Article

Note, R.D.C.-T.B.H., 2004/8, p. 814-819

FAILLITE
Faillite internationale - Règlement CE 1346/2000 relatif aux procédures d'insolvabilité - Groupe de sociétés - Reconnaissance des décisions d'ouverture de procédures d'insolvabilité
La cour ouvre une procédure principale d'insolvabilité à l'égard de dix sociétés de droit anglais, de trois filiales allemandes et d'une filiale française appartenant au groupe Daisytek-ISA.
Selon la cour, la preuve est établie que les filiales du groupe sont gérées et contrôlées dans une logique de groupe en sorte que les activités du groupe pour l'Europe sont coordonnées par le siège central situé à Bradford, Royaume-Uni.
La cour justifie dès lors sa compétence par le fait que le centre des intérêts principaux de la filiale française (et des trois filiales allemandes) est situé à Bradford.

FAILLISSEMENT
Internationaal faillissement - Verordening (EG) nr. 1346/2000 betreffende insolventieprocedures - Groep van vennootschappen - Erkenning van beslissingen tot opening van insolventieprocedures
Het Hof opent een hoofdinsolventieprocedure voor tien Britse vennootschappen, drie Duitse dochtervennootschappen en een Franse dochtervennootschap die tot de groep Daisytek-ISA behoren.
Volgens het Hof is bewezen dat de dochtervennootschappen van de groep met het oog op het groepsbelang bestuurd en gecontroleerd worden doordat de activiteiten van de groep in Europa gecoördineerd worden door de centrale zetel in Bradford (Verenigd Koninkrijk).
Het Hof steunt zijn bevoegdheid op het feit dat het centrum van de voornaamste belangen van de Franse dochtervennootschap (en van de drie Duitse dochtervennootschappen) zich in Bradford bevindt.
Candice Barbé [1]

1.À la suite de l'insolvabilité de Daisytek International Corporation et de ses filiales américaines [2], les filiales européennes du groupe Daisytek soumirent aux juges anglais une demande d'administration order [3]. Le 16 mai 2003, la High Court of Justice (Leeds - Royaume Uni) l'octroya à quatorze d'entre elles; il s'agit de la deuxième des trois décisions reproduites. Parmi ces filiales, trois avaient leur siège en Allemagne, et une, ISA Daisytek SAS, en France. La compétence des juges anglais à leur égard fut longuement motivée: la High Court a en effet souligné qu'elle ne se déclarait compétente que parce que les sociétés requérantes avaient démontré que le centre de leurs intérêts principaux était situé en Grande Bretagne, afin de renverser la présomption établie par le Règlement [4]. L'on se souviendra que cet instrument donne compétence, pour ouvrir une procédure d'insolvabilité, aux juridictions de l'État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur, tout en instaurant une présomption réfragable en faveur du siège statutaire dans le cas où ce débiteur est une personne morale [5].

2.Malgré la décision de la High Court, ISA Daisytek SAS fait aveu de son état de cessation de paiement devant le tribunal de commerce de Pontoise. Par un jugement du 26 mai 2003, ce dernier ouvre une procédure principale de redressement judiciaire à l'égard de la filiale. Les administrateurs nommés par la juridiction anglaise forment tierce opposition contre ce jugement, mais celle-ci est rejetée par le juge français en date du 1er juillet 2003, qui estime que la décision de la High Court ne peut être reconnue pour le motif que la procédure ouverte au Royaume Uni n'a pas respecté les conditions prévues par le Règlement [6]. Le tribunal souligne que la High Court ne pouvait se déclarer compétente par le seul fait que ISA Daisytek SAS est la filiale d'une société dont le siège est situé dans son ressort, puisque la notion de 'groupe' n'a pas de portée juridique. Les administrateurs anglais vont interjeter appel de cette décision, appel qui donne lieu à l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 4 septembre 2003 [7], [8], troisième décision publiée.

