Tribunal de commerce de Liège 28 février 2003
MARQUES
Article, 13, A, 1, b, LBM - Enseigne - Usage pour des services - Risque de confusion
Au sens de l'article 13, A, 1, b (ancien), LBM, le risque d'association doit être compris comme un risque de confusion quant à l'origine des produits.
Pour apprécier si les produits ou services sont similaires ou non, l'élément déterminant est de savoir dans quelle mesure le public considère le produit ou service comme étant apparenté, au point de vue commercial, technique ou autre, au produit ou service de l'utilisateur de la marque.
Une différence quant au lieu de vente des services et quant à leur nature n'empêche pas la similarité, dès lors que le titulaire de la marque peut étendre l'utilisation de ses services en dehors du lieu actuel.
Le simple emploi des termes litigieux “Talys” et “Talys Tavern” dans une enseigne mise sur le fronton d'une taverne en l'absence d'autres éléments concrets d'où il apparaîtrait un emploi des termes litigieux pour désigner les services de restauration offerts notamment par de la publicité, par la position du signe sur le matériel utilisé (serviettes, tasses...) n'établit pas un usage du signe pour des produits ou services. Il n'en est autrement que si, en fait, le nom commercial est employé d'une manière telle que le public perçoit cet emploi d'un signe servant à distinguer les services offerts de ceux d'autrui.
MARQUES
Article 13, A, 1, d, LBM - Usage autrement que pour distinguer des produits - Usage tirant indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée
L'usage d'un signe à titre d'enseigne constitue un usage autrement que pour distinguer des produits et services, au sens de l'article 13, A, 1, d, LBM.
En reproduisant le signe “Talys Tavern” sur la devanture de son établissement, le défendeur tente d'attirer l'attention des voyageurs et de les inciter à venir consommer dans sa taverne, laquelle est pour le surplus située en face de la gare des Guillemins où la SNCB fournit par hypothèse ses services, dont celui portant sur les marques litigieuses. Un tel comportement s'identifie précisément au fait de tirer profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque Thalys.
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MERKEN
Artikel 13, A, 1, b, BMW - Uithangbord - Gebruik voor diensten - Gevaar voor verwarring
Het associatiegevaar in de zin van artikel 13, A, 1, b (oud), BMW moet begrepen worden als het gevaar voor verwarring met betrekking tot de oorsprong van de producten.
Om te oordelen of de producten of diensten al dan niet gelijkaardig zijn, is bepalend in welke mate het publiek het product of de dienst op commercieel, technisch of ander gebied als verwant beschouwt met de producten of diensten van de merkhouder.
Een verschil met betrekking tot de plaats van de verkoop van de diensten en met betrekking tot hun aard vormt geen beletsel voor een eventuele gelijkaardigheid van zodra de merkhouder de plaats van zijn dienstverlening kan uitbreiden buiten de huidige locatie.
Het loutere gebruik van de termen “Talys” en “Talys Tavern” op een uithangbord aan de voorgevel van een taverne, zonder andere concrete elementen waaruit zou blijken dat deze termen gebruikt worden om te verwijzen naar de aangeboden restauratiediensten, met name door reclame of door het aanbrengen van het teken op de gebruikte materialen (servetten, tassen,…), vormt geen bewijs voor het gebruik van het teken voor producten of diensten. Dit is slechts anders wanneer de handelsnaam op een zodanige manier wordt gebruikt dat het publiek dit gebruik aanziet als dat van een teken dat dient om de diensten te onderscheiden van de diensten die door anderen worden aangeboden.
MERKEN
Artikel 13, A, 1, d, BMW - Ander gebruik dan ter onderscheiding van producten - Gebruik dat een ongerechtvaardigd voordeel oplevert uit het onderscheidend karakter of de bekendheid van het merk
Het gebruik van een teken als uithangbord vormt een ander gebruik dan ter onderscheiding van producten en diensten in de zin van artikel 13, A, 1, d, BMW.
Door het teken “Talys Tavern” aan te brengen op de voorgevel van zijn etablissement probeert de verweerder de aandacht van de reizigers te trekken en hen aan te zetten om iets te komen verbruiken in zijn taverne, die overigens gevestigd is tegenover het station Guillemins vanwaar de NMBS per hypothese haar diensten verstrekt, met inbegrip van de diensten in kwestie. Een dergelijke handelswijze houdt juist in dat men voordeel haalt uit het onderscheidend vermogen of de bekendheid van het merk Thalys.
