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Transferts de compétences: le tribunal de commerce devient le juge naturel de l'entreprise Loi du 26 mars 2014 « modifiant le Code judiciaire (…) en vue d'attribuer dans diverses matières la compétence au juge naturel », R.D.C.-T.B.H., 2014/6, p. 543-559

Transferts de compétences:
le tribunal de commerce devient le juge naturel de l'entreprise Loi du 26 mars 2014 « modifiant le Code judiciaire (…) en vue d'attribuer dans diverses matières la compétence au juge naturel »

Ivan Verougstraete [1] , Jean-Philippe Lebeau  [2]

TABLE DES MATIERES

I. Les objectifs de la loi dans le contexte de la restructuration de l'organisation judiciaire

II. La notion de commercialité et la compétence des tribunaux de commerce en question

III. L'article 573 du Code judiciaire, nouveau fondement de la compétence du tribunal de commerce § 1. Le nouvel article 573 du Code judiciaire dans le contexte du Code judiciaire

§ 2. La notion d'« acte accompli dans un but économique »

§ 3. La notion d'entreprise dans les diverses lois belges: une notion segmentée

§ 4. La notion d'entreprise dans l'article 573 du Code judiciaire

§ 5. En pratique, quel cheminement suivre pour déterminer la compétence du tribunal par application de l'article 573 du Code judiciaire?

§ 6. Quelques exemples pratiques

§ 7. L'extension optionnelle réservée au demandeur qui n'est pas une entreprise

§ 8. L'exclusion de la compétence du tribunal de commerce quand le litige relève de la compétence spéciale d'autres juridictions

IV. Modification de l'article 573 du Code judiciaire: le transfert des petits litiges de la justice de paix vers le tribunal de commerce (art. 2)

V. Modification de l'article 577 du Code judiciaire: la fin des appels devant le tribunal de commerce (art. 5)

VI. Les compétences exclusives et spéciales clarifiées § 1. Modification de l'article 574, 1° et 5°, du Code judiciaire: la volonté de clarifier la compétence spéciale du tribunal de commerce (art. 3)

§ 2. Modification de l'article 575 du Code judiciaire (art. 4)

§ 3. Modification des articles 587 et 589 du Code judiciaire (art. 6 et 7): retards de paiement, droits d'auteur, etc.

VII. La procédure d'injonction de payer: modification de l'article 1338 du Code judiciaire (art. 9)

VIII. Dispositions corrigeant l'article 578 du Code judiciaire (art. 13 de la loi)

IX. La nouvelle compétence spéciale des juges de paix (art. 11 et 12)

X. Evaluation de certains effets pratiques du nouveau système § 1. Les aspects fiscaux

§ 2. La charge de travail des tribunaux de commerce

XI. Dispositions transitoires et entrée en vigueur (art. 14 à 17 de la loi)

RESUME
La loi du 26 mars 2014 a modifié en profondeur la compétence des tribunaux de première instance, de commerce ainsi que celle des juges de paix. L'idée sous-jacente de la loi a été de concentrer les compétences relatives aux litiges de type économique auprès des tribunaux de commerce. Ceci a impliqué en particulier que les paramètres de l'article 573 du Code judiciaire soient modifiés et que la limitation ratione summae de la compétence des tribunaux de commerce soit abrogée. Les notions d'entreprise et d'acte accompli dans un but économique, sont les nouveaux paramètres de la compétence des tribunaux de commerce. La loi s'inscrit dans le courant qui met la notion d'entreprise au centre du droit économique et commercial et efface progressivement la notion de commerçant.
Par ailleurs, la loi apporte une série de précisions au sujet de la compétence des tribunaux de commerce et donne une compétence accrue aux juges de paix dans les matières relatives aux fournitures de produits d'utilité publique.
SAMENVATTING
De wet van 26 maart 2014 heeft de bevoegdheidsverdeling tussen de rechtbanken van eerste aanleg, van koophandel en van de vredegerechten gevoelig gewijzigd. De basisidee van de nieuwe wet is alle geschillen die verband houden met economische aangelegenheden zoveel mogelijk te concentreren bij de rechtbanken van koophandel. Hiervoor zijn nieuwe parameters ingevoerd in artikel 573 van het Gerechtelijk Wetboek (de algemene bevoegdheid van de rechtbanken van koophandel) en is de beperking “ratione summae” die tot nu toe gold voor de rechtbanken van koophandel opgeheven. De begrippen “geschillen die betrekking hebben op een handeling verricht in het kader van de verwezenlijking van een economisch doel” en “personen die op een duurzame wijze een economisch doel nastreven” zijn de cruciale parameters van de nieuwe bevoegdheid. De wet sluit aldus aan bij de onderliggende opvattingen van het Wetboek economisch recht die ook aan de “onderneming” een centrale plaats bezorgen.
De nieuwe wet preciseert ook een aantal punten die in het verleden zorgden voor betwistingen. Een tweede fundamentele wijziging door de wet aangebracht is de toekenning van een ruimere bevoegdheid aan de vrederechters in verband met de nutsbedrijven.
I. Les objectifs de la loi dans le contexte de la restructuration de l'organisation judiciaire

1.La loi du 26 mars 2014 (M.B., 22 mai 2014) a deux objectifs majeurs:

    • attribuer la compétence des litiges relevant naturellement du tribunal de commerce à celui-ci quel que soit le montant en jeu (et pour ce faire, élargir la compétence du tribunal);
    • regrouper les petits litiges concernant les fournisseurs de services et produits d'utilité publique auprès du juge de paix du domicile du défendeur.

    2.La loi « juge naturel » est contemporaine de toutes les lois qui, sous la législature qui s'écoule et sur l'impulsion de la ministre Turtelboom, auront revisité de façon copernicienne l'organisation judiciaire [3].

    Ce texte complète les transferts de compétences qui font suite à l'entrée en vigueur, le 1er septembre 2014, de la loi du 17 mars 2013 « réformant les régimes d'incapacité et instaurant un nouveau statut de protection conforme à la dignité humaine » [4] et de la loi du 30 juillet 2013 « portant création d'un tribunal de la famille et de la jeunesse » [5].

    En application de ces nouvelles dispositions légales, les transferts de compétences s'opéreront de la manière suivante:

      • des justices de paix vers les tribunaux de première instance (TPI): regroupement de tout le contentieux familial et de la jeunesse;
      • des TPI vers les justices de paix: regroupement de la matière de l'incapacité; regroupement des demandes de paiement dirigées contre des particuliers par les fournisseurs de produits et de services d'utilité publique (gaz, eau, électricité, etc.);
      • des TPI vers les tribunaux de commerce: regroupement du contentieux de l'entreprise;
      • des justices de paix vers les tribunaux de commerce: transfert des petits litiges en matière d'entreprises, quel que soit le montant concerné.

      Pour la justice commerciale, l'élargissement du spectre de compétences s'avère significatif [6].

      De longue date, pour une question de cohérence et de technicité, les tribunaux de commerce et la doctrine souhaitaient la concentration de tout le contentieux économique sous la compétence de son juge « naturel » [7]. Comme l'explique l'exposé des motifs [8], « le législateur a depuis plusieurs années confié au tribunal de commerce des matières sur la base de la nature du litige plus que sur la base de la qualité des parties ». On détaillera cette évolution ci-après (n° 3).

      II. La notion de commercialité et la compétence des tribunaux de commerce en question

      3.La notion de commercialité appelait une évolution. Il est commun en effet de souligner que, quoiqu'importante, l'activité des commerçants est loin de couvrir tout le champ de l'activité économique, celle-ci étant également générée par nombre d'autres opérateurs tels les sociétés civiles, les sociétés agricoles et les agriculteurs, les entreprises publiques, les titulaires de professions libérales et indépendantes, certaines ASBL et fondations ou encore les mutuelles. Pourquoi imposer des règles légales séparées aux opérateurs économiques que rien ne distingue dans l'exercice de leur activité quotidienne? Et si les règles sont identiques, il n'existe alors aucune raison péremptoire pour que le contentieux relatif à leur application soit traité par des juridictions distinctes.

      Cette évolution qui tend à rendre le tribunal de commerce compétent indépendamment de la qualité de commerçant, au-delà des extensions déjà acquises en matière de droits intellectuels, ou plus anciennes en matière de titres cambiaires, était manifeste dans de nombreux textes législatifs récents:

      1. la loi du 26 janvier 2009 « modifiant le Code judiciaire concernant la continuité des entreprises », apportait une modification importante à l'article 574, 1°, du Code judiciaire; elle disposait que:
        « Le tribunal de commerce connaît même lorsque les parties ne sont pas commerçantes:
        1° des contestations pour raison d'une société régie par le Code des sociétés (anciennement: 'pour raison d'une société de commerce') entre sociétés et associés, entre associés, etc. ».
        Depuis cette évolution, l'ensemble des litiges relatifs au fonctionnement interne d'une société agricole ou d'une société civile relève également de la compétence des tribunaux de commerce;
      • il en va de même, depuis cette modification, de toute demande visant la dissolution d'une société régie par le Code des sociétés; par ailleurs, depuis 2012, l'article 574, 10°, du Code judiciaire, a surabondamment confirmé la compétence du tribunal de commerce pour connaître des demandes de dissolution fondées sur l'article 182, § 1er, du Code des sociétés, encore que les parties ne soient pas commerçantes;
      • en 2006, dès l'introduction dans le Code des sociétés d'une procédure d'encadrement spécifique des sociétés en liquidation (art. 184 et s. C. soc.), toutes les sociétés régies par le Code des sociétés - commerciales, civiles ou agricoles - se voyaient soumises pour l'application de cette procédure, à la compétence du tribunal de commerce;
      • dans le même sens, il résulte de la conjonction des deux lois du 10 avril 2010 relatives aux pratiques du marché et à la protection du consommateur (LPMPC), que le président du tribunal de commerce est seul compétent pour connaître de l'action en cessation contre une « entreprise », définie comme étant « toute personne physique ou personne morale poursuivant de manière durable un but économique »; la forme commerciale ne joue plus aucun rôle dans la définition de la compétence présidentielle; le Code de droit économique abroge ces deux lois mais en reprend l'essentiel dans ses Livres VI et XIV;
      • le droit comptable s'est détaché rapidement de la limitation aux catégories formelles de commerçant et société commerciale;
      • le Code de droit économique a attribué au tribunal de commerce diverses compétences, sans faire référence à la limitation de son pouvoir ratione personae qui était la caractéristique de cette juridiction, mais en se référant à la nature de l'acte en cause. Il en va ainsi des actions en cessation, conformément à une tradition qui s'est confirmée depuis la loi du 14 juillet 1971. Celle-ci, visée par le Livre XVII du Code de droit économique, a une portée nettement plus large que l'action en cessation ancienne et vise en règle tous les manquements au Code de droit économique (art. XVII.1 et XVII.2) [9].