3.La cour va développer un raisonnement en trois temps. Elle commence par analyser les règles de compétence énoncées par le Règlement, pour en déduire que le seul critère retenu [9] est le centre des intérêts principaux du débiteur. La présomption de l'article 3, § 1 n'a pour seul but que de désigner celui des personnes morales, et elle peut être renversée dès lors que le siège social n'est pas réellement le centre de leurs intérêts. La cour souligne également que, comme l'avait indiqué le tribunal de Pontoise, 'la notion de groupe de sociétés, ou de filiale, n'a aucune vocation à commander la compétence de la juridiction'. La cour, dans un deuxième temps, examine le critère de compétence appliqué par la High Court, et en conclut qu'elle s'est déclarée compétente en se fondant sur la localisation du centre des intérêts de ISA Daisytek SAS en Angleterre, et, donc, en respectant le critère énoncé par le Règlement. Elle estime par conséquent qu'il est inexact de prétendre que la High Court s'est fondée sur la notion de groupe de sociétés.

Enfin, dans un troisième temps, la cour d'appel de Versailles se penche sur les effets de la procédure ouverte au Royaume Uni. Elle rappelle que l'article 16 du Règlement prévoit, lorsqu'une procédure principale est ouverte par une juridiction compétente, sa reconnaissance dans tous les autres États membres. Elle en déduit que l'administration order interdisait à toute juridiction française d'ouvrir ultérieurement une autre procédure principale [10]. Elle réforme donc les deux décisions prononcées par le tribunal de Pontoise.

4.Les décisions rendues dans l'affaire Daisytek posent au moins deux questions intéressantes quant à l'application du Règlement 1346/2000. Elles concernent en effet l'ouverture de procédures d'insolvabilité de plusieurs sociétés d'un même groupe, circonstance qui soulève le problème de l'interprétation qu'il convient de donner au critère de 'centre des intérêts principaux' pour les personnes morales; d'autre part, les décisions des juridictions françaises abordent la question de la reconnaissance des décisions d'ouverture, et plus particulièrement des motifs de refus susceptibles d'être opposés à cette reconnaissance. C'est pour illustrer cette seconde question que nous dirons également quelques mots de la première décision publiée.

5.L'on sait que le Règlement ne tient nullement compte de la réalité économique des groupes de sociétés. Le rapport de MM. Virgos et Schmit sur la convention relative aux procédures d'insolvabilité [11] était sans équivoque à ce sujet: 'La convention ne prévoit pas de règles particulières pour les groupes de sociétés parentes (du type mère-filiale). La règle générale est que, pour ouvrir ou étendre une procédure d'insolvabilité contre une des sociétés parentes au titre de débiteur principal ou solidaire, il faut respecter la règle de compétence édictée par la convention à l'égard de chacun des débiteurs en cause ayant une personnalité juridique distincte' [12]. De nombreux auteurs ont regretté qu'aucune règle particulière n'ait été édictée [13]. En effet, l'ouverture de faillites principales distinctes pour chaque société du groupe peut soulever des difficultés épineuses… Comment régler le sort des dettes intragroupes? Liquider les actifs de ces sociétés apparentées de façon indépendante ne risque-t-il pas de réduire fortement le taux de désintéressement des créanciers, en entraînant une réalisation des actifs nettement moins avantageuse [14]? Comment coordonner ces procédures, alors que les règles de coopération des syndics édictées par le Règlement ne valent que lorsqu'il s'agit d'articuler une procédure principale d'une part et une ou plusieurs procédures secondaires d'autre part, et non plusieurs procédures principales [15]?

6.C'est probablement dans l'optique de corriger certains de ces inconvénients que la High Court a adopté la solution précitée. Elle ne pouvait aller contre le texte du Règlement; elle a donc motivé sa compétence en prouvant que le centre des intérêts principaux de toutes les filiales européennes du groupe Daisytek était en réalité situé en Angleterre. Il s'agit en effet d'une notion de fait, que le Règlement décrit comme le lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est donc vérifiable par les tiers [16]. Il ne s'agit pas là de conditions cumulatives, comme l'indique la présence de la locution 'donc' [17]; le lieu de gestion est privilégié parce qu'il est généralement celui qui est connu des tiers. Dans la décision commentée, le juge s'est néanmoins attelé à vérifier non seulement que la société mère prenait de nombreuses décisions pour ses filiales, ce qui impliquait à ses yeux qu'elles étaient toutes gérées au lieu du siège de celle-ci, mais aussi à rechercher quels pouvaient être les 'tiers' visés par cette définition, pour en déduire qu'il s'agissait des créanciers les plus importants [18].

