Tribunal de commerce de Tournai 11 septembre 2012
DROIT JUDICIAIRE EUROPEEN ET INTERNATIONAL
Compétence et exécution - Règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 - Champ d'application - Condition d'internationalité
Le règlement “Bruxelles I” n° 44/2001 trouve à s'appliquer dès que le litige présente un caractère international. Tel est le cas dès lors que les sièges sociaux des parties sont situés dans des Etats différents, même si l'une des parties possède une succursale dans l'Etat membre de l'autre.
DROIT JUDICIAIRE EUROPEEN ET INTERNATIONAL
Compétence et exécution - Règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 - Champ d'application - Clause d'élection de for - Renvoi dans le bon de commande et impression au verso de la facture
En vertu de l'article 23, 1., a) du Règlement “Bruxelles I” n° 44/2001, une clause d'élection de for n'est valablement conclue par écrit que si elle a fait l'objet d'un accord signé par les deux parties, comportant le cas échéant un renvoi exprès aux conditions générales. Ni le renvoi figurant dans le bon de commande, ni l'impression des conditions générales au verso de la facture ne remplissent cette condition.
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EUROPEES EN INTERNATIONAAL GERECHTELIJK RECHT
Executie en bevoegdheid - Verordening EG nr. 44/2001 van 22 december 2000 - Toepassingsgebied - Voorwaarde internationaliteit
De “Brussel I”-Verordening nr. 44/2001 vindt toepassing wanneer het geschil een internationaal karakter kent. Dit is het geval wanneer de maatschappelijke zetels van de partijen zich bevinden in verschillende lidstaten, zelfs indien een van de partijen in de lidstaat van de andere partij een bijkantoor heeft.
EUROPEES EN INTERNATIONAAL GERECHTELIJK RECHT
Executie en bevoegdheid - Verordening EG nr. 44/2001 van 22 december 2000 - Toepassingsgebied - Forumbeding - Verwijzing op de bestelbon en weergave op achterzijde factuur
Krachtens artikel 23, 1., a) van de “Brussel I”-Verordening nr. 44/2001 is een forumbeding slechts geldig gesloten wanneer zij het voorwerp heeft uitgemaakt van een akkoord ondertekend door beide partijen, met inbegrip van, in voorkomend geval, een uitdrukkelijke verwijzing naar de algemene voorwaarden. Noch de verwijzing op de bestelbon, noch de weergave van de algemene voorwaarden op de achterzijde van de factuur voldoen aan die voorwaarde.
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SA Les Matériaux Enrobés du Tournaisis / Renold Continental Limited
Siég.: M. de Salle (juge), P. Dedecker et J.-P. Ponchau (juges consulaires) |
Pl.: Mes M. Von Kuegelgen, C. Mertens, R. Jafferali et L. Vercauteren |
Vu la citation introductive d'instance du 21 février 2012;
Entendu les parties à l'audience du 12 juin 2012;
Vu les dossiers des parties.
1. | La demande |
La partie demanderesse sollicite:
- avant dire droit la désignation d'un expert conformément à l'article 19, 2ème alinéa du Code judicaire;
- entendre déclarer la vente intervenue entre parties résolue aux torts exclusifs de la défenderesse en raison du vice caché qui affecterait la chose;
- la condamnation de la partie défenderesse au paiement de la somme provisionnelle de 428.919,89 EUR TVAC ainsi que des frais et dépens de l'instance en ce compris l'indemnité de procédure.
2. | Faits - Discussion |
1. Le 14 décembre 2010, la demanderesse, propriétaire d'une centrale d'enrobés qui produit de l'asphalte à Tournai a passé commande auprès de la défenderesse, entreprise de droit de l'Angleterre et du Pays de Galles, spécialisée dans la fabrication de chaînes industrielles, d'une double chaîne pour l'élévateur à godets d'un montant total de 43.604,89 EUR TVAC et livrée le 23 février 2011 par cette dernière.
2. Le 25 octobre 2011 les deux chaînes de l'élévateur à godets se sont rompues, sinistre dénoncé immédiatement à l'assureur de la défenderesse ce qui a amené les parties et leurs assureurs à organiser une réunion contradictoire sur place les 27 octobre 2011 et 4 novembre 2011 afin d'établir l'origine du sinistre et l'évaluation du préjudice de la demanderesse.
