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Introduction aux principes de la Loi relative à l'action en réparation collective et premiers commentaires critiques, R.D.C.-T.B.H., 2014/6, p. 560-590

Introduction aux principes de la Loi relative à l'action en réparation collective et premiers commentaires critiques

Florence Danis , Elodie Falla , Françoise Lefèvre  [1]

TABLE DES MATIERES

1. Introduction 1.1. Contexte

1.2. Plan de l'article

2. Les objectifs et les particularités de la Loi 2.1. Objectifs poursuivis par l'action en réparation collective 2.1.1. Faciliter l'accès des consommateurs à la justice

2.1.2. Rationalisation de l'administration de la justice

2.2. Particularités de l'action en réparation collective proposée par la Loi 2.2.1. Champ d'application limité aux litiges de consommation

2.2.2. Action attitrée

2.2.3. Compétence exclusive des tribunaux bruxellois

2.2.4. Discrétion accordée au juge sur des points essentiels

2.2.5. Remise en question de certains principes du droit commun de la responsabilité civile

3. Déroulement de la procédure: procédure en trois étapes - deux volets 3.1. Etape 1: le filtrage 3.1.1. Remarques générales

3.1.2. Remarques d'ordre procédural (i) La requête

(ii) La durée de la phase de recevabilité et le contradictoire

(iii) Autres remarques

3.2. Etape 2: l'exercice de l'action

3.3. Etape 3: l'exécution du jugement ou de l'accord homologué

4. Le représentant et le financement de l'action en réparation collective 4.1. Le choix du représentant 4.1.1. Les personnes pouvant agir en qualité de représentant

4.1.2. La sélection et le remplacement du représentant

4.2. Le financement 4.2.1. Les frais du représentant et du liquidateur

4.2.2. Les Third Party Funders

5. Formation du groupe de consommateurs 5.1. Opt-in ou opt-out?

5.2. Système retenu par la Loi

5.3. Commentaires 5.3.1. Pour le système d'opt-in applicable aux non-résidents

5.3.2. Pour le système d'opt-out en cas de dommages « diffus »

6. Exécution de l'accord homologué ou de la décision sur le fond 6.1. Mécanismes mis en place par la Loi pour veiller à l'exécution concrète de l'accord ou de la décision sur le fond 6.1.1. Les modalités d'exécution doivent être détaillées dans l'accord homologué ou la décision sur le fond

6.1.2. Délégation de la mission d'exécution à un liquidateur

6.2. Le reliquat

6.3. Quelques remarques procédurales relatives à la phase d'exécution

7. Autres remarques relatives à la procédure 7.1. L'action en réparation collective au regard du droit judiciaire

7.2. La compétence internationale

7.3. La compétence interne

7.4. Tierce opposition et interventions

7.5. Désistement

7.6. Interactions entre action en réparation collective et autres procédures 7.6.1. Interactions avec l'action pénale

7.6.2. Interactions avec les actions individuelles

7.6.3. Interactions entre plusieurs actions en réparation collective

7.7. Appel

7.8. L'autorité de chose jugée 7.8.1. Général

7.8.2. Action en cessation préalable

8. Considérations finales

RESUME
La Loi du 28 mars 2014 portant insertion d'un Titre 2 « De l'action en réparation collective » au Livre XVII « Procédures juridictionnelles particulières » du Code de droit économique et portant insertion des définitions propres au Livre XVII dans le Livre Ier du Code droit économique et la Loi du 27 mars 2014 portant insertion des dispositions réglant des matières visées à l'article 77 de la Constitution dans le Livre XVII « Procédures juridictionnelles particulières » du Code de droit économique et modifiant le Code judiciaire en vue d'attribuer aux cours et tribunaux de Bruxelles une compétence exclusive pour connaître de l'action en réparation collective visée au Livre XVII, Titre 2, du Code de droit économique ont été publiées au Moniteur belge du 29 avril 2014 et entreront en vigueur le 1er septembre 2014.
Ces législations introduisent une action tout à fait inédite dans l'arsenal judiciaire belge, permettant à un représentant d'introduire en justice une action en réparation du préjudice collectif subi par un groupe de consommateurs suite à une faute commise par une entreprise, sans que ces consommateurs aient mandaté le représentant à cet effet et sans que les membres du groupe soient nécessairement identifiés individuellement lors de l'intentement de l'action. Le représentant peut obtenir soit l'homologation d'un accord, soit un jugement de condamnation du responsable du dommage.
Après avoir exposé les objectifs et le déroulement de cette nouvelle procédure, la présente contribution évoque de façon critique certaines questions qu'elle pose au regard du droit judiciaire et du droit de la responsabilité civile.
SAMENVATTING
De wet van 28 maart 2014 tot invoeging van Titel 2 “Rechtsvordering tot collectief herstel” in Boek XVII “Bijzondere rechtsprocedures” van het Wetboek van economisch recht en houdende invoeging van de definities eigen aan Boek XVII in Boek I van het Wetboek van economisch recht en de wet van 27 maart 2014 houdende invoeging van de bepalingen die een aangelegenheid regelen als bedoeld in artikel 77 van de Grondwet in Boek XVII “Bijzondere rechtsprocedures” van het Wetboek van economisch recht en tot wijziging van het Gerechtelijk Wetboek teneinde de hoven en rechtbanken te Brussel een exclusieve bevoegdheid toe te kennen om kennis te nemen van de rechtsvordering tot collectief herstel bedoeld in Boek XVII, Titel 2 van het Wetboek van economisch recht werden gepubliceerd in het Belgisch Staatsblad van 29 april 2014 en zullen op 1 september 2014 in werking treden.
Deze wetten introduceren een volkomen nieuwe rechtsvordering in het Belgisch recht. De rechtsvordering biedt een vertegenwoordiger de mogelijkheid om een procedure in te stellen voor het herstel van een collectieve schade die geleden wordt door een groep consumenten veroorzaakt door een fout van een onderneming, zonder dat deze consumenten de vertegenwoordiger daartoe opdracht hebben gegeven en zonder dat de leden van de groep noodzakelijk individueel geïdentificeerd zijn bij de instelling van de rechtsvordering. De vertegenwoordiger kan ofwel de homologatie van een akkoord, ofwel de veroordeling van de persoon die aansprakelijk is voor de schade verkrijgen.
Na de uiteenzetting van de doelstellingen en het verloop van de nieuwe procedure, beschrijft deze bijdrage op een kritische wijze enkele vragen die rijzen in verband met het gerechtelijk recht en het burgerlijk aansprakelijkheidsrecht.
1. Introduction
1.1. Contexte

La Loi du 28 mars 2014 portant insertion d'un Titre 2 « De l'action en réparation collective » au Livre XVII « Procédures juridictionnelles particulières » du Code de droit économique et portant insertion des définitions propres au Livre XVII dans le Livre Ier du Code droit économique [2] a été publiée au Moniteur belge du 29 avril 2014 et doit entrer en vigueur le 1er septembre 2014 [3]. Pour des motifs ayant trait aux règles constitutionnelles de répartition des compétences (art. 77 et 78 Const.), l'initiative du Gouvernement a été également formalisée dans une seconde Loi, portant exclusivement sur des questions de compétence [4], entrant également en vigueur le 1er septembre 2014. Ce double texte (ci-après, la Loi) introduit une action tout à fait inédite dans l'arsenal judiciaire belge. L'idée est de permettre à un représentant d'introduire une action en justice pour le compte d'un groupe de consommateurs sans que ces derniers aient mandaté le représentant à cet effet et sans que les membres du groupe soient identifiés individuellement lors de l'intentement de l'action. Le jugement final a autorité de la chose jugée, notamment à l'égard du représentant et du défendeur, mais aussi à l'égard de tous les membres du groupe de consommateurs [5].

Cette action se distingue de l'action en cessation prévue au Titre 1er du Livre XVII du Code de droit économique notamment par son objet, dans la mesure où elle tend à obtenir la réparation d'un préjudice subi par des consommateurs trouvant son origine dans une même cause ou un même ensemble de causes, et non la cessation d'une activité illicite.

L'initiative du législateur belge n'est pas isolée. De plus en plus d'états membres se dotent d'un mécanisme de recours collectif [6]. Ces mécanismes nationaux semblent tous s'inspirer, de près ou de loin, de la Rule 23 des Federal Rules of civil procedure américaines et de ses nombreuses applications pratiques. La Rule 23 constitue le fondement légal des class actions aux états-Unis. S'ils s'en inspirent, tous les législateurs prétendent néanmoins vouloir en éviter les dérives [7].

Notons que ce phénomène est encouragé par la Commission européenne qui a fait de l'introduction dans les états membres d'une forme de recours collectif en réparation une des priorités de son action. La Commission européenne multiplie, en effet, les initiatives en la matière. En 2008, la Commission a publié un Livre blanc proposant l'introduction d'une forme d'action collective en réparation des dommages causés par les entreprises qui méconnaissent les règles du droit de la concurrence [8]. Quelques mois plus tard, elle a publié un Livre vert sur les recours collectifs en faveur des consommateurs dans lequel elle considère que, lorsque des pratiques illégales touchent un grand nombre de consommateurs, elles peuvent donner lieu à des préjudices considérables, à une concurrence déloyale et à une distorsion des marchés, tandis que les consommateurs préjudiciés répugnent à engager une action en justice pour obtenir réparation de leur dommage car ils se heurtent à de nombreux obstacles qui les en dissuadent. Ce Livre vert examine diverses solutions pour pallier ces difficultés, dont l'instauration par une mesure communautaire d'une procédure qui garantirait l'existence d'un mécanisme judiciaire de recours collectif dans les différents états membres [9]. En 2011, une enquête publique a été menée par la Commission sur le sujet [10]. A la suite de celle-ci, la Commission a publié en 2013 une Communication en vue de fixer un « Cadre horizontal commun en matière de recours collectifs » [11] et a adopté une recommandation à destination des états membres en vue de les inciter à se doter de mécanismes de recours collectifs [12]. Le Parlement européen s'intéresse également à la question [13].

1.2. Plan de l'article

Les préoccupations principales relatives à l'introduction d'un régime de recours collectif dans notre droit relèvent du droit judiciaire [14] et la coordination du régime nouvellement proposé avec le droit commun des obligations [15]. Dans le cadre de la présente contribution, nous avons choisi de revenir sur les dispositions de la Loi qui nous paraissent susceptibles de poser les problèmes pratiques ou d'interprétation les plus significatifs. Nous avons dès lors choisi d'évoquer: les objectifs poursuivis par l'action en réparation collective et les particularités de la procédure mise en place par la Loi (point 2.); le déroulement de la procédure (point 3.); le choix du représentant et le financement de l'action en réparation collective (point 4.); la formation du groupe de consommateurs (point 5.); l'exécution de l'accord homologué ou du jugement au fond au terme de la procédure en réparation collective (point 6.); et enfin diverses questions procédurales soulevées par la Loi (point 7.). Nul doute que la Loi et sa mise en oeuvre poseront un grand nombre de questions additionnelles.

2. Les objectifs et les particularités de la Loi
2.1. Objectifs poursuivis par l'action en réparation collective
2.1.1. Faciliter l'accès des consommateurs à la justice

La procédure de réparation collective est présentée dans la Loi comme un moyen de favoriser l'accès à la justice pour les consommateurs en regroupant le traitement de leurs réclamations [16]. La Loi vise principalement à faciliter l'accessibilité des réclamations modestes au système judiciaire [17]. L'idée est de permettre la réparation de dommages « diffus », lesquels sont traditionnellement définis comme des dommages peu importants, supportés par les demandeurs, mais dont l'incidence réduite décourage en pratique l'introduction d'actions en réparation individuelles [18].

Ainsi, en insérant ce type de procédure dans le droit belge, le législateur vise à permettre la réparation de dommages qui ne font, dans la pratique, pas l'objet de recours selon les procédures ordinaires parce que les victimes de ces dommages répugnent à s'investir dans un recours souvent long, coûteux, incertain ou moralement pénible à vivre. Le renforcement de l'accès à la justice se réaliserait par le biais d'une levée des obstacles (financiers [19] et psychologiques [20]) dissuadant les personnes lésées d'introduire une action individuelle. Le procédé de collectivisation des recours individuels permettrait de concentrer les coûts de la justice dans une seule action. L'allègement des coûts devrait avoir pour effet d'abaisser le seuil à partir duquel il devient profitable de présenter une réclamation au tribunal [21]. Un tel mécanisme procédural viserait donc à encourager l'accès au tribunal à de nombreux consommateurs préjudiciés dans des domaines où des entreprises peu scrupuleuses pourraient compter sur leur inertie.

L'exposé des motifs laisse entrevoir que cette première fonction majeure qui consiste à améliorer l'accès à la justice des consommateurs peut s'accompagner d'un autre effet non moins capital, celui de la contribution à l'application des lois et des contrats (et partant à l'établissement d'une concurrence saine sur le marché [22]) dans des situations où les consommateurs n'auraient rationnellement pas intérêt à supporter le coût d'un recours individuel. Une procédure de réparation collective permettrait ainsi de lutter contre le fait que des entreprises conservent des gains illicitement perçus et d'assurer le respect de droits subjectifs [23]. L'idée est qu'en accordant une compensation aux membres du groupe, un message serait nécessairement envoyé à l'ensemble de l'industrie concernée. Le jugement final prononcé au terme d'une procédure de réparation collective, s'il est rendu à l'avantage des membres du groupe, constituerait pour le défendeur condamné une menace pour l'avenir et inciterait les autres contrevenants (potentiels) à faire preuve de plus de vigilance dans leurs comportements [24].

Ces intentions exprimées par le législateur interpellent quant à la fonction du droit civil. Même si le législateur tente de justifier le caractère purement compensatoire de la procédure par l'exclusion des dommages punitifs [25], il est manifeste que la Loi poursuit également un aspect dissuasif ou même sanctionnateur. Nous pouvons nous interroger sur l'utilisation d'une procédure de droit civil à une telle fin. L'influence de la Commission européenne a été décisive en cette matière. La Commission européenne a depuis longtemps apporté son soutien actif à l'indemnisation des victimes de cartel par exemple, car elle estime que, malgré les sanctions particulièrement lourdes qu'elle inflige et qui devraient avoir un effet dissuasif optimal, les entreprises devraient se voir condamnées à des dommages et intérêts importants, puisque malgré les sanctions, des infractions au droit de la concurrence continuent d'être commises. Le raisonnement paraît toutefois manquer de justesse. Il est bien connu que l'augmentation des sanctions pénales n'a pas d'effet dissuasif effectif, seule l'acceptation sociale de la règle et de son bien-fondé permettant de réduire significativement le nombre des infractions, en tout cas pour les infractions graves. Les états-Unis en sont un excellent exemple: les prisons regorgent de condamnés à mort mais la tolérance zéro aux infractions mineures a renversé la situation sécuritaire new yorkaise.

En ce qui concerne les dommages et intérêts punitifs, ils ont toujours été considérés dans notre droit comme contraires à l'ordre public, et il aurait été difficile de justifier une modification de cette règle fondamentale en l'espèce, surtout s'il s'agit de protéger des dommages « diffus ».

2.1.2. Rationalisation de l'administration de la justice

L'amélioration de l'accès à la justice par l'élimination des barrières économiques et la réduction de certains autres obstacles psychologiques est sans aucun doute la fonction la plus importante attribuée au recours collectif. La Loi ajoute à cet objectif celui de la rationalisation de l'administration de la justice [26]. L'idée du législateur est que la procédure de réparation collective représenterait une économie de temps et qu'elle accélèrerait le processus judiciaire, dans la mesure où elle contribuerait à alléger le fardeau des tribunaux en ne les saisissant que d'une seule action là où une multitude d'actions individuelles, dont l'objet et la cause sont identiques ou similaires, auraient dû être exercées. A côté de cette économie de ressources financières, la procédure de réparation collective aurait également pour but d'assurer la sécurité juridique en prévenant l'apparition de décisions contradictoires résultant de procès successifs [27]. Ainsi, en permettant d'éviter la multiplication d'actions individuelles dirigées par différents demandeurs à l'encontre d'adversaires identiques, la procédure de réparation collective réaliserait une économie de coût dans l'administration de la justice et préviendrait le risque de contradiction entre les décisions rendues, assurant par là une plus grande cohérence dans la solution des litiges [28].

Il est ici aussi permis de s'interroger sur la motivation liée à l'instauration d'une plus grande cohérence dans la solution des litiges. Même si cet objectif paraît louable en soi, pourquoi devrait-il sous-tendre cette législation aux enjeux économiques individuels parfois limités, alors que nul ne remet en cause, dans notre système de droit civil, le fait que les précédents ne sont pas obligatoires pour les juridictions inférieures? Si cet objectif devait devenir essentiel, il s'imposerait alors de repenser tout le système juridique actuel, afin d'en faire bénéficier les victimes de tous dommages, de quelque nature qu'ils soient.

La fonction réductrice de la procédure de réparation collective à l'égard des coûts et du temps consacrés aux litiges ne semble pas fondée dans les procédures collectives qui portent exclusivement sur la réparation de dommages « diffus ». Dans de telles situations, c'est plutôt l'effet inverse qui risque de se produire dans la mesure où, loin d'éviter le traitement répétitif d'un grand nombre d'actions, la Loi encourage l'apparition de nouveaux recours, potentiellement lents et encombrants. En outre, en raison de sa complexité procédurale, la procédure mise en place par la Loi est susceptible d'imposer un fardeau plus lourd encore à l'appareil judiciaire que celui d'une simple augmentation du nombre de poursuites.

2.2. Particularités de l'action en réparation collective proposée par la Loi
2.2.1. Champ d'application limité aux litiges de consommation

La Loi met en place une action qui vise à offrir une réparation aux consommateurs qui ont subi un préjudice collectif en raison de la violation par une entreprise de l'une de ses obligations contractuelles ou de l'un des règlements européens ou de l'une des lois (ou arrêtés d'exécution) limitativement énumérés par la Loi [29].

Sont notamment visés [30] le droit des pratiques du marché et de la protection du consommateur [31], le droit de la concurrence [32], le droit la propriété intellectuelle [33], la responsabilité du fait des produits [34], le droit de l'économie électronique [35], les services de paiement et de crédit [36], certaines dispositions de la Loi du 2 août 2002 sur les services financiers, la Loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, la Loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée, la Loi « Breyne [37] », ou encore les règles relatives à l'organisation du marché du gaz et de l'électricité [38]. En limitant le champ d'application de l'action aux litiges de consommation, la Loi belge s'écarte de la recommandation de la Commission européenne de 2013 qui encourageait l'adoption d'une action « universelle » [39].

La Loi déroge également aux suggestions de la Commission en limitant le champ d'application de l'action aux relations B2C [40]. Les consommateurs visés par la Loi sont en effet ceux définis par l'article I.1, 2°, du Code de droit économique, à savoir « toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ». La Loi n'ouvre dès lors pas la procédure aux petites et moyennes entreprises qui auraient pu avoir subi un dommage de masse à la suite d'une violation du droit de la concurrence (follow-on actions), par exemple.

Tous les dommages réparables en droit commun de la responsabilité civile contractuelle pourront faire l'objet d'une réparation collective: dommages matériels, corporels et moraux, à la condition qu'ils répondent à la définition du « préjudice collectif », défini par la Loi comme étant « l'ensemble des dommages individuels ayant une cause commune subis par les membres du groupe [41] ». L'exposé des motifs précise que cette définition « est susceptible d'englober plusieurs dommages distincts quant à leur cause, leur étendue et leur nature. L'objectif est de permettre le traitement, dans la même procédure, de questions de fait ou de droit liées [42] ». L'étendue du préjudice subi ne doit donc pas être identique pour chacun des membres du groupe - des sous-catégories pouvant le cas échéant être formées pour déterminer la réparation [43] - et la nature de leur(s) préjudice(s) peut différer. Soulignons que cette notion de « sous-catégories » n'est pas explicitée avec beaucoup de détails dans les travaux préparatoires de la Loi.

