Article

Cour d'appel Bruxelles, 26/04/2010, R.D.C.-T.B.H., 2014/1, p. 76-84

Cour d'appel de Bruxelles 26 avril 2010

DROITS DE L'HOMME - CEDH
Droits et libertés - Procès équitable (art. 6) - Droit à l'exécution des décisions de justice
DROIT INTERNATIONAL PUBLIC
Etat - Souveraineté - Immunité des Etats - Immunité d'exécution
L'immunité d'exécution d'un Etat étranger n'est pas contraire au droit à un procès équitable dès lors qu'elle n'a pas pour résultat d'enlever au bénéficiaire d'une décision de justice rendue contre cet Etat les possibilités d'exécution - forcée ou non - ni de restreindre ces possibilités à un point tel que le droit à l'exécution du jugement s'en trouverait atteint dans sa substance même.
MENSENRECHTEN - EVRM
Rechten en vrijheden - Eerlijk proces (art. 6) - Recht op tenuitvoerlegging van justitiële beslissingen
VOLKENRECHT
Staat - Soevereiniteit - Immuniteit van Staat - Immuniteit van tenuitvoerlegging
De immuniteit van tenuitvoerlegging van een vreemde Staat schendt het recht op een eerlijk proces niet wanneer zij er niet toe leidt dat de begunstigde van de tegen die Staat gevelde beslissing alle mogelijkheden tot tenuitvoerlegging wordt ontnomen.

M. / République démocratique du Congo, Fortis Banque SA, l'Etat belge et la Communauté française

Siég.: S. Gadeyne, D. Degreef et R. Coirbay (conseillers)
Pl.: Mes R. Jafferali et K. Moma Kazimbwa, J. Linsmeau, A. Verriest, J. Claessens loco M. Uyttendaele

1. La cour est saisie d'une requête d'appel, déposée le 17 septembre 2008, dirigée contre un jugement du juge des saisies près le tribunal de première instance de Bruxelles, rendu le 31 juillet 2008.

Faits et rétroactes

2. Par jugement prononcé le 5 décembre 1997, le tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombé a condamné la République démocratique du Zaïre à la restitution à Monsieur M. de ses biens pillés ou à en payer la contre-valeur estimée à l'équivalent en Nouveaux-Zaïres de 6.100.000 FB et au paiement de l'équivalent en Nouveaux Zaïres de 1.000.000 FB à titre de dommages et intérêts, et a mis les frais d'instance à charge de la République démocratique du Zaïre.

Ce jugement a été signifié avec commandement de payer à la République démocratique du Zaïre le 17 décembre 1997 à la requête de monsieur M.

3. A la requête de monsieur M., le tribunal de première instance de Bruxelles a déclaré ce jugement du 5 décembre 1997 exécutoire en Belgique par ordonnance du 14 juin 2006.

4. Suite à cette ordonnance, également à la requête de monsieur M., un huissier de justice a, selon les termes de l'exploit du 7 août 2006, signifié (et laissé copie conforme de) à la République démocratique du Congo, dont l'ambassade est sise en Belgique à 1000 Bruxelles, rue Marie de Bourgogne 30:

- l'expédition en forme exécutoire du jugement du 5 décembre 1997 rendu par défaut;

- un certificat de non-opposition et un certificat de non-appel;

- l'expédition en forme exécutoire de l'ordonnance du 14 juin 2006.

Suivant les mentions de l'acte de signification, l'huissier de justice instrumentant a, comme la partie signifiée est un Etat étranger, « pour autant que de besoin, adressé deux copies du présent exploit avec deux copies des pièces signifiées, à monsieur le ministre des Affaires étrangères à Bruxelles, avec prière de les faire parvenir à la partie signifiée après l'accomplissement des formalités requises ».

5. L'ambassade de la République démocratique du Congo a accusé réception de la note verbale du 11 août 2006 relative à cette affaire ainsi que du dossier des pièces annexées le 24 août 2006.

6. Les 10 et 14 novembre 2006, il a été procédé, à la requête de monsieur M., à une saisie-arrêt-exécution à charge de la République démocratique du Congo entre les mains de Dexia Banque Belgique SA, KBC Bank SA, ING Belgique SA, Fortis Banque SA, Belgolaise SA et Banque du Congo SA, pour obtenir paiement de 176.004,40 EUR et les frais.

Cette saisie-arrêt-exécution a été dénoncée à la République démocratique du Congo par exploit du 17 novembre 2006.

Il a également été procédé à une dénonciation par la voie diplomatique mais la République démocratique du Congo n'a pas transmis de note verbale quant à ce.

(...)

9. Le 12 mars 2007, l'huissier de justice instrumentant a établi un projet de répartition concernant le produit de la saisie-arrêt-exécution pratiquée à la requête de monsieur M. entre les mains de Fortis Banque SA qui avait libéré entre les mains de cet huissier le montant de 8.698,23 EUR créditant le compte technique ouvert au nom de Consulat général de la République du Congo à Anvers.

Deux créanciers jouissant d'un privilège ont eu droit à un montant.

Les autres créanciers de la République démocratique du Congo, dont monsieur M., n'ont pas eu droit à quelque montant que ce soit.