Or, il nous semble, d'une part, que ce n'est pas parce que la société mère exerçait une certaine autorité sur les filiales que celles-ci n'étaient, nécessairement, pas gérées chacune au lieu de leur siège social. D'autre part, l'interprétation de la notion de 'tiers' nous apparaît très contestable, le Règlement ayant utilisé un terme tout à fait générique; de plus, en forçant ainsi la détermination du lieu de gestion de ces filiales, on aboutit finalement à ne pas respecter les attentes de ces tiers: les créanciers ayant traité directement avec ISA Daisytek SAS ne pouvaient raisonnablement s'attendre à ne pas la voir liquidée par les juges français [19]

7.C'est notamment dans le but d'assurer une certaine uniformité dans l'application du Règlement que le législateur communautaire a établi une présomption pour les personnes morales. Or, des divergences peuvent déjà être constatées dans la jurisprudence: les cours et tribunaux anglais semblent renverser la présomption avec beaucoup plus de facilité que les juges des autres États membres; ainsi, dans l'affaire Crisscross Telecommunications Group, les juridictions anglaises ont, le 20 mai 2003, ouvert des procédures d'insolvabilité à l'encontre de plusieurs sociétés d'un même groupe, dont certaines possédaient leur siège dans d'autres États membres, ainsi qu'en Suisse, et ce alors que ce n'était pas la société mère mais l'une des filiales qui possédait son siège en Angleterre, filiale qui fut néanmoins considérée comme le centre des intérêts principaux des autres sociétés européennes du groupe [20], [21]. Comme l'ont souligné certains auteurs, afin d'éviter ces interprétations distinctes entre les États membres, il semble nécessaire de ne renverser cette présomption que lorsque l'on constate que le siège statutaire est purement fictif [22].

8.Des conséquences non souhaitables découleraient en effet inévitablement d'une concentration des compétences auprès des tribunaux du siège d'une des sociétés d'un groupe: outre que cela pourrait pousser au forum shopping [23], que le Règlement avait précisément pour objet d'éviter, les juges européens devraient se considérer incompétents pour liquider les filiales européennes de sociétés établies dans un État tiers… En effet, le propre d'un groupe étant d'avoir une direction unifiée, ces filiales établies dans des États de l'Union devraient également être considérées comme ayant le centre de leurs intérêts principaux au lieu du siège de la société-mère. Cette situation serait catastrophique quand on sait combien de sociétés européennes sont possédées par des groupes américains, notamment. Indirectement, le Règlement entraînerait alors une perte d'emprise des cours et tribunaux des États de l'Union européenne sur l'administration des insolvabilités de nombreuses sociétés établies sur leur territoire.

De plus, dans l'hypothèse où, comme dans l'affaire Daisytek, une série de faillites principales distinctes seraient ouvertes à l'encontre de filiales appartenant à un même groupe, au lieu du siège de la société mère, l'on peut s'attendre à ce que des faillites secondaires, territoriales, soient ouvertes sur base de l'article 3,§ 2 du Règlement dans tous les États où ces filiales ont leur siège, qui serait donc ici considéré comme un établissement [24]… Le Règlement [25] permet en effet tant au syndic de la procédure principale qu'à toute autre personne habilitée à cet effet par la législation nationale de l'État où cet établissement est situé, de demander l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité secondaire… ce que l'on peut s'attendre à ce que les créanciers ayant traité avec les filiales demandent dans la majorité des cas. Finalement, la compétence du juge du centre des intérêts du groupe (le siège de la société mère, par hypothèse) se limiterait donc à des tâches de coordination de ces faillites secondaires. Quoique cela assurerait une certaine protection des créanciers locaux, l'on ne peut s'empêcher de penser que l'on est bien loin des intentions du législateur européen,…

9.Par conséquent, s'il est sûr que certains inconvénients peuvent découler d'une stricte application des dispositions du Règlement dans le cas des groupes de sociétés, ses termes ne permettent pas, selon nous, de cautionner la décision de la High Court. Une modification du Règlement pourrait cependant être envisagée, non dans le sens d'une concentration des compétences, mais en assurant une coopération et une coordination obligatoires entre les différentes procédures, comme c'est le cas entre procédure principale et procédure(s) secondaire(s) ouvertes à l'égard d'une même société [26].