Concernant la condition de recevabilité imposant que la cause de l'action en réparation collective constitue une « violation potentielle » par l'entreprise d'une de ses obligations contractuelles ou d'une des dispositions légales visées à l'article XVII.37, soulignons que le texte se réfère à une violation potentielle. Cela signifie-t-il simplement qu'une violation contractuelle ou légale imminente peut fonder une action en réparation? Rien dans le texte de la Loi ou dans l'exposé des motifs ne permet d'accréditer cette interprétation. L'adjectif « potentiel » vise simplement à notre avis le fait que la violation ne doit pas encore être pleinement établie et prouvée par le requérant au stade de la recevabilité, une telle discussion et une telle preuve relevant en effet des débats au fond. Le requérant peut-il néanmoins se contenter d'invoquer de façon formelle et abstraite l'existence d'une violation contractuelle ou légale pour satisfaire à l'exigence de l'article XVII.36, 1°? Nous ne le croyons pas. Si la phase de la recevabilité doit jouer un rôle de filtrage et protéger un minimum les défendeurs potentiels contre des recours abusifs [44], le requérant doit impérativement être invité à établir, en fait et en droit, une apparence crédible de violation contractuelle ou légale.

Les travaux préparatoires confirment très clairement que la liste des législations visées à l'article XVII.37, dont la violation peut fonder une action en réparation collective, est exhaustive [45].

Eu égard à la limitation de l'action en réparation collective aux litiges de consommation, l'exposé des motifs précise en outre que les lois visées à l'article XVII.37 doivent être appliquées « dans la mesure où elles contribuent à la protection du consommateur [46] ». Sur cette base, l'exposé des motifs conclut, par exemple, que la procédure en réparation collective ne pourrait pas bénéficier à un groupe composé d'actionnaires qui revendiqueraient la réparation d'un dommage à leur société, en cette qualité [47].

Dans la mesure où elles ne peuvent se fonder sur l'une des législations visées à l'article XVII.37, de nombreuses actions quasi-délictuelles se voient dès lors exclues du bénéfice de l'action en réparation collective, telle par exemple une action fondée sur des faits de pollution. Notons qu'à l'occasion de l'examen du projet de Loi, une discussion particulièrement soutenue s'est tenue au sein de la commission de la Chambre compétente, relativement aux hypothèses dans lesquelles une faute médicale peut fonder une action en réparation collective [48].

2.2.2. Action attitrée

L'action en réparation collective proposée par la Loi est une action attitrée. Elle peut uniquement être introduite par une personne qui revêt les qualités énumérées par la Loi, indépendamment de son intérêt à agir [49]. Cette personne, agissant au nom du groupe, est dénommée « représentant ».

Nous abordons plus en détail la désignation du représentant au point 4.1., infra.

2.2.3. Compétence exclusive des tribunaux bruxellois

La Loi prévoit une centralisation des actions en réparation collective devant le tribunal de première instance (et par dérogation devant le tribunal de commerce) de Bruxelles [50], au motif que ces juridictions « centralisent l'expertise en la matière » et développeront ainsi « une jurisprudence uniforme pour l'ensemble du pays [51] ». L'exposé des motifs se réfère également à « la nature même de l'action » dans la mesure où « l'action bénéficiera à un nombre élevé de consommateurs potentiellement répartis à travers plusieurs arrondissements judiciaires sur l'ensemble du territoire du Royaume, et même au-delà »; dans ces conditions, « le choix d'une juridiction située dans l'arrondissement judiciaire de la capitale semble être le plus adéquat [52] ». Nous y reviendrons au point 7.3., infra.

2.2.4. Discrétion accordée au juge sur des points essentiels

La Loi accorde un rôle important au juge [53] et lui délègue notamment le pouvoir de trancher deux questions essentielles et délicates: non seulement la recevabilité de l'action en réparation collective mais aussi, au cas où une telle action est jugée recevable, la composition du groupe [54]. Selon la Loi, il appartient au juge de choisir le système d'option d'inclusion ou opt-in (seuls les consommateurs qui se sont manifestés bénéficieront du résultat de l'action) et celui de l'option d'exclusion ou opt-out (tous les consommateurs seront liés par le résultat de l'action sauf s'ils ont déclaré vouloir sortir du groupe). La Loi rend, toutefois, le système d'option d'inclusion obligatoire pour (i) les préjudices collectifs corporels ou moraux ainsi que pour (ii) les consommateurs ne résidant pas habituellement en Belgique. Nous y reviendrons au point 5., infra.

Ce large pouvoir laissé au juge paraît contraire à la préoccupation affichée pour la sécurité et la prévisibilité juridiques. En effet, des pans essentiels de la procédure sont laissés à l'appréciation du juge, sans critère légal de référence. La prévisibilité annoncée ne pourra donc être espérée qu'à l'issue d'une construction jurisprudentielle qui risque de prendre un certain temps.

2.2.5. Remise en question de certains principes du droit commun de la responsabilité civile

En droit commun de la responsabilité civile, pour obtenir réparation, la victime doit démontrer l'existence d'un dommage certain et personnel présentant un lien de causalité avec le fait générateur du dommage. La réparation du dommage est en principe intégrale et non punitive. La Loi prétend ne pas apporter de dérogation au droit commun de la responsabilité civile [55].

Certaines dispositions de la Loi semblent pourtant introduire des modifications au droit commun de la responsabilité civile. Sans entrer dans les détails, nous pouvons citer les situations suivantes.

Premièrement, si les parties ou le juge décident de s'engager dans la voie de l'évaluation globale [56], l'on quitte inévitablement le terrain classique de la responsabilité civile. En permettant l'évaluation globale, la Loi s'écarte de la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle « le juge a l'obligation de déterminer le dommage de manière précise, le cas échéant par des calculs appropriés, sauf s'il constate qu'il n'est pas possible de procéder à une telle évaluation, et pour autant qu'il motive son opinion à ce sujet, - auquel cas, il peut procéder à une évaluation ex aequo et bono [57] » [58]. La conformité du recours collectif au droit commun de la responsabilité civile semble d'autant plus difficile à assurer lorsque le juge (ou les parties dans un accord homologué) retient le système d'opt-out [59]. Le juge ne peut pas procéder à un examen des dommages précis allégués par le représentant dans des situations où l'identité et le nombre de membres du groupe peuvent être inconnus au stade de l'évaluation. Nous rejoignons P. Van Ommeslaghe lorsqu'il se demande « comment, par exemple, déterminer le dommage résultant d'une perte totale ou partielle de revenus pendant la durée d'une survie lucrative probable subie par une personne inconnue [60] ».

Deuxièmement, il faut admettre que les préjudices individuels des membres du groupe ne soient pas réparés intégralement lorsque l'indemnité fixée dans la décision de condamnation ou l'accord homologué ne permet pas de désintéresser tous les membres du groupe qui réclament leur part de l'indemnité [61]. Dans ce cas, la distribution de l'indemnité globale réalisée par le liquidateur évoque immanquablement les hypothèses de concours des procédures collectives de liquidation que connaît le droit belge [62].

Ensuite, les solutions proposées par l'exposé des motifs lorsque le juge doit statuer sur l'affectation du reliquat en fin de procédure [63] paraissent toutes remettre en cause le droit commun de la responsabilité civile. Qu'elles prennent la forme de « l'octroi d'une réduction systématique de la facture pour tous les clients pour une durée déterminée », de « la diffusion d'un bon de réduction » ou encore de la « distribution gratuite d'un produit », ces affectations ont toutes en commun d'enrichir sans cause les membres qui se sont déjà manifestés et qui ont reçu leur dû. De telles affectations paraissent ainsi déroger à l'application stricte du principe de la réparation intégrale et participer d'une intention d'instaurer une véritable sanction civile.

Il nous paraît qu'en pareil cas, les montants non réclamés ne peuvent revenir qu'au défendeur. En effet, il se conçoit difficilement que le défendeur se voit privé du reliquat positif de la somme qu'il a été condamné à payer et que les demandeurs ne se donnent pas la peine de se faire payer. En décider autrement violerait fondamentalement le caractère indemnitaire affiché de cette procédure.

Finalement, nous revenons sur une formulation étonnante que nous retrouvons dans la version aussi bien néerlandaise que française de l'exposé des motifs. A la page 15 de l'exposé des motifs, nous pouvons lire que « la réparation peut avoir lieu conformément au droit commun, en nature ou par équivalent [64] ». Formulé ainsi, l'exposé des motifs ouvre la porte aux dérogations au droit commun puisque la réparation peut mais ne doit pas avoir lieu conformément au droit commun. Erreur de frappe? Quoi qu'il en soit, cette formulation semble être en contradiction avec la volonté du législateur qui consiste à ne pas vouloir déroger au droit commun de la responsabilité civile [65].

De manière générale, l'introduction de dérogations au droit commun de la responsabilité civile paraît très délicate dans la mesure où elles pourraient avoir pour effet de traiter différemment la victime (et l'auteur) d'un préjudice subi par une seule personne (ou un petit nombre de personnes) et la victime (et l'auteur) d'un préjudice subi par un grand nombre de personnes. De telles différences de traitement ne sont conformes à la Constitution que si elles reposent sur un critère objectif et à la condition que ce critère soit pertinent au regard du but poursuivi par le législateur et proportionné à celui-ci [66].

3. Déroulement de la procédure: procédure en trois étapes - deux volets

La procédure proposée par la Loi se déroule en trois grandes étapes distinctes: la phase de filtrage, l'exercice de l'action et la phase d'exécution du jugement ou de l'accord homologué.

3.1. Etape 1: le filtrage
3.1.1. Remarques générales

Comme indiqué au point 2.2.4., supra, la Loi confère au juge un pouvoir important dès la première étape de la procédure. L'avenir du recours projeté est entre ses mains.

La phase de recevabilité poursuit essentiellement deux objectifs [67].

Premièrement, elle est une garantie fondamentale de la qualité des recours exercés. Elle protège le défendeur potentiel contre les recours abusifs [68], d'une part, et les membres absents contre des représentants peu soucieux de la défense de leurs intérêts, d'autre part [69]. Outre les conditions de recevabilité prévues par le Code judiciaire pour l'introduction d'une requête, le juge doit vérifier que le représentant du groupe satisfait aux conditions légales, qu'il peut mener la procédure de façon adéquate [70] et que l'action en réparation collective semble plus « efficiente » qu'une action de droit commun [71]. Deuxièmement, la phase de recevabilité vise à déterminer les grandes lignes du litige. Dans sa décision de recevabilité, le juge doit notamment décrire de façon détaillée le dommage et le groupe de personnes lésées, déterminer le système d'option applicable à la composition du groupe, fixer les délais de l'option et son mode, et les modalités de publicité de la décision d'autorisation [72].

La décision de recevabilité doit être intégralement publiée au Moniteur belge et sur le site Internet du SPF Economie [73]. Le juge peut, en outre, ordonner des mesures additionnelles de publicité. Le législateur favorise une diffusion large de la décision de la recevabilité afin d'assurer aux consommateurs potentiellement lésés un exercice de leur droit d'option en pleine connaissance de cause [74].

Dans la phase qui suit la décision de recevabilité, le juge doit inviter les parties à tenter de résoudre leur différend par la voie amiable [75]. Si les négociations aboutissent et que l'accord de réparation collective répond aux exigences de la Loi, il est homologué et rendu public [76]. Ce n'est qu'en cas d'échec de ces négociations obligatoires que s'ouvre la voie contentieuse et que le juge doit se prononcer sur le fond de l'affaire [77].

Notons que la Loi permet également de rendre contraignant un accord passé entre un représentant agissant pour le compte d'un groupe de consommateurs et le débiteur de la réparation en dehors de toute procédure contentieuse (c'est-à-dire avant l'étape de la recevabilité) [78]. Cette procédure doit être initiée conjointement par les parties à l'accord [79]. Le juge doit décider d'homologuer ou non l'accord après avoir vérifié que celui-ci répond aux conditions de recevabilité de l'action en réparation collective [80] et, similairement à ce qui est prévu lorsque l'accord est négocié lors de la phase de négociation obligatoire, après s'être assuré qu'il est complet et répond au prescrit de la Loi [81].

La décision d'homologation a les effets d'un jugement d'accord au sens de l'article 1043 du Code judiciaire, et rend l'accord contraignant pour et à l'égard de tous les membres du groupe, celui-ci étant définitivement constitué à l'expiration du délai d'option [82].

Notons finalement qu'afin de favoriser la voie amiable, la Loi prévoit que ni la conclusion d'un accord en réparation collective, ni son homologation, n'emportent de reconnaissance de responsabilité dans le chef du débiteur de la réparation [83].

3.1.2. Remarques d'ordre procédural

La Loi contient très peu d'indications relatives au déroulement de la phase absolument déterminante de la recevabilité. En outre, la terminologie utilisée par la Loi pèche souvent par défaut de précision. Nous relevons ici, de façon non exhaustive, quelques questions ou difficultés posées par le texte de la Loi, relativement à la phase de recevabilité.

(i) La requête

L'action en réparation collective est introduite par requête et doit contenir les éléments visés à l'article XVII.42, § 1er. Si cette requête est incomplète, le greffe peut « inviter » le requérant à compléter celle-ci dans les huit jours. La Loi ne précise nullement si l'évaluation du caractère complet de la requête est la tâche du juge ou du greffier, et encore moins quelle forme l'« invitation » à compléter la requête doit revêtir. Un pli judiciaire? Un pli simple? Le texte ne précise pas non plus si une requête complétée déposée dans le délai de huit jours à l'invitation du greffe peut, le cas échéant, faire l'objet d'une nouvelle invitation au requérant à compléter sa requête. Il semble que cela ne soit pas possible. L'article XVII.42, § 3, alinéa 3 prévoit en effet qu'« une requête non complétée ou complétée de manière incomplète ou tardive est réputée non introduite », sans évoquer une éventuelle seconde correction. Le requérant dispose donc d'une seule opportunité pour compléter sa requête. A défaut de compléter celle-ci valablement, le requérant sera tenu de déposer une nouvelle requête et d'entamer une nouvelle procédure ab initio.

(ii) La durée de la phase de recevabilité et le contradictoire

L'article XVII.43, § 1er, dispose que le juge statue sur la recevabilité de l'action en réparation collective dans les deux mois qui suivent le dépôt de la requête complète ou complétée à l'invitation du greffe. La Loi s'abstient de préciser la chronologie et le déroulement des étapes procédurales au cours de ce délai de deux mois, ainsi que l'incidence éventuelle d'une « invitation » à compléter la requête introductive sur ce délai de deux mois.

Dans quel délai le greffe doit-il, le cas échéant, inviter le requérant à compléter sa requête? Cette invitation devrait à tout le moins intervenir endéans le délai de décision de deux mois précité, sauf à vider l'article XVII.43, § 1er de tout sens. En outre, si une telle invitation est lancée, comment le délai de huit jours doit-il être calculé? L'article 53bis du Code judiciaire doit-il s'appliquer [84]? En cas d'invitation à compléter la requête et de dépôt d'une requête complétée dans les huit jours, le délai initial de deux mois est interrompu et recommence à courir à compter du dépôt de la requête complétée, comme l'indique la formulation « dans les deux mois qui suivent le dépôt de la requête complète ou complétée [85] » figurant à l'article XVII.43.

La Loi n'organise pas le débat contradictoire au stade de la recevabilité: une audience va-t-elle être fixée pour débattre de la recevabilité? Des conclusions doivent-elles ou peuvent-elles être échangées?

Bien que le texte ne le précise pas, il semble peu contestable qu'à la suite du dépôt d'une requête contradictoire telle la requête en réparation collective, les parties doivent être convoquées à une audience d'introduction [86].

Concernant un éventuel échange de conclusions, les travaux préparatoires semblent accréditer le fait que des écrits puissent être échangés par les parties sur la question de la recevabilité. Ainsi, concernant le système d'option à appliquer, l'exposé des motifs prévoit que « les parties motiveront leur préférence pour un système ou l'autre dans la requête en réparation collective pour ce qui est du représentant et dans sa réponse pour ce qui est du défendeur [87] » et que pour faire son choix sur le système d'option choisi, « le juge s'appuiera sur les faits et motifs invoqués par les parties [88] ».

Dans la mesure où la Loi ne déroge pas aux dispositions du Code judiciaire relatives à la mise en état des procédures, les parties pourront établir un calendrier d'échange de conclusions, dans le respect strict des droits de la défense, d'autant plus que les questions en jeu dans la phase de recevabilité sont essentielles.

En admettant même que les échanges entre parties se limitent à un strict minimum (p. ex., la requête du requérant et une réponse de défendeur), ce délai de deux mois nous semble particulièrement bref pour valablement examiner, débattre et trancher les différentes conditions de recevabilité. En effet, durant ce court laps de temps, le défendeur devrait prendre position, et le juge se prononcer sur:

    • l'existence d'une violation potentielle par l'entreprise d'une obligation contractuelle ou d'une disposition légale;
    • la qualification et le caractère adéquat du représentant;
    • le caractère efficient d'une action en réparation collective par rapport à des actions individuelles. Ce dernier point impose notamment d'envisager la taille potentielle du groupe et l'existence de dommages individualisables et suffisamment liés, ainsi que l'ensemble des autres éléments qui tendraient à établir que les spécificités individuelles rendent un traitement collectif de la réparation du dommage peu souhaitable (prescription, désistement, autorité de chose jugée, etc.);
    • la description du préjudice collectif; ou encore
    • le système d'option (opt-in ou opt-out) et les modalités d'exercice de cette option.

    En d'autres termes, à ce stade, des questions tout à fait essentielles et anticipant déjà de nombreux problèmes de fond, largement tributaires d'éléments factuels et ayant potentiellement trait à plusieurs milliers de personnes doivent être examinées et débattues. Nous ne craignons pas l'exagération en qualifiant ce délai de deux mois de surréaliste…

    Selon l'arrêt du 30 juin 2000 de la Cour de cassation [89], s'agissant d'un délai qui n'est pas expressément prévu à peine de nullité, le non-respect du délai de deux mois pour statuer sur la recevabilité de l'action en réparation collective peut uniquement être sanctionné par le dessaisissement du juge à la requête du procureur général (art. 652 C. jud.) et n'entraîne pas l'illégalité de la décision rendue postérieurement à l'expiration de ce délai.

    Il est donc probable que les exigences pratiques du débat contradictoire auront raison du délai de deux mois prévu par l'article XVII.43, § 1er.

    (iii) Autres remarques

    En guise de conclusion sur la phase de recevabilité, nous nous interrogeons sur le sort à réserver à l'action en réparation collective déclarée recevable par le juge, mais dont le juge constate en cours de procédure que les conditions de recevabilité ne sont en réalité pas remplies. Tel pourrait par exemple être le cas si le défendeur établit à l'occasion de la phase contentieuse (au fond) que l'action en réparation collective n'est en réalité pas plus « efficiente » que des actions individuelles de droit commun: dommages ne trouvant pas leur origine dans une cause commune, trop grande diversité de questions de fait et de droit ne permettant pas de les traiter dans une même procédure, etc. [90].

    La Loi ne permet pas au juge de revenir sur la décision de recevabilité à la lumière de nouveaux éléments ayant surgi en cours de procédure. Dans de telles circonstances, seul le défendeur pourrait remédier au constat que les conditions de recevabilité ne sont pas réunies, en interjetant appel de la décision de recevabilité. Il ne doit, pour ce faire, pas nécessairement attendre la décision au fond (voy. point 7.7., infra).

    3.2. Etape 2: l'exercice de l'action

    La procédure contentieuse se déroule conformément aux règles applicables en matière de litiges individuels. C'est au cours de cette phase que sont discutées les questions de faute ou de violation des dispositions listées, du ou des dommages et du lien causal.

    Notons que, même après l'échec des négociations obligatoires et le lancement de la phase contentieuse, les parties peuvent encore opter pour une résolution amiable du litige. Il est, en effet, expressément prévu dans la Loi, qu'à tout moment, les parties peuvent conclure un accord de réparation collective [91]. En cas d'accord, la procédure se poursuit selon les règles de la procédure d'homologation de l'accord collectif décrite au point 3.1.1., supra [92].