      Le législateur s'est donc écarté bien avant que ne soit votée la loi sur le juge naturel, du carcan qui existait antérieurement et réduisait le tribunal de commerce à une juridiction destinée à discipliner les comportements des commerçants. La loi sur le juge naturel s'inscrit dans cette logique. Les notions d'acte à but économique et d'entreprise devront être lues dans la perspective d'un renouveau du droit économique et d'une compétence élargie du tribunal de commerce voulue par le législateur. La lecture de ces notions reprises à l'article 573 nouveau du Code judiciaire devra prendre en compte les objectifs du législateur énoncés dans le Code de droit économique.

      4.Au-delà des questions relatives à la compétence judiciaire, c'est le concept même d'un droit commercial spécifique qui est mis en cause. Le droit économique qui est un mélange de droit public et privé, et qui ne concerne plus spécifiquement les acteurs commerciaux classiques, absorbe progressivement le droit commercial. L'avènement d'un droit économique a nécessairement un impact sur l'évolution des tribunaux de commerce, lesquels perdraient leur pertinence si leur activité se limitait au droit commercial en son sens le plus étroit. Le Code de droit économique est le vecteur de ces changements. Son champ d'application ratione personae dépasse de loin le critère de la commercialité classique. Il intègre à la fois le droit européen économique et les normes éparses économiques anciennes, tout en y ajoutant des éléments et accents nouveaux. D'un Code de commerce destiné à l'origine à la corporation des marchands, le droit belge a évolué vers un Code de droit économique, dont le destinataire n'est pas principalement le commerçant ou la société commerciale, dont le contenu dépasse le droit privé et qui appelle la naissance d'une juridiction apte à assurer son application.

      III. L'article 573 du Code judiciaire, nouveau fondement de la compétence du tribunal de commerce
      § 1. Le nouvel article 573 du Code judiciaire dans le contexte du Code judiciaire

      5.Du point de vue des tribunaux de commerce, l'article 573 du Code judiciaire est l'article fondamental, celui qui établit sa compétence matérielle générale [10]. C'est à ce niveau que se situe l'innovation la plus importante de la loi « juge naturel », puisque les concepts de commerçant et d'actes commerciaux qui justifiaient cette compétence depuis les temps napoléoniens du Code de commerce, passent au second plan [11] et que deviennent prépondérants les concepts d'entreprise et d'actes accomplis dans la poursuite d'un but économique.

      Comparons en effet le libellé de l'ancien article 573 du Code judiciaire et du nouveau:


      Ancien article 573 Nouvel article 573
      « Le tribunal de commerce connaît en premier ressort: « Le tribunal de commerce connaît en premier ressort:
      1° des contestations entre commerçants relatives aux actes réputés commerciaux par la loi et qui ne sont pas de la compétence générale des juges de paix ou de la compétence des tribunaux de police; 1° des contestations entre entreprises, à savoir entre toutes personnes qui poursuivent de manière durable un but économique, concernant un acte accompli dans la poursuite de ce but et qui ne relèvent pas de la compétence spéciale d'autres juridictions;
      2° des contestations relatives aux lettres de change et aux billets à ordre, lorsque le montant de la demande dépasse 1.860 EUR. Le litige qui a trait à un acte réputé commercial par la loi et qui n'est pas de la compétence générale des juges de paix, peut aussi être porté devant le tribunal de commerce, quoique le demandeur n'ait pas la qualité de commerçant. Est, à cet égard, nulle de plein droit, toute clause attributive de compétence antérieure à la naissance du litige. » 2° des contestations relatives aux lettres de change et aux billets à ordre. La demande dirigée contre une entreprise peut également être portée, aux conditions visées à l'alinéa 1er, 1°, devant le tribunal de commerce, même si le demandeur n'est pas une entreprise. Est, à cet égard, nulle, toute clause attributive de compétence antérieure à la naissance du litige. »

      6.Dans le texte ancien, l'article 573 du Code judiciaire étayait la vocation du tribunal de commerce, qui était de trancher les conflits opposant des commerçants entre eux [12]. La qualité des parties était un facteur essentiel de détermination du pouvoir exercé [13]. Cette compétence s'accompagnait d'un correctif, notamment la nature de l'activité concernée par le litige. Seuls les actes réputés commerciaux par la loi relevaient de la compétence des tribunaux de commerce. La boucle se fermait grâce à la règle selon laquelle les actes accomplis par un commerçant étaient en principe réputés des actes commerciaux.

      Les articles suivants du Code judiciaire dérogeaient à l'article 573 du Code judiciaire, attribuant au tribunal de commerce la compétence quelle que soit la qualité des parties, selon la nature de l'acte ou la situation donnant lieu à procès.

      Dans le nouveau texte, l'équilibre est modifié. La compétence n'est plus fondée principalement sur la qualité professionnelle du défendeur - commerçant ou société commerciale - mais part de la notion de contestation relative à un acte accompli dans un but économique. Le contentieux est dès lors objectivé et ne se démarque plus de la même façon des autres articles qui balisent la compétence d'attribution des tribunaux de commerce [14].

      Le critère essentiel est le litige concernant un acte accompli dans un but économique. Le champ d'application est ensuite circonscrit de façon large par la notion d'entreprise. Cette dernière notion se veut plus extensive que celle de commerçant ou de société commerciale. Sa définition pourra donner lieu à discussion mais, ainsi que nous le verrons, l'importance de la délimitation ratione personae sera secondaire par rapport à la question objective de la nature du litige qui sera désormais traité par son juge « naturel ».

      Ce sont donc les deux notions pivots de l'article 573, l'acte réputé commercial et la qualité de commerçant qui sont remplacées par deux concepts nouveaux.

      § 2. La notion d'« acte accompli dans un but économique »

      7.Cette notion est la notion principale permettant de délimiter le contentieux confié aux tribunaux de commerce.

      Intuitivement l'interprète comprend ce qu'est un acte accompli dans un but économique. La doctrine déjà ancienne de Van Ryn faisait la distinction entre les différents acteurs concernés en mettant l'accent sur l'organisation orientée vers la rentabilité: les activités exercées dans un tel contexte relèveraient de la compétence élargie du Code de commerce [15]. Une structure efficiente orientée vers la rentabilité accomplirait nécessairement des actes dans un but économique et partant relèverait de la compétence du tribunal de commerce.

      Le législateur n'a pas tout à fait abandonné les anciennes notions d'acte de commerce, de commerçant et société commerciale - le Code de commerce n'a somme toute pas (encore) été abrogé - mais les a réduites dans le contexte du Code judiciaire à un rôle non significatif. L'acte accompli dans un but économique n'est pas réductible à un acte de commerce ou acte réputé commercial. La notion est différente. L'acte accompli dans un but économique est celui de la production de biens ou de services sur un marché donné. Le but de lucre n'est pas requis. En revanche, un acte - qu'il s'agisse d'une production ou livraison de biens ou d'une prestation de services - n'est pas accompli dans un but économique s'il a pour objectif premier de satisfaire des besoins que les pouvoirs publics dans un état de démocratie sociale sont censés prendre en charge, besoins que nous pourrions qualifier de sociétaux. Quand nous précisons qu'il s'agit de l'objectif premier de la personne, nous voulons distinguer cet objectif de celui purement formel ou commercial de personnes morales agissant dans un cadre concurrentiel, qui affirment dans leurs statuts avoir pour objectif de satisfaire des besoins des citoyens, tels le divertissement (un télédistributeur), la production et la fourniture d'énergie, l'assouvissement de la soif (une association de brasseurs). L'objectif premier de ces personnes morales est avant tout d'assurer une rentabilité propre, même si elles contribuent au sens large à la satisfaction de besoins communs à tout un chacun.

      8.Ni la loi relative au juge naturel ni le Code de droit économique n'ont abrogé les articles 1, 2 et 2bis du Code de commerce. Le maintien de la notion d'acte de commerce a un effet secondaire sur l'interprétation à donner à l'article 573 du Code judiciaire. Les actes qui naguère étaient visés par le Code de commerce doivent être considérés comme des actes accomplis dans un but économique. Le législateur les considère certainement comme tels. Par contre, les actes qui étaient exclus de la liste (art. 2bis et 3) ne deviennent pas pour autant des actes dépourvus de but économique.

      9.La question se pose des actes accomplis par des sociétés civiles (à forme commerciale) ou par des associations qui, dans leur objet statutaire, n'ont pas inclus des opérations à titre commercial, si ce n'est à titre accessoire pour permettre la réalisation d'un objet social essentiellement civil ou philanthropique. Les actes de ces personnes morales consistant en la production ou vente de biens ou prestations de services sur un marché, peuvent-ils ou doivent-ils être considérés comme des actes accomplis dans un but économique? En d'autres mots, le fait que l'objet social soit de nature non économique, peut-il dénaturer une activité à but économique accomplie à titre accessoire et en faire une activité à but non économique?