10.Une autre question soulevée par cette affaire Daisytek est celle de la reconnaissance des décisions d'ouverture. En vertu de l'article 16 du Règlement, l'on sait que cette reconnaissance se fait sans aucune formalité: 'Toute décision ouvrant une procédure d'insolvabilité prise par une juridiction d'un État membre compétente en vertu de l'article 3 est reconnue dans tous les autres États membres, dès qu'elle produit ses effets dans l'État d'ouverture'. La doctrine présente généralement l'ordre public international, mentionné à l'article 26 du règlement [27], comme le seul motif de refus susceptible d'être opposé à cette reconnaissance de plano [28], [29]. Or, on peut se demander quelle portée attribuer à l'expression 'procédure d'insolvabilité prise par une juridiction d'un État membre compétente en vertu de l'article 3'. Cela implique-t-il que le juge de l'État requis pourrait refuser la reconnaissance de la décision d'ouverture pour le motif qu'elle n'a pas été prononcée par la juridiction du centre des intérêts principaux du débiteur? C'est ce que les juges français ont considéré dans la présente affaire [30], [31]. Or cela nous semble hautement contestable [32].

11.Que l'on se réfère, d'abord, au rapport Virgos et S­chmit, précité, qui souligne que 'La Convention se fonde sur le principe de la confiance communautaire et sur une présomption générale de régularité de la décision étrangère. (…) Les juridictions de l'État requis ne peuvent contrôler la compétence de la juridiction de l'État d'origine, mais peuvent uniquement vérifier que la décision émane d'une juridiction d'un État contractant qui se déclare compétente en vertu de l'article 3 de la convention' [33]. Le considérant 22 du Règlement précise quant à lui, in fine, que 'La reconnaissance des décisions rendues par les juridictions des États membres devrait reposer sur le principe de la confiance mutuelle. À cet égard, les motifs de non-reconnaissance devraient être réduits au minimum nécessaire. Il convient également de régler conformément à ce principe tout conflit qui existe lorsque les juridictions de deux États membres se considèrent comme compétentes pour ouvrir une procédure principale. La décision de la juridiction qui ouvre la première la procédure devrait être reconnue dans tous les autres États membres, sans que ceux-ci aient la faculté de soumettre la décision de cette juridiction à un contrôle'.

La formulation de l'article 16, pour maladroite qu'elle soit, n'est donc destinée, selon nous, qu'à rappeler que le Règlement ne s'applique qu'aux procédures d'insolvabilité à l'encontre de débiteurs dont le centre des intérêts principaux est localisé en Europe. Les décisions des États membres qui ouvrent une procédure sur base de leur droit commun à l'encontre d'un débiteur dont le centre des intérêts se situe en dehors de l'Union européenne ne sont donc pas susceptibles de bénéficier des règles de reconnaissance telles qu'énoncées par le Règlement. La seule situation où le juge de l'État requis pourrait, semble-t-il, refuser la reconnaissance pour un autre motif que la violation de son ordre public international sera donc le cas où, en réalité, le Règlement n'était pas d'application [34].

12.La confiance mutuelle que se vouent les États européens [35] doit donc conduire, dès lors qu'une décision d'ouverture a été prononcée dans un État membre, à ne procéder à aucune vérification quant à la localisation du centre des intérêts principaux, et à n'ouvrir, le cas échéant, qu'une procédure secondaire. C'est le raisonnement qu'a tenu le tribunal de commerce de Charleroi, dans la première des trois décisions ici publiées, en mettant volontairement de côté les éléments qui semblaient montrer que le centre des intérêts principaux du débiteur ne se trouvait pas dans l'État d'ouverture mais bien en Belgique.

Toute autre interprétation ruinerait le système du Règlement, puisque, le centre des intérêts principaux étant une notion de fait, l'on aboutirait alors à une multiplication de cas où plusieurs procédures principales seraient ouvertes au sein de l'Union européenne à l'encontre d'un même débiteur, en raison d'une appréciation distincte de ce critère par les États membres [36]. Seul un arrêt de la Cour de justice définissant plus précisément cette notion pourrait apporter une solution aux situations telle celle qui se présentait dans l'affaire D­aisytek [37].

