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Tribunal de l'entreprise Liège (div. Namur), 26/03/2019, N/18/00078, R.D.C.-T.B.H., 2019/10, p. 1283-1284

Tribunal de l'entreprise de Liège (div. Namur)26 mars 2019

INSOLVABILITÉ
Réorganisation judiciaire - Notions et définitions - Créances sursitaires extraordinaires - Sureté réelle - Privilège spécial - Cession fiduciaire à titre de sûreté
La cession de créance à titre de garantie est une sûreté réelle et doit être assimilée à un gage. Le bénéficiaire d'une telle cession est un créancier sursitaire extraordinaire, dans les limites fixées par l'article I.22, 14° CDE.
INSOLVENTIE
Gerechtelijke reorganisatie - Begrippen en definities - Buitengewone schuldvorderingen in de opschorting - Zakelijke zekerheid - Fiduciaire overdracht tot zekerheid
De overdracht van een schuldvordering tot zekerheid is een zakelijke zekerheid en moet worden geassimileerd met een pandrecht. De begunstigde van een dergelijke overdracht is de buitengewone schuldeiser in de opschorting, althans binnen de grenzen gesteld door artikel I.22, 14° WER.

Axa Bank Belgium NV / Van Rossomme Concept BVBA

Sièg.: W. David (rechter, voorzitter), B. Durieux en J.-P. Lebrun (rechters in ondernemingszaken)
Pl.: Mes. L. Marnette loco J.-M. van Durme en Y. Printz
Aff.: N/18/00078

(…)

4. L'article I.22, 14° CDE définit les créances sursitaires extraordinaires comme suit: « les créances sursitaires garanties, au moment de l'ouverture de la réorganisation judiciaire, par une sûreté réelle et les créances des créanciers-propriétaires; la créance n'est extraordinaire qu'à concurrence du montant, au jour de l'ouverture de la procédure de réorganisation judiciaire, pour lequel une inscription ou un enregistrement a été pris, ou, si aucune inscription ou aucun enregistrement n'a été pris, à concurrence de la valeur de réalisation in going concern du bien ou, si le gage porte sur des créances spécifiquement gagées, leur valeur comptable; la limitation décrite ci-dessus ne s'applique qu'en vue de la réalisation et du vote du plan de réorganisation, tel que visé aux articles XX.72 à XX.83 ».

La doctrine affirme, à bon droit, que les créances gagées dans le cadre d'un gage général sur créances ou d'une cession d'un ensemble de créances à titre de garantie sont des créances spécifiquement gagées au sens de cette disposition (N. Ouchinsky, « Analyse des nouveaux moyens d'action des créanciers dans le cadre d'une procédure de réorganisation judiciaire. Questions choisies », in La réforme du droit de l'insolvabilité et ses conséquences (sur les avocats): une (r)évolution, Larcier, 2018, p. 75). La créance du titulaire d'un tel gage ou du bénéficiaire d'une telle cession sera donc extraordinaire à concurrence de la valeur comptable des créances gagées ou cédées.

5. L'article 62 du Livre III, Titre XVII (Des sûretés réelles mobilières) du Code civil dispose que:

« Cession fiduciaire à titre de sûreté

Une cession de créance à titre de sûreté confère uniquement au cessionnaire un gage sur la créance cédée et ce, que cette cession soit ou non conforme aux dispositions de l'article 61, sauf lorsque le cédant est un consommateur (...) »

Le tribunal considère que l'assimilation de la cession de créance à titre de garantie à un gage intervient dès la conclusion du contrat de cession et indépendamment de l'existence - ou non - d'un cas de concours (le professeur Grégoire cite, parmi les sûretés réelles, le gage et la cession fiduciaire à titre de sûreté (M. Grégoire, « Lecture conjointe des réformes relatives aux sûretés réelles mobilières et aux procédures collectives d'insolvabilité », in Le nouveau Livre XX du Code de droit économique consacré à l'insolvabilité des entreprises, Larcier, 2018, p. 71), ce qui pourrait laisser entendre que selon cet auteur, ces deux notions seraient clairement distinctes. II n'en reste pas moins que sur le plan de la qualification de la cession de créance à titre de garantie, elle affirme qu'il s'agit bien d'une sûreté réelle.), l'article 62 n'apportant aucune limitation en la matière.

6. Contrairement à ce qu'affirme la SPRL Van Rossomme Concept, un tel gage ne doit pas faire l'objet d'une inscription dans le registre des gages. Ce sont en effet les dispositions de l'article 60 du Livre III, Titre XVII (Des sûretés réelles mobilières) du Code civil, qui sont applicables en la matière.

7. Dans la mesure où la cession de créance à titre de garantie doit être assimilée dès l'abord à un gage, le bénéficiaire d'une telle cession est un créancier sursitaire extraordinaire, dans les limites fixées par l'article I.22, 14° CDE.

Et même s'il ne fallait pas assimiler cette institution à un gage, la doctrine soutient qu'une cession de créance à titre de garantie est une sûreté réelle et que le bénéficiaire d'une telle cession est donc un créancier sursitaire extraordinaire (M. Grégoire, « Lecture conjointe des réformes relatives aux sûretés réelles mobilières et aux procédures collectives d'insolvabilité », in Le nouveau Livre XX du Code de droit économique consacré à l'insolvabilité des entreprises, Larcier, 2018, p. 71).