10. En date du 23 mars 2007, monsieur M. a fait procéder à une saisie-arrêt-exécution à charge de la République démocratique du Congo entre les mains de la Banque Nationale de Belgique SA, la Communauté française et l'Etat belge pour un montant principal de 176.004,40 EUR et les frais, moins 8.698,23 EUR, soit le produit de la saisie-arrêt-exécution entre les mains de Fortis Banque SA.

Cette saisie a été dénoncée à la République démocratique du Congo par exploit signifié le 30 mars 2007.

Il a également été procédé à une dénonciation par la voie diplomatique mais la République démocratique du Congo n'a pas transmis de note verbale quant à ce.

(...)

En droit

35. Monsieur M. demande la réouverture des débats pour lui permettre de verser deux arrêts prononcés le 21 décembre 2009 par la Cour de cassation à son dossier de doctrine et de jurisprudence.

Ces arrêts ont été prononcés avant que la présente cause ne soit prise en délibéré le 11 janvier 2010.

De plus, ils font partie de la jurisprudence accessible qui peut être consultée librement.

Il n'y a dès lors pas lieu à une réouverture des débats uniquement pour permettre à monsieur M. de déposer ces deux arrêts.

36. Monsieur M. soutient que pour les deux demandes de la République démocratique du Congo, à savoir la mainlevée des saisies litigieuses et la condamnation de monsieur M. au paiement de dommages et intérêts, les conditions de recevabilité n'ont jamais été remplies.

Il le déduit des constatations que la République démocratique du Congo ne produit pas la décision du ministère de la Justice congolais d'introduire les procédures d'opposition et qu'elle ne démontre pas qu'en droit congolais le ministère de la Justice est compétent pour introduire une telle procédure.

La République démocratique du Congo produit le décret n° 03/027 du 16 septembre 2003 portant organisation et fonctionnement du Gouvernement de Transition ainsi que les modalités de collaboration entre le président de la République, les vice-présidents de la République, les ministres et les vice-ministres.

Elle dépose également l'ordonnance n° 07/016 du 16 mai 2007 fixant les attributions des ministres.

Il en découle qu'est conférée au ministère de la Justice la défense des intérêts de l'Etat devant les juridictions nationales, étrangères et internationales. Ces documents justifient la représentation de la République démocratique du Congo par le ministère de la Justice ainsi que l'indiquent les différents exploits et actes par lesquels la République démocratique du Congo introduit des demandes et présente sa défense dans la présente cause.

Comme dans le cas d'espèce, la loi n'exige pas de mandat spécial, l'avocat de la République démocratique du Congo qui accomplit un acte de procédure devant une juridiction de l'ordre judiciaire se limite à déclarer agir au nom de celle-ci, il est légalement présumé avoir reçu à cette fin un mandat régulier de l'organe compétent de la République démocratique du Congo.

Cette présomption peut être renversée, de sorte qu'en l'espèce monsieur M. est en droit d'alléguer que la décision d'accomplir un acte de procédure n'a pas été approuvée par les organes de la République démocratique du Congo et n'émane pas de cette dernière, mais la charge de la preuve repose sur lui (Cass., 9 janvier 2007, rôle n° P.06.1175.N, Justel n° F-20070109-3, http://jure.juridat.just.fgov.be; la règle énoncée dans cet arrêt pour une personne morale de droit privé peut également être appliquée à une personne morale de droit public: (C. trav. Mons., 18 octobre 2002, rôle 16862-16863, Justel n° F-20021018-4, http://jure.juridat.just.fgov.be)).

Ce moyen n'est donc pas fondé.

37. Monsieur M. soutient également que la demande de mainlevée de la République démocratique du Congo est irrecevable à défaut d'intérêt.

Il estime que la République démocratique du Congo n'a pas d'intérêt concret et actuel à demander la mainlevée sur la base des arguments suivants:

- L'article 1541 C. jud. prévoit que l'opposition du débiteur saisi est signifiée à sa requête au saisissant dans les 15 jours de la dénonciation de la saisie, avec citation à comparaître devant le juge des saisies.

Bien qu'il ne s'agisse pas d'un délai prévu à peine de déchéance, une opposition formalisée en dehors de ce délai n'a d'effet à l'égard des tiers que pour les paiements futurs et ne se justifie donc qu'en cas de saisie-arrêt échelonnée.

- L'article 1629, alinéas 3 et 4 C. jud. prévoit que tout contredit au projet de répartition doit être fait dans les 15 jours soit par exploit d'huissier de justice signifié à l'huissier de justice instrumentant, soit par déclaration devant celui-ci, à défaut de quoi il sera procédé à la répartition selon les dispositions du projet. (...) Aucune opposition ne sera admise après l'échéance de ce délai, ni entre les mains de l'huissier de justice, ni devant le juge.

Contrairement à ce que soutient la République démocratique du Congo, aucune règle de droit n'imposait de lui notifier par la voie diplomatique le projet de répartition des sommes saisies.

- Dans le cadre de la première saisie des 10 et 14 novembre 2006, les seules sommes liquides et exigibles saisies par l'huissier de justice de monsieur M. sont constituées par un « compte technique » d'un montant de 8.698,23 EUR.

Ce montant a fait l'objet d'un projet de répartition auquel la République démocratique du Congo n'a pas fait opposition dans le délai légal de 15 jours.

Elle n'a par ailleurs pas fait opposition à la saisie dans le délai légal de 15 jours à dater de la dénonciation de la saisie.