    La décision du juge sur le fond doit être publiée au Moniteur belge et sur le site Internet du SPF Economie [93]. Le juge peut, en outre, prévoir des mesures de publicité additionnelles afin d'assurer une information effective des consommateurs représentés pour faire valoir leur droit à la réparation individuelle [94].

    3.3. Etape 3: l'exécution du jugement ou de l'accord homologué

    L'accord homologué ou la décision sur le fond doivent contenir les modalités et le contenu de la réparation [95]. Un liquidateur doit être désigné pour répartir l'indemnité [96] (voy. point 6., infra).

    Lorsque la réparation a lieu par équivalent et si le système d'opt-out est retenu, la Loi prévoit que les membres du groupe doivent faire une démarche positive pour obtenir leur part dans le montant alloué à titre de dommages et intérêts [97]. Les membres doivent s'adresser au greffe, endéans le délai et suivant les modalités déterminés par le juge, pour obtenir réparation. Le liquidateur dresse ensuite une liste provisoire des membres qui souhaitent obtenir réparation sur la base des données que le greffe lui communique. Dans cette liste, le liquidateur peut contester l'inscription d'un membre s'il considère qu'il ne satisfait pas aux conditions requises pour être membre du groupe. Une fois cette liste provisoire établie, elle doit être transmise au juge, au défendeur et au représentant du groupe. Les personnes dont l'inscription aura été contestée dans la liste provisoire doivent également être informées. Le représentant du groupe et le défendeur peuvent contester l'inscription de certains membres sur la liste provisoire et déposer des conclusions sur ce point. Cette phase se clôture par une audience devant le juge en présence de toutes les parties et à l'issue de laquelle une liste définitive des membres ayant droit à réparation est établie [98]. Le liquidateur doit finalement effectuer la répartition des dommages et intérêts sur la base de cette liste définitive.

    Le processus mis en place par la Loi ouvre uniquement la voie à la distribution individuelle.

    Le juge reste saisi jusqu'à l'« exécution intégrale de la réparation prévue par l'accord homologué ou la décision sur le fond » au bénéfice de tous les membres du groupe [99]. Le liquidateur doit, à cet égard, transmettre au juge un rapport trimestriel détaillé relatif à l'exécution de sa mission [100]. Il transmet pour approbation un rapport final d'exécution au juge lorsqu'il estime que l'accord homologué ou la décision du juge sur le fond est entièrement exécuté [101]. Se pose, à ce stade, la question de l'attribution de l'éventuel reliquat non réclamé. Nous reviendrons sur cette question au point 6.2., infra.

    4. Le représentant et le financement de l'action en réparation collective
    4.1. Le choix du représentant
    4.1.1. Les personnes pouvant agir en qualité de représentant

    L'article XVII.39 énumère de façon exhaustive les personnes autorisées à agir en qualité de représentant. Il s'agit en substance de: 1° une association de défense des intérêts des consommateurs ayant la personnalité juridique et siégeant au Conseil de la Consommation ou agréée par le ministre; 2° une association ayant la personnalité juridique depuis trois ans au moins, agréée par le ministre, dont l'objet social est en relation directe avec le préjudice collectif subi par le groupe et qui ne poursuit pas durablement de but économique; et 3° uniquement dans le cadre de l'homologation d'un accord de réparation collective, le service de médiation pour le consommateur qui doit être créé par le Livre XVI du Code de droit économique [102].

    Les personnes physiques ne peuvent en aucune façon être désignées comme représentant, qu'elles aient elles-mêmes subi le préjudice collectif ou non [103]. Conformément à la tradition européenne sur ce point, la Loi exclut que les sociétés commerciales, les syndicats ou les cabinets d'avocats puissent revêtir la qualité de représentant [104]. En limitant la qualité de représentant à certaines catégories de requérants sélectionnés sur la base de l'intérêt ou de l'objet social particulier qu'ils défendent et représentent, la Loi entend éviter les recours abusifs ou téméraires [105].

    Dans l'attente d'éventuels agréments d'associations par le ministre de l'Economie, seules les associations représentées au Conseil de la Consommation peuvent actuellement prétendre (en Belgique) agir en qualité de représentant. D'après l'article 3, § 1er, de l'arrêté royal du 20 février 1964 instituant un Conseil de la Consommation, ledit Conseil comporte treize membres représentant les organisations de consommateurs [106]. Si l'on retient, parmi ces treize membres, ceux possédant la personnalité juridique [107] et n'ayant pas donné leur démission [108], les associations suivantes constitueraient la liste des acteurs belges susceptibles d'agir en qualité de représentant: Gezinsbond, Kristelijke Arbeiders Vrouwenbeweging (FEMMA), Kristelijke Werknemersbeweging (KWB), la Ligue des Familles, Test Achats, Verbraucherschutzzentrale et Verbruikersateljee. La Loi ne précise pas si l'objectif de défense des intérêts des consommateurs qui doit être poursuivi par ces associations est automatiquement déduit de leur présence au Conseil de la Consommation - au titre de « membre représentant les consommateurs » - ou s'il convient, en outre, de vérifier si la défense des consommateurs est expressément visée dans l'objet social de chacune de ces associations. L'article XVII.39, 1°, de la Loi ne comportant aucune référence à l'objet social (contrairement à l'art. XVII.39, 2°), l'exigence d'une telle mention dans l'objet social semble difficile à imposer et conduirait à créer une condition que la Loi ne prévoit pas.

    Il reste que, compte tenu de son objet social mais surtout des moyens dont elle dispose a priori, Test Achats semble être l'association siégeant au Conseil de la Consommation la plus susceptible d'agir en qualité de représentant. A noter que la simple référence à « Test Achats » établie rue de Hollande 13 à 1060 Saint-Gilles, telle qu'elle figure sur le site du SPF Economie identifiant les membres du Conseil de la Consommation, ne permet pas d'identifier l'entité juridique qui aurait qualité pour agir. En effet, comme le confirme le site de Test Achats [109], cette association est structurée autour de trois entités juridiques distinctes, ayant toutes trois le même siège social: une société coopérative à responsabilité limitée (Association des Consommateurs Test Achats SCRL, n° d'entreprise 0425.989.356), une première ASBL (Association Belge des Consommateurs Test-Achats ASBL, n° d'entreprise 0407.703.668) et une seconde ASBL (Organisation Indépendante pour la Protection du Consommateur ASBL, n° d'entreprise 0475.031.566). Compte tenu de la référence constante dans la Loi et dans les travaux préparatoires à la notion d'« association » (plutôt qu'aux « entités » ou « personnes ») et compte tenu du fait que la Loi entend éviter que le requérant agisse à des fins lucratives [110], la SCRL précitée semble ne pas satisfaire aux prescrits de la Loi pour agir en qualité de représentant. L'arrêté ministériel du 15 mars 2006 portant nomination du président, des vice-présidents et des membres du Conseil de la Consommation comportant à plusieurs reprises la référence « Test-Achats - Association belge des Consommateurs », la première ASBL visée ci-dessous (n° d'entreprise 0407.703.668) semble donc être l'entité juridique correspondant à « Test-Achats » en tant qu'association siégeant au Conseil de la Consommation et, plus précisément, en tant que représentant potentiel sur pied de l'article XVII.39, 1°, de la Loi.

    Suivant la recommandation de la Commission européenne [111], les associations de droit étranger auquel un état membre a reconnu la qualité pour agir en représentation devraient être autorisées à saisir la juridiction nationale compétente, en ce compris si cette juridiction relève d'un autre état membre. Cette position se justifie notamment par les exigences d'égalité de traitement et d'absence de discrimination fondée sur la nationalité qu'impose le droit européen [112].

    4.1.2. La sélection et le remplacement du représentant

    Pour prétendre à la qualité de représentant, et ce même s'il satisfait aux exigences de l'article XVII.39, le requérant doit en outre être jugé « adéquat » par le juge [113]. Cette condition vise premièrement à assurer la représentation efficace des membres du groupe, dans la mesure où les membres du groupe représenté sont liés par le jugement final (qu'il soit positif ou négatif), sans pour autant avoir donné de mandat au représentant (ceux-ci auront néanmoins exercé un droit d'option). Le critère du caractère adéquat octroie également une garantie supplémentaire aux défendeurs contre les actions non fondées [114]. Il devrait, en outre, permettre au juge de résoudre la situation dans laquelle plusieurs candidats se présenteraient en qualité de représentant du groupe. En pareille circonstance, le juge évalue celui des candidats qui est le plus adéquat pour représenter le groupe, ce qui permettrait de ne pas encourager la course aux tribunaux. En d'autres termes, le choix du représentant par le juge ne peut en principe se faire sur la base du critère « first come, first served » [115].

    En cas de candidats-représentants multiples, c'est donc la faculté de représenter les membres du groupe de façon adéquate (évaluée in concreto) qui est déterminante dans le choix du représentant. Il faut néanmoins constater que rien ne garantit que les divers candidats-représentants potentiellement intéressés (pourvu qu'il y en ait en effet plusieurs) déposent simultanément ou de façon très rapprochée leur requête en réparation collective. Pour permettre une réelle « mise en concurrence » des candidats-représentants potentiels, la Loi aurait dû mettre en oeuvre un mécanisme de publicité automatique faisant suite au dépôt d'une requête en réparation collective, de façon à inviter les autres associations concernées à également se manifester, dans un délai donné.

    En l'absence de telles mesures de publicité, il est à craindre que le choix du représentant s'opère dans les faits sur une base « first come, first served ».

    En outre, dans les (rares) hypothèses où plusieurs candidats se seraient manifestés simultanément, la Loi ne prévoit aucune règle procédurale organisant le choix du représentant par le juge. Nous sommes à tout le moins d'avis qu'une jonction pour connexité devrait alors être mise en oeuvre, dans le respect des dispositions de l'article 856, alinéa 2, du Code judiciaire (ou de l'art. 566 C. jud., selon que les demandes sont ou non pendantes devant le même tribunal), aux fins d'examiner les requêtes dans le cadre d'une seule et même procédure.

    Soulignons que l'exigence du caractère adéquat du représentant figure à l'article XVII.36 (soit comme une condition de recevabilité de l'action dans son ensemble) et non à l'article XVII.39 (identifiant les qualités formelles à remplir par le représentant). Sur cette base, si le représentant venait à ne plus pouvoir représenter le groupe de façon adéquate en cours d'instance, une telle situation ne permettrait en principe pas au juge de retirer à l'association en cause sa qualité de représentant. En effet, l'article XVII.40 - qui permet au juge de remplacer un représentant par un autre - ne permet un tel changement que si les conditions visées à l'article XVII.39 ne sont plus satisfaites, sans viser les conditions contenues à l'article XVII.36.

    Par ailleurs, la Loi ne précise pas qui pourrait être amené à invoquer le fait que le requérant ne satisfait plus aux conditions de l'article XVII.39. Le requérant qui a connaissance d'une telle situation a-t-il l'obligation d'en informer le juge et le défendeur, ou à tout le moins de justifier à intervalle régulier le fait qu'il satisfait toujours auxdites conditions? Le juge doit-il ponctuellement inviter le requérant à fournir une telle justification? En l'absence de disposition expresse sur ce point, ces différents scenarios semblent peu réalistes. Il incombe dès lors vraisemblablement au défendeur lui-même d'invoquer le non-respect de l'article XVII.39 et d'inviter le juge à vérifier ce point et à retirer, le cas échéant, à l'association en cause sa qualité de représentant. Nous déplorons vivement que la Loi n'organise nullement une procédure formelle en révocation du représentant.

    La Loi ne prévoit pas que les membres du groupe soient consultés par le juge pour choisir ou remplacer le représentant. En réponse à une question du Conseil d'état, le délégué a en effet confirmé que « l'éventuelle désignation d'un nouveau représentant (qui doit marquer son accord) est l'oeuvre du juge, sans qu'il ne doive au préalable informer ou consulter les membres du groupe » [116]. A l'instar du Conseil d'état, nous regrettons le fait que les membres du groupe n'aient pas l'opportunité d'exercer à nouveau leur droit d'option (opt-in ou opt-out) en cas de remplacement du représentant. En effet, un consommateur donné peut avoir choisi de se joindre au groupe (ou de ne pas s'en exclure) uniquement sur la base de la confiance particulière qu'il témoignait au représentant concerné [117].

    La Loi ne contient aucune indication quant aux critères à appliquer pour juger de l'adéquation du candidat. Devra-t-il établir qu'il connaît le secteur commercial ou industriel concerné, ou qu'il dispose de juristes maîtrisant la procédure collective ou qu'il est représenté par un cabinet d'avocats spécialisé? Il devrait en tout cas établir qu'il dispose d'un financement suffisant pour avancer les frais de procédure et payer les frais d'avocat. L'organisation interne du représentant doit aussi faire l'objet d'une analyse: dispose-t-il du personnel suffisant pour gérer l'enregistrement d'un grand nombre de demandeurs, spécialement dans les procédures d'opt-in?

    Après quelques années d'application de la Loi, l'expérience du représentant en matière de procédure collective deviendra également un élément pertinent à évaluer.

    4.2. Le financement

    La question du financement de la procédure de réparation collective, qui n'est abordée ni par la Loi ni par l'exposé des motifs, est susceptible de revêtir un caractère essentiel pour le déroulement de la procédure. En effet, c'est le représentant, et non les consommateurs, qui initie l'action, et ces derniers ne seront connus qu'en fin de procédure en cas d'opt out. Comment le représentant et le liquidateur vont-ils mener cette procédure, dont la complexité et la longueur entraîneront inévitablement des frais?

    4.2.1. Les frais du représentant et du liquidateur

    Le représentant du groupe doit consacrer un temps certain à diligenter la procédure, à représenter les consommateurs, à gérer les contacts avec ceux qui se feront connaître comme membres du groupe dans une procédure d'inclusion ou qui s'informeront sur l'état de la procédure dans toutes les hypothèses, à comparaître en justice, à instruire son conseil, à suivre et à valider la liste des membres du groupe, etc. Il encourt par conséquent des frais de personnel qui peuvent s'avérer conséquents.

    Il doit assurer la rémunération de son avocat. En cas de défaut du défendeur, il doit avancer les frais de publication des décisions. Il doit financer les éventuelles expertises ordonnées par le juge. S'il perd sa procédure, que ce soit au niveau de la recevabilité ou du fond, il doit supporter tous les frais de la procédure et l'indemnité de procédure due au défendeur triomphant.

    La Loi ne traite pas des modalités d'indemnisation ou de rémunération du représentant, à la différence du liquidateur [118].

    L'exposé des motifs contient quelques indications relatives aux frais du représentant, qui n'offrent toutefois pas de solution aisée. Ainsi, le législateur explique que le résultat de l'action ne peut en aucun cas avoir pour effet d'enrichir le représentant du groupe au-delà de la juste rémunération de ses prestations et du remboursement de ses frais, si son action s'avère recevable et fondée [119]. Lorsque les parties concluent un accord amiable, celui-ci doit régler la question de la répartition des frais et dépens de la procédure, le juge pouvant refuser d'homologuer l'accord si les montants convenus pour l'indemnité dépassent les frais du représentant [120]. L'indemnité et les frais ne peuvent être déduits du montant évalué du dommage à réparer des membres du groupe [121].

    Les termes ainsi utilisés sembleraient indiquer que le représentant pourrait obtenir non seulement le remboursement de ses frais, mais également une indemnité couvrant sa « juste rémunération ». Cette interprétation est toutefois contredite par les motifs figurant en page 34 de l'exposé des motifs, qui rappellent que le principe du non-enrichissement du requérant est à la base de l'équilibre réalisé par la Loi et qui précise que « l'indemnité de procédure et les frais doivent être strictement calculés sur base des rapports de mission rédigés par le représentant du groupe et selon les modalités déterminées par le Code judiciaire et la Loi en matière de dépens ». Il s'ensuit que le représentant ne peut obtenir que le remboursement de ses frais (publications, etc.) et l'indemnité de procédure légale, ce qui exclurait non seulement toute rémunération, mais également l'indemnisation de ses coûts internes, tels les coûts de personnel.

    Le ministre a précisé lors des débats à la Chambre que les pactes de « quota litis » n'étaient pas permis dans les relations entre le représentant et les consommateurs [122] et que les organisations devraient faire un effort [123], l'ASBL Test Achats disposant d'un budget pour les litiges [124].

    Il paraît en tout état de cause difficile pour le représentant de convenir avec les membres du groupe l'obtention d'un pourcentage sur les indemnités qu'ils recevront, dans la mesure où ces membres risquent de n'être connus qu'en fin de procédure. De plus, la procédure de liquidation des indemnités par le liquidateur prévue à l'article XVII.59 semble exclure que le liquidateur verse l'indemnité au représentant afin de lui assurer le prélèvement de sa rémunération. La réparation en nature expressément prévue exclurait pareille rémunération en tout état de cause.

    Le ministre estime que le fait que le représentant doive supporter les frais de la procédure du défendeur en cas d'action irrecevable ou non fondée constitue une protection contre les actions irréfléchies et favorise la piste du règlement amiable [125].

    Au cours des débats à la Chambre, le ministre a encore ajouté qu'en cas d'accord amiable, le représentant doit négocier son indemnité avec l'entreprise, cette indemnité ne pouvant excéder ses frais réels dûment prouvés [126].

    Le ministre a poursuivi en indiquant que cette indemnité serait payée sur la base des honoraires pratiqués par le groupe professionnel et fixés par le liquidateur dans son rapport d'exécution. Le ministre paraît avoir confondu le statut de représentant et celui de liquidateur. En outre, il introduit une ambiguïté supplémentaire. Le représentant va-t-il en fin de compte avoir droit au remboursement des frais de la procédure, ou au remboursement de ses frais réels (y compris le coût du personnel ou non) ou enfin à une juste rémunération, éventuellement sur la base d'honoraires pratiqués par le groupe professionnel auquel il appartiendrait, alors que le représentant ne peut être qu'une association [127]?

    Interrogée sur ce point, Test Achats a indiqué [128] être prête à faire face à une action en réparation collective grâce à ses 368 collaborateurs et être prête à supporter le coût d'une procédure si elle devait la perdre, sans en répercuter le coût sur ses membres, car cela ferait des années qu'elle introduit des actions en cessation en faveur des consommateurs. Le défi posé par une action en réparation collective paraît toutefois différent: une action en cessation n'implique pas la gestion de demandes et plaintes de nombreux membres et se plaide comme en référé. L'investissement n'est donc en aucun cas comparable à celui exigé par une action en réparation collective.

    Si le représentant ne devait, comme le précise l'exposé des motifs, obtenir que le remboursement des frais qu'il a exposés et le paiement de l'indemnité de procédure, il conviendra qu'il couvre lui-même les honoraires de son conseil pour la partie excédant l'indemnité de procédure et ses coûts internes. La capacité financière de l'association concernée doit donc faire partie des critères d'évaluation appliqués par le juge à la sélection du représentant, en particulier en ce qui concerne l'évaluation de son caractère « adéquat » [129]. A défaut, les intérêts des membres du groupe pourraient ne pas bénéficier de la défense et de la protection voulues par la Loi.

    A titre de comparaison, l'article XVII.61, § 2, alinéa 2, de la Loi dispose que l'approbation du rapport final par le juge vaut titre exécutoire sur la base duquel le liquidateur peut revendiquer le paiement de ses frais et prestations au défendeur. L'exposé des motifs prévoit le paiement d'honoraires pour ses prestations, à charge du défendeur [130].

    4.2.2. Les Third Party Funders

    La question se pose de savoir si l'apparition de la procédure en réparation collective ouvrira le marché belge aux tiers financeurs de procédures, les third party funders ou TPF, à l'instar des autres pays qui ont introduit ce type de procédure. Les TPF se sont en effet largement développés dans les pays anglo-saxons, mais également aux Pays-Bas dont la législation a servi d'inspiration à la nouvelle Loi.

    Au sens large, le financement des procédures par des tiers englobe tous les mécanismes par lesquels les coûts de la procédure sont supportés par une partie autre que le demandeur, telle que, par exemple, la cession de la créance à un tiers qui en poursuivra la récupération à son compte (dans les limites de la cessibilité de la créance et des dispositions réglant le retrait litigieux, le cas échéant). Il peut consister simplement dans le financement de la procédure par l'avocat qui représente le demandeur dans le litige. Notons que, même dans les pays où le pacte de « quota litis » est déontologiquement interdit, il est généralement permis à l'avocat d'obtenir des honoraires limités, complétés par un honoraire additionnel en cas de succès.