[1] Assistante à l'Université libre de Bruxelles, Unité de droit international privé, www.dipulb.be.
[2] Ces sociétés ont bénéficié d'une procédure du Chapter 11 en date du 7 mai 2003.
[3] Pour bénéficier de cette procédure, il faut que la désignation d'un administrateur soit susceptible de mener soit à la survie de la société, ou d'une partie de ses activités, soit à une réalisation plus avantageuse de ses actifs que par le biais d'une liquidation. Cette procédure est visée par l'annexe A du Règlement CE n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité (J.O.C.E. (L) 160 du 30 juin 2000, p. 1, ci-après, le Règlement), qui énonce limitativement les procédures visées à l'art. 2, a), c'est-à-dire celles qui sont susceptibles d'être des procédures principales, au sens de l'art. 3, § 1 du Règlement.
[4] Sur cet instrument, voy.: N. Watté et V. Marquette, 'Le règlement communautaire, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d'insolvabilité', R.D.C. 2001, pp. 565 et s.; P. Wautelet, 'De Europese insolventieverordening', in H. Van Houtte et M. Petergás Sender (éd.), Het nieuwe Europese IPR: van verdrag naar verordening, Antwerpen-Groningen, Intersentia Rechtswetenschappen, 2001, pp. 103 et s.; D. Bureau, 'La fin d'un îlot de résistance. Le Règlement du Conseil relatif aux procédures d'insolvabilité', Rev. crit. d.i.p. 2002, pp. 613 et s.; G. Moss, I. Fletcher et S. Isaacs (éd.), The EC Regulation on insolvency proceedings. A commentary and annotated guide, Oxford University Press, 2002; T. M. Bos, 'The European insolvency regulation and the harmonization of private international law in Europe', N.I.L.R. 2003, pp. 31 et s.; Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, 'Les entreprises en difficulté dans l'Union européenne', Petites Affiches 2001, n° spécial du 20 novembre; P. Torremans, 'The EU Council Regulation on Insolvency Proceedings: a step in the right direction?', tijdschrif@ipr.be 2001, pp. 104 et s.; voy. également: Ph. Hameau et M. Raimon, 'Faillites internationales. Approche européenne', RDAI 2003, pp. 645 et s.; L. Idot, 'Un nouveau droit communautaire des procédures collectives: le Règlement (CE) n° 1346/2000 du 29 mai 2000', J.C.P. éd. E 2000, pp. 1648 et s.; Th. Kruger, 'De Europese Insolventie­verordening: een toepassing', note sous Comm. Tongres 20 février 2003, R.D.C. 2004, pp. 71 et s.; Y. Chaput, 'Vers un droit de la faillite européenne? (Le Règlement du Conseil du 29 mai 2000, relatif aux procédures d'insolvabilité)', in Centre d'études Jean Renauld, Faillites et concordats judiciaires: un droit aux contours incertains et aux interférences multiples, Bruxelles, Bruylant, 2002, pp. 571 et s.; Th. Bosly, 'La faillite internationale. Une ère nouvelle s'est-elle ouverte avec le règlement du Conseil du 29 mai 2000?', J.T. 2001, pp. 689 et s.
[5] Art. 3, § 1.
[6] Il semble que l'AG Düsseldorf ait, par une décision du 6 juin 2003, tenu le même raisonnement quant aux filiales allemandes du groupe Daisytek. Cette décision aurait également été réformée en appel, les procédures ouvertes en Allemagne ayant dès lors été converties en procédures secondaires. Voy. B. Wessels, 'International jurisdiction to open insolvency proceedings in Europe, in particular against (groups of) companies', www.iiiglobal.org , p. 23.
[7] Sur ces décisions, voy. les notes de: A. Jacquemont, Clunet 2004, pp. 150 et s.; B. Wessels, J.O.R. 2003, pp. 2225 s.; M. Menjucq, 'Premières applications du règlement sur les procédures d'insolvabilité et premières controverses', J.C.P. 2004, jur., II, 10.007; J-L Vallens, 'Première application du Règlement européen sur les procédures collectives: premières atteintes à l'ordre public', D. 2003, jur., pp. 2352 et s.; G-A Likillimba, JCP éd. E 2003, jur., 1747; G. Moss, 'The triumph of 'fraternité': ISA Daisytek SAS', www.iiiglobal.org .
[8] A. Jacquemont indique que cet arrêt de la cour d'appel de Versailles fait l'objet d'un pourvoi dans l'intérêt de la loi près la Cour de cassation de France, note précitée, p. 150.
