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– Position de la FSMA en ce qui concerne les éléments essentiels du contrat d'assurance, FSMA_2015_13 du 26 août 2015, R.D.C.-T.B.H., 2015/9, p. 933-934

Position de la FSMA en ce qui concerne les éléments essentiels du contrat d'assurance, FSMA_2015_13 du 26 août 2015

Par une communication du 26 août 2015 [1], la FSMA a pris position à propos des éléments essentiels du contrat d'assurance.

Elle identifie quatre composantes (événement incertain, intérêt d'assurance, prime et prestation d'assurance) et une particularité, à savoir le caractère autonome.

1. La notion de prestation d'assurance (en espèces ou en nature) n'est pas développée. Il en va de même de la notion de prime d'assurance qui peut consister en une « rétribution ne tenant pas compte de statistiques ou de la mutualisation des risques » (p. 4 de la communication de la FSMA). Aucun exemple n'est donné par la FSMA, sans doute a-t-elle voulu viser les assurances du groupe d'activités « vie » liées à des fonds d'investissement (branche 23) ou encore les produits de capitalisation (branche 26).

2. Quant à la notion d'événement incertain, la FSMA rappelle que la loi du 19 juillet 2013 interprétative de l'article 97 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre (intégré à l'art. 160 de la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances) a mis fin à la controverse antérieure à propos de la qualification de certains contrats d'assurance vie (p. 3 de la communication de la FSMA).

La FSMA reformule l'alinéa 1er de l'article 160 dans ces termes: « l'incertitude quant au moment du décès de l'assuré et/ou au fait que l'assuré soit en vie à une date déterminée suffit donc, sans que le caractère incertain ne doive nécessairement être étendu aux chances/risques de bénéfices ou de pertes pour l'assureur et le preneur d'assurance ».

3. La définition de la notion d'assureur introduite dans la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances (art. 5, 1°) ne fait pas référence à une activité à titre professionnel ou à un usage de la technique actuarielle. Le débat ancien sur la question est à présent tranché: la qualité professionnelle de l'assureur ne fait pas partie des éléments essentiels du contrat d'assurance. La solution a le mérite de la clarté comme l'ont souligné le professeur Fontaine et J.-M. Binon [2] mais soulève diverses questions lorsqu'un transfert de risques est proposé par un non-assureur.

Pour y répondre, la FSMA rappelle que l'intérêt d'assurance - essentiel au contrat d'assurance - à savoir l'intérêt à ce que l'événement incertain ne se réalise pas, distingue le contrat d'assurance du pari mais aussi de certains contrats dérivés (entre autres, les « interest rate caps » et les « credit default swaps »).

Ces contrats dérivés sont conclus afin de couvrir le risque qu'un événement déterminé (p. ex., l'augmentation d'un taux d'intérêt) se réalise. L'intérêt à ce que l'événement incertain ne se réalise pas existe exclusivement dans le chef de l'acheteur du dérivé [3] mais n'entraîne pas que cet intérêt soit un élément essentiel du contrat dérivé; il en est simplement le motif. En effet, selon la FSMA, les obligations du vendeur sont indépendantes de la perte ou du risque de la perte pour l'acheteur et, dès lors, du fait que l'acheteur ait ou non intérêt à ce que l'événement ne se réalise pas.

Ces contrats dérivés peuvent également être conclus à des fins spéculatives sans que cela n'affecte la validité du contrat (art. 32 de la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers).

La FSMA met en avant le fait que l'intérêt d'assurance (intérêt à la non-réalisation de l'événement) est exigé dans le chef de l'assuré et ou/du bénéficiaire et non dans le chef de l'assureur (art. 5, 14°).

C'est ce caractère non réciproque de l'intérêt d'assurance qui permettrait, selon la FSMA, de ne pas qualifier de contrat d'assurance l'engagement d'une société de location de voitures consistant à offrir, sous certaines conditions, et contre rémunération, une couverture de certains risques. La FSMA constate que la société de location en qualité de propriétaire des véhicules a un intérêt à ce que l'événement incertain (vol, bris de vitre, dégâts matériels) ne se réalise pas et considère que la couverture de cet événement incertain « revient à ce que la société de location de véhicules renonce, contre rémunération, au cas où l'événement incertain vient à se réaliser, à son droit contractuel d'exiger du preneur en location que ce dernier rapporte le véhicule loué dans un bon état » pour conclure qu'« il ne s'agit pas d'un contrat d'assurance mais d'une clause d'exonération » (p. 4 de la communication de la FSMA).