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SA de droit public Société nationale des Chemins de fer belges / SA Gaétan Warzée
Siég.: M-C. Ernotte (juge présidant le siège), Ph. Tromme et J. Debande (juges consulaires) |
Pl.: Mes G. Sorreaux loco G. Glas, G. Trinco loco J.-F. Jeunehomme |
(...)
1. | Les faits |
1. La SA de droit public Société nationale des Chemins de fer belges (ci-après “SNCB”) est titulaire des marques Benelux suivantes:
- la marque verbale “Thalys” n° 544105 déposée le 4 février 1994 pour les classes suivantes: classe 12 (véhicules, appareils de locomotion par terre, par air ou par eau); classe 28 (jeux, jouets, articles de gymnastique et de sport non compris dans d'autres classes, décorations pour arbres de Noël); classe 39 (transport, emballage et entreposage de marchandises, organisation de voyages); classe 42 (restauration (alimentation), hébergement temporaire);
- la marque figurative “Thalys” n° 547505 déposée le 4 mai 1994 notamment pour les classes suivantes: classe 12 (véhicules, appareils de locomotion par terre, par air ou par eau); classe 39 (transport, emballage et entreposage de marchandises, organisation de voyages); classe 42 (restauration (alimentation), hébergement temporaire).
2. La SA Gaétan Warzée (ci-après “Gaétan Warzée”) exploite une taverne sous l'enseigne “Talys Tavern” en face de la gare des Guillemins.
3. Par lettre du 14 avril 1998, le bureau Gevers fait part à Gaétan Warzée que sa cliente a constaté dans le quartier de la gare liégeoise une taverne portant le nom Talys Tavern et dont l'enseigne reprend un dessin qui fait clairement référence à un train. Le bureau Gevers invite Gaétan Warzée à mettre fin à tout usage de la dénomination Talys Tavern ou de tout autre signe ressemblant aux marques de la SNCB, aussi bien à titre d'enseigne que tout autre usage.
Par courrier du 22 avril 1998, Gaétan Warzée répond qu'elle n'a pas l'intention de faire une quelconque concurrence à la marque “Thalys”. Gaétan Warzée fait état du fait que (...) c'est notre gérant Monsieur Jean-Claude Konings (SA Restotel) qui a proposé de donner ce nom à l'établissement après nous avoir confirmé qu'il avait obtenu l'accord verbal d'un haut fonctionnaire de la SNCB à Liège-Guillemins. Gaétan Warzée demande ce qu'elle pourrait faire.
Par courrier du 30 avril 1998, le bureau Gevers maintient sa position et demande à Gaétan Warzée de cesser immédiatement tout usage de la dénomination Talys ou de tout autre signe ressemblant. Le conseil en marque de la SNCB invite Gaétan Warzée à changer l'enseigne ainsi qu'à modifier les cartes, menus,...
Un rappel est adressé par courrier du 16 juin 1998.
Par courrier du 5 novembre 1999, le conseil de la SNCB invite à nouveau Gaétan Warzée à cesser toute utilisation de signes identiques ou ressemblants à la marque de sa cliente.
Par courrier du 29 novembre 1999, Gaétan Warzée confirme qu'elle n'a jamais eu l'intention de porter préjudice à la SNCB et précise: comme vous le savez parfaitement à proximité des gares, les cafés portent très fréquemment des noms ayant un rapport avec le chemin de fer, les trains, les locomotives, etc. Nous ne voyons pas quelle confusion il pourrait exister entre le guichet ou les bureaux d'accueil du Thalys et notre fonds de commerce.
2. | La demande |
La SNCB demande condamnation de Gaétan Warzée:
- à cesser tout emploi du signe incriminé, à savoir l'enseigne représentant un train et dans lequel figure le signe “Talys”, ainsi que de tout autre signe ressemblant à ses marques pour des services et produits ayant trait au secteur de la restauration ou comme nom commercial dans ce secteur, sous peine d'une astreinte de 5.000 euros par unique fait d'usage et par jour en contravention au jugement à intervenir;
- à lui payer la somme de 50.000 euros au titre de dommages-intérêts majorée des intérêts judiciaires.
La SNCB demande que le jugement à intervenir soit déclaré exécutoire par provision nonobstant tout recours et toute offre de cantonnement.
3. | Discussion |
La SNCB fonde sa demande d'interdiction sur les dispositions suivantes:
3.1. | Article 13, A, 1, b, de la loi uniforme Benelux sur les marques |
L'article 13, A, 1, b, de la loi uniforme Benelux sur les marques (LUBM) permet au titulaire d'une marque de s'opposer à tout usage qui, dans la vie des affaires, serait fait de la marque ou d'un signe ressemblant pour les produits pour lesquels la marque est enregistrée ou pour des produits similaires, lorsqu'il existe, dans l'esprit du public, un risque d'association entre le signe et la marque.