[9] La cour traite ici uniquement des procédures principales d'insolvabilité, telles que visées à l'art. 3, § 1 du Règlement: 'Considérant que (...) les deux procédures ouvertes, l'une par la Haute Cour de Justice de Leeds le 16 mai 2003, et l'autre par le Tribunal de commerce de Pontoise le 26 mai 2003 sont des procédures d'insolvabilité principales de l'article 3 § 1, et que la notion d'insolvabilité secondaire de l'article 3 § 2 est étrangère au présent litige'.
[10] La cour d'appel de Versailles semble en réalité déduire cette conséquence de la combinaison des artt. 16 et 17. Il semble toutefois délicat de faire dépendre l'impossibilité d'ouvrir une seconde procédure principale du droit interne de l'État dans lequel la première procédure a été ouverte. L'art. 17 énonce en effet 'La décision d'ouverture d'une procédure visée à l'article 3, paragraphe 1, produit, sans aucune autre formalité, dans tout autre État membre les effets que lui attribue la loi de l'État d'ouverture'. Le fait qu'une seconde procédure principale ne puisse plus être ouverte résulte de la combinaison des trois premiers paragraphes de l'art. 3 - desquels il ressort qu'il n'existe qu'un seul centre des intérêts principaux pour chaque débiteur - et de l'art. 16, ainsi que, de manière générale, de l'économie du Règlement, qui consacre le principe de l'universalité de la faillite, quoique aménagée par la possibilité d'ouvrir des procédures secondaires strictement territoriales.
[11] Doc. 6500/96, non publié. Pour rappel, la Convention européenne relative aux procédures d'insolvabilité avait été adoptée à Bruxelles, le 23 novembre 1995, par le Conseil de l'Union européenne, et n'est jamais entrée en vigueur en raison du refus du Royaume-Uni de la signer. Les dispositions du Règlement 1346/2000 sont pratiquement identiques à celles de cette Convention, raison pour laquelle le rapport Virgos et Schmit est cité à l'appui de son interprétation.
[12] N° 76.
[13] Voy. notam. T.M. Bos, 'The European insolvency regulation and the harmonization of private international law in Europe', o.c., p. 35; D. Bureau, 'La fin d'un îlot de résistance...', o.c., p. 678; B. Wessels, 'The European Union Insolvency Regulation. An overview with trans-atlantic elaborations', www.iiiglobal.org , p. 12; R. Van Galen, 'The European Insolvency Regulation and groups of companies', www.iiiglobal.org ; Y. Chaput, 'Vers un droit de la faillite européenne?', o.c., p. 575.
[14] Sur toutes ces questions, voy. aussi le Projet de Guide législatif de la CNUDCI sur le droit de l'insolvabilité, qui résume le traitement de ces questions en droit comparé (doc. A/CN.9/WG.V/WP.70, du 30 septembre 2003, pp. 255 et s., disponible sur www.uncitral.org).
[15] Le Règlement n'ayant pas envisagé le cas des groupes de sociétés, une coordination de procédures principales n'était en effet pas nécessaire, puisque ces procédures étaient ouvertes à l'égard de personnes juridiques distinctes.
[16] Considérant n° 13.
[17] Qui existe également dans les autres versions linguistiques du Règlement.
[18] 'It appears that a large majority of potential creditors by value (which I regard as the relevant criterion) know that Bradford is where many important functions of the German companies are carried out', n° 16.
[19] En ce sens, voy. R. Van Galen, qui estime que concentrer les compétences entre les mains des juges du centre des intérêts principaux de la société mère entraînerait des difficultés supplémentaires pour les créanciers en termes de prévisibilité, puisqu'ils devraient dans tous les cas chercher si la société avec laquelle ils se proposent de contracter appartient ou non à un groupe, 'The European Insolvency Regulation and groups of companies', o.c.
[20] Décision non publiée, citée par R. Van Galen, o.c.; voy. également J. Willcock, 'How Europe became the capital of Forum Shopping (and how London hopes to become the Delaware of Europe)', Insol World 2003-3, p. 8, disponible sur www.insol.org/newinsolworld/2003/INSOLaug03.pdf .