Par le rapport du comité de direction de 2007 (p. 89), l'autorité de contrôle avait suggéré, dans cette hypothèse, de « mentionner expressément dans l'avenant au contrat de location que le loueur renonce à son droit de recours à l'encontre du locataire et d'éviter d'y faire figurer une terminologie spécifique à l'assurance ».

4. Prenant appui sur les travaux préparatoires de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance, la FSMA s'arrête sur une cinquième caractéristique du contrat d'assurance qui pourtant ne figure pas dans sa définition (art. 5, 14°): le caractère autonome du contrat d'assurance.

Grâce à ce critère, elle distingue le contrat d'assurance du contrat de garantie pour autant que deux conditions cumulatives soient rencontrées.

Selon la FSMA, si la couverture octroyée n'est que l'accessoire d'une opération principale non aléatoire (un contrat d'achat) et est « limitée à l'indemnisation ou à la réparation d'un préjudice (direct), créé par la survenance d'un événement dont la cause est intrinsèque à l'opération principale ou à son objet (p. ex., un mauvais fonctionnement résultant d'un défaut de matériel ou de fabrication propre à l'appareil acheté) » (p. 5 de la communication de la FSMA), l'opération ne revêt pas un caractère autonome et ne peut, par conséquent, être qualifiée de contrat d'assurance.

Tout autre est, selon la FSMA, l'hypothèse où le vendeur couvre son obligation de garantie par le biais d'un contrat d'assurance souscrit auprès d'un assureur. Ce contrat a un caractère autonome: « il n'est en effet pas l'accessoire du contrat d'achat (une opération principale non aléatoire), mais il vise à couvrir le risque de l'obligation de garantie incertaine du vendeur par une personne (l'assureur) qui n'est pas concernée par le contrat d'achat (l'opération principale non aléatoire) » (p. 5 de la communication de la FSMA). Le critère déterminant apparaît pour qualifier le contrat d' « autonome »: « il est souscrit auprès d'une personne elle-même étrangère au risque » [4]. Encore différent mais toujours autonome est le contrat d'assurance dont l'acheteur est le bénéficiaire direct et qui organise une couverture des dommages et réparations liés à l'usage du bien acquis.

On mettra en parallèle les critères proposés par la FSMA avec ceux repris par l'arrêt du 16 juillet 2015 de la Cour de justice de l'Union européenne pour préciser la notion d'« opération unique » en matière fiscale. Cet arrêt est commenté par Jean-Marc Binon dans ce numéro de la revue.

ASSURANCES
Généralités - Eléments essentiels du contrat d'assurance - Autorité des services et marchés financiers
VERZEKERINGEN
Algemeen - Essentiële bestanddelen van de verzekeringsovereenkomst - Autoriteit voor Financiële Diensten en Markten
[1] Position de la FSMA en ce qui concerne les éléments essentiels du contrat d'assurance FSMA_2015_13 du 26 août 2015.
[2] M. Fontaine et J.-M. Binon, « La loi du 4 avril 2014 relative aux assurances. Présentation générale. Dispositions relatives au droit du contrat d'assurance », R.D.C., 2014, pp. 954 et 955.
[3] H. Cousy, « Van de teerling van Julius Caesar tot de 'Credit Default Swaps'. De juridische betekenis van het aleatoire », in Liber Amicorum Ludovic De Gryse, Gent, Larcier, 2010, p. 656; F. Bogaert, « Risico's en voorwaarden voor het beheer van kredietrisico d.m.v. kredietderivaten en true sale-effectiseringen », D.B.F.-B.F.R., 2013/1, p. 34.
[4] M. Fontaine, « Assurance par un non-assureur clause de prise en charge de risques, convention de garantie et contrat d'assurance », R.G.D.C., 2013/10, p. 498. Voy. égal. le texte de l'accord préalable donné par le comité de direction de la CBFA en novembre 2007 à propos d'une garantie offerte par une société de distribution d'engins de génie civil qui permettait aux concessionnaires d'offrir, accessoirement à la vente du matériel, des garanties plus étendues que celles du fabricant (www.fsma.be).