      Dans le nouveau texte, l'objet statutaire n'a pas perdu sa pertinence en tant que telle: c'est toujours l'objet social qui détermine s'il s'agit d'une société commerciale ou non. Il faut faire des distinctions complémentaires pour déterminer la compétence judiciaire.

      Si l'objet statutaire vise des activités à but économique, le tribunal de commerce sera compétent. Les activités à but économique sont à distinguer des actes commerciaux et il est parfaitement concevable que des non-commerçants ou associations aient pour but de développer des activités dans un but économique. Ils relèveront du tribunal de commerce s'il s'agit d'un acte accompli dans un tel but et s'ils constituent une entreprise, notion partiellement détachée des catégories de commerçants et sociétés commerciales.

      Entre autres, les sociétés mutualistes, les maisons de repos, constituées sous forme d'ASBL, les sociétés de logements sociaux, quelle que soit leur forme, les fonds de pension, exercent généralement une activité économique en prestant des services ou en vendant des biens. Pour autant, ces actes ne sont pas nécessairement accomplis dans un but économique s'ils ont un but purement sociétal ou social hors de tout marché, ce qui ne se vérifiera pas automatiquement en ayant égard au but social, désintéressé par définition. Cette exclusion sera confortée, le cas échéant, par le fait que ces entités ne seront pas non plus à considérer comme des entreprises, dans la mesure indiquée ci-dessous.

      Cette hypothèse doit être distinguée de celle où l'activité à but économique n'est que développée à titre accessoire. Il est fréquent qu'une entité exerce à titre accessoire une activité à but économique uniquement pour se procurer les moyens d'atteindre son objet social. L'accessoire ne fera pas basculer pour autant dans la catégorie des entités soumises à la compétence du tribunal de commerce.

      10.Le cas des professions libérales pose une difficulté particulière. Il n'y a aucun doute que les titulaires de professions libérales [16] sont des entreprises pour le droit de la concurrence (voir infra, n° 16). Il ne faut pas pour autant en déduire qu'ils sont nécessairement soumis à la compétence du tribunal de commerce. Le législateur a voulu assujettir certaines professions libérales à un régime dérogeant au droit commun. Dans le commentaire consacré au Livre XIV du Code de droit économique, le gouvernement souligne « que la spécificité des professions libérales nécessite (…) une approche distincte par le législateur en comparaison avec les commerçants ».

      Il en va ainsi pour les notaires et les huissiers, officiers ministériels, qui de façon explicite sont écartés de l'application du Code de droit économique (art. II, I.1, CDE).

      Un même raisonnement peut éventuellement être tenu s'agissant des avocats pour lesquels l'article 574, 1°, nouveau du Code judiciaire forme une exception en ce qui concerne leurs sociétés: il pourrait en être ainsi à plus forte raison pour les avocats en personne physique. Le législateur semble avoir voulu que leur activité ne soit pas considérée comme une activité à but économique au sens de l'article 573 du Code judiciaire, même si selon d'autres critères ils seront considérés comme des entreprises.

      11.Quant aux pouvoirs publics, qui sont en quelque sorte par essence des organisations à but social ou sociétal, leurs actes ont en principe un but non économique, ce qui les soustrait à l'application de l'article 573 du Code judiciaire, outre le fait qu'ils ne seront pas considérés comme des entreprises. Toutefois, lorsque les pouvoirs publics organisent sous quelque forme que ce soit certains de leurs avatars en participant au marché, ces entités accompliront des actes à but économique et relèveront des tribunaux de commerce.

      § 3. La notion d'entreprise dans les diverses lois belges: une notion segmentée

      12.La notion d'entreprise est une notion polymorphe, comme l'a démontré encore tout récemment le Code de droit économique. Elle a un sens très différencié selon le contexte dans lequel elle est utilisée (voir Livre Ier CDE). A priori, la notion d'entreprise semblait peu appropriée à une utilisation en droit judiciaire mais nous verrons ce qui a poussé le législateur à franchir le pas.

      13.En droit belge, c'est en droit du travail qu'elle a connu les plus importants développements [17]. Dans des domaines mixtes relatifs à la fois au droit économique et au droit du travail, elle a fait l'objet de discussions complexes en matière de transfert d'entreprises. En droit européen, la notion d'entreprise n'a pas été à proprement parler définie par les directives nos 77/187, 98/50 et 2001/23. La Cour de justice a aussi renoncé à définir la notion et a eu recours à la notion d'entité économique [18], principe sous-jacent aux notions d'entreprise et établissement [19].

      14.Le droit de l'insolvabilité a également connu des développements liés à la notion d'entreprise. Ces développements sont complexes parce qu'ils recoupent une double évolution: celle de l'extension simple du champ d'application au-delà du champ de la commercialité dans le cadre d'une procédure déterminée, la réorganisation judiciaire, et celle de l'utilisation de la notion d'entreprise. La loi belge sur la continuité des entreprises a eu recours à la notion d'entreprise dans un but fonctionnel, celui de distinguer dans son champ d'application la personne morale ou juridique (qualifiée uniformément de débiteur) et l'entité économique sous-jacente qualifiée d'entreprise. L'application en matière sociale de la notion d'entreprise dans le cas du transfert d'entreprise recèle des complications particulières que la pratique commence à relever [20]. Par ailleurs, à dessein, la loi sur la continuité des entreprises a quitté le champ strict de la commercialité pour définir quels débiteurs étaient concernés. Dans la loi du 31 janvier 2009 « relative à la continuité des entreprises » (LCE), le législateur décidait de ne plus limiter aux seuls commerçants le bénéfice du texte, ainsi qu'il en était de la loi antérieure du 17 juillet 1997 sur le concordat judiciaire, mais de l'étendre dans un premier temps aux sociétés agricoles et civiles à forme commerciale (art. 3 LCE), puis aux agriculteurs en personne physique, sous la réserve que sont restées exclues les « sociétés civiles à forme commerciale qui ont la qualité de titulaire d'une profession libérale » (art. 4).

      Il en résulte que le tribunal de commerce est compétent pour suivre en chambre d'enquête commerciale la situation des opérateurs agricoles et des sociétés civiles aussi bien que des commerçants (art. 8 à 12 LCE), pour leur désigner un médiateur d'entreprise (art. 13) ou un mandataire judiciaire (art. 14), et pour connaître de leur réorganisation judiciaire (art. 16 et s.) [21].

      15.Pour le droit belge de la faillite, si à première vue le critère de la commercialité est resté immuable depuis 1851, ceci n'est qu'une illusion. Tout d'abord, par l'effet du règlement n° 1346/2000/CE, des entités non commerciales peuvent faire l'objet de procédures d'insolvabilité en Belgique; par ailleurs la différenciation qui à l'heure actuelle interdirait notamment à des entreprises agricoles de faire l'aveu de la faillite alors qu'elles peuvent entamer une procédure de réorganisation judiciaire, devrait logiquement se heurter au prescrit constitutionnel des articles 10 et 11 de la Constitution [22]. Ce ne sont que des exemples d'une évolution inéluctable et bienvenue.

      16.Dans le droit de la concurrence, sous l'impulsion du droit européen, la notion d'entreprise a connu quelques développements intéressants qui révèlent tout particulièrement le lien entre la matière qui fait l'objet de la norme et le concept d'entreprise [23].

      Selon la Cour de justice, attachée au concept d'entité économique en matière de droit de la concurrence également, ce qui distinguera l'entité économique, ce sont des éléments qui isolément ne seront pas déterminants mais pris dans leur ensemble lui conféreront leur caractère économique. Le but de lucre est un élément particulièrement topique mais l'absence de but de lucre ne suffit pas encore à faire basculer l'entité vers un caractère non économique [24].

      D'autres facteurs jouent, telle la participation à un service public, la fonction sociale, l'absence de lien entre la rémunération et la prestation (si le prix des prestations d'une entité est calculé sans lien avec le coût réel de la prestation, comme p. ex. le prix d'un ticket de chemin de fer, le symptôme d'une activité sociétale est présent).

      La délimitation n'est pas toujours claire mais en simplifiant, on pourrait conclure à un caractère non économique en droit européen de la concurrence lorsqu'il s'agit de l'exercice de prérogatives de puissance publique et lorsqu'il s'agit d'activités qui ne reposent pas sur une logique de marché (cf. sécurité sociale, enseignement, etc.) [25]. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que le droit européen a comme tâche première l'intégration des marchés et que les normes n'ont pas forcément le même objectif qu'en droit interne.

      La Cour de justice a, prudemment, souligné à maintes reprises que sa définition de l'entreprise était une définition contextuelle. Elle le rappelle encore dans un arrêt du 11 juillet 2006 (C-205/2003, Fenini / Commission):

      « Le tribunal a rappelé à bon droit, au point 35 de l'arrêt attaqué, que la notion d''entreprise' comprend, dans le contexte du droit communautaire de la concurrence, toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (arrêts du 23 avril 1991, Höfner et Elser, C-41/90, Rec., p. I1979, point 21 et du 16 mars 2004, AOK-Bundesverband e.a., C-264/01, C-306/01, C-354/01 et C-355/01, Rec., p. I2493, point 46). Conformément à la jurisprudence de la Cour, il a également souligné, au point 36 dudit arrêt, que c'est le fait d'offrir des biens ou des services sur un marché donné qui caractérise la notion d'activité économique (arrêt du 18 juin 1998, C-35/96, Commission / Italie, Rec., p. I3851, point 36). »

      Pour le droit d'établissement, des notions relativement semblables ont été développées en droit européen, notamment quant aux professions libérales.