Les conditions d'application de cette disposition sont-elles réunies?
3.1.1. Usage dans la vie des affaires de la marque ou d'un signe ressemblant |
Gaétan Warzée ne conteste pas qu'il y a une ressemblance entre les marques de la SNCB et l'enseigne qu'elle a adoptée, à savoir “Talys Tavern”, et ce tant du point de vue phonétique par l'utilisation du terme “Talys” que du point de vue visuel, l'enseigne litigieuse ayant été dessinée de façon stylisée afin de faire penser à la représentation d'un train à grande vitesse.
L'usage a bien lieu dans la vie des affaires puisque l'utilisation litigieuse l'est au titre d'enseigne.
3.1.2. Produits identiques ou similaires |
Il faut que le signe soit utilisé pour des produits ou des services à tout le moins similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée.
Sur ce plan, il y a lieu de tenir compte des principes directeurs suivants:
1. L'appréciation de la ressemblance entre les produits doit être examinée à la lumière de l'enseignement donné par la Cour de justice Benelux dans son arrêt Polyglot du 16 juin 1995 (Ing.-Cons. 1995, p. 243): pour dire si des produits ou services sont similaires ou non, l'élément déterminant est de savoir dans quelle mesure le public considère les produits ou services comme étant apparentés, au point de vue commercial, technique ou autre, aux produits ou services de l'utilisateur de la marque.
Gaétan Warzée met en exergue le fait qu'il existerait une différence entre les services en cause dès lors que la SNCB fournirait à ses passagers un service de restauration dans les trains alors qu'elle se limite à exploiter en dehors de la gare un débit de boissons où il n'est servi que de la petite restauration. Selon Gaétan Warzée, il existerait dès lors une différence quant au lieu de vente des services et quant à leur nature.
Pareil raisonnement ne peut être suivi. En effet:
- si à l'heure actuelle, les services de restauration sous la dénomination “Thalys” ne sont fournis que dans les trains, rien n'empêche la SNCB d'étendre l'utilisation de tels services en dehors de ce lieu;
- Gaétan Warzée doit bien reconnaître qu'elle fournit de la petite restauration, ce qui, incontestablement, rentre dans le cadre général des services de restauration. Par ailleurs, le service portant sur la fourniture de boissons présente un lien incontestable avec la restauration.
2. La particularité réside en l'espèce dans le fait que l'usage incriminé réside dans l'enseigne de Gaétan Warzée.
Selon la Cour de justice Benelux, il est requis que celui qui emploie la marque le fasse de manière que le public perçoive cet emploi comme se rapportant à un produit déterminé vendu ou offert en vente et qui, par un tel emploi, se distingue des produits d'autrui; que, dès lors, l'emploi d'une marque ou d'un signe ressemblant comme dénomination commerciale ou nom commercial seulement, donc uniquement comme désignation d'une entreprise, ne peut être considéré comme un emploi pour des produits, au sens de l'article 13, A, alinéa 1er, sous 1, LBM; Attendu qu'il n'en reste pas moins que le nom commercial est également un signe susceptible d'être employé, en fait, de manière que le public perçoive cet emploi comme se rapportant à un ou plusieurs produits déterminés vendus ou offerts en vente par l'entreprise, lesquels, par cet emploi, se distinguent de ceux d'autrui; que cela peut également être le cas lorsque ce signe n'est pas apposé sur les produits eux-mêmes, sur leurs emballages ou sur les étiquettes (arrêt Omnisport/Bauweraerts du 7 novembre 1988).
Cette appréciation a été consacrée par la Cour de justice Benelux également pour les services: après avoir rappelé la position adoptée dans l'affaire Omnisport, la cour considère qu'il n'y a pas lieu de statuer différemment pour les marques de service: le simple emploi d'un nom commercial par une entreprise prestataire de services pour fournir ou offrir des services ne constitue pas au surplus l'emploi d'une marque de service identique à ce nom commercial ou l'emploi d'un signe ressemblant; qu'il peut toutefois en être autrement et qu'il y a bien pareil emploi, si, en fait, le nom commercial est employé de manière telle que le public perçoit cet emploi d'un signe servant à distinguer les services offerts ou fournis de ceux d'autrui.
La SNCB considère que Gaétan Warzée fait usage du signe incriminé afin de distinguer les services de restauration qu'elle offre au public.
Gaétan Warzée considère pour sa part que l'utilisation du mot “Talys” est strictement limité à la dénomination de l'établissement.
