Cour de cassation 11 septembre 2015
CONSTRUCTION - ENTREPRISE DE TRAVAUX
Contrat d'entreprise - Conclusion et exécution - Clause de dédit - Faute commune au maître de l'ouvrage et à l'entrepreneur - Force obligatoire - Pouvoir du juge - Pas de réduction de l'indemnité de résiliation
Le juge qui constate que le maître de l'ouvrage a résilié unilatéralement le contrat, ne peut, sans méconnaître la force obligatoire de la clause, qui s'analyse en une stipulation conventionnelle d'une somme d'argent qui constitue la contrepartie d'une faculté de résiliation unilatérale, réduire l'indemnité de résiliation jusqu'à concurrence de la moitié au motif que l'entrepreneur ne peut prétendre à l'intégralité de la réparation de son dommage en raison d'une « faute (…) commune au maître de l'ouvrage et à l'entrepreneur ».
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BOUW - AANNEMING VAN WERKEN
Aanneming - Sluiting en uitvoering - Opzeggingsbeding met bedongen opzeggingsvergoeding - Fout van aannemer en opdrachtgever - Bindende kracht - Bevoegdheid van rechter - Geen herleiding van het bedongen bedrag
De rechter die vaststelt dat de opdrachtgever het contract heeft opgezegd, kan niet, zonder miskenning van de bindende kracht van het contractueel beding dat zich laat vertalen als een vergoeding bedongen als tegenprestatie voor het opzeggingsrecht, de opzeggingsvergoeding verminderen tot de helft, op grond van het motief dat de aannemer geen aanspraak kan maken op de volledige vergoeding van zijn schade wegens een “gezamenlijke fout van de opdrachtgever en de aannemer”.
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Les Métiers Réunis / H.R. et O.G. Concept
Siég.: Ch. Storck et A. Fettweis (présidents de section), D. Batselé, M. Lemal et M.-Cl. Ernotte (conseillers) |
M.P.: Th. Werquin (avocat général) |
Pl.: Mes M. Grégoire et F. T'Kint |
Affaire: C.14.0278.F |
I. | La procédure devant la Cour |
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2013 par la cour d'appel de Mons.
Le conseiller D. Batselé a fait rapport.
L'avocat général Th. Werquin a conclu.
II. | Le moyen de cassation |
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. | La décision de la Cour |
Sur le moyen |
Quant à la troisième branche |
Aux termes de l'article 1134, alinéa 1er, du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
L'arrêt constate que la demande reconventionnelle de la demanderesse tend à la condamnation du défendeur « au paiement de l'indemnité conventionnelle prévue à l'article 7 du contrat d'entreprise, lequel précise que, 'si, après accord explicite et préalable de l'entrepreneur, le maître de l'ouvrage se charge lui-même ou charge un tiers de l'exécution [des] travaux, il s'engage à indemniser l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux et de son manque à gagner, sans justification, évalués à 30% du montant des travaux qu'il n'a pas exécutés', et que 'cette indemnité est également due pour l'annulation par le maître de l'ouvrage d'une partie ou de l'entièreté des travaux' ».
Il considère qu'il est jugé par le jugement non entrepris du 12 juin 2003 que cette clause, qui est « une modalité de l'article 1794 du Code civil », ne s'analyse pas en « une clause pénale mais [en] une stipulation conventionnelle d'une somme d'argent qui constitue la contrepartie d'une faculté de résiliation unilatérale » et ne laisse pas au juge « un pouvoir d'appréciation du taux de 30% ».
L'arrêt, qui constate que le défendeur a résilié unilatéralement le contrat, n'a pu, sans méconnaître la force obligatoire de l'article 7 de celui-ci et violer, partant, l'article 1134, alinéa 1er, du Code civil, réduire l'indemnité de résiliation jusqu'à concurrence de la moitié au motif que la demanderesse « ne peut prétendre à l'intégralité de la réparation de son dommage » en raison d'une « faute [...] commune au maître de l'ouvrage et à l'entrepreneur ».
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Et il n'y pas lieu d'examiner les deux premières branches du moyen, qui ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur la demande reconventionnelle de la demanderesse et sur les dépens;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Liège.
(…)