[21] Voy. aussi les affaires Enron Directo Sociedad Limitada, société dont le siège était fixé en Espagne (4 juin 2002, non publiée, citée par B. Wessels, 'International jurisdiction to open insolvency proceedings in Europe, in particular against (groups of) companies', o.c.), et BRAC Rent-a-car International Inc, société dont le siège statutaire était situé aux États-Unis (7 février 2003, All. E.R. 2003, 2, p. 201).
[22] N. Watté et V. Marquette, 'Le règlement communautaire…', o.c., n° 21.
[23] Voy. les craintes non dissimulées de J. Willcock, 'How Europe became the capital of Forum Shopping (and how London hopes to become the Delaware of Europe)', o.c., p. 8; voy. aussi R. Van Galen, o.c.
[24] R. Van Galen, o.c.; G. Moss, I. Fletcher et S. Isaacs (éd.), The EC Regulation on insolvency proceedings, o.c., n° 8.57. Contra: A. Jacquemont, note précitée, p. 158 et J-L Vallens, 'Première application du Règlement européen sur les procédures collectives: premières atteintes à l'ordre public', o.c., qui estiment tous deux que, la filiale ayant la personnalité juridique, elle ne pourrait en aucun cas être considérée comme un établissement. S'il est certain que le législateur communautaire n'avait pas en tête de viser les filiales dans le concept d'établissement, à partir du moment où l'on décide qu'une filiale a le centre de ses intérêts principaux non au lieu de son siège, mais à celui de sa société mère, il semble difficile de nier qu'elle a bien un 'lieu d'opérations où elle exerce de façon non transitoire une activité économique avec des moyens humains et des biens' dans l'État où est fixé son siège… Dans le cas contraire, il y aurait en outre une discrimination pour les créanciers locaux de l'État de ce siège par rapport aux créanciers d'autres établissements (succursales p. ex.). Comme le précise M. Menjucq ('Premières applications du règlement sur les procédures d'insolvabilité et premières controverses', o.c., p. 92), une interprétation plus large de la notion d'établissement n'est pas exclue puisque rien dans la définition précitée de l'art. 2 h) du Règlement ne précise expressément qu'un établissement ne peut avoir la personnalité juridique.
[25] En son art. 29.
[26] Pour de plus amples développements, voy. C. Barbé et V. Marquette, 'Council Regulation (EC) No. 1346/2000. Insolvancy Proceedings in Europe and third Countries, Status and Prospects'. in A. Nuyts en N. Watté (éd.), International civil litigation in Europe and relations with Third States, Bruxelles, Bruylant, 2004.
[27] Qu'il convient de lire en combinaison avec les art. 16, § 1 in fine (qui empêche un État membre, dont la législation réserve la procédure de faillite aux personnes ayant la qualité de commerçant, de considérer qu'une procédure ouverte dans un autre État membre à l'égard d'un non commerçant est, de ce seul fait, contraire à son ordre public international) et 25, § 3; N. Watté et V. Marquette, 'Le règlement communautaire, ...', o.c., n° 38.
[28] Voy. notam.: P. Torremans, 'The EU Council Regulation on Insolvency Proceedings: a step in the right direction?', o.c., p. 151; T. M. Bos, 'The European insolvency regulation and the harmonization of private international law in Europe', o.c., p. 39; N. Watté et V. Marquette, 'Le règlement communautaire, ...', o.c., n° 38. Voy. également les développements de A. Jacquemont, note précitée, pp. 155-156.
[29] L'arrêt de la cour d'appel de Versailles avait également à se prononcer sur des arguments tirés de la violation de conditions de forme (notamment, le fait que l'administration order n'ait pas fait l'objet de publicité au greffe du tribunal de commerce du siège de ISA Daisytek SAS); à cette occasion, elle rappelle que 'l'absence de cette publication n'est d'aucune conséquence sur le fait que cette décision a pour effet d'interdire à la juridiction française d'ouvrir ultérieurement une autre procédure d'insolvabilité principale; qu'en effet l'article 17 du Règlement précise que la décision d'ouverture produit ses effets 'sans aucune autre formalité''. L'on ne s'étendra pas sur cette question de la publicité ici; notons toutefois que le fait que le Règlement ne rende pas obligatoire la publicité, dans les autres Etats membres, d'une décision d'ouverture (art. 21 et 22) pourra susciter des problèmes pratiques non négligeables dans son application.