      Plus près des matières concernées par la loi nouvelle, mais plus éloignées dans le temps, les réflexions dans les années 1970 concernant la magistrature économique ont ouvert la voie à la loi « juge naturel » [26].

      17.La définition de l'entreprise occupe une place déterminante dans le Code de droit économique. Les définitions de l'entreprise suivent la logique voulant que la notion d'entreprise ait une valeur contextuelle. L'entreprise est définie à l'article I.1 comme « toute personne physique ou personne morale poursuivant de manière durable un but économique, y compris ses associations ». Cette définition a vocation résiduaire, en d'autres mots elle s'appliquera sauf si pour d'autres matières d'autres concepts sont utilisés.

      On verra à l'article I.2 les définitions applicables pour le Livre III et ainsi le concept de l'« entreprise commerciale », soit toute personne qui dispose d'une unité d'établissement sur le territoire belge et y exerce des actes qualifiés de commerciaux tels que décrits au Code de commerce, et qui est ainsi présumée avoir la qualité de commerçant. L'article I.2 définit encore d'autres notions utiles: entreprise non commerciale de droit privé, entreprise artisanale, profession réglementée.

      L'article I.4 définit comme entreprise « toute entité tenue de se faire inscrire dans la Banque-Carrefour des Entreprises en vertu de l'article III.16 ».

      L'article I.5 définit comme entreprise aux fins de l'article III, Titre 3, Chapitre 2: a. les personnes physiques ayant la qualité de commerçant; b. les sociétés commerciales ou à forme commerciale, à l'exception des organismes administratifs publics visés à l'article 2 de la loi du 22 mai 2003 portant organisation du budget et de la comptabilité de l'Etat fédéral, et les groupements européens d'intérêt économique; c. les organismes publics qui exercent une mission statutaire à caractère commercial, financier ou industriel; d. les organismes non visés aux b) et c) dotés ou non de personnalité juridique propre qui exercent avec ou sans but de lucre une activité à caractère commercial, financier ou industriel, auxquels les dispositions du présent chapitre sont, par catégories d'organisme, rendues applicables par arrêté royal.

      L'article I.8 définit pour le Livre VI la notion d'établissement commercial.

      18.De ces données diverses deux conséquences provisoires peuvent être tirées: la première est que la notion d'entreprise est une notion plurielle, à ne pas détacher de son contexte; la seconde c'est que la tendance de ne pas faire dépendre le champ d'application de la norme économique ou judiciaire, de critères formels tels la qualité de commerçant ou la qualité de société commerciale, se vérifie dans toutes les matières.

      Dans un second temps, cette tendance se répercute nécessairement sur l'élément accessoire que constitue la définition du juge compétent pour statuer sur les conflits relatifs à une norme économique, applicable tant aux commerçants et sociétés commerciales qu'à d'autres entités économiques.

      § 4. La notion d'entreprise dans l'article 573 du Code judiciaire

      19.Comme nous l'avons vu, la notion d'entreprise n'est pas la notion centrale de l'article 573 du Code judiciaire mais joue néanmoins un rôle délimitatif, qui exclut la compétence du tribunal de commerce pour statuer sur les litiges impliquant comme défendeur des entités détachées des règles de fonctionnement du marché et qui n'agissent que dans un but sociétal ou social.

      L'article 573 du Code judiciaire fournit la définition suivante, qui est largement conforme à la définition figurant dans le Code de droit économique (art. I., 1); on entend par « entreprise »: « toutes personnes qui poursuivent de manière durable un but économique ».

      Il faut en premier lieu qu'il s'agisse de « personnes ». Une entité dépourvue de personnalité juridique ne relève pas de l'article 573 du Code judiciaire.

      Par ailleurs, l'entreprise est celle qui poursuit un objectif économique de manière durable. Selon les travaux préparatoires des lois LPMPC du 6 avril 2010: « Une entreprise est une organisation indépendante et durable au sein de laquelle une ou plusieurs personnes produisent ou distribuent des biens ou des services à l'aide de moyens matériels et immatériels (…) Ainsi des actes uniques ne suffisent-ils pas pour qualifier une personne d''entreprise'; l'acte doit être posé dans le cadre d'une certaine organisation. » [27].

      La notion d'entreprise postule un caractère durable dans une offre de biens ou de services sur un marché donné. Mais le seul fait d'offrir des services ou biens sur un marché [28] n'implique pas encore que l'opérateur agisse dans un but économique. Si l'opérateur a pour but immédiat de satisfaire des besoins sociaux ou sociétaux et n'a pas pour objectif primaire d'assurer à son organisation une rentabilité suffisante, il ne sera pas considéré comme une entreprise, même s'il exerce des activités accessoires de nature économique entièrement destinées à atteindre l'objectif social ou sociétal. A titre exemplatif, les services sociaux, l'aide à l'enfance et l'aide aux familles ou aux personnes se trouvant de manière permanente ou temporaire dans une situation de besoin, ne constitueront pas des entreprises.

      § 5. En pratique, quel cheminement suivre pour déterminer la compétence du tribunal par application de l'article 573 du Code judiciaire?

      20.Pour vérifier la compétence du tribunal dans le cadre de l'article 573 du Code judiciaire, le demandeur qui souhaite attraire un défendeur en justice devra, dans son cheminement, résoudre les questions suivantes:

        • le défendeur est-il un commerçant ou une société commerciale? Certes, le statut juridique choisi par le défendeur importe moins désormais: personne physique ou morale, société commerciale ou civile, ASBL, professions libérales, etc. Mais, a minima, l'exercice par la personne concernée d'une activité commerciale (en société commerciale ou en nom personnel) fournit une indication claire de la compétence du tribunal de commerce;
        • si le défendeur n'est pas identifié comme commerçant ou société commerciale, l'acte incriminé poursuit-il un but économique? Tel sera le cas si l'acte consiste en la production de biens ou de services sur un marché donné et s'il n'a pas pour but premier de satisfaire des besoins sociaux ou sociétaux au sens où nous l'avons indiqué;
        • si le défendeur pose des actes qui poursuivent un objectif économique, est-il pour autant une entreprise? Pour cela, le défendeur doit avoir la personnalité juridique, il doit produire de manière durable des biens ou des services sur un marché donné et il doit être structuré pour tendre à la rentabilité.
        § 6. Quelques exemples pratiques

        21.Concrètement, quels sont les opérateurs économiques relevant en tant qu'« entreprise » de la compétence des tribunaux de commerce lorsque la contestation porte sur un acte accompli dans un but économique?

        Il n'est pas possible d'établir une telle liste a priori, avec une certitude absolue, car la forme ou le statut sous lequel agit un opérateur devient secondaire, tout en restant néanmoins susceptible d'apporter une présomption. Sous cette réserve, la liste suivante pourrait être énoncée:

        1. les sociétés commerciales, civiles à forme commerciale et agricoles: en tant que sociétés, elles poursuivent en principe [29] de façon durable un but économique aux termes de l'article 573 du Code judiciaire Pour être plus précis, tentons une liste des sociétés qui jusqu'à présent ne pouvaient être attraites devant les tribunaux de commerce, dans un cadre contractuel ou extracontractuel, et relèvent aujourd'hui, en règle, de la compétence générale de ces juridictions:
            • les sociétés civiles immobilières;
            • les sociétés d'artisanat, les sociétés de mine et carrière;
            • les sociétés de logements sociaux [30];
            • les sociétés qui exploitent une activité médicale ou paramédicale (médecins, vétérinaires, dentistes, kinésithérapeutes, etc.);
            • les sociétés qui exploitent une activité de professionnels du chiffre (comptables, experts-comptables, réviseurs);
            • les sociétés qui exploitent une activité d'architecte ou de géomètre;
          • les personnes morales de droit public: s'il s'agit d'une activité économique qui peut être séparée de l'exercice de l'autorité publique, l'organisme public agit comme une entreprise. Afin de déterminer si un organisme public agit en tant qu' « entreprise », il sera donc nécessaire d'examiner au cas par cas les activités qu'elle accomplit [31]. Les lois particulières peuvent toutefois donner à la société même investie d'une parcelle d'autorité publique une nature commerciale, justifiant la compétence du tribunal de commerce (en gros: les sociétés visées par la loi du 21 mars 1991). Cela peut se produire aussi à l'avenir si l'Etat ou les entités fédérées « privatisent » une partie de leur autorité (p. ex., les institutions de détention psychiatriques);
          • les professions libérales exercées en personnes physiques: les titulaires d'une profession libérale sont définis dans le Code de droit économique (Livre XIV) comme suit: (…) 35° personne exerçant une profession libérale: « toute personne physique ou morale qui, de manière intellectuellement indépendante et sous sa propre responsabilité, exerce une activité professionnelle consistant principalement en des prestations intellectuelles, a suivi auparavant la formation exigée, est tenue de suivre une formation continue, est soumise à un organe disciplinaire créé par ou en vertu de la loi et n'est pas un commerçant au sens de l'article 1er du Code de commerce. » Sont dès lors visés les comptables, experts-comptables, réviseurs d'entreprises, architectes, géomètres, médecins, dentistes, kinésithérapeutes, vétérinaires, ... Ces titulaires de professions libérales sont en principe des entreprises. Le Livre XIV du Code de droit économique dans la foulée de la directive n° 2005/29 prend le pli de leur donner une réglementation particulière qui tienne à la fois compte de leur spécificité tout en évitant l'écueil d'une différenciation que la Cour constitutionnelle n'avait pas trouvé acceptable. Ceci n'empêche qu'elles peuvent être considérées comme entreprises au sens générique et pour l'application de la loi juge naturel;
          • les huissiers de justice, notaires et avocats: ceux-ci sont exclus de la notion d'entreprise (voir supra, n° 10 et l'interrogation en ce qui concerne les avocats);
          • les professions indépendantes exercées en personnes physiques: pour ces activités la distinction peut être floue entre actes de commerce et actes civils; quoi qu'il en soit, les personnes physiques qui exercent ce type d'activités sont des entreprises au sens de la loi: agents immobiliers, laboratoires médicaux, ambulanciers, infirmiers, administration d'immeubles résidentiels, études techniques et activités d'ingénierie, décoration d'intérieur, soins à domicile, conseils juridiques, conseils fiscaux, artistes qui exploitent leurs oeuvres, associations d'auteurs;
          • organes de personnes morales, détenteurs de mandats dans divers organes d'administration: ce ne sont pas des entreprises sauf si le mandat est exercé à travers une société de gestion. Le mandataire personne physique quand il agit comme organe engage la société et pas lui-même. Une société de gestion a une activité économique propre distincte de celle d'être l'organe d'une personne morale;
        2. les ASBL et fondations: selon les normes antérieures, les ASBL ne pouvaient être des commerçantes et relevaient nécessairement du tribunal de première instance [32]. Les ASBL sont-elles des entreprises? Rappelons que des secteurs économiques importants, tels la grande majorité des cliniques et hôpitaux, sont encadrés par des ASBL; l'enseignement et les maisons de repos de même. L'objet social est sans doute déterminant pour définir la nature de l'association, mais cet objet social n'exclura pas nécessairement la compétence du tribunal de commerce.
          La question s'est déjà posée dans le cadre de la LPMPC du 6 avril 2010; ainsi que l'exprime un auteur:
          « Les ASBL et les fondations peuvent (…) être considérées comme des entreprises si elles poursuivent de manière durable un but économique. Sinon, elles tombent en dehors du champ d'application de la LPMPC. Lorsque le service n'est pas destiné au marché, la LPMPC ne s'appliquera pas. ” [33].
          En règle, les ASBL relèveront de la compétence du tribunal de première instance; dans des cas particuliers, si le but premier d'une activité poursuivie de façon durable par une ASBL est économique, encore que les bénéfices en soient affectés ensuite à l'objet de l'ASBL, cet aspect de leur activité pourra relever du tribunal de commerce.
          Ainsi, un établissement d'enseignement public n'est pas une entreprise lorsqu'il dispense un enseignement, mais bien en revanche lorsque, par exemple, il loue ses installations de manière durable;
          • les mutuelles: la Cour de justice a estimé - il est vrai dans le cadre du droit de la concurrence - que « les systèmes de sécurité sociale reposent sur un système d'affiliation obligatoire, indispensable à l'application du principe de solidarité ainsi qu'à l'équilibre financier desdits régimes » et que « les caisses de maladie ou les organismes qui concourent à la gestion du service public de la sécurité sociale remplissent une fonction de caractère exclusivement social. Cette activité est, en effet, fondée sur le principe de la solidarité nationale et dépourvue de tout but lucratif. Les prestations versées sont des prestations légales et indépendantes du montant des cotisations » [34]. Il s'ensuit pour la Cour de justice que cette activité n'est pas une activité économique et que, dès lors, les organismes qui en sont chargés ne constituent pas des entreprises au sens du droit de la concurrence. Par contre, les caisses de maladie sont effectivement des entreprises dans la mesure où elles offrent d'autres services tels que, par exemple, les assurances complémentaires.
          § 7. L'extension optionnelle réservée au demandeur qui n'est pas une entreprise

          22.Celui-ci, par application de l'article 573, dernier alinéa, du Code judiciaire, bénéficie de l'option d'introduire, soit devant le tribunal de première instance soit devant le tribunal de commerce, la demande qu'il forme contre une entreprise.

          En outre, ce même demandeur bénéficie de l'option de porter sa réclamation d'un montant maximum de 1.860 EUR (2.500 EUR au 1er septembre 2014) [35], devant le juge de paix ou devant le tribunal de commerce, compétent aujourd'hui pour connaître des petits litiges.

          S'il choisit la juridiction cantonale, un appel de la décision à intervenir sera possible devant le tribunal de première instance lorsque la demande est supérieure à 1.240 EUR (1860 EUR au 1er septembre 2014) [36]. En revanche, l'appel ne sera pas possible si le jugement est prononcé par le tribunal de commerce car devant cette juridiction les litiges d'un montant maximum de 1.860 EUR ne sont pas appelables (2.500 EUR au 1er septembre 2014) [37].

          Le commentaire de l'article 2 de la loi « juge naturel » souligne que les litiges purement civils, même entre entités économiques, ne relèvent pas du tribunal de commerce, comme par exemple un divorce entre commerçants [38].

          § 8. L'exclusion de la compétence du tribunal de commerce quand le litige relève de la compétence spéciale d'autres juridictions

          23.Le tribunal de commerce n'a pas de compétence résiduaire comme le tribunal de première instance. Si une loi confère une compétence spéciale à une autre juridiction, il doit se déclarer incompétent. Ainsi, la loi ne porte pas atteinte à la compétence des tribunaux du travail pour tout ce qui regarde les relations de travail ou la sécurité sociale des travailleurs.

          Elle ne modifie rien non plus à la compétence spéciale qui est celle du tribunal de police, en vertu de l'article 601bis du Code judiciaire, selon lequel quel qu'en soit le montant, le tribunal de police connaît de toute demande relative à la réparation d'un dommage résultant d'un accident de la circulation ou d'un accident ferroviaire même si celui-ci est survenu dans un lieu qui n'est pas accessible au public.

          Elle ne modifie pas non plus la compétence des juges de paix quant aux baux commerciaux [39].

          IV. Modification de l'article 573 du Code judiciaire: le transfert des petits litiges de la justice de paix vers le tribunal de commerce (art. 2)

          24.L'article 573 du Code judiciaire va changer les repères à d'autres égards encore.

          Dans sa version antérieure, cette disposition excluait de la compétence du tribunal de commerce les contestations relevant de la compétence générale des juges de paix ainsi que les contestations relatives aux lettres de change et aux billets à ordre lorsque le montant de la demande ne dépasse pas 1.860 EUR.

          La compétence générale du juge de paix, organisée à l'article 590 du Code judiciaire, portait sur toutes demandes dont le montant n'excède pas 1.860 EUR [40], hormis celles qui sont soustraites par la loi à sa juridiction.

          L'article 573 nouveau du Code judiciaire écarte toute référence à la compétence des juges de paix et supprime la limite de 1.860 EUR pour les lettres de change et billets à ordre; en outre cet article est adjoint [41] à la liste des matières qui sont soustraites à la juridiction du juge de paix par l'article 590, alinéa 1er, du Code judiciaire.

          Il s'ensuit que le tribunal de commerce est désormais compétent, quel que soit le montant en jeu, pour toutes les matières qui lui sont attribuées par le Code judiciaire au titre de sa compétence générale, spéciale ou exclusive.

          Ainsi que l'exposent les travaux préparatoires [42], « Tous les 'petits' litiges d'une valeur inférieure à 1.860 EUR et qui concernent les entreprises seront dorénavant traités par le tribunal de commerce. (…) La nouvelle disposition ne change par ailleurs rien en ce qui concerne l'appellabilité. En effet, l'article 617 du Code judiciaire prévoit que les jugements du tribunal de commerce qui statuent sur une demande dont le montant ne dépasse pas 1.860 EUR sont rendus en dernier ressort. »

          Le parallélisme devient parfait avec l'autre juridiction spécialisée qu'est le tribunal du travail, dont la compétence n'a jamais été limitée ratione summae.

          V. Modification de l'article 577 du Code judiciaire: la fin des appels devant le tribunal de commerce (art. 5)

          25.A la suite du transfert des petits litiges, il était logique de supprimer l'appel devant le tribunal de commerce des décisions rendues en premier ressort par le juge de paix sur les contestations entre commerçants ou relatives aux lettres de change et billets à ordre.

          L'article 577 se voit limité à son ancien alinéa 1er libellé comme suit:

          « Le tribunal de première instance connaît de l'appel des jugements rendus en premier ressort par le juge de paix et, dans les cas prévus à l'article 601bis, par le tribunal de police. » [43].

          Le juge de paix disposerait-il encore de l'une ou l'autre compétence commerciale qui n'aurait pas été exclue par la loi? La question concerne particulièrement les litiges relatifs aux baux commerciaux, lorsque les parties sont toutes des entreprises (étant entendu que la location ou la prise à bail dans le cadre d'un bail commercial est un acte à objectif économique).

          Lorsque le litige opposait deux commerçants, la jurisprudence de la Cour de cassation désignait le tribunal de commerce comme compétent [44]. Cependant, le législateur a purement et simplement retiré aux tribunaux de commerce toute compétence d'appel de justice de paix puisqu'il a supprimé l'alinéa 2 de l'article 577 du Code judiciaire. Dès lors les juges de commerce sont sans juridiction pour encore connaître de quelle que requête d'appel que ce soit. Les appels des décisions des juges de paix sont donc concentrés devant le tribunal de première instance.