3. Constatant que la défenderesse rejetait toute responsabilité éventuelle dans son chef, la demanderesse a été contrainte de procéder à la réparation en urgence et de manière provisoire la chaîne endommagée et de citer la défenderesse devant le tribunal de céans en vue de solliciter la rédhibition de la vente conformément à l'article 1644 du Code civil.
3. | Discussion |
La défenderesse décline la compétence du tribunal de céans en se fondant sur ses conditions générales contenant une élection de compétence exclusive des tribunaux de l'arrondissement de Bruxelles en cas de litige mentionnée non seulement sur la confirmation de commande du 15 décembre 2010 mais également au verso de sa facture du 18 février 2011;
La demanderesse soutient que la compétence du tribunal est régie par le Règlement européen “Bruxelles I” dont les règles reçoivent primauté sur le droit national dès lors que la défenderesse est domiciliée sur le territoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne;
Ainsi, la demanderesse fait valoir que l'article 23 dudit règlement s'il permet que la compétence est déterminée par une clause d'élection de for, la validité de celle-ci doit être soumise à un accord signé par les deux parties;
Le Règlement “Bruxelles I” trouve à s'appliquer dès que le litige présente un caractère international, ce qui est le cas en l'espèce dès lors que la localisation des sièges sociaux des parties se situent dans deux états différents, la défenderesse ayant son siège social au Royaume-Uni tandis que la demanderesse a son siège en Belgique;
C'est à juste titre que la demanderesse relève qu'il importe peu que la défenderesse possède une succursale en Belgique, cette circonstance ne suffisant pas à ôter au litige son caractère international et le confirmant même d'ailleurs;
L'article 23, 1., a) du règlement admet la validité d'une clause d'élection de for dans la mesure où elle est conclue “par écrit ou verbalement avec confirmation écrite”;
La Cour de justice de l'Union européenne a considéré qu'une clause n'est conclue “par écrit” que dans l'hypothèse où elle a fait l'objet d'un accord signé par les deux parties, comportant le cas échéant un renvoi exprès aux conditions générales en motivant de la manière suivante: “En elle-même, la simple impression, sur le verso d'un contrat établi sur le papier d'affaires de l'une des parties, d'une clause attributive de juridiction dans le cadre des conditions générales de cette partie ne satisfait pas aux exigences de l'article 17 (art. 17 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 devenu l'art. 23 de Bruxelles I), aucune garantie n'étant donnée par ce procédé que l'autre partie a consenti effectivement à la clause dérogatoire au droit commun en matière de compétence judiciaire”;
En l'espèce, il est constant que le renvoi aux conditions générales de la défenderesse, même mentionnées sur le bon de commande n'a fait l'objet d'aucun accord signé par les deux parties;
En outre, les conditions générales au verso de la facture ne sont pas opposables dès lors qu'elles ont été établies après la conclusion du contrat;
Ainsi, en l'absence de clause d'élection de for satisfaisant aux exigences de l'écrit figuré à l'article 23, 1., a), la demanderesse était en droit de citer la défenderesse devant le tribunal de céans;
En effet, en vertu de l'article 5, 1., b) du Règlement Bruxelles I “une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre” en cas de “vente de marchandises” devant le tribunal du “lieu d'un Etat membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées”;
Dès lors que la chaîne vendue par la défenderesse a été livrée dans le ressort du tribunal de commerce de céans au siège de la demanderesse, le tribunal de céans est compétent;
Il y a lieu de renvoyer la cause pour le surplus au rôle général afin de permettre aux parties de mettre celle-ci en état:
Par ces motifs
Le tribunal,
Vu la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire;
Statuant contradictoirement;
Se déclare territorialement compétent pour statuer à l'égard de la présente cause;
Réserve à statuer pour le surplus et renvoie la cause au rôle général.
(...)
La décision de la Cour de justice à laquelle se réfère le tribunal est CJUE 14 décembre 1976, C-24/76, Estasis Salotti / Ruewa, point 9.
Sur la condition d'internationalité du litige requise pour appliquer le Règlement Bruxelles I, cons. not. T. Kruger, “Wanneer is een zaak 'internationaal' voor het Europese IPR?”, RDC-TBH 2006, 941 et s.