[30] La cour d'appel de Versailles précise ainsi qu'il s'agit dans la présente espèce de dire qu'elle (sic) est celle des deux procédures d'insolvabilité principales qui doit être appliquée à la SAS ISA Daisytek.
[31] Une partie de la doctrine va dans le même sens; voy. G-A Likillimba, note précitée, p. 2017; M. Menjucq, 'Premières applications du règlement sur les procédures d'insolvabilité et premières controverses', o.c., p. 91 qui estime que le contrôle de la compétence du juge d'origine n'est pas incompatible avec le principe de confiance mutuelle parce qu'il ne s'agit pas de contrôler la matérialité des constatations faites par ce juge.
[32] Dans le sens d'une absence de contrôle par le juge requis, voy. not. B. Wessels, 'International jurisdiction to open insolvency proceedings in Europe, in particular against (groups of) companies', o.c., p. 17; A. Jacquemont, note précitée, p. 151; voy. également les dispositions insérées par le législateur allemand dans l'InsO, citées par B. Wessels.
[33] N° 202.
[34] En ce sens, D. Bureau, 'La fin d'un îlot de résistance..., o.c., pp. 645-646; P. Wautelet, 'De Europese insolventieverordening', o.c., n°s5-49 et 'Reconnaissance et exécution des décisions en Europe. L'exemple de la faillite internationale', in G. de Leval et M. Storme (dir.), Le droit processuel & judiciaire européen, Bruxelles, La Charte, 2003, pp. 419 et s., spéc. p. 444.
[35] L'on notera que, depuis le 1er mai 2004, ce sont vingt-cinq États qui appliquent le Règlement 1346/2000. Le Traité d'adhésion de la République tchèque, la République d'Estonie, la République de Chypre, la République de Lettonie, la République de Lituanie, la République de Hongrie, la République de Malte, la République de Pologne, la République de Slovénie, la République slovaque à l'Union européenne prévoit en effet (dans l'art. 2 de l'Acte relatif aux conditions d'adhésion, qui fait partie intégrante du Traité) que 'Dès l'adhésion, les dispositions des traités originaires et les actes pris, avant l'adhésion, par les institutions et la Banque centrale européenne lient les nouveaux États membres et sont applicables dans ces États dans les conditions prévues par ces traités et par le présent acte' (nous soulignons); Annexe II qui contient la “liste visée à l'article 20 de l'acte d'adhésion” énonce la modification à apporter au texte du Règlement, J.O.C.E. (L) 236, 23 septembre 2003, pp. 17 et s. et p. 711 et s.
[36] Une autre question intéressante vient d'être soulevée dans une décision de la High Court (Irlande) rendue le 23 mars 2004 (non publiée) dans la faillite de la société Eurofood, filiale du groupe Parmalat. Elle consiste à déterminer le moment à partir duquel l'on peut considérer qu'une procédure d'insolvabilité a été ouverte: la désignation d'un syndic provisoire est-elle une décision d'ouverture, empêchant par conséquent l'ouverture d'une procédure principale dans tout autre État membre? C'est ce qu'a considéré le juge irlandais, qui avait désigné un administrateur provisoire avant que les tribunaux italiens, déjà saisis de la faillite de la société mère, ne se déclarent compétents pour liquider la filiale. Deux procédures principales d'insolvabilité sont donc ouvertes pour un seul débiteur, la société Eurofood, ce qui, faut-il le préciser, va totalement à l'encontre de l'esprit du Règlement... Une série de questions préjudicielles, les premières concernant le Règlement, vient d'ailleurs d'être posée à la Cour de Justice par la Supreme Court, saisie de l'appel de la décision rendue par la High Court, le 27 juillet dernier.
[37] Le système des questions préjudicielles ne semble toutefois pas très adapté aux procédures d'insolvabilité. Les procédures devant la Cour de justice sont en effet longues, et réservées aux cours suprêmes. Le législateur européen serait peut-être avisé d'imaginer une autre solution, ne fût-ce que, par exemple, pour la détermination dans des cas d'espèce du centre des intérêts principaux, la cour étant en tout état de cause incompétente pour trancher des questions de fait.