          VI. Les compétences exclusives et spéciales clarifiées
          § 1. Modification de l'article 574, 1° et 5°, du Code judiciaire: la volonté de clarifier la compétence spéciale du tribunal de commerce (art. 3)

          26.L'ancien article 574, 1°, du Code judiciaire était libellé comme suit:

          « Le tribunal de commerce connaît, même lorsque les parties ne sont pas commerçantes:

          1° des contestations pour raison d'une société régie par le Code des sociétés entre sociétés et associés, entre associés, entre sociétés et administrateurs ou gérants, entre administrateurs ou gérants, entre administrateurs ou gérants et tiers, entre administrateurs ou gérants et associés, entre commissaires, entre commissaires et sociétés, entre commissaires et administrateurs, gérants ou associés, entre liquidateurs, entre liquidateurs et tiers, entre liquidateurs et sociétés ou entre liquidateurs et associés, entre sociétés, associés, administrateurs ou gérants, commissaires ou liquidateurs et réviseurs d'entreprises, entre fondateurs, entre fondateurs et sociétés, entre fondateurs et tiers ou entre fondateurs, sociétés, associés et administrateurs ou gérants. »

          Il se présente dorénavant comme suit:

          « Le tribunal de commerce connaît:

          1° des contestations pour raison d'une société régie par le Code des sociétés, ainsi que des contestations survenant entre associés d'une telle société, à l'exception des contes­tations dans lesquelles l'une des parties est une société c­onstituée en vue de l'exercice de la profession d'avocat, de notaire ou d'huissier de justice; ».

          Ces modifications ne devraient pas apporter de bouleversements dans l'application de l'article 574, 1°, du Code judiciaire; il a toujours été de l'intention du législateur de confier au tribunal de commerce l'ensemble du contentieux relatif au fonctionnement interne des sociétés commerciales et, depuis la modification apportée par la loi du 31 janvier 2009 (voir supra, n° 14), de toutes les sociétés régies par le Code des sociétés.

          Ainsi que le constatent les travaux préparatoires [45], l'ancienne disposition de l'article 574, 1°, du Code judiciaire comportait une longue énonciation qui, à chaque évolution législative, se révélait incomplète quand de nouvelles formes de gestion ou représentation apparaissaient (pensons au comité de direction, ou au délégué à la gestion journalière); une formulation plus générale s'imposait, qui est celle dont le législateur a dorénavant fait choix.

          Mais l'exposé des motifs [46] prend soin de préciser que l'ancienne énonciation de l'article 574, 1°, du Code judiciaire pourra servir à interpréter a minima la nouvelle disposition en ce qui concerne la notion de « contestation pour raison d'une société ». Les praticiens feront donc référence en tout cas aux situations de conflits énumérées dans l'ancien article 574, tout en ayant à l'esprit que la volonté expresse du législateur est bien de couvrir plus largement tous les litiges qui concernent le fonctionnement interne d'une société.

          Pour éviter que certaine jurisprudence ne dénie la compétence du tribunal de commerce dans le cadre de litiges entre associés, au motif que ne seraient concernés ni la société ni l'un de ses organes, le texte précise expressément que les litiges entre associés relèvent de la compétence des juridictions consulaires; bien entendu, les litiges visés concernent les associés anciens et actuels.

          27.Exception à l'élargissement des compétences: la loi « juge naturel » réduit (très légèrement) la compétence antérieure des tribunaux de commerce, en prévoyant que les contestations dont question à l'article 574, 1°, du Code judiciaire leur seront soustraites lorsque l'une des parties est une société constituée en vue de l'exercice de la profession d'avocat, de notaire ou d'huissier de justice. Cette exception repose - dit le commentaire des articles - sur le fait que ces professions sont proches du système juridictionnel et que le tribunal de première instance étant déjà saisi de types de litiges impliquant ces professions, sera le mieux à même de juger de ces cas (p. 11).

          28.Quant aux 5° et 9° de l'article 574, leur libellé est dorénavant le suivant:

          « Le tribunal de commerce connaît:

          (…)

          5° des actions en rectification et en radiation des inscriptions à la Banque-Carrefour des Entreprises, des entreprises au sens de l'article 2, 3°, de la loi du 16 janvier 2003 portant création d'une Banque-Carrefour des Entreprises, modernisation du registre de commerce, création de guichets-entreprises agréés et portant diverses dispositions. (Abrogé: 'des actions en rectification et en radiation d'inscriptions à la Banque-Carrefour des Entreprises, en qualité de commerçant')

          9° des contestations relatives aux actes de la Loterie nationale. (Abrogé: 'réputés commerciaux par la loi') ».

          Ces modifications à l'article 574 du Code judiciaire sont dans la logique du changement apporté à l'article 573 du Code judiciaire; désormais toutes les actions en rectification et radiation à la BCE ressortent du tribunal de commerce, quel que soit le type d'entreprise.

          Et tout le contentieux (minime) relatif à la Loterie nationale est confié aux tribunaux de commerce.

          § 2. Modification de l'article 575 du Code judiciaire (art. 4)

          29.La rédaction de l'article 575, § 1er nouveau, du Code judiciaire est la suivante:

          « § 1er. Le tribunal de commerce connaît des demandes entre entreprises, visées à l'article 573, alinéa 1er, 1° (anciennement: 'entre commerçants'), relatives au droit d'auteur, aux droits voisins et au droit des producteurs de bases de données.

          La demande dirigée contre une entreprise (anciennement: 'contre un commerçant'), par une personne qui n'agit pas elle-même en cette qualité, peut également être portée devant le tribunal de commerce. »

          Quant au § 3 [47], il est en toute logique abrogé puisqu'il portait sur l'appel des décisions de justice de paix dans les matières concernées par cette disposition.

          La très grande majorité des litiges relatifs au droit d'auteur et voisins devraient dorénavant être traités par les juridictions commerciales [48].

          § 3. Modification des articles 587 et 589 du Code judiciaire (art. 6 et 7): retards de paiement, droits d'auteur, etc.

          30.La rédaction de l'article 587 nouveau, modifié par l'article 6 de la loi « juge naturel » est la suivante:

          « Le président du tribunal de première instance statue:

          (…)

          10° sur les demandes prévues à l'article 8 de la loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, qui sont dirigées contre toute personne autre que des entreprises visées à l'article 573, 1°, ou contre leurs groupements professionnels ou interprofessionnels, (anciennement: 'qui sont dirigées contre des personnes non commerçantes ou contre leurs groupements professionnels ou interprofessionnels') » [49].

          Cette adaptation est un toilettage de texte, dont les répercussions seront très faibles en la quasi-absence de tout contentieux résultant de cette disposition.

          Le pendant de cette modification se situe à l'article 589 du Code judiciaire, aujourd'hui libellé comme suit:

          « Le président du tribunal de commerce statue sur les demandes prévues:

          (…)

          7° à l'article 8 de la loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, qui sont dirigées contre les entreprises visées à l'article 573, alinéa 1er, 1°, (anciennement: 'contre des commerçants') ou contre leurs groupements professionnels ou interprofessionnels.

          (…). »

          Un autre alinéa de l'article 589, est également modifié pour étendre la compétence en matière de noms de domaine à toutes les sociétés régies par le Code des sociétés:

          « 12° à l'article 4 de la loi du 26 juin 2003 relative à l'enregistrement abusif des noms de domaine, dans la mesure où elles concernent une marque, une indication géographique ou une appellation d'origine, un nom commercial ou la dénomination sociale d'une société régie par le Code des sociétés (anciennement: 'une société commerciale') ».

          VII. La procédure d'injonction de payer: modification de l'article 1338 du Code judiciaire (art. 9)

          31.L'article 1338 du Code judiciaire, qui se situe dans le Chapitre XV: « Procédure sommaire d'injonction de payer », est complété comme suit par un alinéa inséré entre les alinéas 2 et 3:

          « Toute demande de la compétence du juge de paix, tendant au paiement d'une dette liquide qui a pour objet une somme d'argent dont le montant n'excède pas 1.860 EUR peut être introduite, instruite et jugée conformément aux dispositions du présent chapitre, si elle paraît justifiée devant lui par un écrit émanant du débiteur.

          L'écrit qui sert de fondement à la demande ne doit pas nécessairement constituer une reconnaissance de dette.

          Ces dispositions s'appliquent également à toute demande de la compétence du tribunal de commerce lorsqu'il connaît des contestations visées à l'article 573.

          Ces dispositions s'appliquent également à toute demande de la compétence du tribunal de police lorsqu'il connaît des contestations visées à l'article 601bis. »

          En d'autres termes, la demande peut être introduite devant le tribunal de commerce par la procédure d'injonction de payer, lorsqu'elle n'excède pas 1.860 EUR.

          VIII. Dispositions corrigeant l'article 578 du Code judiciaire (art. 13 de la loi)

          32.Dans l'article 578 du Code judiciaire, le 18° est abrogé, comme suit:

          « Le tribunal du travail connaît:

          (…)

          18° les actions en dommages et intérêts visées à l'article 61, § 3, alinéa 3, de la loi du 31 janvier 2009 relative à la continuité des entreprises; »

          Il s'agit d'un toilettage de texte.

          Le commentaire de l'article 13 (anciennement 12) fournit l'éclairage suivant:

          « L'alinéa 3, du paragraphe 3, de l'article 61 de la loi du 31 janvier 2009 relative à la continuité des entreprises prévoit pour les travailleurs concernés par un transfert sous autorité de justice la possibilité de réclamer au cédant des dommages et intérêts devant le tribunal du travail en cas de transmission, par le cédant ou le mandataire de justice, de données incorrectes ou inexactes au candidat-cessionnaire pour le préjudice qu'il a subi.

          Les partenaires sociaux, réunis au sein du Conseil National du Travail, ont souhaité la suppression de cette possibilité d'action devant le tribunal du travail, d'où l'abrogation de celle-ci dans l'article 578, 18°, du Code judiciaire.

          La loi du 31 janvier 2009 a d'ailleurs été modifiée dans ce sens par la loi du 27 mai 2013 et l'abrogation proposée en est la conséquence logique. » [50].