En l'état du dossier, la SNCB ne fournit aucun élément probant d'où il résulterait que l'emploi des termes “Talys” ou “Talys Tavern” servirait à distinguer les services offerts par Gaétan Warzée de ceux présentés par autrui.
Mis à part l'enseigne apposée sur le fronton de la taverne, la SNCB ne fournit aucun élément concret d'où il apparaîtrait que Gaétan Warzée emploie les termes litigieux pour désigner ses services notamment par de la publicité, par l'apposition du signe sur le matériel utilisé (serviettes, tasses,...).
Dans ces circonstances, la SNBC n'établit pas que les termes litigieux sont utilisés pour des produits ou services similaires.
3.1.3. Risque de confusion |
Surabondamment, l'emploi du signe n'est interdit que s'il existe dans l'esprit du public un risque d'association entre le signe et la marque.
En l'espèce, cette condition n'est pas davantage rencontrée.
1. En effet, ainsi que l'admettent tant la SNCB que Gaétan Warzée, il y a lieu d'interpréter la notion de risque d'association à la lumière de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes rendu dans l'affaire Sabel le 11 novembre 1997 (C-251-95, Rec. 1997, I, 6191): le critère de risque de confusion qui comprend le risque d'association avec la marque antérieure (...) doit être interprété en ce sens que la simple association entre deux marques que pourrait faire le public par le biais de la concordance de leur contenu sémantique ne suffit pas en elle-même pour conclure à l'existence d'un risque de confusion (sur la portée de cet arrêt, S. Velu, “La loi uniforme Benelux sur les marques après l'arrêt Sabel/Puma de la Cour de Justice des Communautés européennes”, R.D.C. 2000, pp. 332 et s.).
Le champ de protection accordé est limité par la fonction d'identification de la marque: (...) dans l'arrêt Cannon du 29 septembre 1998 (...), la Cour de justice avant souligné que le risque de confusion devait se situer sur l'origine des produits en cause, en ce sens qu'il existe un tel risque lorsque le public peut croire que les produits ou services litigieux proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement (E. Cornu, “La contrefaçon: état des lieux à la lumière de la jurisprudence belge récente (1997-2000)”, Ing.-Cons. 2000, pp. 4-5).
N'est donc pas prise en considération le risque d'association proprement dite.
2. Ainsi que le met à juste titre en évidence la SNCB, la marque verbale “Thalys” ainsi que sa marque figurative jouissent d'un pouvoir distinctif fort et ont par ailleurs acquis une reconnaissance publique large compte tenu du service ferroviaire qu'elles désignent.
Dans ces circonstances, le signe utilisé par Gaétan Warzée, à savoir “Talys Tavern” présente une similitude évidente avec les marques de la SNCB.
Toutefois, ainsi que le reconnaît cette dernière, si pour le voyageur moyennement attentif qui, sortant d'une gare où il a bénéficié des services de la SNCB, est confronté à l'enseigne de Gaétan Warzée, naîtra indubitablement une association dans son esprit entre les deux signes (conclusions, p. 6), un tel risque d'association ne constitue pas le risque de confusion requis en ce sens que ledit voyageur pourrait croire que les services ainsi proposés à la taverne de Gaétan Warzée proviennent de la même entreprise que ceux fournis par la SNCB sous la marque “Thalys” ou d'une entreprise apparentée.
Gaétan Warzée considère à juste titre que le consommateur d'attention tout à fait moyenne sait bien que le débit de boissons est indépendant de la SNCB.
3.2. | Article 13, A, 1, d, de la loi uniforme Benelux sur les marques |
Selon l'article 13, A, 1, d, LUBM, le titulaire de la marque peut s'opposer à tout usage qui, dans la vie des affaires et sans juste motif, serait fait d'une marque ou d'un signe ressemblant autrement que pour distinguer des produits, lorsque l'usage de ce signe tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur porterait préjudice.
3.2.1. Usage dans la vie des affaires d'une marque ou d'un signe ressemblant |
Il résulte à suffisance des développements ci-avant que cette condition est remplie.
3.2.2. Autrement que pour distinguer des produits |
Précisément, il a été jugé supra que Gaétan Warzée utilise le signe litigieux au titre d'enseigne, la SNCB ne rapportant pas la preuve qu'elle l'utilise pour désigner les services de son entreprise.
3.2.3. Tirant indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque |
Ainsi que cela a été mis en évidence supra, les marques de la SNCB ont un pouvoir distinctif fort et jouissent d'une réputation certaine.