- La République démocratique du Congo ne peut donc retirer quelque avantage concret de son action.

La somme de 8.698,23 EUR a déjà été distribuée entre les créanciers de la République démocratique du Congo et ne pourrait plus être récupérée par la République démocratique du Congo.

Par ailleurs, l'ensemble des autres créances saisies les 10 et 14 novembre 2006 sont des garanties bancaires soit déjà périmées soit non exigibles.

C'est à juste titre que le premier juge a constaté quant à ce que si la somme de 8.698,23 EUR a été répartie avant l'opposition de la République démocratique du Congo, celle-ci conserve naturellement un intérêt à contester cette saisie en tant que celle-ci porte sur les garanties bancaires. Le fait que ces garanties soient déjà périmées ou non exigibles importe peu car elles demeurent bloquées par l'effet de la saisie. En outre, l'intérêt pour la République démocratique du Congo à solliciter la mainlevée des saisies pratiquées en mars 2007 n'est pas contesté. La République démocratique du Congo dispose dès lors bien d'un intérêt à agir.

C'est donc à tort que monsieur M. conclut à l'irrecevabilité de la demande de mainlevée à défaut d'intérêt dans le chef de la République démocratique du Congo.

38. Pour justifier sa demande de mainlevée des saisies pratiquées à sa charge, la République démocratique du Congo invoque l'immunité d'exécution dans son chef.

Monsieur M. y oppose un moyen d'irrecevabilité en ce que les oppositions de la République démocratique du Congo ont été formées tardivement.

Il conteste également le bien-fondé de ce moyen.

39. En raison de l'égalité entre les Etats souverains, un exploit d'huissier doit être transmis à un Etat étranger par la voie diplomatique.

Aucun exploit d'huissier ne peut être signifié à l'ambassade. Les locaux des ambassades sont en effet inviolables. Il n'est pas permis aux agents de l'Etat d'accueil d'y pénétrer, sauf avec le consentement du chef de la mission (art. 22, 1., de la Convention de Vienne du 18 avril 1961).

Ainsi, il ne peut y être fait aucun commandement destiné à l'Etat d'envoi. L'ambassade ne peut recevoir ces documents, même si ceux-ci sont envoyés par lettre recommandée, car l'interdiction visée par l'article 22, 1., de la Convention de Vienne est moins la présence d'un fonctionnaire de l'Etat d'accueil, qui pourrait entrer d'une manière parfaitement légitime dans une ambassade étrangère pour y chercher un visa ou y déposer un pli officiel par exemple, que le commandement dont l'acte est porteur.

(C. trav. Bruxelles, 16 mars 2009, rôle n° 49.250, Justel n° F-20090316-8, http://jure.juridat.just.fgov.be, avec références: J. Salmon, Manuel de droit diplomatique, 1994, pp. 194-196; E. Denze, Diplomatic law, Oxford, 1998, p. 127.)

Les significations faites à l'ambassade de la République démocratique du Congo ne peuvent dès lors être prises en considération puisqu'elles sont irrégulières.

En ce qui concerne les significations qui ont été faites par la voie diplomatique, le premier juge a décidé à juste titre que les oppositions aux saisies formées par la République démocratique du Congo ne peuvent être jugées tardives sur la base de la motivation suivante.

Le ministre des Affaires étrangères confirme avoir adressé les exploits de dénonciation à l'ambassade de la République démocratique du Congo respectivement le 14 décembre 2006 et le 23 avril 2007 mais il indique ne pas avoir reçu la note verbale en retour, et ce nonobstant le fait qu'un rappel a été adressé à l'ambassade. Dans la mesure où il n'est donc pas établi que l'ambassade a effectivement réceptionné le pli plus d'un mois avant la date à laquelle la République démocratique du Congo a formé son opposition, et pour autant que l'on puisse considérer par ailleurs que l'article 1412bis C. jud. soit applicable aux personnes morales étrangères - question controversée - l'opposition formée par la République démocratique du Congo ne peut être jugée tardive.

Monsieur M. ne démontre pas à suffisance de droit que la République démocratique du Congo aurait délibérément perturbé le cours normal de la procédure de notification par la voie diplomatique pour échapper à la déchéance qui la frapperait pour avoir introduit tardivement la procédure en mainlevée.

Il découle de ce qui précède qu'il ne peut être conclu à l'irrecevabilité des demandes en mainlevée formées par la République démocratique du Congo.

40. Les Etats étrangers jouissent en Belgique d'une immunité d'exécution. Il est toutefois admis que cette immunité n'est pas absolue en ce sens qu'elle ne s'étend qu'aux biens affectés aux activités de souveraineté de l'Etat et que les biens dont l'affectation est privée peuvent faire l'objet d'une exécution forcée (E. Dirix et K. Broeckx, Beslag, A.P.R., 2001, n° 196, pp. 132-133; P. d'Argent, « Jurisprudence belge relative au droit international public (1993-2003) », R.B.D.I., 2004, pp. 606 et s.).

En ce qui concerne la charge de la preuve de l'affectation des biens saisis, la cour approuve et fait sienne la motivation pertinente du juge des saisies (voir le jugement entrepris, n° 7, pp. 8-9).

Le montant créditant le compte technique ouvert auprès de Fortis Banque SA a fait l'objet d'une répartition avant que la République démocratique du Congo ne forme opposition à la saisie.