          IX. La nouvelle compétence spéciale des juges de paix (art. 11 et 12)

          33.Les articles 11 et 12 constituent le deuxième volet important de la réforme. Le transfert ne concerne pas le tribunal de commerce mais a néanmoins un impact non négligeable sur la répartition des affaires. Il a été joint par un amendement au projet du Gouvernement [51].

          Désormais, en application de l'article 591 du Code judiciaire, ressortissent à la compétence spéciale du juge de paix, toutes les demandes relatives au recouvrement d'une somme d'argent introduites par un fournisseur d'électricité, de gaz, de chauffage ou d'eau ou par une personne proposant un réseau public de communications électroniques, un service de radiotransmission ou de radiodiffusion et télédiffusion, dirigée contre une personne physique qui n'est pas une entreprise au sens de l'article 573, alinéa 1er, 1°, du fait qu'elle reste en défaut de paiement d'une fourniture de service d'utilité publique par le fournisseur ou par la personne susvisés.

          Et de manière bienvenue pour éviter les attributions de compétence contenues dans les conditions de facturation, l'article 628, 25°, du Code judiciaire édicte dorénavant que le juge du domicile du défendeur est seul compétent pour connaître de la demande lorsqu'un fournisseur d'électricité, de gaz, de chauffage ou d'eau ou une personne proposant un réseau public de communications électroniques, un service de radiotransmission ou de radiodiffusion et télédiffusion intente une action en paiement d'une somme d'argent à l'encontre d'une personne physique qui n'est pas une entreprise visée à l'article 573, alinéa 1er, 1°, du fait qu'elle reste en défaut de paiement d'une fourniture de service d'utilité publique par le fournisseur ou par la personne susvisés.

          Cet amendement place un contentieux proche du consommateur dans l'orbite naturelle du juge de paix du domicile du défendeur, par ailleurs déchargé d'un contentieux portant sur des petites sommes liées à des actes de nature économique.

          X. Evaluation de certains effets pratiques du nouveau système
          § 1. Les aspects fiscaux

          34.Le déplacement d'un certain nombre d'affaires aura un effet limité sur le coût des procédures. Les droits de greffe à payer devant le tribunal de commerce sont plus élevés que ceux à payer devant le juge de paix, et ce pour un litige du même montant.

          Le Gouvernement a reconnu que c'était le prix à payer pour une plus grande sécurité juridique [52]. Les inconvénients seront certainement moindres dès lors que des chambres d'introduction efficaces dans le cadre des tribunaux de commerce restructurés pourront avec célérité s'acquitter de ce contentieux.

          § 2. La charge de travail des tribunaux de commerce

          35.En matière de contentieux « ordinaire », l'exposé des motifs de la loi « juge naturel » révèle que le nombre d'affaires introduites devant ces juridictions stagnent ou diminuent pour la période de 2000 à 2011 (de 72.898 à 69.042) [53]. La diminution en 2012 et 2013 s'est accélérée dans la plupart des juridictions au point que, si l'on ne considère que les petits litiges regroupés dorénavant devant les tribunaux de commerce, le nouveau contentieux pourrait simplement compenser cette perte.

          Les justices de paix ont effectué au cours des travaux parlementaires des comptages précis du nombre d'affaires qui échapperont à leur compétence suite à l'abandon du critère ratione summae. Le chiffre avancé initialement de plus ou moins 10.000 cas (dont plus de 2/3 des défauts) est sans doute surévalué. Il en est d'autant plus ainsi que par le biais des nouvelles procédures alternatives de règlement des conflits (Livre XVI CDE) une partie de ces litiges devrait pouvoir quitter le pouvoir judiciaire.

          Ceci permettra aux tribunaux de commerce, surtout dans leur nouvelle structure, de consacrer une attention particulière à la fois aux contentieux transférés (notamment ceux en matière de droits intellectuels) et à la matière plus classique pour eux mais cruciale de l'insolvabilité.

          36.Les procédures liées à l'insolvabilité augmentent en effet fortement ces dernières années, comme le montrent les chiffres relevés par Graydon:

          Faillites

            • 1980: 3.542
            • 2010: 9.570
            • 2011: 10.224
            • 2012: 11.052
            • 2013: 12.306

            PRJ

              • 2009: 633
              • 2010: 1.253
              • 2011: 1.398
              • 2012: 1.537

              Or les procédures d'insolvabilité - l'enquête commerciale, la procédure de réorganisation judiciaire (PRJ), la faillite, la liquidation - sont des procédures complexes, qui induisent un ensemble d'interventions.

              De la même manière, les juridictions commerciales ne peuvent aujourd'hui se désintéresser du rôle de police économique qui est le leur; ce rôle impose la mise en oeuvre de contrôles méthodiques à partir des données disponibles dans les dossiers du greffe des sociétés et des ASBL, en connexion avec la chambre d'enquête.

              Dès lors, pour assurer leurs missions d'encadrement, les tribunaux de commerce sont tenus de consacrer à ces matières des moyens humains supplémentaires.

              37.En fonction des cadres qui leur sont affectés, les tribunaux de commerce se trouvent aujourd'hui dans une situation d'équilibre pour faire face aux tâches qui leur sont dévolues. Le regroupement des juridictions devrait pouvoir assurer une meilleure gestion des affaires surtout si les rigidités des attributions de compétence aux divisions sont évitées.

              Mais tentons une évaluation, qui vaut ce qu'elle vaut, pour l'époque où les praticiens auront intégré la compétence obligatoire du tribunal de commerce (litige entre entreprises) ou facultative (litige contre une entreprise), et tablons sur un pourcentage de 8 à 10% d'augmentation des affaires entrantes, qui seront réparties en charge de travail supplémentaire pour le greffe et pour les magistrats.

              Divers éléments détermineront l'évolution quantitative et qualitative du contentieux.

              La création des grands tribunaux de commerce doit permettre de rationaliser la gestion des litiges, surtout lorsque le greffe informatisé aura vu le jour (ce qui ne saurait tarder…). Une certaine centralisation sur un seul siège au sein de l'arrondissement, notamment par l'effet de clauses conventionnelles, devrait promouvoir une approche plus efficace pour solutionner les contentieux simples.

              L'apport des formules extrajudiciaires du Livre XVI du Code de droit économique allègera progressivement le travail des tribunaux, dont celui du tribunal de commerce.

              Quant à la perception exacte des magistrats de leur rôle en matière de conciliation, essentiel dans le domaine économique, elle induit des répercussions globalement favorables (diminution du nombre de recours) mais pèse par contre sur la « productivité » à court terme. Il en va de même de l'intégration de l'excellente formule de la médiation, qui dans les matières économiques progresse chaque année en Belgique.

              En bref, il y a une marge considérable d'amélioration possible de la productivité du service judiciaire.

              Les innovations de la loi « juge naturel » imposeront sans nul doute une charge complémentaire aux tribunaux de commerce mais ceux-ci auront l'avantage de gérer un contentieux qui aura gagné en densité et intérêt.

              XI. Dispositions transitoires et entrée en vigueur (art. 14 à 17 de la loi)

              38.Les dispositions transitoires sont classiques.

              Les affaires dont était saisie, avant l'entrée en vigueur de la présente loi, la juridiction compétente en vertu des dispositions en vigueur au moment de la saisine, restent pendantes devant cette juridiction.

              De même, l'opposition, la tierce opposition et l'appel sont formés, dans les mêmes conditions, devant la juridiction compétente en vertu des dispositions en vigueur à la date de la décision incriminée.

              39.L'entrée en vigueur de la loi a lieu le premier jour du mois qui suit l'expiration d'un délai de dix jours prenant cours le jour après sa publication au Moniteur belge, soit le 1er juillet 2014.