    Au sens strict, le Third Party Funding est une méthode de financement par laquelle une entité qui n'est pas partie à un litige finance les frais de procédure et d'avocat d'une partie et/ou supporte le coût d'une décision rendue à l'encontre de cette partie, et ce sans recours. Ce type de financement a vu le jour en Australie à la fin des années 1980 et est largement répandu en Autriche, en Allemagne, en Suisse, aux états-Unis et au Royaume-Uni [131]. Le barreau de New York a estimé qu'en 2011, le financement de litiges avait excédé le milliard de dollars US [132]. Les sociétés spécialisées en la matière les plus connues sont, aux états-Unis, Juridica Capital Management, Burford Capital Limited et IMF Ltd. Juridica Capital Management et Burford Capital Limited se financent par le biais d'offres publiques sur la bourse de Londres [133]. D'autres TPF émettent des obligations, telle Crystallex au Canada, ou investissent le capital de leurs fondateurs [134]. Des banques comme Crédit Suisse (Litigation Strategics Group) ou Citigroup (Counsel Financial), ou des compagnies d'assurance comme Allianz, sont également actives sur ce marché [135].

    Ces sociétés peuvent financer, soit les parties directement, soit le représentant du groupe, soit le conseil de ceux-ci. En contrepartie, elles obtiennent un pourcentage de l'indemnisation accordée, qui peut correspondre à un montant égal à deux à quatre fois le montant de leur investissement ou à 10 à 40% de l'indemnisation [136]. Si la partie qu'elles ont financée perd le litige, elles ne disposent d'aucun recours et c'est pour ce risque qu'elles obtiennent la rémunération décrite ci-dessus [137]. La protection peut être complétée par une assurance After the Event Legal Expenses Insurance ou ATE. Ce type de contrat d'assurance couvre le paiement des frais de la procédure et de l'indemnité de procédure due à la partie adverse dans l'hypothèse où le demandeur perd son procès, la prime pouvant également être financée par le TPF.

    Plus l'intervention du TPF est importante, plus l'influence dont il dispose dans le déroulement du litige est importante, que ce soit sur le choix du conseil et son budget, la stratégie à adopter ou la conclusion d'une transaction et sa hauteur.

    L'intervention de TPF dans le cadre de procédures en réparation collectives en Belgique est limitée eu égard aux dispositions légales prévues pour la liquidation des indemnités. En effet, le TPF doit s'assurer qu'il dispose de la possibilité de récupérer son investissement et de percevoir la rémunération de son risque. Or, dans la mesure où la Loi dispose que le liquidateur paie les indemnités aux membres du groupe et sous le contrôle du juge, un accord de financement conclu entre un TPF et le représentant du groupe va demeurer sans effet pratique, et ne paraît pas possible entre un TPF et le liquidateur.

    Le TPF pourrait néanmoins s'assurer de sa rémunération s'il démarche lui-même les consommateurs, obtient d'eux la cession d'une partie de leur indemnisation future, et propose à un représentant potentiellement éligible de financer pour lui la procédure, après avoir rassemblé un nombre suffisant de consommateurs adhérents. Il reste à voir si pareil scenario va susciter l'intérêt des TPF, en particulier eu égard à l'étroitesse du marché belge.

    Citons également le cas rare, certes, mais intéressant d'un TPF désintéressé. Michael Bloomberg, l'ancien maire de New York, a financé par des donations personnelles ou provenant de sa fondation, la défense de l'état de l'Uruguay contre une procédure d'arbitrage CIRDI [138] initiée par Philip Morris en 2010, qui soutenait que les mesures prises par le gouvernement uruguayen dans le but de réduire la consommation de tabac par sa population, violaient les dispositions du traité bilatéral d'investissement entre l'Uruguay et la Suisse [139]. Alors que l'Uruguay envisageait de transiger devant les coûts engendrés par une telle procédure, M. Bloomberg fit plusieurs donations à cet état pour lui permettre de poursuivre sa défense [140].

    Eu égard aux dispositions de la Loi et aux objectifs poursuivis par celle-ci, l'intervention d'un TPF dans le financement d'une procédure en réparation collective en Belgique doit être divulguée par le représentant dans la requête introductive d'instance. En effet, eu égard à l'influence décisive que pourrait avoir le TPF sur le suivi de la procédure, ainsi que sur la conclusion d'un accord, et donc sur la véritable direction du procès et la protection des intérêts des consommateurs, le juge doit tenir compte de l'existence et des modalités de cette intervention dans son appréciation du caractère adéquat du représentant. Le juge pourrait dès lors, en fin de compte, devoir se prononcer sur le caractère adéquat du TPF qui financerait toute l'opération.

    5. Formation du groupe de consommateurs
    5.1. Opt-in ou opt-out?

    Le mode de composition du groupe de consommateurs lésés par le préjudice collectif est une question essentielle. Elle va se poser dès la phase de recevabilité.

    Pour délimiter le groupe de victimes, deux mécanismes sont possibles [141]: soit celui de l'opt-in (ou système d'option d'inclusion), selon lequel seules des personnes ayant manifesté un accord explicite pour faire partie du groupe sont incluses dans le groupe, soit le régime de l'opt-out (ou système d'option d'exclusion) selon lequel, sont considérées comme membres du groupe, les personnes qui ont subi le préjudice collectif, objet de l'action, et qui n'ont pas manifesté leur volonté de s'en exclure après avoir pris connaissance de mesures de publicité relatives à la composition du groupe.

    5.2. Système retenu par la Loi

    La Loi déroge au principe de l'opt-in recommandé par la Commission européenne [142] en conférant au juge le pouvoir de choisir le système d'option [143]. Pour chaque action collective qu'il déclare recevable, le juge doit déterminer le système d'option applicable à la composition du groupe et fixer les délais endéans lesquels les membres du groupe peuvent exercer leur option [144]. Les délais impartis aux membres du groupe pour communiquer leur option au greffe commencent à courir le lendemain de la publication de la décision de recevabilité au Moniteur belge [145]. Le groupe est définitivement formé à l'expiration de ces délais; à l'écoulement de ce délai, un membre ne peut donc plus entrer (opt-in) ou sortir (opt-out) du groupe [146].

    L'accord de réparation collective tout comme la décision qui fait droit à l'action en réparation collective lient tous les membres qui, selon le système d'option retenu, ont manifesté leur volonté de s'inclure ou n'ont pas manifesté leur intention de s'exclure du groupe endéans les délais fixés par le juge. Le contenu et la forme de la publicité de la décision de recevabilité revêtent donc une importance particulière [147].

    Le délai laissé aux consommateurs pour exercer leur droit d'option prend fin avant que le résultat des négociations ou du jugement sur le fond soit connu [148]. Ce timing vise à éviter toute spéculation sur la réussite de l'action. Lorsque le système d'opt-in est retenu, une première liste incluant le nombre et l'identité des consommateurs qui peuvent prétendre à la réparation du dommage peut être établie à l'écoulement du délai déterminé pour l'exercice du droit d'option. La situation est différente si le juge choisit le système d'opt-out. A l'expiration de ce délai et jusqu'à l'exécution totale de l'accord ou de la décision sur le fond, le nombre et l'identité des membres peuvent rester inconnus. Dans cette situation, le nombre et l'identité des consommateurs membres du groupe sont seulement déterminables après que l'accord soit homologué ou que la décision sur le fond soit rendue. Ainsi, alors que le système d'opt-out peut constituer un avantage pour le défendeur en terme de finalité [149] (l'accord homologué ou la décision sur le fond sont opposables à tous les consommateurs lésés décrits dans la procédure et qui ne se sont pas exclus et ce, quelle que soit l'issue de la procédure), il peut en revanche constituer une difficulté lorsque l'entreprise défenderesse doit évaluer dans ses livres l'étendue de l'indemnité qu'elle devra verser à l'issue de la procédure de réparation collective.

    La liberté du juge lorsqu'il doit choisir entre le système d'inclusion ou d'exclusion n'est pas totale. La Loi limite le choix du juge dans certaines situations. Le système d'opt-in est imposé lorsque l'action vise la réparation d'un dommage corporel ou moral [150]. D'après l'exposé des motifs, cette technique présente l'avantage pour ce type de dommage d'identifier de façon précise les membres du groupe et de circonscrire ainsi le litige en permettant au juge d'apprécier l'existence du préjudice invoqué par chacun des demandeurs, ce qui garantit une prise en compte de la situation individuelle de chaque membre du groupe [151]. Le système d'opt-in est en outre obligatoire pour les membres du groupe qui n'ont pas leur résidence habituelle en Belgique [152].

    Par conséquent, l'adhésion au groupe peut s'opérer différemment pour les consommateurs qui ont leur résidence habituelle en Belgique [153] et ceux qui ont leur résidence habituelle en dehors de la Belgique. L'exposé des motifs justifie cette différence de traitement entre les résidents belges et les non-résidents par deux ordres de considérations [154]. Premièrement, il est généralement plus difficile de localiser les personnes préjudiciées qui ne résident pas en Belgique. Les mesures de publicité prévues dans la Loi pourraient être insuffisantes pour garantir un droit d'accès à la justice des consommateurs non-résidents. Les personnes préjudiciées non-résidentes risquent de ne pas être averties par les mesures de publicité relatives au délai d'option. Dans un système d'opt-out, le fait de ne pas avoir exercé leur droit d'exclusion du groupe, priverait les non-résidents du droit d'introduire une action judiciaire individuelle ayant pour objet la même pratique illégale même dans un cas d'application des règles de conflits de juridictions protectrices. Deuxièmement, la probabilité est grande que la règle de conflit de lois applicable à un litige relatif à un préjudice de masse subi par des non-résidents désigne une Loi étrangère comme droit applicable. Appliquer le système d'opt-in aux non-résidents permettra de trancher, dès le début de la procédure, les questions de droit international privé que la procédure de réparation collective peut poser.

    Par ailleurs, lorsque les parties parviennent à un accord en dehors de toute procédure contentieuse et introduisent conjointement une requête en vue de son homologation, le choix entre le système d'opt-in ou d'opt-out et la détermination des délais relatifs à l'exercice de l'option choisie appartient aux parties à l'accord et non au juge. L'exposé des motifs explique que dans une telle situation, il n'est « pas concevable que les parties présentent un accord préexistant sans avoir elles-mêmes pu déterminer le système d'option qu'elles souhaitent appliquer [155] ».

    Hormis ces situations expressément prévues par la Loi, le juge doit choisir, sur la base des faits et motifs invoqués par les parties [156], entre le système d'opt-in et le système d'opt-out. L'exposé des motifs guide le choix du juge en soulignant que la nature (et l'intensité) du préjudice subi par les consommateurs potentiellement représentés dans le groupe constitue un élément décisif dans le choix du juge [157]. Ainsi, le système d'opt-out est par exemple suggéré pour lutter contre le désintérêt rationnel (rational apathy) des consommateurs dans les situations de dommages « diffus ». L'exposé des motifs privilégie, par contre, le système de l'opt-in dans deux situations: (i) lorsqu'il est presque impossible d'estimer même approximativement le nombre de membres qui composent le groupe; (ii) lorsque la nature du dommage nécessite l'intervention active des personnes lésées pour son établissement et son évaluation (p. ex. atteinte à la vie privée) [158].

    5.3. Commentaires
    5.3.1. Pour le système d'opt-in applicable aux non-résidents

    Le choix du législateur d'exiger l'application du système d'opt-in aux personnes ayant leur résidence habituelle à l'étranger paraît justifié afin d'éviter les nombreux problèmes de droit international privé que le recours collectif peut poser.

    5.3.2. Pour le système d'opt-out en cas de dommages « diffus »

    Nous partageons, par ailleurs, la position du législateur lorsqu'il encourage le juge à opter pour un système d'exclusion dans les situations dans lesquelles l'action en réparation collective vise à réparer des dommages « diffus ». Lorsque les dommages subis sont de faible importance, seule la formule d'opt-out semble pouvoir garantir les objectifs poursuivis par la procédure de réparation collective [159]. En effet, la formule de l'opt-in, forçant chacun des membres concernés à s'inclure dans la poursuite judiciaire par une démarche officielle, pourrait en cas de dommages « diffus » être vouée à l'échec, compte tenu des difficultés d'information des membres, de l'intérêt mitigé soulevé par une réclamation modeste et de l'inertie coutumière des justiciables [160]. L'opt-out présente l'avantage de réduire considérablement les efforts nécessaires et les coûts liés à la procédure d'indemnisation dans un contexte de dommage de masse, lesquels facteurs agissant, en contexte individuel, comme des obstacles inhibiteurs à toute velléité de poursuivre de la part des consommateurs [161].

    Certains ont toutefois reproché au système d'opt-out d'être difficilement conciliable avec le droit fondamental d'accès à la justice envisagé dans son aspect tant positif que négatif [162]. Le droit fondamental de toute personne d'accéder à la justice pour y faire valoir ses droits, tel que garanti par la Constitution [163] et consacré dans la convention européenne des droits de l'homme [164], implique en effet la liberté d'agir en justice mais également celle de ne pas être contraint de saisir les tribunaux par un tiers [165].

    Cette critique doit être replacée dans son contexte pour pouvoir être tempérée.

    Il faut tout d'abord admettre que lorsque l'enjeu personnel du membre du groupe est trop faible pour rendre une action judiciaire individuelle envisageable - comme c'est le cas en cas de dommages « diffus » -, la faculté d'introduire une telle action demeure purement théorique [166]. Le choix du consommateur de poursuivre individuellement ou non n'existe pas [167]. « Liberté individuelle de certains de ne pas agir versus droit d'accès effectif à la protection juridictionnel d'un grand nombre, tel devient, en fin de compte, l'équation à résoudre. » [168]. Des études nord-américaines ont, par ailleurs, démontré que le nombre de personnes qui exercent effectivement leur droit d'exclusion dans les procédures de réparation collective est dans la plupart des cas dérisoire. Au Québec, par exemple, des statistiques informelles rapportent que moins d'1% des membres demandent effectivement l'exclusion du groupe et, au surplus, la décision de cette infime minorité résulte souvent d'une confusion [169].

    A l'opposé, le droit de s'exclure revêt une importance grandissante dans le cas de procédures de réparation collective impliquant des montants suffisamment élevés pour justifier une réclamation individuelle. Dans ce contexte, la procédure de réparation collective perd son caractère utile; un membre peut choisir d'intenter sa propre poursuite, plutôt que de risquer de perdre son droit d'action lors d'un recours collectif sur lequel il n'a pas ou presque pas de contrôle [170].

    Lorsqu'on est en présence de réclamations « individuelle-ment recouvrables », la compatibilité du système d'opt-out avec la faculté d'ester en justice peut, toutefois, être assurée par certaines garanties [171].

    A ce titre, il convient de revenir sur le double système de protection mis en place par la Loi pour préserver la liberté individuelle des consommateurs d'agir ou de ne pas agir.

    Premièrement, la Loi accorde au juge un important pouvoir lors de la phase de recevabilité non seulement pour apprécier si et dans quelle mesure les conditions d'une procédure de réparation collective sont réunies mais également pour identifier, dans la limite du possible, les membres du groupe. Lors de cette première étape de la procédure, le juge doit, en effet, vérifier non seulement la qualité et l'aptitude du requérant à représenter adéquatement les membres du groupe mais aussi la « supériorité » de la procédure de réparation collective sur toute autre forme d'action. Cette première étape doit également aboutir à ce que le juge rende un jugement identifiant le groupe de consommateurs potentiellement lésés avec une précision suffisante.

    Deuxièmement, la Loi place également la publicité de la décision de recevabilité sous le contrôle du juge qui doit en déterminer, en fonction de la configuration du groupe, les spécificités et modalités. Outre la publicité prévue à l'article XVII.43, § 3, le juge peut en effet déterminer, en fonction de toutes les circonstances de l'espèce, la publicité la plus adéquate pour atteindre avec un maximum d'efficacité et de sûreté les consommateurs potentiellement membres du groupe [172]. Cette publicité peut, selon la décision du juge, prendre la forme soit d'une notification individuelle (lettre adressée à chaque client de l'entreprise défenderesse, p. ex.), soit d'une notification collective faite par voie de presse (annonce dans les grands quotidiens du pays) [173]. Ainsi, une publicité de la procédure de réparation en cours, très largement répandue et éventuellement personnalisée, assurera la garantie de la liberté de choix des membres du groupe qui pourront exercer en pleine connaissance de cause leur droit d'option [174]. De plus, la Loi renforce cette protection en prévoyant que les membres du groupe ne seront pas liés par les effets de la décision de l'homologation de l'accord de réparation collective ou de la décision au fond, s'ils démontrent n'avoir pas pris et n'avoir raisonnablement pas pu prendre connaissance de la décision de recevabilité durant le délai d'option [175].

    6. Exécution de l'accord homologué ou de la décision sur le fond
    6.1. Mécanismes mis en place par la Loi pour veiller à l'exécution concrète de l'accord ou de la décision sur le fond

    Le législateur a prévu un certain nombre de dispositions qui visent à garantir que les sommes pour lesquelles le défendeur est condamné seront effectivement versées par le défendeur et remises aux membres du groupe.

    6.1.1. Les modalités d'exécution doivent être détaillées dans l'accord homologué ou la décision sur le fond

    Au rang de celles-ci, nous noterons premièrement les dispositions qui imposent que les modalités d'exécution soient mentionnées dans l'accord homologué ou dans la décision sur le fond. Un accord de réparation collective ne peut, en effet, recevoir une homologation judiciaire que lorsqu'il contient notamment une estimation aussi précise du nombre de membres qui ont droit à une réparation ainsi que la détermination des modalités et du montant de la réparation [176]. L'exposé des motifs précise que les parties s'accordent librement sur, notamment, la forme de la réparation (en nature ou par équivalent), les modalités du calcul du dommage, le montant de la réparation et les délais de paiement [177]. De manière similaire, la décision sur le fond de l'affaire qui conclut à une obligation de réparation dans le chef du défendeur doit contenir une série d'éléments utiles à son exécution [178].

    Afin d'assurer aux membres du groupe une réparation adaptée, le juge (ou les parties en cas d'accord homologué) peut répartir le groupe en sous-catégories et prévoir des modalités différentes pour chacune des sous-catégories [179].

    La Loi ajoute, par ailleurs, que le juge peut demander au défendeur de fournir des garanties établissant sa solvabilité et partant son aptitude à exécuter l'accord ou la décision sur le fond [180]. Ces garanties peuvent être de toute sorte et ne doivent pas nécessairement consister en des sûretés personnelles ou réelles [181].

    Si le juge (et les parties en cas d'accord homologué) est libre de choisir les modalités de réparation en cas de réparation par équivalent, le législateur semble préconiser que le juge ordonne au défendeur de verser le montant total de l'indemnité au liquidateur [182], afin d'éviter les difficultés que causerait l'exécution individualisée du jugement où chaque membre doit venir faire la preuve de sa réclamation devant le tribunal (ou le greffe) pour évaluer la condamnation totale du débiteur de la réparation. Si le débiteur verse ce montant global au liquidateur, cette mesure équivaudra dans un premier temps à une confiscation de gains illicitement gagnés. La condamnation du défendeur serait mesurée non pas au nombre de réclamations produites, mais au montant déposé auprès du liquidateur représentant la réparation globale du préjudice causé.

    La solution prônée par le législateur n'est possible que si l'on peut évaluer de manière suffisamment exacte le montant de la responsabilité du défendeur, soit le montant total des réclamations des membres du groupe à un moment où le nombre et l'identité de tous les membres ne sont pas nécessairement connus. De plus, l'effectivité de l'indemnisation des membres du groupe dépendra souvent d'une seconde étape, soit celle de la distribution de ces indemnités. Une fois que ce montant sera versé au liquidateur, encore faudra-t-il opter pour un mode de distribution approprié, ce qui pourra s'avérer être une étape délicate dans certains types de recours collectifs [183].