La République démocratique du Congo soutient que ce compte technique est nécessaire à l'exercice de la puissance publique dans la mesure où il est affecté au fonctionnement du Consulat général à Anvers de la République démocratique du Congo, et que dès lors il est couvert par l'immunité d'exécution.

Comme la République démocratique du Congo n'est pas en mesure de démontrer que cette affirmation est exacte alors que Monsieur M. se trouve dans l'impossibilité de démontrer le contraire (l'affectation à des fins privées de ce compte) et comme la République démocratique du Congo ne dépose aucune pièce et ne fournit aucune explication convaincante à ce sujet, il y a lieu d'admettre que pour le montant créditant ce compte, la République démocratique du Congo ne peut pas se prévaloir d'une immunité d'exécution.

Pour ce qui est des autres biens qui ont fait l'objet des saisies litigieuses, sur la base d'une analyse des éléments de fait et d'une motivation judicieuses que la cour approuve et fait siennes, le premier juge a estimé à bon droit qu'ils doivent bénéficier de l'immunité d'exécution.

41. Monsieur M. invoque que, à supposer même que les sommes saisies soient couvertes par l'immunité d'exécution, en statuant sur la demande de mainlevée, la Belgique doit en toute hypothèse respecter les obligations internationales qu'elle a souscrites, notamment en vertu de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).

A ce sujet, monsieur M. fait valoir:

- l'article 1er du premier protocole additionnel à la CEDH garantit le droit de propriété. La créance que monsieur M. tire du jugement du 5 décembre 1997 entre dans la notion des « biens » protégés par cette disposition;

- le droit à un procès équitable, garanti par l'article 6 CEDH implique pour monsieur M. le droit d'obtenir l'exécution du jugement du 5 décembre 1997.

A bon droit, le premier juge a dit qu'il n'était certainement pas dans l'intention des auteurs de la CEDH de mettre à néant le principe de l'immunité d'exécution unanimement admis en droit international.

La Cour eur. D.H. admet que l'immunité d'un sujet de droit, comme par exemple un Etat, entrave l'accès à un juge car « le droit d'accès aux tribunaux n'est pas absolu », mais à condition que la limitation de ce droit d'accès poursuive « un but légitime » et qu'elle soit « proportionnée au but poursuivi ». Tel est le cas des limitations généralement admises par la Communauté des Nations comme relevant de la doctrine des Etats (...) La Cour met toutefois une limite aux limites... Si l'accès aux tribunaux peut être limité au nom de l'immunité, il ne faut pas que le droit à un juge soit restreint « d'une manière ou à un point tels que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même » (...). En d'autres termes, la Cour eur. D.H. confrontée à un conflit entre la norme internationale relative à l'immunité et la CEDH fait primer la seconde si la première lui porte substantiellement atteinte (E. David, obs. sous Bruxelles (9e ch.), 4 mars 2003, J.T., 2003, nos 7, 8, 11, pp. 686-687).

Ces constatations concernant l'accès aux cours et tribunaux sont valables également pour l'immunité d'exécution puisque la jurisprudence de la Cour eur. D.H. considère que l'exécution des décisions de justice fait partie intégrante du procès équitable (R. Ergec, « Examen de jurisprudence. La Convention européenne des droits de l'homme », R.C.J.B., 2002, n° 104, p. 155).

La cour constate dans le cas d'espèce qu'il a été admis que l'immunité d'exécution invoquée par la République démocratique du Congo ne s'étend qu'à des biens affectés à des activités de souveraineté, à l'exclusion des biens dont l'affectation est privée, et qu'il ne suffit pas que la République démocratique du Congo affirme qu'un de ses biens est affecté à des activités de souveraineté pour que cela soit admis automatiquement.

L'immunité d'exécution admise dans le cas d'espèce n'est donc certainement pas absolue.

Le fait que suite à une répartition d'un montant saisi pour lequel la République démocratique du Congo ne peut se prévaloir de l'immunité d'exécution, aucune somme n'est revenue à monsieur M., n'infirme pas les constatations précédentes.

Par conséquent, en l'espèce, il ne peut être conclu que l'immunité d'exécution dont se prévaut la République démocratique du Congo aurait pour résultat d'enlever à monsieur M. les possibilités d'exécution - forcée ou non - ni d'ailleurs de restreindre ces possibilités à un point tel que le droit de monsieur M. à l'exécution du jugement du 5 décembre 1997 s'en trouverait atteint dans sa substance même.

C'est dès lors à juste titre que le juge des saisies, après avoir constaté que la demande de mainlevée de la République démocratique du Congo est sans objet concernant le montant créditant le compte technique ouvert auprès de Fortis Banque SA, a ordonné pour le surplus la mainlevée des saisies litigieuses.

Vu ce qui précède, l'argumentation des parties concernant « la voie alternative raisonnable » est devenue sans pertinence.

42. Pour de justes motifs que la cour approuve et fait siens, le premier juge a débouté la République démocratique du Congo de sa demande d'indemnisation pour saisies téméraires et vexatoires.

Le fait que monsieur M. ne démontre pas avoir demandé le paiement de sa créance dans le cadre de l'initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) est sans pertinence puisque cela aurait impliqué que monsieur M. accepte un allègement de 80% de sa créance.