La SNCB souligne à bon droit qu'en reproduisant le signe sur la devanture de son établissement, Gaétan Warzée tente d'attirer l'attention des voyageurs et de les pousser à venir consommer dans sa taverne, laquelle est pour le surplus située en face de la gare des Guillemins où la SNCB fournit par hypothèse ses services dont celui portant les marques litigieuses.
Nonobstant ses dénégations, Gaétan Warzée est parfaitement consciente du problème et a d'ailleurs opéré le choix de l'enseigne de son établissement situé en face de la gare précisément pour attirer les voyageurs:
- dans un premier temps, Gaétan Warzée a fait savoir qu'elle avait obtenu l'accord d'un responsable de la SNCB pour utiliser le signer au titre d'enseigne (lettre du 22 avril 1998);
- par la suite, dans un courrier du 29 novembre 1999, Gaétan Warzée a reconnu que: comme vous le savez parfaitement à proximité des gares, les cafés portent très fréquemment des noms ayant un rapport avec le chemin de fer, les trains, les locomotives, etc.
En termes de conclusions (p. 6), Gaétan Warzée reprend d'ailleurs ce point de vue: comme c'est très souvent le cas à proximité des gares, les cafés portent très fréquemment un nom ayant un rapport avec le transport ferroviaire (“Orient Express”, “T.G.V.”, “Express 2000”, “Eurostar”...).
La volonté est dès lors clairement affichée de bénéficier de l'impact de ces marques pour attirer la clientèle.
Un tel comportement s'identifie précisément au fait de tirer profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque.
En revanche, la SNCB ne rapporte pas la preuve que l'usage incriminé porterait préjudice à la renommée de ses marques.
La circonstance que la taverne ne serait pas du même niveau de qualité que les services “Thalys” de la SNCB et que les services proposés seraient loin de véhiculer la même image de luxe, de modernité et de confort ne peut être retenue.
Outre le fait que, en fonction des photographies déposées, l'établissement de Gaétan Warzée apparaît bien tenu et ne véhicule pas à cet égard une image négative, il n'y a pas, ainsi que cela a été exposé supra, un risque de confusion.
3.2.4. Absence de justes motifs |
L'article 13, A, 1, d réserve l'hypothèse de l'utilisation dans la vie des affaires de la marque d'autrui pour de “justes motifs”.
La Cour de justice Benelux ne reconnaît l'existence d'un tel juste motif que lorsque l'utilisateur du signe fait état d'une nécessité à faire usage de ce signe-là, telle que malgré le préjudice causé au titulaire de la marque, il ne puisse pas être raisonnablement exigé de l'utilisateur qu'il s'abstienne de l'emploi du signe, ou encore lorsque l'utilisateur a un droit propre à faire usage du signe, droit propre non primé par le droit du titulaire de la marque (arrêt Klarein du 1er mars 1975).
La notion de “justes motifs” s'interprète donc strictement.
En l'espèce, Gaétan Warzée n'invoque pas, ni a fortiori n'établit, l'existence d'un juste motif.
En conclusion, la SNCB invoque à juste titre son droit à s'opposer à l'utilisation par Gaétan Warzée des termes “Talys Tavern” comme enseigne de son débit de boissons.
3.3. | Dommages-intérêts |
Selon l'article 13, A, 3, LUBM, dans les mêmes conditions qu'à l'alinéa premier, ce droit permet au titulaire de réclamer réparation de tout dommage qu'il subirait à la suite de l'usage au sens de l'alinéa premier.
La SNCB fait uniquement valoir à cet égard l'atteinte au pouvoir distinctif de ses marques et réclame quant à ce une somme de 50.000 euros évaluée ex aequo et bono.
Sur ce plan, s'il a été admis ci-avant que Gaétan Warzée tirait indûment profit du caractère distinctif et de la renommée des marques de la SNCB, encore a-t-il été jugé en revanche que la SNCB n'établissait pas que Gaétan Warzée leur portait préjudice.
Dans ces circonstances, la SNCB n'établit pas l'existence du dommage invoqué.
Par ces motifs
Le tribunal,
Se déclare territorialement compétent conformément à l'article 37 de la loi uniforme Benelux sur les marques;
Dit la demande de la SA de droit public Société nationale des Chemins de fer belges recevable et fondée dans la mesure ci-après;
Condamne la SA Gaétan Warzée à cesser d'utiliser au titre de nom commercial dans le secteur de la restauration l'enseigne représentant un train et dans lequel figure le signe “Talys”, et ce sous peine d'une astreinte de 1.000 euros par jour de retard à se conformer à la présente condamnation à l'expiration d'un délai de quinze jours à partir de la signification du présent jugement;
Déboute la SA de droit public Société nationale des Chemins de fer belges du surplus de sa demande.
(...).