    6.1.2. Délégation de la mission d'exécution à un liquidateur

    Selon la nature du dossier, le nombre de réclamants peut être élevé et l'analyse nécessaire pour statuer sur une réclamation d'une certaine ampleur. Le législateur a estimé que le greffier ne disposerait pas nécessairement des moyens nécessaires pour gérer tous les recours collectifs, surtout dans les dossiers complexes, et a, ainsi, confié la gestion des réclamations individuelles et la distribution des indemnités à un tiers, le liquidateur [184]. Le débiteur s'acquitte de son obligation de réparation en nature sous le contrôle du liquidateur, ou lui verse le montant de l'indemnité prévue afin qu'il en assure la répartition entre les membres du groupe, en cas de réparation par équivalent. Le juge désignera le liquidateur sur la base d'une liste dressée par l'assemblée générale de la juridiction compétente pour connaître d'une action en réparation collective [185].

    La Loi met en place un double système de contrôle pour encadrer la mission du liquidateur. D'une part, l'étendue de sa mission est délimitée par les termes de l'accord homologué ou de la décision sur le fond. D'autre part, la distribution des montants accordés par la décision sur le fond ou convenus dans l'accord homologué s'effectue sous le contrôle du tribunal. Le juge reste saisi jusqu'à la réparation intégrale des membres du groupe [186]. Le liquidateur doit tenir le juge informé de l'évolution de sa mission trimestriellement (rapport trimestriel [187]) et lui transmettre un rapport final lorsque l'accord homologué ou la décision du juge sur le fond est entièrement exécuté(e) [188]. Les rapports périodiques et le rapport final doivent être suffisamment détaillés pour permettre un contrôle effectif de la procédure d'exécution par le juge. Si ces rapports devaient établir que le taux de réclamation est faible et qu'il est attribuable à une mauvaise publicité, le juge ne pourrait ordonner des mesures de publicité additionnelles car il aura épuisé sa juridiction par la décision intervenue. Les rapports trimestriels permettront d'évaluer l'efficacité de certains modes d'indemnisation, ce qui pourrait bénéficier aux juges auxquels on demande d'approuver des transactions, par exemple. Ils permettront par ailleurs les recherches empiriques qui pourraient contribuer à identifier les mécanismes les plus efficaces ou les plus appropriés.

    6.2. Le reliquat

    Le mécanisme mis en place par la Loi peut aboutir à ce qu'en fin de procédure, le liquidateur reste en possession de sommes non réclamées. Un reliquat surviendra lorsque le montant global auquel le défendeur est condamné à verser au liquidateur est supérieur à la somme des revendications des membres du groupe qui se manifestent au stade de la distribution [189]. Il semble hautement probable que cette situation se réalise lorsque le système d'opt-out est retenu et que l'évaluation du dommage se fait sur une base globale. Dans ce cas, le défendeur pourra se voir condamné au paiement d'un montant fixé alors même que l'identité, le nombre exact de membres, et partant le montant exact de leurs réclamations, n'est pas déterminé. Cette détermination ne pourra alors intervenir qu'au stade de la distribution de l'indemnité, les bénéficiaires potentiels de la condamnation étant appelés à se manifester au moment de la publication de la décision sur le fond ou de l'accord homologué. De plus, quand bien même le nombre de membres et le montant de leurs réclamations pourraient faire l'objet d'une évaluation précise, encore faut-il que ces membres se manifestent pour réclamer leur dû. Or, une des critiques les plus virulentes et les plus souvent entendues à l'endroit du recours collectif dans les juridictions qui possèdent déjà ce mécanisme consiste en ce qu'un très petit pourcentage de membres du groupe se manifeste, après un jugement favorable ou un règlement hors tribunal, pour réclamer leur part dans le montant alloué à titre de dommages et intérêts. Les expériences étrangères rapportent, en effet, qu'un faible pourcentage des membres du groupe réclamerait effectivement leur dû [190]. Les spécialistes étrangers attribuent l'absence d'engouement des consommateurs en bout de course de la procédure à plusieurs causes [191]. Premièrement, la modicité des réclamations, les efforts nécessaires et les coûts liés à la procédure d'indemnisation peuvent être jugés responsables du faible taux de participation à l'étape du recouvrement. Ensuite, la réclamation effective par les membres dépendra aussi des démarches accomplies par le représentant et de la forme de la publicité aux membres du groupe. Le déficit d'information, de même que les avis trop « légalistes » publiés dans les journaux, expliqueraient en partie le faible taux de réclamation des membres du groupe à l'étape de l'exécution des décisions sur le fond ou de l'entente extrajudiciaire [192]. La réclamation effective par les membres dépendra également de l'intelligibilité du formulaire de réclamation à remplir et des preuves à adjoindre à ce formulaire.

    La Loi impose au liquidateur de préciser « le montant du solde restant non remboursé aux consommateurs » dans son rapport final [193] et remet le sort du reliquat entre les mains du juge [194]. Ainsi, lorsque le montant de la condamnation globale du défendeur ne correspondra pas à la somme des préjudices individuels dont la réparation est effectivement réclamée au stade de la distribution, les sommes non réclamées ne reviennent pas automatiquement au défendeur et il appartient au juge de statuer sur l'affectation du reliquat. L'exposé des motifs accorde au juge un pouvoir d'appréciation large en la matière et énumère une série d'affectations possibles pour lesquelles le juge pourrait pencher [195]. Au rang de celles-ci, on retrouve l'octroi d'une réduction systématique de la facture pour tous les clients pour une durée déterminée, la diffusion d'un bon de réduction et la distribution gratuite d'un produit [196].

    Le juge a également la possibilité d'opter pour la réversion des sommes non réclamées au défendeur, ce qui paraît évident et justifié si les bénéficiaires de la décision négligent de faire valoir leurs droits [197].

    Notons que l'exposé des motifs ne cite pas la possibilité pour le juge de procéder à une distribution collective, c'est-à-dire une forme de distribution qui vise le groupe en entier [198]. La distribution collective a pris, dans d'autres pays, la forme de la distribution des sommes auxquelles le défendeur est condamné à une organisation qui entretient un lien direct avec l'objet du litige [199], le destinataire de la distribution collective étant sélectionné en fonction de l'intérêt des personnes directement impliquées dans la procédure en cause. Le législateur a certainement soigneusement évité de citer ce type d'affectation car la distribution collective pose indéniablement des questions en termes de compatibilité avec les principes strictement indemnitaires de l'action en réparation d'un dommage.

    6.3. Quelques remarques procédurales relatives à la phase d'exécution

    La Loi laisse planer certaines incertitudes procédurales au sujet de la phase d'exécution.

    Ainsi, par exemple, la Loi ne prévoit pas dans quel délai la liste provisoire des membres du groupe doit être établie par le liquidateur et se contente, à cet égard, de faire référence à un « délai raisonnable [200] ».

    Une fois que la liste provisoire est établie, le représentant et le défendeur disposent d'un délai de trente jours (prolongeable à la demande du liquidateur ou de l'une des parties) pour contester l'inscription ou l'exclusion d'un membre du groupe [201]. Ce délai de trente jours, qui n'est assorti d'aucune sanction est beaucoup trop court et doit être prorogé, en particulier dans les procédures rassemblant plusieurs milliers de consommateurs.

    Soulignons que, bien qu'informés de la décision du liquidateur, les membres du groupe ne peuvent pas formellement contester l'inscription ou l'exclusion d'un membre du groupe sur la liste provisoire à titre individuel. Dès lors, les membres doivent avoir une pleine confiance dans le représentant du groupe pour formuler les contestations qui s'imposent, en particulier eu égard à l'absence d'autorité ou de pouvoir d'instruction des consommateurs membres du groupe à l'égard du représentant. Notons que, d'après l'article XVII.58, § 3, les membres du groupe dont l'inscription à la liste provisoire est contestée (le texte ne vise pas les membres dont l'exclusion de la liste provisoire est contestée) peuvent faire connaître leur position auprès du greffe et sont convoqués et entendus par le juge.

    7. Autres remarques relatives à la procédure
    7.1. L'action en réparation collective au regard du droit judiciaire

    Le droit judiciaire belge est traditionnellement fondé sur une procédure opposant un seul demandeur à un seul défendeur, régie par le principe dispositif. Selon ce principe, le procès civil est « la chose des parties » [202]. Ce sont elles qui fixent les limites du litige soumis au juge et qui assument la direction de la procédure [203]. Ce sont les parties au procès qui décident qui doit être mis à la cause ou non. Ainsi que le confirme l'article 811 du Code judiciaire, le juge ne peut en effet mettre un tiers à la cause de sa propre initiative. En outre, les parties définissent l'objet et le fondement du litige: elles identifient les faits, formulent les demandes et les défenses [204]. Le juge civil ne se saisit en effet pas seul, la procédure devant être intentée par une partie. Par la suite, les parties accélèrent ou ralentissent le rythme de la procédure et peuvent également y mettre un terme, par exemple par le biais d'un désistement d'action.

    L'action en réparation collective se démarque de ces principes à de nombreux égards.

    Ainsi par exemple, le nombre d'acteurs est démultiplié: représentant, groupe, défendeur, avocats, juge, liquidateur. En outre, la grande majorité des personnes concernées par la procédure (soit les consommateurs membres du groupe) ne sont pas formellement demanderesses à la procédure et sont uniquement représentées par le représentant, sans mandat mais sur la base d'une disposition légale.

    Le statut procédural des consommateurs membres du groupe (parties ou non?), en particulier au regard du rôle significatif rempli par le représentant, est en effet particulier. S'il est vrai que la Cour de cassation oppose traditionnellement la qualité de « tiers » à celle de « partie » à l'instance [205], le Code judiciaire ne consacre pas formellement cette distinction « partie » - « tiers » [206]. Ainsi par exemple, le Code ouvre la tierce opposition non au « tiers » mais à « la personne qui n'a point été dûment appelée ou n'est pas intervenue à la cause en la même qualité [207] ». Le point déterminant dans l'évaluation de la notion de « tiers » en matière de tierce opposition est donc de savoir si une personne est ou non restée « étrangère au procès [208] ». Dans le cadre de l'action en réparation en collective, par l'effet du pouvoir de représentation octroyé au représentant, de la publicité entourant les décisions du juge et de l'exercice du droit d'option qui est offert aux membres du groupe, ceux-ci ne sont pas étrangers au procès. L'exposé des motifs confirme que les membres du groupe ne peuvent pas être considérés comme des tiers [209].

    L'exposé des motifs indique par ailleurs, un peu maladroitement peut-être, que « les membres du groupe n'apparaissent pas à la procédure en qualité de partie » [210]. Les membres du groupe, ni partie, ni tiers alors?

    Il semble plus correct de considérer que les membres du groupe ne sont pas formellement demandeurs (leurs droits sont exercés, et leur action est introduite, par l'intermédiaire du représentant [211]), mais qu'ils sont bien « au procès ».

    Notons que le représentant (au sens de la Loi) n'est d'ailleurs pas un représentant processuel au sens strict, puisqu'il s'agit d'une représentation qui dépasse la simple identité de la partie au procès [212]. Le rôle du représentant dans le cadre d'une action en réparation collective s'apparente donc davantage au rôle du curateur en matière de faillite [213].

    Un autre élément distingue encore la procédure en réparation collective de la procédure civile classique: le juge est tenu d'adopter un rôle actif à tous les stades de la procédure et son pouvoir d'appréciation est particulièrement large [214], notamment au niveau de la phase de recevabilité. Se démarquant nettement du principe dispositif et des règles régissant traditionnellement la procédure civile, la Loi confie au juge un important pouvoir d'appréciation, qui est déterminant dans le déroulement et l'issue de la procédure [215]. Ainsi, comme évoqué au point 4.1., supra, l'article XVII.36 pose comme condition de recevabilité à l'action en réparation collective le fait que le requérant soit jugé « adéquat » par le juge et que le recours à l'action en réparation collective « semble plus efficient qu'une action de droit commun ». Les travaux préparatoires de la Loi contiennent certaines indications ou exemples permettant d'éclairer le juge sur les principes devant guider ses décisions, mais ne permettront en aucun cas de résoudre l'ensemble des questions pratiques auxquelles le juge sera confronté.

    7.2. La compétence internationale

    Le sujet de la compétence internationale en matière de recours collectifs, telle l'action en réparation collective, est un vaste sujet qui excède à l'évidence les limites de la présente contribution [216].

    La Loi n'évoque nullement, même dans ses travaux préparatoires, les questions de compétence internationale liées à une action en réparation collective. Le seul élément d'extranéité expressément cité par la Loi concerne la différence dans le régime d'option applicable aux fins de constituer le groupe (voy. art. XVII.38, § 1er), d'une part, aux consommateurs résidant habituellement en Belgique et, d'autre part, aux consommateurs résidant habituellement en-dehors de la Belgique [217].

    Cependant, des interrogations surgiront immanquablement en cas d'éclatement géographique des facteurs de rattachement pertinents dans le cadre d'une action en réparation collective (p. ex., l'éclatement géographique des domiciles) pour définir la compétence internationale.

    A l'instar du Code judiciaire, le règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (« Règlement Bruxelles I ») n'envisage à aucun moment l'introduction d'une action par une pluralité de demandeurs [218]. Seule l'hypothèse d'une pluralité de défendeurs y est expressément envisagée [219]. Il est néanmoins vraisemblable que le groupe de consommateurs victimes d'une infraction visée par la Loi sera fréquemment dispersé géographiquement, au-delà des frontières belges.

    Dans sa communication en vue de fixer un « cadre horizontal commun en matière de recours collectifs » [220], la Commission n'a pas estimé opportun d'envisager une dérogation ou une modification aux dispositions du Règlement Bruxelles I aux fins de régler la compétence dans le cadre d'actions en réparation collective. La Commission considère en effet que les dispositions du Règlement Bruxelles I « devraient être pleinement exploitées » et se contente de renvoyer à l'expérience qui sera acquise en matière de contentieux transfrontaliers et à l'évaluation qui en serait faite dans le rapport prévu sur l'application du Règlement Bruxelles I.

    Pour rappel, dans le cadre du Règlement Bruxelles I, le législateur européen considère qu'en matière de contrats avec les consommateurs, il est opportun de protéger la partie réputée économiquement la plus faible, au moyen de règles de compétence plus favorables aux intérêts des consommateurs que ne le sont les règles générales de compétence [221]. L'objectif est en effet de créer, autant que possible une protection pour la partie faible qui soit semblable à celle dont cette partie bénéficierait si le litige était purement national [222].

    Comment appliquer les dispositions de la Section 4 du Règlement Bruxelles I (soit les art. 15, 16 et 17), permettant par exemple au consommateur d'intenter une action devant le tribunal du lieu où il est domicilié, à l'occasion d'une action en réparation collective, alors que plusieurs centaines voire milliers de consommateurs sont impliqués dans cette procédure [223]? Faut-il considérer qu'au nom de la protection de la partie faible et eu égard à la présence de nombreux consommateurs au procès, des centaines voire des milliers de fors alternatifs soient disponibles (pourvu qu'une procédure en réparation collective soit disponible dans chacun de ces fors)? Notons qu'une telle situation pourrait être rencontrée dès le moment où l'on est confronté à une démultiplication des critères de rattachement (domiciles des consommateurs, lieux de la prestation contractuelle, lieux de la survenance du dommage, etc.). Une telle démultiplication semble contraire à l'un des objectifs cardinaux du Règlement Bruxelles I, à savoir le fait que les règles de compétence doivent présenter un haut degré de prévisibilité [224].

    Sur cette base, et eu égard au rôle procédural central du représentant, il semble que seule la personne du représentant doive donc être considérée pour les besoins du Règlement de Bruxelles I, et plus particulièrement de la compétence internationale, lorsqu'il est fait référence au demandeur (à l'exclusion des consommateurs membres du groupe). Faut-il néanmoins renoncer complètement au bénéfice des règles de compétence protectrices des intérêts des consommateurs? En d'autres termes, le représentant pourrait-il néanmoins être assimilé à un consommateur pour les besoins de l'application du Règlement Bruxelles I?

    L'arrêt Henkel de la Cour de justice nous conduit à répondre par la négative à cette question et confirme que les règles de compétence protectrices des consommateurs [du Règlement Bruxelles I] ne trouvent pas à s'appliquer au représentant d'un recours collectif [225], notamment au motif que celui-ci agit dans le cadre de son activité professionnelle [226]. Ce raisonnement se fonde entre autres sur la nécessité d'interpréter de façon stricte les règles de compétences protectrices dérogatoires aux règles générales [227].

    La refonte du Règlement Bruxelles I par le règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012, entrant en vigueur le 10 janvier 2015, n'aborde nullement la problématique des recours collectifs et ne modifie dès lors pas les éléments d'analyse qui précèdent.

    L'application du Règlement Bruxelles I à la question de la compétence internationale en matière d'actions en réparation collective semble donc conduire à une application quasi automatique de la règle de l'article 2, 1., du Règlement Bruxelles I, soit la compétence des tribunaux du domicile du défendeur, à l'exclusion de tout autre chef de compétence spéciale.

    7.3. La compétence interne

    Comme indiqué ci-avant, le législateur a souhaité assurer une centralisation des actions en réparation collective, et ce faisant, une spécialisation des magistrats amenés à traiter de ces affaires et une harmonisation de la jurisprudence en la matière [228].

    L'article XVII.35 prévoit que sont seuls compétents pour connaître des actions en réparation collective, les cours et tribunaux de Bruxelles.

    L'exposé des motifs souligne que le demandeur n'est en l'occurrence pas une entreprise mais un consommateur. A noter que, ce faisant, le législateur met l'accent procédural sur le groupe de consommateurs plutôt que sur le représentant aux fins de définir la compétence interne. Ce point de vue s'écarte donc de celui-ci qui semble devoir prévaloir en matière de compétence internationale dans le cadre du Règlement Bruxelles I (voy. point 7.2., supra), où l'accent devrait davantage être mis sur le représentant que sur les consommateurs membres du groupe, du point de vue figurant par ailleurs dans l'exposé des motifs (voy. point 4., supra), mais également des discussions en commission de la Chambre, où le ministre a indiqué que, pour l'application de la législation sur l'emploi des langues en matière judiciaire, la qualité des consommateurs n'est pas un critère puisqu'ils ne sont pas demandeurs [229].

    Le juge naturel des actions en réparation collective est donc le tribunal de première instance de Bruxelles, sauf si le demandeur choisit lui-même, après la naissance du litige, de porter l'affaire devant le tribunal de commerce, ainsi que le lui permet l'article 573 du Code judiciaire (pourvu - actuellement - que le litige soit relatif à un ou plusieurs actes de commerce [230]).

    L'article XVII.35 n'exclut pas explicitement la compétence du tribunal du travail ou de la cour du travail de Bruxelles. Faut-il en conclure que les juridictions du travail peuvent également (potentiellement) traiter des actions en réparation collective? La réponse semble être négative. L'exposé des motifs confirme en effet qu'eu égard à la limitation du champ d'application de la Loi au consommateur (soit la personne physique qui agit à des fins n'entrant pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, au sens de l'art. I.1, 2°, du Code de droit économique), les litiges portant sur des manquements contractuels dans le domaine du droit du travail sont exclus du champ d'application de la Loi [231].

    Le législateur confirme que la Loi ne contient aucune modification aux règles de compétence matérielle, mais uniquement une modification des règles de compétence territoriale [232]. Nous pouvons nous demander s'il n'eut dès lors pas mieux valu prévoir à l'article XVII.35 que « sont seuls compétents pour connaître d'une action en réparation collective les tribunaux de première instance et de commerce de Bruxelles ». L'article XVII.42 permet déjà de pallier la formulation hasardeuse de l'article XVII.35, dans la mesure où il dispose que « la requête ayant pour objet une réparation collective est adressée ou déposée au greffe du tribunal de première instance, ou, le cas échéant, du tribunal de commerce ». Le nouvel article 633ter du Code judiciaire (contenu dans le second texte de l'initiative gouvernementale [233]) y fait écho et confirme également que « le tribunal de première instance, le cas échéant, le tribunal de commerce, de Bruxelles et en degré d'appel, la cour d'appel de Bruxelles, sont seuls compétents pour les actions en réparation collective visées au Titre 2 du Livre XVII du Code de droit économique ».