La République démocratique du Congo ne démontre nullement que monsieur M. avait l'obligation d'accepter ce mode de règlement, ni d'ailleurs qu'elle-même est obligée de payer tous ses créanciers par cette voie.

Cet argument de la République démocratique du Congo n'infirme donc en rien la motivation ni la décision concernant la demande de paiement d'indemnités pour saisies téméraires et vexatoires.

Le fait que monsieur M. ait interjeté appel du jugement du juge des saisies n'est pas non plus téméraire et vexatoire à l'égard de la République démocratique du Congo.

Au contraire, cela a eu pour résultat qu'il a été établi que, pour ce qui est du compte technique ouvert auprès de Fortis Banque SA, la République démocratique du Congo ne peut se prévaloir de l'immunité d'exécution, ce que le premier juge n'a pas constaté.

43. Sur la base de manquements selon lui de Fortis Banque SA, de l'Etat belge et de la Communauté française en leur qualité de tiers saisis, monsieur M. demande que ces trois parties soient déclarées débitrices des causes des saisies-arrêts litigieuses, et qu'elles soient par conséquent condamnées au paiement de 177.281,31 EUR chacune, à tout le moins solidairement, à défaut in solidum.

44. Comme l'a constaté le premier juge, Fortis Banque SA a effectivement fait une déclaration de tiers saisi imparfaite.

A cet égard, la cour se réfère aux constatations et à la motivation du premier juge et les fait siennes.

Fortis Banque SA fait valoir que si sa déclaration était incomplète, elle ne peut néanmoins être condamnée de ce fait à quelque montant que ce soit s'il est admis, comme l'a fait le premier juge, que les biens saisis étaient en réalité insaisissables du fait de l'immunité d'exécution.

Fortis Banque SA invoque que l'immunité d'exécution relève dans le cas d'espèce de la coutume internationale et que l'insaisissabilité est une règle d'ordre public même si dans la présente affaire l'insaisissabilité n'est que relative en ce sens que la personne morale de droit public qu'elle protège peut y renoncer.

Fortis Banque SA affirme que si le jugement est confirmé en ce qui concerne cette insaisissabilité, elle ne peut être condamnée pour avoir fait une déclaration de tiers saisi - éventuellement - imparfaite s'il apparaît rétrospectivement qu'elle aurait pu ne pas en faire du tout.

Le tiers saisi a l'obligation d'effectuer la déclaration de tiers saisi prévue à l'article 1452 C. jud.

Il a déjà été constaté plus haut que l'immunité d'exécution invoquée par la République démocratique du Congo est relative et que cette dernière ne peut s'en prévaloir pour le montant créditant le compte technique ouvert auprès de Fortis Banque SA.

Fortis Banque SA ne pouvait pas, en tant que tiers saisi, se prévaloir de l'immunité d'exécution dès lors que celle-ci n'est pas absolue, son obligation de faire une déclaration de tiers saisi conformément aux dispositions légales restait entière.

Le fait que suite à l'opposition de la République démocratique du Congo il est admis dans le présent arrêt que l'immunité d'exécution est d'application pour une partie des biens saisis entre les mains de Fortis Banque SA, n'a pas pour conséquence que Fortis Banque SA ne peut pas être sanctionnée pour avoir effectué une déclaration de tiers saisi non conforme aux exigences légales.

En effet, la seule constatation que, pour une partie des biens sur lesquels portait la saisie (notamment sur le montant créditant le compte technique), l'immunité d'exécution n'est pas admise, suffit pour conclure que la saisie-arrêt-exécution pratiquée entre les mains de Fortis Banque SA n'est pas nulle comme le prétend celle-ci.

L'argumentation de Fortis Banque SA concernant « la nature des créances saisies » et sa question: « Que doit déclarer le tiers saisi lorsque sa dette n'est qu'éventuelle? », sont sans pertinence.

En effet, dans sa déclaration de tiers saisi du 13 novembre 2006, Fortis Banque SA fait état de toute une série de garanties bancaires dont elle ne mentionne que les numéros et dont elle précise « que les obligations de Fortis Banque du chef des garanties bancaires précitées sont essentiellement conditionnelles ».

Vu cette « précision » et vu le fait qu'actuellement Fortis Banque SA estime qu'il ne s'agit pas d'obligations conditionnelles mais éventuelles, elle a fait une déclaration inexacte ce qui en soi peut donner lieu à une sanction et qu'elle aurait à tout le moins dû rectifier dans les meilleurs délais, ce qu'elle n'a pas fait.

Donc même si Fortis Banque SA n'avait aucune dette actuelle à déclarer, comme elle le prétend, elle ne pouvait en tout état de cause faire une déclaration de tiers saisi inexacte.

Pour le surplus, la cour constate que le juge des saisies a judicieusement analysé les faits et appliqué les règles régissant la matière pour établir si une sanction et, dans l'affirmative, quelle sanction devait être infligée à Fortis Banque SA du fait de l'inexactitude de sa déclaration de tiers saisi, et que les arguments invoqués par monsieur M. et Fortis Banque SA dans le cadre de la présente procédure en appel n'infirment en rien l'analyse, la motivation et la décision du premier juge.

La cour approuve et fait sienne la motivation du juge des saisies et se rallie à sa décision de condamner Fortis Banque SA au paiement de 2.500 EUR à monsieur M.

