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Actualité : Cour de justice de l'Union européenne, 03/10/2013, R.D.C.-T.B.H., 2014/1, p. 120

Cour de justice de l'Union européenne 3 octobre 2013

DROIT JUDICIAIRE EUROPEEN ET INTERNATIONAL - REGLEMENT (CE) N° 44/2001 DU 22 DECEMBRE 2000
Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions en matière civile et commerciale - Règlement (CE) n° 44/2001 - Article 5, paragraphe 3 - Compétence spéciale en « matière délictuelle ou quasi délictuelle » - Détermination du lieux de réalisation du dommage - Violation des droit patrimoniaux d'auteur
EUROPEES EN INTERNATIONAAL GERECHTELIJK RECHT - VERORDENING (EG) N° 44 VAN 22 DECEMBER 2000
Rechterlijke bevoegdheid, erkenning en tenuitvoerlegging van beslissingen in burgerlijke en handelszaken - Verordening (EG) nr. 44/2001 - Artikel 5, punt 3 - Bijzondere bevoegdheid voor verbintenissen uit onrechtmatige daad - Bepaling van plaats waar schade is ingetreden - Inbreuk op de vermogensrechten van een auteur

Peter Pinckney / KDG Mediatech

Affaire: C-170/12

Dans un arrêt du 3 octobre 2013, rendu dans l'affaire C-170/12 Peter Pinckney / KDG Mediatech, la Cour de justice a précisé la portée de l'article 5, paragraphe 3, du règlement Bruxelles I. Selon cette disposition, en matière délictuelle et quasi délictuelle, l'action doit être introduite devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire, ce lieu pouvant être tant le lieu de l'événement causal qui est à l'origine du dommage, que le lieu de la réalisation du dommage. L'arrêt analysé, par lequel la Cour a répondu aux questions préjudicielles posées par la Cour de cassation française, concerne l'interprétation de la notion du lieu de la réalisation du dommage dans un cas de violation des droits patrimoniaux d'auteur.

Le litige au principal oppose M. Pinckney, un auteur interprète résidant à Toulouse, à la société autrichienne KDG Mediatech. La société défenderesse a reproduit sur un disque CD pressé en Autriche sans autorisation de M. Pinckney un album de celui-ci. L'album a ensuite été commercialisé par deux sociétés britanniques par l'intermédiaire de différents sites Internet. M. Pinckney a assigné KDG Mediatech devant les juridictions toulousaines en alléguant que le seul fait qu'il ait pu acheter les disques en cause depuis son domicile français sur un site Internet ouvert au public français suffisait à justifier la compétence des juridictions françaises sur la base de l'article 5, paragraphe 3, du règlement Bruxelles I, en tant que juridictions du lieu de la réalisation du dommage. La société défenderesse a contesté la compétence des juridictions françaises en faisant valoir que le lieu de la réalisation du dommage se trouvait au siège des sociétés qui commercialisaient le CD, c'est-à-dire au Royaume-Uni.

Dans son arrêt, la Cour a, en substance, partagé l'interprétation de l'article 5, paragraphe 3, du règlement Bruxelles I faite par le demandeur au principal. Elle a constaté, en effet, qu'en ce qui concerne une violation alléguée d'un droit patrimonial d'auteur, la compétence pour connaître d'une action en matière délictuelle est établie, au profit de la juridiction saisie, dès lors que l'Etat membre dans lequel se trouve cette juridiction protège les droits patrimoniaux dont le demandeur se prévaut et que le dommage allégué risque de se produire dans le ressort de la juridiction saisie. Or, d'une part, en vertu de la directive 2001/29 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information (JO L 176 du 22 juin 2001, p. 10), les droits patrimoniaux d'auteur doivent être protégés de manière automatique dans tous les Etats membres, si bien qu'ils sont susceptibles d'être violés dans chacun d'eux. D'autre part, selon la Cour, la possibilité même de se procurer une reproduction d'une oeuvre, au moyen d'un site Internet accessible dans le ressort de la juridiction saisie, suffit pour établir un risque de violation d'un droit patrimonial de l'auteur de cette oeuvre. Enfin, la Cour a précisé que, eu égard au caractère territorial des droits d'auteur, la juridiction saisie n'est compétente que pour connaître du seul dommage causé sur le territoire de l'Etat membre dont elle relève.