapprochement de Toptrade et Sercoval.

Les actions originaires ne sont dès lors pas fondées et il y a lieu de mettre la décision attaquée à néant.

- Sur les appels incidents

16. Dès lors que l'appel principal est fondé, les appels incidents deviennent sans objet.

Par ces motifs,

La cour,

(...)

Dit l'appel principal recevable et fondé;

Met la décision attaquée à néant;

Dit les demandes originaires non fondées;

Constate que les appels incidents sont sans objet;

(...)