              [1] Président honoraire de la Cour de cassation, médiateur agréé.
              [2] Président du tribunal de commerce du Hainaut.
              [3] Notamment la loi du 1er décembre 2013 « portant réforme des arrondissements judiciaires et modifiant le Code judiciaire en vue de renforcer la mobilité des membres de l'ordre judiciaire » (M.B., 10 décembre 2013) et la loi du 18 février 2014 « relative à l'introduction d'une gestion autonome pour l'Organisation judiciaire » (M.B., 4 mars 2014).
              [4] M.B., 14 juin 2013.
              [5] M.B., 27 septembre 2013.
              [6] Le Livre XVI du Code de droit économique qui élargit le champ d'activité des médiateurs aura pour conséquence de « déjudiciariser » beaucoup de litiges, mais ces dispositions ne devraient pas concerner plus le tribunal de commerce que le tribunal de première instance.
              [7] D. Mertens, « Mag de vrije beroepsbeoefenaar eindelijk gewoon 'onderneming' heten? » (note sous C. const., 6 avril 2011), R.W., 2011-2012, n° 20, 14 janvier 2012, p. 910; P. Troisfontaines, « Le tribunal de commerce en Belgique: une juridiction exemplaire?”, R.D.C., 2000, p. 34.
              [8] Projet de loi modifiant le Code judiciaire, le Titre préliminaire du Code de procédure pénale et la loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, en vue d'attribuer dans diverses matières la compétence au juge naturel, exposé des motifs, Doc. parl., Chambre, 2013-2014, n° 53-3076/001, pp. 7-8; voir égal. Zenner, Lebeau et Alter, La loi relative à la continuité des entreprises à l'épreuve de sa première pratique, Larcier, 2010, pp. 217 et 218, n° 153.
              [9] Voir toutefois l'exception à apporter en ce qui concerne les professions libérales, dans le Code de droit économique: Doc. parl., n° 53-3423/001.
              [10] Sur les compétences générales, spéciales et exclusives du tribunal de commerce, voir G. de Leval et F. Georges, Précis de droit judiciaire, Tome 1, Les institutions judiciaires: organisation et éléments de compétence, Larcier, 2010, pp. 145 et 146.
              [11] L'exposé des motifs l'indique: « Ceci (le recours à la notion d'entreprise (NDLR)) ne signifie pas que la qualité de commerçant, de société commerciale ou de société à forme commerciale est indifférente pour la répartition de compétence. Ces paramètres de compétence doivent être pris en compte et sont d'ailleurs de nature à faciliter la perception de la juridiction compétente. » Doc. parl., Chambre, n° 53-3076/001, p. 6, n° 4. Concernant l'impact de la réforme sur le droit de la faillite, voir infra, n° 15.
              [12] C. Cambier, Droit judiciaire civil, tome II, La compétence, Larcier, 1981, p. 471.
              [13] C. Cambier, o.c., p. 474: « Une conception subjective de la commercialité devient, de la sorte, le principe des pouvoirs établis. »
              [14] Ce qui a justifié la différence rédactionnelle de l'art. 574 nouveau du Code judiciaire laquelle ne fait plus allusion à la circonstance que le tribunal de commerce reste compétent même lorsque les parties ne sont pas commerçantes.
              [15] Recueil Van Ryn, Bruylant, 1992, p. 304.
              [16] Le Code de droit économique définit les professions libérales (voir infra, n° 21, c).
              [17] La thèse de M. Van Putten, Het arbeidsrecht en de onderneming, Intersentia, 2009, consacre 820 pages à sa définition.
              [18] Voir aussi aux Pays Bas, l'abandon de la notion d'entreprise au profit de celle d'entité économique: art. 7:662.2.B NBW.
              [19] Voir les conclusions de l'avocat général Van Gerven dans l'affaire C-392/92 (C.J.C.E., 14 avril 1994) qui réfère à l'arrêt Botzen de 1985: « ll ressort du passage ci-dessus que, dans les trois notions d''entreprise', d''établissement' ou de 'partie d'établissement', la Cour reconnaît une notion sous-jacente, à savoir celle d''entité économique', notion qui, à notre avis, renvoie à une entité présentant un minimum d' autonomie organisationnelle, qui peut exister en soi ou former une partie d'une entreprise plus globale. » Dans l'arrêt Botzen, rendu avant l'arrêt Spijkers, la Cour avait déjà affirmé que le seul critère déterminant pour le transfert des droits et des obligations des travailleurs, au sens de la directive, « consiste dans la question de savoir si le service auquel ils étaient affectés et dans le cadre duquel se concrétisait, du point de vue de l'organisation, leur relation de travail, est transféré ou non ».
              [20] Voir L. Bihain, « Transfert d'entreprise sous autorité de justice », J.T., 2014, 125.
              [21] Comparez le rôle du juge dans d'autres pays: M. Melissen, « Towards a different role of the Dutch Insolvency Judge », in Perspectives on international insolvency law: a tribute to Bob Wessels, Kluwer, 2014, p. 85.
              [22] Dans la pratique, certaines faillites d'agriculteurs sont déjà prononcées sous l'impulsion d'organes syndicaux d'agriculteurs qui conseillent cette voie à leurs adhérents.
              [23] Voir notamment W. Van Gerven, L. Gyselen, M. Maresceau et J. Stuyck, Kartelrecht, Tjeenk Willink, 1997, pp. 73 et s.
              [24] Voir C.J.C.E., 16 novembre 1995, C-244/94, Fédération française des sociétés d'assurance / Ministère de l'agriculture et de la pêche, Jur. 1995, I-4013.
              [25] Pour un aperçu de cette jurisprudence très casuistique, voir les points 27 et suivants du Guide to the application of the European Union rules on state aid, public procurement and the internal market to services of general economic interest, and in particular to social services of general interest, 29 avril 2013, SWD(2013) 53 final.
              [26] Voir J. Vander Gucht et I. Verougstraete, « Precontentieuse economische rechtsmachten », in Actes du colloque sur la magistrature économique, Bruylant, 1976, qui prônent la création de chambres économiques compétentes pour statuer sur le droit économique (I.6).
              [27] Projet de loi relatif aux pratiques du marché et à la protection du consommateur, exposé des motifs, Doc. parl., Chambre, n° 52-2340/001, p. 13.
              [28] Le marché peut être défini comme un mécanisme par lequel des acheteurs et des vendeurs interagissent pour déterminer le prix et la quantité d'un bien et d'un service. L'équilibre entre offre et demande est censé se faire par l'intermédiaire des prix (voir P. Samuelson et W. Nordhaus, Economie, 16e éd., 2000, p. 27).
              [29] En principe, car elles peuvent ne pas nécessairement poursuivre un but économique. Si l'Etat structure sa coopération au développement ou le contrôle des voies aériennes par la voie d'une forme sociétale, il ne s'agira pas encore d'une entreprise soumis au tribunal de commerce, mais d'un service d'intérêt général non économique.
              [30] Dans la mesure précisée supra, n° 9, al. 3.
              [31] A. Tallon, Concurrence et pratiques du marché. La procédure, Larcier, 2012, p. 81, commentant l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 26 octobre 2005, en cause de la SNCB; R. Steennot, « Waarom de NMBS als verkoper in de zin van de wet handelspraktijken beschouwd moet worden? », D.C.C.R., 2006, pp. 46-67.
              [32] Voir à ce sujet: D. Van Gerven, Handboek verenigingen, Biblo, 2004, p. 246.
              [33] A. Tallon, Concurrence et pratiques du marché. La procédure, Larcier, 2012, p. 70, n° 78.
              [34] C.J.C.E., 17 février 1993, C-159/91 et C-160/91, Rec., I-664.
              [35] A partir du 1er septembre 2014, le seuil de la compétence générale des juges de paix sera porté à 2.500 EUR en application de la loi portant création d'un tribunal de la famille et de la jeunesse.
              [36] Art. 617 C. jud.: « Les jugements du tribunal de première instance et du tribunal de commerce qui statuent sur une demande dont le montant ne dépasse pas 1.860 EUR, sont rendus en dernier ressort. Cette règle s'applique également aux jugements du juge de paix et, dans les contestations visées à l'article 601bis, à ceux du tribunal de police, lorsqu'il est statué sur une demande dont le montant ne dépasse pas 1.240 EUR (…). » Au 1er septembre 2014, le seuil de non-appel devant les juges de paix sera porté de 1.240 EUR à 1.860 EUR par la loi portant création d'un tribunal de la famille et de la jeunesse.
              [37] Ibid., art. 617, al. 1er, C. jud.
              [38] Doc. parl., Chambre, n° 53-3076/001, p. 9.
              [39] Sans préjudice de la qualification qui peut être donnée des locations de fonds de commerce.
              [40] Chiffre porté à 2.500 EUR lors de l'entrée en vigueur, le 1er septembre 2014, de la loi créant le tribunal de la famille et de la jeunesse.
              [41] Par l'art. 8 de la loi « juge naturel ».
              [42] Doc. parl., Chambre, n° 53-3076/001, p. 6.
              [43] L'ancien alinéa 2, désormais supprimé, était libellé de la manière suivante: « Néanmoins l'appel des décisions rendues en premier ressort par le juge de paix sur les contestations entre commerçants et relatives aux actes réputés commerciaux par la loi ou aux contestations relatives aux lettres de change est porté devant le tribunal de commerce. »
              [44] Voy. Cass., 4 octobre 1999, R.G. C.98.0384.F, Pas., 1999, n° 498; S. Uhlig, « Problèmes divers de compétence », in Le point sur les procédure (2e partie), CUP, décembre 2000, vol. 43, pp. 31 et s.
              [45] Exposé des motifs, Doc. parl., Chambre, n° 53-3076/001, p. 10.
              [46] Mêmes réf.
              [47] « § 3. Les dispositions des paragraphes 1 et 2 ne s'appliquent pas aux demandes relevant de la compétence du juge de paix conformément à l'article 590. Le tribunal de première instance connaît en appel des décisions prises en première instance par le juge de paix dans les matières visées aux paragraphes 1er et 2, à moins qu'il ne s'agisse d'un litige entre commerçants, auquel cas l'appel est interjeté devant le tribunal de commerce. »
              [48] Rappelons qu'en cette matière une compétence territoriale spécifique est prévue à l'art. 636 C. jud., (modifié par la loi du 1er décembre 2013 portant réforme des arrondissements judiciaires): « Si un tribunal est réparti en divisions et si la loi confère la compétence territoriale à un tribunal qui est établi au siège d'une cour d'appel, la division établie au siège d'une cour d'appel est territorialement compétente (…). »
              [49] L'art. 8 de la loi du 2 août 2002 prévoit que: « Le président du tribunal de première instance ou, lorsque l'action est dirigée contre des commerçants ou leurs groupements professionnels ou interprofessionnels, le président du tribunal de commerce, constate l'existence et ordonne la cessation de l'utilisation de clauses contractuelles ou des pratiques qui constituent un abus manifeste au sens de l'article 7. » Cet article sera sous peu abrogé et remplacé par le Livre XVII du Code de droit économique (art. XVII.1).
              [50] Projet de loi modifiant le Code judiciaire, le Titre préliminaire du Code de procédure pénale et la loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, en vue d'attribuer dans diverses matières la compétence au juge naturel, exposé des motifs, Doc. parl., Chambre, 2013-2014, n° 53-3076/001, p. 14.
              [51] Doc. parl., Chambre, 2013-2014, n° 53-3076/004.
              [52] Projet de loi modifiant le Code judiciaire, le Titre préliminaire du Code de procédure pénale et la loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, en vue d'attribuer dans diverses matières la compétence au juge naturel, exposé des motifs, Doc. parl., Chambre, 2013-2014, n° 53-3076/001, p. 15.
              [53] Doc. parl., Chambre, n° 53-3076/001, p. 5.