45. Il en est de même en ce qui concerne la décision du premier juge de condamner l'Etat belge à payer à monsieur M., à titre de sanction, un montant de 2.500 EUR: la cour approuve et fait siennes l'analyse en fait et la motivation en droit du juge des saisies qui ont amené celui-ci à prononcer la condamnation susmentionnée à laquelle la cour se rallie.

La cour constate que ni monsieur M. ni l'Etat belge n'invoquent des arguments de fait ou de droit de nature à infirmer ce qu'a dit le premier juge.

46. C'est à tort que la Communauté française soutient que c'est « uniquement en vue de remédier au problème de l'insolvabilité de la République démocratique du Congo et au principe d'immunité absolue d'exécution des personnes morales de droit public en droit congolais » que monsieur M. a pratiqué des saisies qui « n'avaient d'autre but, face à l'insolvabilité de son débiteur, que de profiter d'une erreur commise par un tiers saisi pour ensuite postuler qu'il soit déclaré débiteur des causes de la saisie, alors qu'il savait pertinemment bien qu'il ne pouvait obtenir aucun paiement autrement ».

Cela n'est nullement prouvé et d'ailleurs contredit par les faits puisque Fortis Banque SA a libéré le montant du compte technique.

Le fait que ce montant a fait l'objet d'une répartition ne profitant pas à monsieur M. n'infirme pas cette constatation.

Pour le surplus, la cour approuve et fait sienne la motivation en fait et en droit du premier juge et se rallie à sa décision de condamner la Communauté française au paiement de 2.500 EUR.

Aucun des arguments en fait ou en droit de monsieur M. et de la Communauté française sont de nature à infirmer cette motivation et donc la décision du premier juge.

47. Chacun des tiers saisis est condamné au paiement d'un montant à titre de sanction.

Pour chaque tiers saisi, le montant de la condamnation est établi compte tenu des éléments de fait qui leur sont propres.

Il n'y a pas lieu, comme le fait Fortis Banque SA, de comparer les trois cas dans le but d'influencer le montant de la condamnation sur la base de quelques observations sans tenir compte de toutes les données de fait.

Les condamnations sont à considérer comme des sanctions imposées à trois tiers saisis indépendants les uns des autres. Ces condamnations doivent dès lors être individualisées de sorte qu'une condamnation solidaire ou in solidum est exclue.

48. Monsieur M. introduit en ordre subsidiaire une action en responsabilité contre l'Etat belge au motif que celui-ci n'a pas veillé au bon déroulement de la procédure de notification par la voie diplomatique.

Il introduit cette demande au cas où il serait admis par la cour, comme l'a fait le premier juge, que la dénonciation par la voie diplomatique des saisies n'a pas fait courir les délais prévus à peine de déchéance à l'égard de la République démocratique du Congo parce que la procédure de notification ne s'était pas conclue par la réception par la SPF Affaires étrangères d'une note verbale de retour.

La cour a effectivement admis qu'il n'est pas établi que les oppositions de la République démocratique du Congo sont tardives et dès lors irrecevables (supra).

L'Etat belge conclut à l'irrecevabilité de cette demande qu'il qualifie de demande nouvelle.

Il fait valoir que cette demande subsidiaire est irrecevable à deux titres:

- d'une part il s'agit d'une extension de la demande originaire non fondée sur un fait ou un acte invoqué dans la citation;

- d'autre part il s'agit d'une demande formulée par la demanderesse originaire en intervention forcée qui ne l'a pas été en première instance. L'Etat belge précise qu'en l'espèce monsieur M. n'a pas mentionné dans l'acte introductif d'instance l'irrégularité de la procédure de dénonciation des saisies-arrêts pratiquées, pas plus qu'il n'a sollicité la condamnation de l'Etat belge à des dommages et intérêts à ce titre.

Monsieur M. conteste l'irrecevabilité de cette demande, soutenant:

- que la Cour de cassation donne une interprétation extensive de l'article 807 C. jud.;

- que cette disposition n'exige pas que la demande nouvelle se base exclusivement sur les faits invoqués en citation, qu'il suffit qu'elle se base au moins partiellement sur ces faits, mais peut parfaitement se fonder également sur de nouveaux faits découverts depuis lors et qui ont un impact sur le litige;

- que de manière générale, il suffit que la demande nouvelle présente un lien avec le litige et que la cause de ce dernier ne soit pas totalement modifiée par la demande nouvelle;

- qu'en l'occurrence, l'acte introductif d'instance, à savoir la citation en intervention forcée, faisait valoir, en son point 11, que la saisie-arrêt du 23 mars 2007 avait été dénoncée à la République démocratique du Congo le 30 mars 2007;

- que ce n'est qu'ultérieurement que la République démocratique du Congo a contesté la régularité de cette dénonciation intervenue par la voie diplomatique sur l'initiative de l'Etat belge;

- que la demande nouvelle, fondée partiellement sur cette dénonciation invoquée en citation et partiellement sur le rôle joué par l'Etat belge dans cette dénonciation, présente donc manifestement un lien avec le litige initial justifiant la recevabilité de cette demande nouvelle.

L'article 807 C. jud. dispose que la demande dont le juge est saisi peut être étendue ou modifiée, si les conclusions nouvelles, contradictoirement prises, sont fondées sur un fait ou un acte invoqué dans la citation, même si leur qualification juridique est différente.