    Enfin, notons que - contrairement à la proposition de Loi déposée par S. De Clerck et consorts [234] - la Loi n'a pas estimé opportun d'automatiquement confier les procédures en réparation collective à une chambre à trois magistrats [235], ni d'imposer au(x) magistrat(s) concerné(s) de suivre une formation particulière en matière de procédures de réparation collective, que ce soit en première instance ou en appel [236].

    7.4. Tierce opposition et interventions

    L'exposé des motifs confirme expressément que les membres du groupe ne peuvent être considérés comme des tiers [237], de telle sorte qu'une tierce opposition par ces consommateurs à l'encontre d'une décision les concernant est exclue [238].

    Pour les mêmes motifs [239], une intervention volontaire par un membre du groupe qui n'aurait, par exemple, pas exercé son droit d'option dans le délai ou selon les modalités imposées ne peut être accueillie.

    La Loi ne traite pas expressément du sort à réserver aux interventions par ou contre des vrais « tiers », tels les appels en garantie. La Loi ne dérogeant pas expressément aux articles 811 et suivants du Code judiciaire, des interventions (volontaires ou forcées) peuvent donc être formées dans le cadre d'actions en réparation en collective, pourvu que les conditions applicables à de tels incidents soient remplies. Le défendeur impliqué dans une telle action pourrait dès lors être bien inspiré d'appeler son assureur en garantie, idéalement dès la notification de la requête en réparation collective, de façon à ce que celui-ci soit à la cause dès la phase (tout à fait essentielle) de la recevabilité.

    7.5. Désistement

    L'article XVII.65, § 3, prévoit que, par dérogation à l'article 821 du Code judiciaire, le représentant ne peut pas se désister de l'action introduite. En effet, se faisant, il lèserait les droits du groupe [240]. Le désistement d'instance est lui, par contre, possible moyennant l'accord du juge [241].

    Compte tenu de la mission de défense des intérêts du groupe confiée au représentant, il paraît improbable que le juge contraigne un représentant à poursuivre l'instance si celui-ci souhaite s'en désister et que le juge a refusé un tel désistement. En effet, quelles garanties un tel représentant peut-il encore offrir aux membres du groupe?

    Rappelons que la Loi ne prévoit pas de possibilité formelle de remplacer le représentant au motif qu'il ne serait plus « adéquat », alors qu'il répond toujours formellement aux conditions visées par l'article XVII.39 [242].

    7.6. Interactions entre action en réparation collective et autres procédures
    7.6.1. Interactions avec l'action pénale

    L'article XVII.67, alinéa 1er, prévoit que « le juge statue sur la recevabilité d'une action en réparation collective, sur l'homologation de l'accord de réparation d'un préjudice collectif ou sur le fond du litige nonobstant toute poursuite exercée devant une juridiction pénale pour les mêmes faits » [243]. Ce faisant, la Loi prévoit une exception expresse à la règle « le criminel tient le civil en état » et au principe contenu à l'article 4 du Titre préliminaire du Code de procédure pénale.

    Il est acquis qu'une action en cessation peut être intentée malgré l'existence d'une instruction pénale qui couvrirait les mêmes faits [244]. La règle « le criminel tient le civil en état » ne trouve donc pas, en règle, à s'appliquer dans les matières couvertes par une action en cessation dans les formes du référé, cette exception étant essentiellement justifiée par le fait que le contentieux de la cessation est présumé urgent [245], et que l'illégalité ou le comportement fautif doit être prévenu ou arrêté dès que possible.

    Pour quel motif le contentieux de la réparation collective doit-il lui aussi bénéficier d'une exception à la règle « le criminel tient le civil en état »? L'exposé des motifs indique que « l'objectif est d'éviter que les poursuites pénales ne retardent et compromettent la procédure de groupe [246] ». La justification est peu convaincante. Toute procédure civile, en ce compris en matière d'indemnisation du dommage, n'a-t-elle pas intérêt à être traitée sans retard? En outre, il est malaisé d'identifier les motifs pour lesquels une procédure de groupe serait « compromise » par des poursuites pénales. Les instances pénales agiraient-elles a priori contre les intérêts des consommateurs? Il n'en est évidemment rien.

    L'objectif avancé par le législateur semble donc inapproprié, sauf à considérer qu'il convient de remettre fondamentalement en question la règle « le criminel tient le civil en état ».

    En conclusion, l'article XVII.67, alinéa 1er, permet, d'une part, au juge pénal statuant sur les intérêts civils relatifs à une infraction pouvant également fonder une action en réparation collective, et, d'autre part, au juge civil statuant sur une telle action en réparation collective, d'adopter des décisions fondamentalement contradictoires relativement au comportement d'une entreprise donnée.

    7.6.2. Interactions avec les actions individuelles

    La Loi entend limiter autant que faire se peut les perturbations ou interférences de procédures individuelles sur l'action en réparation collective [247]. La Loi prévoit dès lors qu'il ne peut y avoir jonction pour connexité entre une action individuelle et une action en réparation collective visant à obtenir réparation [248].

    Elle prévoit en outre que le consommateur qui se constitue partie civile devant une juridiction pénale ne pourra faire partie du groupe et bénéficier de l'action en réparation collective, sauf à se désister de sa constitution de partie civile dans le délai d'option fixé [249].

    Les procédures individuelles déjà introduites par une personne membre du groupe conformément à l'article XVII.38, pourvu qu'il y ait identité de défendeur, d'objet et de cause, s'éteignent dès le moment où le juge rend une décision de recevabilité conformément à l'article XVII.43. Parallèlement, toute nouvelle procédure individuelle introduite par une personne membre du groupe conformément à l'article XVII.38 contre le même défendeur et ayant le même objet et la même clause est déclarée irrecevable, à nouveau à compter de la décision de recevabilité rendue par le juge [250].

    La chronologie mise en place par cette disposition laisse perplexe. En effet, au moment où le juge se prononce sur la recevabilité, le groupe n'est pas encore constitué puisque le mécanisme d'option et les modalités d'exercice de l'option viennent à peine d'être définis. En outre, le délai d'option ne commence à courir qu'à compter du lendemain de la publication de la décision de recevabilité au Moniteur belge [251]. Dans ce contexte, comment justifier que des procédures individuelles s'éteignent automatiquement ou que de nouvelles actions soient déclarées irrecevables au jour où la décision de recevabilité est rendue, dès lors que les consommateurs concernés n'ont pas encore exercé leur option (et donc pas encore posé un choix entre une réparation par voie collective ou par voie individuelle) et que la liste des membres du groupe n'est finale qu'à l'issue dans la dernière phase de la procédure, soit la phase d'exécution?

    L'extinction des procédures individuelles existantes, ou l'irrecevabilité des nouvelles procédures individuelles, ne devrait donc intervenir qu'à compter du moment où la liste finale des membres du groupe est connue et, en tout état de cause, pourvu que les consommateurs concernés aient choisi d'être membres du groupe ou de ne pas s'en exclure (selon que l'opt-in ou l'opt-out s'applique). Les travaux préparatoires reconnaissent que l'on ne peut être membre du groupe qu'à l'expiration du délai d'option [252]. Le texte de l'article XVII.69 mérite donc une reformulation substantielle.

    Enfin, notons que cet article XVII.69 est peu loquace sur la manière dont doit être formalisée l'extinction des procédures individuelles pendantes entre un membre du groupe et le défendeur.

    7.6.3. Interactions entre plusieurs actions en réparation collective

    Nous l'avons dit, la jonction pour connexité entre une action en réparation individuelle et une action en réparation collective n'est pas permise [253]. Est-il par contre envisageable de joindre deux actions en réparation collective pour connexité, par exemple au motif que deux sociétés ont commis une infraction identique à l'égard des consommateurs? La Loi n'aborde pas cette question.

    Le texte actuel n'excluant, par exception aux articles 566 et 856, alinéa 2, du Code judicaire, que la jonction entre une procédure individuelle et une procédure collective, et les exceptions étant de stricte interprétation, une jonction pour connexité entre deux actions en réparation collective ne semble pas exclue. En outre, l'objectif d'économie procédurale poursuivi par le législateur [254] se trouverait conforté par une telle jonction. Notons à ce propos que rien dans la Loi ne permet d'exclure a priori une action en réparation collective à l'encontre d'une pluralité de défendeurs. Les travaux préparatoires contiennent d'ailleurs eux-mêmes certaines références à la notion de « défendeurs » au pluriel [255].

    Si une jonction entre deux actions en réparation collective était effectivement acceptée, serait-on également tenu par la règle figurant à l'article XVII.39 qui impose que le groupe ne soit représenté que par un seul représentant? L'article XVII.39 se référant à la notion de « groupe » et celui-ci étant défini en lien avec le « préjudice collectif », la réponse est à trouver dans la définition de cette notion.

    Ainsi, si l'on se trouve face à un seul et même préjudice collectif (soit un ensemble de dommages individuels ayant une cause commune), il n'existera qu'un seul groupe et dès lors, en vertu de l'article XVII.39, seul un représentant peut intervenir [256]. Par contre, si deux groupes de consommateurs doivent être distingués, au motif que les préjudices trouvent leur origine dans deux causes distinctes, il nous semble que l'article XVII.39 permet que deux représentants soient à la cause [257]. Pour ce faire, il faudrait bien entendu que, malgré l'existence de causes distinctes des dommages, les conditions de la jonction pour connexité soient par ailleurs remplies.

    7.7. Appel

    Les décisions prises par le juge dans le cadre d'une action en réparation collective sont susceptibles d'appel auprès de la cour d'appel de Bruxelles.

    L'article 1068 du Code judiciaire, en vertu duquel tout appel d'un jugement définitif ou avant dire droit saisit du fond du litige le juge d'appel, est d'application [258]. Ce dernier ne renvoie l'affaire au premier juge que s'il confirme, même partiellement, une mesure d'enquête ordonnée dans le jugement dont appel [259].

    En réponse à une question du Conseil d'état, le délégué du ministre a confirmé que la décision d'interjeter appel revenait au représentant, sans que les membres individuels du groupe se prononcent ou soient consultés. Il a notamment indiqué que « le choix de faire ou non partie du groupe s'exerce une fois et est définitif. Les membres du groupe ne sont dès lors pas consultés sur la question de savoir s'il doit être interjeté appel ou non contre la décision du premier juge. C'est le représentant qui assume le risque juridique et financier d'interjeter appel » [260].

    Notons que ce qui précède ne s'applique pas à la décision d'homologation de l'accord de réparation collective. Celle-ci a en effet les effets d'un jugement d'accord au sens de l'article 1043 du Code judiciaire [261]. A ce titre, la décision d'homologation n'est susceptible d'aucun recours de la part des parties litigantes, à moins que l'accord n'ait point été légalement formé [262].

    L'éventuelle décision ordonnant une médiation dans le cadre de la procédure en réparation collective [263] n'est pas davantage susceptible de recours [264].

    7.8. L'autorité de chose jugée
    7.8.1. Général

    L'autorité de chose jugée est une forme de présomption légale, qui veut que la décision du juge est réputée conforme à la vérité [265] et qui fait obstacle à la réitération de la demande [266]. En vertu de l'article 23 du Code judiciaire, pour qu'il y ait autorité de chose jugée, il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

    L'article XVII.57, § 5, confirme que la décision du juge sur le fond lie tous les membres du groupe, à l'exception du consommateur qui, bien que faisant partie du groupe, démontre n'avoir raisonnablement pu prendre connaissance de la décision de recevabilité (voy. point 5.3.2., supra). En outre, les travaux préparatoires confirment que l'autorité de chose jugée s'étend non seulement à l'égard « du demandeur et des défendeurs, mais également à l'égard de l'ensemble des membres du groupe » [267].

    7.8.2. Action en cessation préalable

    Une question délicate se pose au sujet de l'autorité de chose jugée si l'action en réparation collective a été précédée d'une action en cessation fondée sur les mêmes faits, la même cause et à l'encontre du même défendeur.

    Il s'écrit fréquemment qu'un ordre de cessation est revêtu d'une autorité de chose jugée erga omnes [268] et que celui-ci liera donc en principe toutes les juridictions de même degré ultérieurement saisies du litige (sous réserve de l'hypothèse d'une action ultérieure où le demandeur invoquerait une autre base juridique) [269], en ce compris si le juge ultérieurement saisi doit statuer sur une demande d'indemnisation faisant suite à un ordre de cessation [270]. A appliquer ce principe d'autorité erga omnes strictement, un ordre de cessation constatant l'existence ou l'absence d'une infraction donnée devrait s'imposer au juge saisi d'une action en réparation collective, ainsi qu'au défendeur et au groupe de consommateurs, que ceux-ci aient ou non été parties à la procédure en cessation.

    Si la décision antérieure constate une infraction et ordonne la cessation, il semble peu contestable que cette décision puisse être invoquée à l'encontre du défendeur dans l'action en réparation collective, bien que (tous) les membres du groupe n'aient pas été parties à l'instance antérieure. Les droits de la défense du défendeur ont en effet en principe pu être exercés dans le cadre de la procédure en cessation. Il est cependant à craindre qu'une telle situation conduise à des abus procéduraux au détriment du défendeur. Ainsi, en anticipation d'une action en réparation collective et avec le soutien d'un représentant potentiel, un consommateur ayant un dossier particulièrement favorable pourrait intenter une action en cessation à l'encontre d'une entreprise donnée. Si cette action, jugée selon les formes du référé et soumise à un magistrat unique du tribunal de commerce à Bruxelles ou ailleurs, conduit à la condamnation du défendeur, ce dernier se verra opposer l'autorité de la chose jugée dans le cadre d'une action en réparation collective ultérieure fondée sur les mêmes faits, ne pouvant plus remettre en cause la faute ou l'infraction commise. La possibilité d'un tel test case nous paraît particulièrement dangereuse et inéquitable du point de vue du défendeur.

    Si la décision du juge des cessations conclut à l'absence d'infraction, ce point du dispositif doit-il s'imposer à l'ensemble du groupe de consommateurs (qui étaient en large majorité absents de la procédure en cessation) et donc conduire à l'irrecevabilité de l'action en réparation collective dans son ensemble?

    Compte tenu des principes contenus dans l'arrêt « Stappers » de la Cour de cassation [271] (arrêt modalisant fortement l'autorité de chose jugée erga omnes des décisions pénales [272]), une telle solution semble devoir être refusée car contraire aux droits de la défense des membres du groupe. Ceux-ci n'ayant en effet pas été impliqués dans la procédure en cessation, ils n'auront aucunement eu l'opportunité de faire valoir leurs arguments, faits ou pièces à l'égard du point décidé par le juge des cessations, ce qui semble contraire à l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. Sur la base de ce qui précède, l'autorité de chose jugée de la décision du juge des cessations concluant à l'absence d'infraction pourrait uniquement être invoquée à l'encontre du/des consommateur(s) ayant été partie(s) à la procédure en cessation, par exemple, afin de contester son/leur inscription sur la liste définitive du groupe, mais non à l'encontre du représentant ou du groupe dans son ensemble (absents de la procédure en cessation). En d'autres mots encore, l'autorité de chose jugée de la décision concluant à l'absence d'infraction dans une procédure bipartite traditionnelle ne pourrait pas automatiquement conduire à l'irrecevabilité de l'action en réparation collective dans son ensemble.

    8. Considérations finales

    La nouvelle Loi introduit dans l'arsenal juridique belge une procédure résolument nouvelle, tant au plan de la réparation du dommage qu'au plan procédural strict. Cet ambitieux texte, que le Gouvernement a mené à son terme avec une énergie et une rapidité remarquables [273], nous laisse néanmoins dubitatives.

    D'une part, au-delà des objectifs évidents d'un meilleur accès à la justice et d'une rationalisation de l'administration judiciaire, la Loi poursuit également - si non de façon assumée, à tout le moins dans les faits - des fonctions de réglementation, de prévention, de dissuasion ou encore de sanction. De telles fonctions nous semblent fort éloignées de la fonction réparatrice et indemnitaire expressément visée par la Loi, et relèvent en réalité davantage du droit réglementaire ou du droit pénal [274]. Ce mélange des genres doit être souligné car il permet d'identifier la portée réelle de la nouvelle procédure en réparation collective.

    D'autre part, la Loi n'offre qu'une prévisibilité limitée, que ce soit au représentant, aux consommateurs, au défendeur ou au liquidateur, sur le déroulement pratique d'une action en réparation collective. En commission de la Chambre, le ministre a d'ailleurs indiqué à plusieurs reprises que la Loi n'allait nullement régler l'ensemble des détails de la procédure [275].

    Les nombreuses incertitudes qui demeurent ne pourront être levées que par la jurisprudence, celle-ci dépendant bien entendu du nombre de procédures en réparation collective qui seront intentées.