Conformément aux dispositions de l'article 1042 C. jud., cette règle est également applicable en appel.

Or, une demande peut être formée pour la première fois en degré d'appel si elle se fonde sur un fait ou un acte invoqué dans la citation ou si elle constitue une défense à l'action principale ou tend à la compensation. Il n'est par contre pas admis qu'une partie puisse introduire une nouvelle demande en appel si elle ne présente pas avec la cause un des liens tels que mentionnés ci-dessus.

Il n'est en l'espèce pas question d'une demande reconventionnelle qui constitue une défense à l'action principale ou tend à la compensation.

Ni dans les oppositions introduites par la République démocratique du Congo, ni dans la citation en intervention forcée, il a été question du rôle à jouer par l'Etat belge dans le déroulement de la procédure de notification par la voie diplomatique.

L'action de monsieur M. à l'égard de l'Etat belge portait uniquement sur les manquements de ce dernier en sa qualité de tiers saisi dans le cadre d'une saisie-arrêt-exécution.

Devant le premier juge, la question de la tardiveté de l'opposition de la République démocratique du Congo a été débattue entre la République démocratique du Congo et monsieur M., et dans le cadre de ce débat la procédure de notification par la voie diplomatique a été abordée. Nonobstant ce fait, monsieur M. n'a, devant le premier juge, pas formé à l'égard de l'Etat belge la demande qu'il introduit actuellement, même pas à titre subsidiaire. Il s'est limité en première instance à sa demande basée sur les obligations de l'Etat belge en tant que tiers saisi.

L'actuelle demande subsidiaire de monsieur M. est une demande nouvelle basée sur la responsabilité de l'Etat belge concernant son rôle dans le déroulement de la procédure de notification par la voie diplomatique, et cette demande ne présente aucun lien avec sa demande originaire basée sur les manquements de l'Etat belge à ses obligations de tiers saisi. Telle demande ne peut être formée pour la première fois en degré d'appel et est dès lors irrecevable.

La seule circonstance que, dans sa citation en intervention forcée, monsieur M. a mentionné que: « Compte tenu de l'échec de la première saisie, le requérant en fit pratiquer une seconde, le 23 mars 2007 - soit avant que la République démocratique du Congo ne demande la mainlevée de la première saisie le 20 avril 2007 - entre les mains de l'Etat belge - deuxième cité -, de la Communauté française - troisième citée - et de la Banque Nationale de Belgique, dénoncée à la République démocratique du Congo le 30 mars 2007 », ne suffit pas pour admettre que la demande nouvelle de monsieur M. se fonde, même partiellement, sur un fait ou un acte invoqué dans la citation.

Cette mention ne constitue en effet ni un acte ni un fait invoqué dans la citation introductive en ce sens qu'en l'espèce monsieur M. ne l'a pas à proprement parler « invoquée » comme un fait à l'appui de sa demande: il ne s'agissait que d'une information concernant la chronologie des rétroactes sans pertinence aucune pour la demande que monsieur M. introduisait contre l'Etat belge.

La mention de la dénonciation en citation n'a dès lors pas pour résultat qu'il puisse être admis que la demande nouvelle présente un lien avec le litige initial dans le sens de l'article 807 C. jud.

La circonstance que cette demande nouvelle n'est formée qu'à titre subsidiaire n'infirme pas les constatations précédentes.

C'est dès lors à bon droit que l'Etat belge conclut à l'irrecevabilité de la demande subsidiaire de monsieur M.

49. Monsieur M. introduit également une demande nouvelle contre l'Etat belge qui tend à entendre condamner celui-ci à vider inconditionnellement ses mains entre celles de l'huissier de justice instrumentant à concurrence de la somme déclarée de « quelques 84,6 millions d'euros », sous peine d'une astreinte de 10.000 EUR par jour de retard.

Il précise qu'il forme cette demande au motif que l'Etat belge a déjà annoncé qu'au cas où la demande de mainlevée de la République démocratique du Congo serait rejetée, il s'opposera à la libération des fonds saisis.

Or, comme en l'espèce il a été décidé de confirmer la décision du juge des saisies concernant la mainlevée des saisies, cette demande nouvelle de monsieur M. est devenue sans objet, de sorte que l'argumentation des parties concernées quant à ce est devenue sans pertinence.

50. La République démocratique du Congo demande la condamnation de Fortis Banque SA au remboursement de la somme de 8.698,23 EUR qui a été répartie avant l'opposition à saisie.

Fortis Banque SA fait valoir à juste titre que devant le juge des saisies, la République démocratique du Congo n'a formé aucune demande contre elle, qu'à cet égard il n'existe pas de lien d'instance entre elles, et que au surplus l'objet de l'action originaire dirigée contre elle est radicalement différent de - ne présente aucun lien avec - la demande formée en appel par la République démocratique du Congo contre elle.

La demande de la République démocratique du Congo formée contre Fortis Banque SA est dès lors irrecevable.

51. Fortis Banque SA et la Communauté française demandent que la République démocratique du Congo soit condamnée à les garantir de toute condamnation prononcée à leur encontre au profit de monsieur M.

Pour autant que le tiers saisi doit, du fait de sa condamnation, payer plus que ce dont il est redevable au saisi, ou qu'il doit le payer plus tôt, il possède à l'égard du saisi une action subrogatoire lui permettant d'exiger le paiement de ce montant.