    [1] F. Danis, avocate au barreau de Bruxelles; E. Falla, doctorante au Centre de droit privé de l'Université libre de Bruxelles; F. Lefèvre, avocate au barreau de Bruxelles.
    [2] M.B., 29 avril 2014, pp. 35201-35211.
    [3] Arrêté royal du 4 avril 2014 relatif à l'entrée en vigueur de certains livres du Code de droit économique (M.B., 29 avril 2014, pp. 35212-35213).
    [4] Loi du 27 mars 2014 portant insertion des dispositions réglant des matières visées à l'art. 77 de la Constitution dans le Livre XVII « Procédures juridictionnelles particulières » du Code de droit économique et modifiant le Code judiciaire en vue d'attribuer aux cours et tribunaux de Bruxelles une compétence exclusive pour connaître de l'action en réparation collective visée au Livre XVII, Titre 2, du Code de droit économique (M.B., 29 avril 2014, pp. 35197-35198).
    [5] Voy. infra, point 7.8.
    [6] Au moins 14 états membres disposent actuellement de différentes formes de recours collectifs en réparation. Pour une présentation et une comparaison de ces différents mécanismes nationaux, voy. not. Centre for Consumer Law of the Katholieke Universiteit Leuven, « An analysis and evaluation of alternative means of consumer redress other than redress through ordinary judicial proceedings, Final Report », 2007, paras. 384-440, ec.europa.eu/consumers/redress/reports_studies/comparative_report_en.pdf; R.P. Mulheron, « The Case for an Opt-out Action for European Member States: A Legal and Empirical Analysis », Columbia Journal of European Law, 2009, pp. 409-454; P.H. Lindblom, « Group Litigation in Scandinavia », Zeitschrift fur Zivilprozess International, 2008, p. 85; S. Pietrini, « Le développement des recours collectifs en droit des pratiques anticoncurrentielles, panorama des systèmes existants en Europe », Revue des droits de la concurrence, n° 4/2011, pp. 1-14; E. Falla, The Role of the Court in Collective Redress Litigation. Comparative Report, Bruxelles, Larcier, 2014.
    [7] Les critiques traditionnellement formulées à l'encontre de la class action américaine portent sur le coût très élevé de ces actions, dont la croissance aurait des effets directs sur l'économie américaine prise dans son ensemble (hausse des primes d'assurances répercutée sur les prix des biens et des services et faillites d'entreprises) et la judiciarisation de la vie économique, en général, et des relations entre consommateurs et professionnels, en particulier. Les reproches concernent également le système de rémunération des avocats qui peut consister en un pourcentage des indemnités obtenues par les membres de la class (les contigency fees) et qui profiterait plus aux avocats qu'aux victimes. Le système de la class action est finalement critiqué au motif qu'elle serait source de conflits d'intérêts: entre l'avocat et les personnes qu'il représente; entre demandeurs; entre avocats.
    [8] Livre blanc sur les actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles communautaires sur les ententes et les abus de position dominante du 2 avril 2008, COM(2008), 165.
    [9] 27 novembre 2008, (COM), 2008, 794.
    [10] Consultation publique « Renforcer la cohérence de l'approche européenne en matière de recours collectifs », COM(2010) 135 final du 31 mars 2010.
    [11] COM(2013) 401 final.
    [12] « Recommandation de la Commission du 11 juin 2013 relative à des principes communs applicables aux mécanismes de recours collectifs en cessation et en réparation dans les états membres en cas de violation de droits conférés par le droit de l'Union », C(2013) 3539/3, (ci-après, la recommandation). Pour une présentation de la recommandation, voy. not. S. Voet, « Europa zet class actions definitief op de agenda », R.W., 2013-2014, n° 1, pp. 37-39.
    [13] Résolution du Parlement européen du 2 février 2012 « Vers une approche européenne cohérente en matière de recours collectif » (2011/2089(INI)).
    [14] Sur la compatibilité d'un tel mécanisme procédural avec les principes fondamentaux du droit de la procédure civile belge et avec les exigences du procès équitable, voy. not. J. Van Compernolle, « L'introduction d'une class action en droit belge: compatibilité ou incompatibilité avec les principes fondamentaux du droit processuel? », in Vers une class action en droit belge?, Bruxelles-Bruges, la Charte-die Keure, 2008, pp. 165-176.
    [15] La compatibilité d'un tel mécanisme procédural avec le droit commun de la responsabilité est nettement moins examinée que sa compatibilité avec le droit de la procédure civile belge. Notons toutefois les études de L. Frankignoul, « L'action en réparation collective ou un mécanisme procédural permettant de prendre le droit au sérieux », T.B.B.R./R.G.D.C., 2012/5, pp. 194-207; C. Botman, « De la réparation du dommage dans l'hypothèse de l'introduction en droit belge d'une action collective de type opt-out: importation du modèle québécois? », R.G.A.R., 2013/1, n° 14.934; P. Van Omme­slaghe, « Une class action en droit belge? Et le droit des obligations? », in Liber Amicorum François Glansdorff et Pierre Legros, Bruylant, 2013, pp. 415-441 et la recherche doctorale en cours sur ce sujet menée par E. Falla au Centre de droit privé de l'Université libre de Bruxelles.
    [16] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, pp. 10 et 15.
    [17] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 7.
    [18] Pour une étude approfondie sur ce type de dommage, voy. I.N. Tzankova, Strooischade, Een verkennend onderzoek naar een nieuw rechtsfenomeen, Den Haag, Sdu Uitgevers, 2005.
    [19] Par exemple, l'immunité conférée aux membres du groupe, en cas de jugement défavorable, quant aux honoraires de l'avocat du représentant et aux dépens vise à écarter l'obstacle économique de la justice.
    [20] Par exemple, le système de représentation qui se trouve au coeur du recours collectif permet aux membres du groupe de se désinvestir d'une lutte judiciaire parfois éprouvante du point de vue psychologique tout en bénéficiant de la condamnation prononcée.
    [21] B. Allemeersch et M. Piers, « De invoering van een class action in België naar Amerikaans model », in G. Closset-Marchal et J. Van Compernolle (eds.), Naar een class action in het Belgisch recht?/Vers une class action en droit belge?, Bruxelles-Bruges, la Charte-die Keure, 2008, pp. 1 et s.; W. Eyskens et N. Kaluma, « La class action et le droit belge. Va-et-vient de part et d'autre de l'Atlantique », J.T., 2008, n° 4; G. de Leval, Le citoyen et la justice civile: un délicat équilibre entre efficacité et qualité, Bruylant, 2006, p. 96.
    [22] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 7.
    [23] L. Frankignoul, « L'action en réparation collective ou un mécanisme procédural permettant de prendre le droit au sérieux », T.B.B.R./R.G.D.C., 2012/5, p. 195.
    [24] « La 'class action' à la belge: une épée de Damoclès pour les entreprises », interview de H. Boularbah, L'Echo du 17 septembre 2009, p. 14.
    [25] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 11.
    [26] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, pp. 7-8 et 21.
    [27] Voy. à ce propos, O. De Schutter, Fonction de juger et droits fondamentaux, transformation du contrôle juridictionnel dans les ordres juridiques américains et européens, Bruxelles, Bruylant, 1999. pp. 904-942, ainsi que J.-P. Buyle et M. Mairlot, « Le droit des actions collectives », in L. Marlière (ed.), Les 25 marchés émergents du droit, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 168.
    [28] L. Frankignoul, « L'action en réparation collective ou un mécanisme procédural permettant de prendre le droit au sérieux », T.B.B.R./R.G.D.C., 2012/5, p. 195.
    [29] Art. XVII.36.
    [30] Art. XVII.37. L'exposé des motifs précise que la violation d'une de ces normes ne suffit pas en tant que telle à fonder une action en réparation collective; le représentant devra bien évidemment démontrer un préjudice subi par les membres du groupe en lien causal avec cette faute (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 22).
    [31] Livre VI et Livre XIV CDE.
    [32] Livre IV et Livre V CDE.
    [33] Livre XI CDE.
    [34] Loi du 25 février 1991 relative à la responsabilité des produits défectueux; Livre IX CDE.
    [35] Livre XII CDE; Loi du 13 juin 2005 relative aux communications électroniques.
    [36] Livre VII CDE.
    [37] Loi du 9 juillet 1971 réglementant la construction d'habitations et la vente d'habitations à construire ou en voie de construction.
    [38] Loi du 29 avril 1999 relative à l'organisation du marché de l'électricité; Loi du 29 avril 1999 relative à l'organisation du marché du gaz et au statut fiscal des producteurs d'électricité.
    [39] Recommandation, considérant n° 7.
    [40] Recommandation, art. 3.
    [41] Livre Ier, Titre 2, Chapitre 13, art. I.21, 1°, CDE.
    [42] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 16.
    [43] Art. XVII.38, § 2.
    [44] Voy. infra, point 3.1.1.
    [45] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 21; Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/004, p. 46.
    [46] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 22.
    [47] Ibid.
    [48] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/006.
    [49] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 20.
    [50] Art. XVII.35.
    [51] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 12.
    [52] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 16.
    [53] Voy. not. M. Taeymans, « Consumenten kunnen collectieve vordering instellen », Juristenkrant, 26 mars 2014, n° 286, p. 1.
    [54] Nous expliquons plus loin qu'en faisant ce choix la Loi belge s'écarte de la recommandation de la Commission européenne qui impose le système d'inclusion et qui n'admet d'exceptions à ce principe uniquement pour des motifs tenant à la bonne administration de la justice (recommandation, art. 21).
    [55] Nous pouvons, par exemple, lire dans l'exposé des motifs que « le règlement de procédure ne modifie en rien le droit en matière de responsabilité civile »; « la réparation aura lieu conformément au droit commun, soit en nature soit par équivalent » (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 57).
    [56] La Loi précise en effet que lorsque la réparation a lieu par équivalent, le montant de l'indemnité peut être évalué sur une base individuelle ou globale, pour l'ensemble ou certaines catégories du groupe (art. XVII.54, § 1er, 7° et Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, pp. 37-38).
    [57] Pour plus de détails: P. Van Ommeslaghe, Droit des obligations, tome II, n° 1068 et les réf. not. à la jurisprudence de la Cour.
    [58] P. Van Ommeslaghe, « Une class action en droit belge? Et le droit des obligations? », in Liber Amicorum François Glansdorff et Pierre Legros, Bruxelles, Bruylant, 2013, p. 433.
    [59] Pour une étude approfondie des modifications que l'introduction d'une class action du type opt-out introduirait dans notre droit de la responsabilité civile, voy. C. Botman, « De la réparation du dommage dans l'hypothèse de l'introduction en droit belge d'une action collective de type opt-out: importation du modèle québécois? », R.G.A.R., 2013/1, n° 14.934.
    [60] P. Van Ommeslaghe, « Une class action en droit belge? Et le droit des obligations? », in Liber Amicorum François Glansdorff et Pierre Legros, Bruxelles, Bruylant, 2013, p. 434.
    [61] Sauf lorsqu'il est prévu dans la décision ou l'accord que l'affaire peut être ramenée devant le juge dans cette hypothèse.
    [62] Cf. L. Frankignoul, « L'action en réparation collective ou un mécanisme procédural permettant de prendre le droit au sérieux », T.B.B.R./R.G.D.C., 2012/5, p. 205.
    [63] Nous renvoyons au point 6.2., infra pour de plus amples explications concernant cette étape de la procédure.
    [64] Nous soulignons (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300-001, exposé des motifs, p. 15).
    [65] Voy., p. ex., à la page 37 de l'exposé des motifs: « la réparation aura lieu conformément au droit commun, soit en nature, soit par équivalent » (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300-001, exposé des motifs, p. 37).
    [66] Cf. A. Puttemans, « Le mécanisme de l'opt-out envisagé en droit belge », Journal des sociétés, juillet 2011, n° 89, France, p. 39.
    [67] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 13.
    [68] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 15.
    [69] Sur le caractère essentiel de cette étape du point de vue de la protection des intérêts des membres absents, voy. not. S. Voet, Een Belgische vertegenwoordigende collectieve rechtsvordering, Antwerpen-Cambridge, Intersentia, 2012, pp. 181-185.
    [70] Art. XVII.36, 2°.
    [71] Art. XVII.36, 3°. L'exposé des motifs précise que le terme « efficient » « met l'accent sur l'optimisation (dans le chef des consommateurs ou sur le plan de l'efficacité procédurale) des outils mis en oeuvre pour parvenir à un résultat » (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 9). L'exposé des motifs ajoute plus loin que l'exigence d'efficience par rapport à une action de droit commun « implique que le juge évalue, sur la base des faits et motifs invoqués par les parties, l'intérêt pour le groupe de consommateurs potentiellement concernés de recourir à une action en réparation collective plutôt qu'à une procédure classique en réparation » (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 21).
    [72] Art. XVII.43, § 2.
    [73] Art. XVII.43, § 3 (sans préjudice de la notification aux parties conformément à l'art. 792 du Code judiciaire).
    [74] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 31.
    [75] Art. XVII.45.
    [76] Art. XVII.49, § 2 et § 4.
    [77] Art. XVII.48.
    [78] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 14.
    [79] Art. XVII.42, § 2.
    [80] Enoncées à l'art. XVII.36.
    [81] Art. XVII.44, § 1er qui fait référence à l'art. XVII.45, § 3, 2° à 13°.
    [82] Art. XVII.49, § 4.
    [83] Art. XVII.51.
    [84] La réponse est sans doute positive.
    [85] Nous soulignons.
    [86] G. De Leval, Eléments de procédure civile, 2e édition, Bruxelles, Larcier, 2005, p. 93.
    [87] Nous soulignons.
    [88] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 29.
    [89] Cass., 30 juin 2000, Pas., 2000, I, p. 424. Voy. égal. J.-Fr. Funck, « Le délibéré et le jugement », in Le procès civil accéléré?, Bruxelles, Larcier, 2007, pp. 175 et s.
    [90] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 8.
    [91] Art. XVII.56.
    [92] Cf. art. XVII.56 qui renvoie aux art. XVII.49 à XVII.51.
    [93] Art. XVII.55.
    [94] Art. XVII.54, § 1er, 6°.
    [95] En cas d'accord, art. XVII.45, § 3, 6°; en cas de décision sur le fond, art. XVII.54. § 1er, 7°.
    [96] En cas d'accord, art. XVII.49, § 3; en cas de décision sur le fond, art. XVII.54, § 2.
    [97] Art. XVII.45, § 3, 7° (en cas d'accord) et art. XVII.54, § 1er, 8° (en cas de décision sur le fond).
    [98] Art. XVII.58, § 4.
    [99] Art. XVII.60.
    [100] Art. XVII.59, § 1er.
    [101] Art. XVII.61, § 1er.
    [102] Le service de médiation pour le consommateur doit être créé par le futur Livre XVI du Code de droit économique, faisant actuellement l'objet du projet de Loi portant insertion du Livre XVI, « Règlement extrajudiciaire des litiges de consommation » dans le Code de droit économique (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3360/001).
    [103] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 25.
    [104] Ne satisfaisant pas aux prescrits de l'article XVII.39, notamment concernant l'absence de poursuite d'une activité économique, la société Deminor n'aura pas qualité pour agir en tant que représentant.
    [105] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, pp. 12 et 25.
    [106] La liste des treize membres en cause est disponible sur le site du SPF Economie à l'adresse http://economie.fgov.be/fr/binaries/Composition_Conseil_Consommation_tcm326-225389.pdf.
    [107] Soit en excluant les syndicats, dépourvus de personnalité juridique, et les mutualités dont les statuts n'ont pas été publiés conformément à la Loi du 6 août 1990 relative aux mutualités et aux unions nationales de mutualités (et donc également dépourvues de personnalité juridique).
    [108] Soit, d'après le document visé à la note 106, la Fédération des Coopératives de Belgique (FEBECOOP) et le Réseau des Consommateurs Responsables.
    [109] www.test-achats.be/informations/association, onglet « Structures ».
    [110] Voy. Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 34.
    [111] C(2013) 3539/3, points 17 et 18.
    [112] Voy. not. P. Dollat, « Vers la reconnaissance généralisée du principe de l'égalité de traitement entre les personnes dans l'Union européenne », J.D.E., 2002, pp. 57 et s. et M. Tison, « L'égalité de traitement dans la vie des affaires sous le regard du droit belge », J.T., 2002, pp. 697 et s.
    [113] Art. XVII.36, 2°.
    [114] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 27.
    [115] Pour un aperçu des conséquences néfastes (tant sur le plan de la protection des intérêts des membres du groupe que sur celui du respect de certaines questions d'éthique) engendrées par l'application du principe suivant lequel le tribunal doit donner la priorité à la première requête déposée, voy. not. P.-C. Lafond, L'accès à la justice civile au Québec. Portrait général, Cowansville, Editions Y. Blais, 2012, p. 157.
    [116] Traduction libre du néerlandais; Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, avis du Conseil d'état, p. 74.
    [117] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, avis du Conseil d'état, p. 74.
    [118] Voy. point 6., infra; le liquidateur devra gérer la constitution de la liste des membres du groupe et assurer la distribution des fonds payés par le défendeur ainsi que la gestion du reliquat éventuel.
    [119] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 12.
    [120] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 13.
    [121] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 34.
    [122] Doc. parl., Ch. repr., n° 53300/004, p. 17.
    [123] Ibid., p. 18.
    [124] Ibid., p. 25.
    [125] Ibid., p. 2.
    [126] Ibid., p. 37.
    [127] Ibid., p. 38.
    [128] L'Echo, 18 mars 2014, « La 'class action' donne à Test-Achats un quasi-monopole ».
    [129] Voy. point 2.2.2., supra.
    [130] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, pp. 41-42.
    [131] M. Maleske, Hedging Bets: third-party Litigation Funding Gains Steam in the US, www.insidecounsel.com/2009/12/01/hedging-bets.
    [132] New York City Bar Association, Formal Opinion 2011-2: Third Party Litigation Financing, juin 2011, et en particulier la citation de B. Appelbaum, « Investors Put Money on Lawsuits to het Payouts », N.Y. Times, 14 novembre 2010.
    [133] R. Lloyd, « The New, New Thing », The American Lawyer, 17 mai 2010, www.law.com. Voy. Fulbrook Management LLC, Investiging in Commercial Claims, Nutshell Primer, http://fulbrookmanagement.com/publications/Nutshell-Primer.pdf, p. 21.
    [134] M. Scherer et A. Goldsmith, « Third Party Funding in International Arbitration in Europe, Part 1 - Funders' perspectives », Rev. Dr. Affaires Internationales/International Business Law Journal, 2012, n° 2, pp. 209 et s.
    [135] B. Cremades, Third party litigation funding: investing in arbitration, 32nd Annual Meeting of the ICC Institute of World Business Law, Paris, 26 novembre 2012, pp. 13 et 14.
    [136] L. Atherton, Third Party Funding in Arbitration: A Perspective from England, KL Gates LLP Newstand, www.klgates.com.
    [137] L. Bench Nieuwveld et V. Shannon, Third Party Financing in International Arbitration, Wolters Kluwer, 2012, p. 8.
    [138] Ou en anglais ICSID, le centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements.
    [139] FTR Holding S.A. (Suisse), Philip Morris Products S.A. (Suisse) and Abal Hermanos S.A. (Uruguay) / la République orientale d'Uruguay, aff. CIRDI, n° ARB/10/7, arbitrage, 19 février 2010, 6, pp. 43-50.
    [140] Bloomberg Philanthropies and Bill & Melinda Gates Foundation, « Michael Bloomberg and Bill Gates Joint to Combat Global Tobacco Epidemic », 23 juillet, 2008; Foley Hoag LLP, « Government of Uruguay Taps Foley Hoag for Representation in International Arbitration Brought by Philip Morris to Overtum Country's Tobacco Regulations », 8 octobre 2010 (www.foleyhoag.com); S. Perry, « Uruguay Won't Cave in on Tobacco Laws », Global Arbitartion Review, 7 octobre 2010 (www.mikebloomberg.com); Bloomberg Philanthropics, « Bloomberg Philanthropics Pledges Assitance to President José Mujica as the Tobacco Industry Targets Uruguayés Gold Standard Anti-Tobacco Laws », 10 novembre 2010 (www.mikebloomberg.com).
    [141] Pour un examen complet de la problématique relative à la composition du groupe, voy. not. J. Stuyck, « Class actions in Europe? To opt-in or to opt-out, that is the question », European Business Law Review, 2009, pp. 483-505; H.-W. Mickilitz, « Collective private enforcement of consumer law: the key questions », in W.H. van Boom et M. Loos (eds.), Collective Enforcement of Consumer Law. Securing Compliance in Europe through Private Group Action and Public Authority Intervention, Groningen, Europa Law Publishing, 2007, pp. 20 et s.; S. Voet, Een Belgische vertegenwoordigende collectieve rechtsvordering, Antwerpen-Cambridge, Intersentia, 2012, pp. 267-291; G. Patetta, « Opportunité du choix de l'opt-in/opt-out. Le point de vue de l'UFC. Que choisir? », in A. Legendre (coord.), L'action collective ou l'action de groupe. Se préparer à son introduction en droit français et en droit belge, Bruxelles, Larcier, 2010, pp. 90 et s.
    [142] Recommandation, art. 21.
    [143] Art. XVII.43, § 2, 3°.
    [144] Art. XVII.43, § 2, 7°. Le juge ne peut fixer un délai inférieur à trente jours ni supérieur à trois mois.
    [145] Art. XVII.43, § 4.
    [146] Nous verrons plus loin que la Loi prévoit une exception à cette règle. Lorsque le système d'opt-out est retenu, le consommateur à qui un accord amiable homologué ou une décision sur le fond est opposé, peut en contester son opposabilité s'il démontre qu'il était dans l'impossibilité de prendre connaissance de la décision de recevabilité de l'action en réparation collective (art. XVII.49, § 4 (accord) ou art. XVII.54, § 5 (décision sur le fond)).
    [147] S. Voet, Een Belgische vertegenwoordigende collectieve rechtsvordering, Antwerpen-Cambridge, Intersentia, 2012, pp. 239-240; D. Carter, « Notice and The Protection of Class Members' Interests », Southern California Law Review, 1996, pp. 1121-1161.
    [148] A l'exception de l'hypothèse dans laquelle un accord de réparation collective serait négocié en dehors de toute procédure contentieuse. Dans pareille situation, les membres du groupe connaîtront l'importance et les modalités de la réparation au moment de faire leur choix de s'exclure du groupe ou de s'y insérer, suivant le système d'option retenu.
    [149] La doctrine américaine parle de finality ou closure. Voy. not. S. Issacharoff et G.P. Miller, « Will Aggregate Litigation Come to Europe? », Vanderbilt Law Review, 2009, pp. 11-12; W.B. Rubenstein, « Finality in Class Action Litigation: Lessons from Habeas », New York University Law Review, 2007, pp. 790-869.
    [150] Art. XVII.43, § 2, 3°.
    [151] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 23.
    [152] Art. XVII.38, § 1, 2°.
    [153] La Loi précise que la « résidence habituelle » doit être entendue au sens de l'art. 4, § 2, du Code de droit international privé.
    [154] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, pp. 24-25.
    [155] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 28.
    [156] Art. XVII.42, § 1er, 3°.
    [157] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 29.
    [158] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 30.
    [159] Dans ce sens, voy. S. Voet, Een Belgische vertegenwoordigende collectieve rechtsvordering, Antwerpen-Cambridge, Intersentia, 2012, pp. 277-278.
    [160] P.-C. Lafond, Le recours collectif, le rôle du juge et sa conception de la justice: impact et évolution, Cowansville, Yvon Blais, 2006, p. 218.
    [161] I.N. Tzankova, Toegang tot het recht bij massaschade, Deventer, Kluwer, 2007, p. 148.
    [162] Sur le débat concernant la compatibilité le système d'opt-out avec les droits fondamentaux et les principes fondamentaux de droit judiciaire, voy. not. S. Guinchard, « Le droit français en matière de class action », ainsi que J. Van Compernolle, « L'introduction d'une class action en droit belge: compatibilité ou incompatibilité avec les principes fondamentaux du droit processuel? », in G. Closset-Marchal et J. van Compernolle (eds.), Naar een class action in het Belgisch recht/Vers une class action en droit belge?, Bruxelles-Bruges, la Charte-die Keure, 2008, respectivement pp. 47-60 et pp. 165-176.
    [163] Art. 144.
    [164] Art. 6 et 13.
    [165] J. Van Compernolle, « L'introduction d'une class action en droit belge: compatibilité ou incompatibilité avec les principes fondamentaux du droit processuel? », in G. Closset-Marchal et J. Van Compernolle (eds.), Naar een class action in het Belgisch recht/Vers une class action en droit belge?, Bruxelles-Bruges, la Charte-die Keure, 2008, n° 8.
    [166] P.-C. Lafond, Le recours collectif comme voie d'accès à la justice pour les consommateurs, Montréal, Thémis, p. 379.
    [167] P.-C. Lafond, Le recours collectif comme voie d'accès à la justice pour les consommateurs, Montréal, Thémis, p. 355.
    [168] J. Van Compernolle, « L'introduction d'une class action en droit belge: compatibilité ou incompatibilité avec les principes fondamentaux du droit processuel? », in G. Closset-Marchal et J. van Compernolle (eds.), Naar een class action in het Belgisch recht/Vers une class action en droit belge?, Bruxelles-Bruges, la Charte-die Keure, 2008, n° 16.
    [169] Aux états-Unis, des études empiriques ont abouti à la même conclusion: moins d'1% des membres du groupe font usage de leur droit d'exclusion. Voy., p. ex., T. Eisenberg et G. Miller, « The Role of Opt outs and Objectors in Class Action Litigation: Theoritical and Empirical Issues », Vanderbilt Law Review, 2004, pp. 1532-1533.
    [170] P.-C. Lafond, Le recours collectif comme voie d'accès à la justice pour les consommateurs, Montréal, Thémis, p. 356.
    [171] Dans ce sens, voy. S. Voet, Een Belgische vertegenwoordigende collectieve rechtsvordering, Antwerpen-Cambridge, Intersentia, 2012, p. 289.
    [172] Art. XVII.43, § 2, 9°.
    [173] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 31. Notons, toutefois, que pour aider le juge à assurer une diffusion large, efficace et adaptée de la décision de recevabilité, l'exposé des motifs aurait pu ne pas se limiter à la presse écrite et énumérer des modes de publicité plus modernes tels que la diffusion par voie de radio, télévision ou réseaux sociaux. Des études nord-américaines montrent, en effet, que les citoyens ne lisent presque pas les quotidiens et que partant, la publication d'une décision par voie de presse est dans la plupart des cas inefficace (voy. not. S. Poulain, « Les avis aux membres d'un recours collectif: un outil à améliorer », Cinquième colloque sur les recours collectifs, l'Association du Barreau canadien, Actes de la formation juridique permanente, vol. 7, 2010, pp. 185 et s.; J.S. Ginsberg, « Class Action Notice: The Internet's Time Has Come », University of Chicago Legal Forum, 2003, p. 757; L.A. Rieders, « Old Principles, New Technology, and the Future of Notice in Newspapers », Hofstra Law Review, 2010, pp. 1042-1043).
    [174] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 31; P.-C. Lafond, Le recours collectif comme voie d'accès à la justice pour les consommateurs, Montréal, Thémis, p. 379; T.B. Hilsee, « Effective Class Action Notice Promotes Access to Justice: Insight from a New U.S. Federal Judicial Center Checklist », in J. Kalajdzic (ed.), Accessing Justice. Appraising Class Actions. Ten Years After Dutton, Hollick & Rumley, Canada, LexisNexis, 2011, p. 275; etc.
    [175] Notons que cette exception s'applique uniquement aux consommateurs devenus membres du groupe à défaut d'avoir manifesté leur volonté de ne pas en faire partie (opt-out). Art. XVII.49, § 4 (accord) ou art. XVII.54, § 5 (décision sur le fond).
    [176] Art. XVII.45, § 3, 3° et 6°.
    [177] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 34.
    [178] Art. XVII.54, § 1er, 7°.
    [179] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 24 et art. XVII.54, § 1, 7° (décision sur le fond) et art. XVII.45, § 3, 6° (accord).
    [180] Art. XVII.54, § 1er, 9° (décision sur le fond) et art. XVII.45, § 3, 10° (accord).
    [181] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 39.
    [182] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 39.
    [183] R.P. Mulheron, The Class Action in Common Law Legal Systems. A comparative perspective, Oxford, Portland, Oregon, Hart Publishing, 2004, p. 423: « Where an aggregate assessment of damages has been adopted in one of the scenarios that lends to that approach, the management difficulties avoied in the assessment may arise again at the distribution stage. »
    [184] Art. XVII.57.
    [185] Art. XVII.57. Sur cette liste, seuls les avocats, officiers ministériels ou les mandataires de justice dans l'exercice de leur profession ou de leur fonction, présentant des garanties de compétence en matière de procédures de règlement de préjudice, pourront être admis. Les frais afférents à l'exécution devront être supportés par le débiteur à la réparation (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 13).
    [186] Art. XVII.60.
    [187] Art. XVII.59, § 1er.
    [188] Art. XVII.61, § 1er.
    [189] Notons que si le juge opte pour une formule de distribution directe des indemnités qui consiste, par exemple, à demander au défendeur de verser directement le montant dû à chaque membre sur son compte bancaire (sur la base des fichiers clients en possession du défendeur, p. ex.), la question de l'affectation du reliquat ne se posera pas.
    [190] G.R. Tremblay, « La procédure d'autorisation est devenue trop facile », Le monde juridique, 2004, n° 3, pp. 7-8; voy. égal. l'étude menée par S. Poulain: « Les règlements de recours collectifs par voie de coupons: la justice sous forme de programme de fidélisation? », in P.-C. Lafond (dir.), L'accès des consommateurs à la justice, Cowansville, Editions Yvon Blais, 2010, pp. 23-31 (S. Poulain relève que dans l'accord qui fait l'objet de son étude seulement 26,8% des membres du groupe ont réclamé le chèque ou le coupon offert par la société débitrice de la réparation).
    [191] Voy. not. W. Branch et G. McMullen, « Take-up Rates: The Real Measure of 'Access to Justice' », avril 2011, accessible en ligne: www.branchmacmaster.com/storage/articles/branch_mcmullen-take_up_rates.pdf; F.P. Morrison et H. M. Rosenberg, « Missing in Action: An Analysis of Plaintiff Participation in Canadian Class Actions », in J. Kalajdzic (ed.), Accessing Justice: Apraising Class Actions Ten Years After Dutten, Hollick & Rumley, Candada, LexisNexis, pp. 57-97.
    [192] P.-C. Lafond, L'accès à la justice civile au Québec. Portrait général, Cowansville, Editions Y. Blais, 2012, p. 155; W. Branch et G. McMullen, « Take-up Rates: The Real Measure of 'Access to Justice' », avril 2011, accessible en ligne: www.branchmacmaster.com/storage/articles/branch_mcmullen-take_up_rates.pdf.
    [193] Art. XVII.61, § 1er, alinéa 2.
    [194] Art. XVII.61, § 2.
    [195] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 42.
    [196] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 42.
    [197] Voy. point 2.2.5., supra.
    [198] Lorsque la distribution collective a pour objet la totalité de l'indemnité adjugée par le tribunal, on parle de « dédommagement fluide » ou de fluid class recovery. Dans le cas où la distribution vise un reliquat partiel des sommes non réclamées, on parle de cy-pres distribution. A propos de cette forme de distribution, voy. not. R.P. Mulheron, « Cy-Près Damages Distributions in England: A New Era for Consumer Redress », European Business Law Review, 2009, pp. 307-342.
    [199] Voy. à titre d'exemple l'affaire Sutherland / Boots Pharmaceuticals (PLC (2002), 21 C.P.C. (5th) 196 (Ont. S.C.J.)): « In a class action involving a drug prescribed for the treatment of hypothyroidism, the recipients were various institutions conducting specific research projects, education and outreach having to do with thyroid disease. »
    [200] Art. XVII.58, § 1er.
    [201] Art. XVII.58, § 3.
    [202] Cass., 5 octobre 1984, Pas., 1985, I, p. 181.
    [203] Voy. not. G. Closset-marchal, « Examen de jurisprudence. Les mesures d'instruction (2000 à 2010) », R.C.J.B., 2011, p. 97 et Rép.not., tome XIII, « Procédure notariale. Principes de droit judiciaire privé », édition 2008, nos 7 et s.
    [204] G. de Leval, Eléments de procédure civile, 2e édition, Bruxelles, Larcier, 2005, pp. 37 et s.
    [205] Cass., 1er mars 1993, Pas., 1993, I, p. 228.
    [206] H. Boularbah et Ch. Marquet, « Tierce opposition », in R.P.D.B., p. 46.
    [207] Art. 1122 C. jud.
    [208] W. Ganshof van der Meersch, concl. avant Cass., 24 janvier 1974, Pas., 1974, I, pp. 546-547.
    [209] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 17.
    [210] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 26.
    [211] Il y aura donc dissociation entre qualité et intérêt au sens de l'art. 17 du Code judiciaire; voy. not. G. de Leval, Eléments de procédure civile, 2e édition, Bruxelles, Larcier, 2005, pp. 24 et s.
    [212] M. Posnow-Wurm, « Recours collectifs et conflits de juridictions », Rev. Dr. U.L.B., 2010, p. 15.
    [213] W. Eyskens et N. Kaluma, « La class action et le droit belge. Va-et-vient de part et d'autre de l'Atlantique », J.T., 2008, p. 487.
    [214] I. Verougstraete, « Class actions: les doutes et certitudes du magistrat », Cah. Jur., 2012/4, p. 100.
    [215] Voy. égal. point 2.2.4., supra.
    [216] Pour une analyse détaillée des enjeux liés à cette question, nous renvoyons notamment à l'ouvrage collectif édité par A. Nuyts et N.E. Hatzimihail, Cross-Border Class Actions - The European Way, s.e.l.p., Munich, 2014 et à la contribution de M. Posnow-Wurm, « Recours collectifs et conflits de juridictions », Rev. Dr. U.L.B., 2010/1-2.
    [217] Pour les consommateurs ne résidant pas habituellement en Belgique, seul le mécanisme de l'opt-in trouve à s'appliquer. Voy. point 5., supra.
    [218] C. González Beilfuss et B. Añoveros Terradas, « Compensatory Consumer Collective Redress and the Brussels I Regulation (Recast) », in Cross-Border Class Actions - The European Way, s.e.l.p., Munich, 2014, pp. 245-246.
    [219] Voy. art. 6, 1., du Règlement Bruxelles I.
    [220] COM (2013) 401/2.
    [221] Voy. not. considérant n° 13 du Règlement Bruxelles I et C.J.C.E., 20 janvier 2005, C-27/02, Engler, § 39.
    [222] M. Posnow-Wurm, « Recours collectifs et conflits de juridictions », Rev. Dr. U.L.B., 2010, p. 111.
    [223] Notons que le Règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012, entrant en vigueur le 10 janvier 2015, procédant à la refonte du Règlement Bruxelles I, ne modifie pas en tant que telles les dispositions de la Section 4 mais permet leur application même si le défendeur est domicilié en-dehors de l'Union européenne (voy. considérant n° 14 et art. 6, 1. du Règlement n° 1215/2012).
    [224] Voy. not. considérant n° 11 du Règlement Bruxelles I.
    [225] C.J.C.E., 1er octobre 2002, C-167/00, Henkel, § 33: « En effet, ainsi que la Cour l'a jugé dans son arrêt du 19 janvier 1993, Shearson Lehman Hutton (C-89/91, Rec., p. I-139), une personne morale qui agit en qualité de cessionnaire des droits d'un consommateur final privé, sans être elle-même partie à un contrat conclu entre un professionnel et un particulier, ne peut pas se voir reconnaître la qualité de consommateur au sens de la convention de Bruxelles, de sorte qu'elle ne saurait se prévaloir des articles 13 à 15 de cette convention. Or, cette interprétation doit valoir également en ce qui concerne une association de protection des consommateurs telle que le VKI qui a intenté une action d'intérêt collectif pour le compte de ceux-ci. »
    [226] C.J.C.E., 19 janvier 1993, C-89/91, Shearson Lehman Hutton, dispositif.
    [227] M. Posnow-Wurm, « Recours collectifs et conflits de juridictions », Rev. Dr. U.L.B., 2010, p. 113 et les références citées en note 335.
    [228] Voy. point 2.2.3., supra; Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 12.
    [229] Doc. parl., n° 53-3300/004, p. 77.
    [230] Voy. not. G. Closset-Marchal, La compétence en droit judiciaire privé, Bruxelles, Larcier, 2009, pp. 208 et s. L'actuel art. 573 du Code judiciaire va être prochainement modifié par la Loi modifiant le Code judiciaire et la Loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, en vue d'attribuer dans diverses matières la compétence au juge naturel (voy. Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3076/005). Cette Loi a, à l'heure où nous écrivons, été adoptée par le Parlement, sanctionnée et promulguée, mais doit encore être publiée au Moniteur belge. Le futur art. 573 du Code judiciaire est rédigé comme suit: « Le tribunal de commerce connaît en premier ressort:

    1° des contestations entre entreprises, à savoir entre toutes personnes qui poursuivent de manière durable un but économique, concernant un acte accompli dans la poursuite de ce but et qui ne relèvent pas de la compétence spéciale d'autres juridictions;

    2° des contestations relatives aux lettres de change et aux billets à ordre.

    La demande dirigée contre une entreprise peut également être portée, aux conditions visées à l'alinéa 1er, 1°, devant le tribunal de commerce, même si le demandeur n'est pas une entreprise. Est, à cet égard, nulle, toute clause attributive de compétence antérieure à la naissance du litige. »
    [231] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, p. 20.
    [232] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, avis du Conseil d'État, p. 71.
    [233] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3301/003.
    [234] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-2863/001.
    [235] Pour rappel, l'art. 91, al. 8, C. jud. dispose qu'« [e]n matière civile, le juge ordonne le renvoi devant une chambre à trois juges lorsqu'avant tout autre moyen, une partie en fait la demande par écrit le jour de l'introduction de la cause. (…) » et l'art. 109bis, § 2, al. 2, C. jud. dispose que « les appels énumérés à l'alinéa 1er sont, dans tous les cas, attribués aux chambres composées de trois conseillers à la cour lorsque la demande en est faite par l'appelant dans son acte d'appel principal. La cause est également attribuée à une chambre composée de trois conseillers, pour autant que l'intimé, à peine de déchéance, en fasse la demande par écrit dans la déclaration visée à l'article 1061 ».
    [236] Voy. H. Boularbah, « La 'class action à la belge' est arrivée », Justement, n° 6, 19 février 2014, p. 1.
    [237] Soulignons les hésitations du législateur quant à la qualification des consommateurs membres du groupe.
    [238] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 17.
    [239] Voy. point 7.1., supra sur les réserves concernant l'usage du mot « tiers ».
    [240] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 43.
    [241] Art. XVII.65, § 1er (par dérogation à l'art. 820 C. jud.).
    [242] Comme souligné au point 4., supra, l'art. XVII.39 ne fait référence qu'aux qualités formelles du représentant, mais non au caractère adéquat de celui-ci, qui n'est lui visé qu'à l'art. XVII.36.
    [243] Nous soulignons.
    [244] Voy. p. ex. Anvers, 6 septembre 1999, Ann. prat. comm., 1999, p. 550.
    [245] C. Dalcq, « Les actions 'comme en référé' », in Le référé judiciaire, Bruxelles, Editions du Jeune Barreau, 2003, p. 187; C. Dalcq et S. Uhlig, « Vers et pour une théorie générale du 'comme en référé': le point sur les questions transversales de compétence et de procédure », in Les actions en cessation, CUP, Bruxelles, Larcier, 2006, p. 60.
    [246] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 44.
    [247] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 43.
    [248] Art. XVII.66.
    [249] Art. XVII.67, al. 2.
    [250] Art. XVII.69.
    [251] Art. XVII.43, § 4.
    [252] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 44.
    [253] Voy. point 7.6.2., supra.
    [254] Voy. point 2.1., supra.
    [255] Ainsi, p. ex., le délégué du ministre a indiqué au Conseil d'état que l'autorité de la chose jugée s'étendait non seulement à l'égard « du demandeur et des défendeurs, mais également à l'égard de l'ensemble des membres du groupe » (nous soulignons; traduction libre du néerlandais; Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, avis du Conseil d'état, p. 70).
    [256] L'existence d'un groupe unique de consommateurs n'empêche aucunement l'organisation du groupe en sous-catégories (art. XVII.38, § 2).
    [257] Notons qu'à l'occasion des discussions en commission de la Chambre, le ministre a précisé que, si deux associations s'unissant pour défendre une cause ensemble (p. ex. en cas de dossier compliqué), ces associations devraient se mettre d'accord pour savoir qui sera le représentant du groupe, le Gouvernement souhaitant que le juge n'ait qu'un interlocuteur (Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/004, p. 53). Cette discussion porte selon nous sur une situation où un seul « groupe » de consommateurs est impliqué dans la procédure, ce qui justifie en effet la présence d'un seul représentant, mais non sur une situation où deux « groupes » seraient impliqués dans une même procédure.
    [258] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 16.
    [259] Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 20.
    [260] Traduction libre du néerlandais; Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, avis du Conseil d'état, p. 77.
    [261] Art. XVII.49, § 4; voy. point 3.1.1., supra.
    [262] Art. 1043 C. jud.; Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, exposé des motifs, p. 36.
    [263] Voy. art. XVII.45, § 2.
    [264] Art. 1737 C. jud.
    [265] Art. 1350, 3°, C. civ.; Rép.not., tome XIII, « Procédure notariale. Principes de droit judiciaire privé », édition 2008, n° 306.
    [266] Art. 25 C. jud.
    [267] Traduction libre du néerlandais; Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/001, avis du Conseil d'état, p. 70.
    [268] Voy. p. ex. C. Dalcq et S. Uhlig, « Vers et pour une théorie générale du 'comme en référé': le point sur les questions transversales de compétence et de procédure », in Les actions en cessation, CUP, Bruxelles, Larcier, 2006, p. 61.
    [269] J.-Fr. Van Drooghenbroeck, « La nature et le régime de la compétence exercée 'comme en référé' - L'exemple de l'action en dommages et intérêts », J.T., 1996, p. 555 et les références visées sous la note 17.
    [270] C. Dalcq, « Les actions 'comme en référé' », in Le référé judiciaire, Bruxelles, Editions du Jeune Barreau, 2003, p. 185.
    [271] Cass., 15 février 1991, Pas., 1991, I, p. 572.
    [272] Voy. not. H. Bosly et al., Droit de la procédure pénale, 6e édition, Bruges, la Charte, pp. 253 et s.
    [273] A peine trois mois séparent le dépôt des projets de lois à la Chambre de leur publication au Moniteur belge.
    [274] Fr. Tulkens et M. van de Kerchove, Introduction au droit pénal, Diegem, E.Story-Scientia, 1999, p. 127.
    [275] Voy. p. ex. Doc. parl., Ch. repr., n° 53-3300/004, pp. 54 et 60.