Cela découle de la constatation que, du fait de la condamnation du tiers saisi, celui-ci et le saisi sont tenus solidairement à l'égard du saisissant qui de la sorte se trouve face à plusieurs débiteurs de la même dette (E. Dirix et K. Broeckx, Beslag, A.P.R., 2001, n° 780, p. 449).

La circonstance que, pour certains de ses biens, la République démocratique du Congo peut se prévaloir d'une immunité d'exécution n'est pas pertinente: cette immunité relative ne change rien au fait que la République démocratique du Congo est la débitrice de monsieur M.

Les autres arguments invoqués par la République démocratique du Congo ne sont pas non plus pertinents pour le même motif: elle est la débitrice de monsieur M. qui ne peut être payé qu'une fois.

Au vu des éléments de fait, il apparaît qu'effectivement de par leurs condamnations en faveur de monsieur M., aussi bien Fortis Banque SA que la Communauté française doivent payer plus tôt ou plus que ce dont elles sont - ou ne sont pas ou pas encore - redevables à l'égard de la République démocratique du Congo.

Il y a donc lieu de faire droit à leurs demandes respectives dirigées contre la République démocratique du Congo.

52. Vu ce qui précède, vu le fait que monsieur M. bénéficie de l'assistance judiciaire en raison de l'insuffisance de ses revenus avec pour conséquence que toute indemnité de procédure à sa charge doit être réduite au minimum légal, et compte tenu également:

- de ce que ni le refus persistant de la République démocratique du Congo d'acquitter sa dette à l'égard de monsieur M., ni les manquements des tiers saisis ne démontrent que la procédure actuelle soit manifestement déraisonnable;

- de ce que l'affaire n'est pas particulièrement complexe pour les parties, aucune d'elles n'ayant à traiter toutes les demandes formées;

- de ce qu'il s'agit essentiellement d'une action non évaluable en argent et que donc les indemnités de procédure à charge des autres parties que monsieur M. sont de 1.200 EUR (montant de base pour une affaire non évaluable en argent),

il y a lieu:

- comme l'appel et les appels incidents ne sont pas fondés, de ne pas réformer la décision du premier juge concernant les dépens liquidés par lui pour les dépens qui avaient été taxés par les parties;

- pour la présente procédure en appel, vu ce qui précède et compte tenu des frais et dépens taxés par les parties et dont elles demandent paiement:

° de condamner monsieur M. à ses propres dépens et à une indemnité de procédure de 75 EUR en faveur de la République démocratique du Congo;

° de condamner la République démocratique du Congo aux dépens de Fortis Banque SA (indemnité de procédure de 1.200 EUR), de l'Etat belge (indemnité de procédure de 1.200 EUR) et de la Communauté française (indemnité de procédure de 1.200 EUR).

Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement;

Vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire;

Déclare la demande en réouverture des débats de monsieur M. recevable mais non fondée, en déboute monsieur M.

Déclare l'appel de monsieur M. recevable mais non fondé, en déboute monsieur M.

Déclare les demandes nouvelles de monsieur M. formées contre l'Etat belge irrecevables, en déboute monsieur M.

Déclare l'appel incident de la République démocratique du Congo recevable mais non fondé, en déboute la République démocratique du Congo.

Déclare la demande nouvelle de la République démocratique du Congo formée contre monsieur M. pour appel téméraire et vexatoire recevable mais non fondée, en déboute la République démocratique du Congo.

Déclare la demande nouvelle de la République démocratique du Congo formée contre Fortis Banque SA irrecevable, en déboute la République démocratique du Congo.

Déclare l'appel incident de Fortis Banque SA recevable mais non fondé, en déboute Fortis Banque SA.

Déclare la demande de Fortis Banque SA formée contre la République démocratique du Congo recevable et fondée.

Par conséquent, condamne la République démocratique du Congo à couvrir Fortis Banque SA à hauteur des condamnations prononcées par le juge des saisies, non réformées en appel, à charge de Fortis Banque SA en faveur de monsieur M.

Déclare l'appel incident de l'Etat belge recevable mais non fondé, en déboute l'Etat belge.

Déclare l'appel incident de la Communauté française recevable mais non fondé, en déboute la Communauté française.

Déclare la demande de la Communauté française formée contre la République démocratique du Congo recevable et fondée.

Par conséquent, condamne la République démocratique du Congo à garantir la Communauté française de la condamnation prononcée à son encontre par le juge des saisies, non réformées en appel, en faveur de monsieur M. en principal, intérêts et accessoires.

Dit que monsieur M. prend ses propres dépens à charge et le condamne au paiement d'une indemnité de procédure de 75 EUR à la République démocratique du Congo.

Condamne la République démocratique du Congo au paiement d'une indemnité de procédure de 1.200 EUR à Fortis Banque SA et d'une indemnité de procédure de 1.200 EUR à la Communauté française.

(...)


Observations / Noot

Cette décision, qui confirme largement en degré d'appel Civ. Bruxelles (sais.), 31 juillet 2008, J.L.M.B., 2010, p. 1613, fait l'objet d'un pourvoi en cassation encore pendant à ce jour. Sur les rapports entre immunité d'exécution et droit à un procès équitable, voy. la contribution d'Anne Lagerwall et Arnaud Louwette parue dans le présent numéro, p. 30.