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Actualité : Cour de justice de l'Union européenne, 19/07/2012, R.D.C.-T.B.H., 2012/9, p. 949-950

Cour de justice de l'Union européenne 19 juillet 2012

Mahamdia / République algérienne démocratique et populaire

Aff.: C-154/11
DROIT JUDICIAIRE EUROPEEN ET INTERNATIONAL
Compétence et exécution - Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 - Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions en matière civile et commerciale - Article 18, 2. du règlement - Notion de 'succursale, agence et autre établissement' - Compatibilité d'une convention attributive de juridiction aux tribunaux de l'Etat tiers avec l'article 21 du règlement (CE) n° 44/2001


EUROPEES EN INTERNATIONAAL GERECHTELIJK RECHT
Executie en bevoegdheid - Verordening (EG) nr. 44/2011 van 22 december 2000 - Rechterlijke bevoegdheid, erkenning en tenuitvoerlegging van beslissingen in burgerlijke en handelszaken - Artikel 18, 2. verordening - Begrip 'filiaal, agentschap of andere vestiging' - Bestaanbaarheid met artikel 21 verordening (EG) nr. 44/2001 van een bevoegdheidsbeding ten voordele van een rechtbank van een derde land


Dans un arrêt du 19 juillet 2012, rendu dans l'affaire C-154/11 Mahamdia / République algérienne démocratique et populaire, la grande chambre de la Cour a précisé la portée des dispositions du règlement Bruxelles I concernant la compétence en matière des contrats individuels de travail. Ces dispositions, protectrices du travailleur, établissent une dérogation au principe selon lequel un défendeur domicilié dans l'Union est attrait devant les juridictions de l'Etat membre de son domicile. En effet, ces dispositions permettent, en substance, au travailleur d'attraire en justice son employeur devant la juridiction qu'il considère comme étant la plus proche de ses intérêts, en lui reconnaissant la faculté d'agir devant une juridiction soit de l'Etat dans lequel l'employeur a son domicile, soit de l'Etat dans lequel le travailleur accomplit habituellement son travail. En outre, l'article 18, 2. du règlement Bruxelles I prévoit que, lorsqu'un travailleur conclut un contrat de travail avec un employeur qui est domicilié hors du territoire de l'Union européenne, mais qui possède dans un Etat membre une succursale, une agence ou tout autre établissement, cet employeur doit être considéré comme domicilié dans cet Etat aux fins de la détermination de la juridiction compétente. La question qui s'est posée dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt de la Cour était celle de savoir si une ambassade d'un Etat tiers peut être considérée comme une 'succursale, une agence ou tout autre établissement' au sens de l'article 18, 2. du règlement Bruxelles I.

L'arrêt commenté avait pour origine une question préjudicielle du tribunal de travail de Berlin et Brandenbourg qui connaissait d'un litige entre M. Mahamdia, citoyen algérien et allemand, et l'Etat algérien. M. Mahamdia, qui travaillait pour l'ambassade d'Algérie à Berlin en qualité de chauffeur, avait assigné l'Etat algérien en demandant d'être rémunéré pour les heures supplémentaires de travail qu'il prétendait avoir effectuées au cours des années 2005 à 2007. Plus tard, il a étendu son action afin de contester son licenciement qui est intervenu au cours du procès. L'Etat algérien opposait à cette action, d'une part, l'immunité de juridiction ayant sa source dans le droit international et, d'autre part, une clause attributive de juridiction figurant dans le contrat de travail de M. Mahamdia, selon laquelle les différends relatifs à ce contrat ne pouvaient être portés que devant les juridictions algériennes.

Interrogée sur la portée des arguments soulevés par l'Etat algérien, la grande chambre de la Cour a, tout d'abord, estimé que l'immunité de juridiction des Etats souverains n'a pas une valeur absolue et qu'elle est généralement reconnue lorsque le litige concerne des actes de souveraineté accomplis iure imperii. Dès lors que, en l'espèce, le litige concernait un contrat de travail dans le cadre duquel le demandeur n'accomplissait pas de fonctions relevant de l'exercice de la puissance publique, cette immunité ne s'appliquait pas et le contrat rentrait dans le champ d'application du règlement Bruxelles I. Ensuite, la Cour a estimé qu'à la lumière de sa jurisprudence antérieure relative tant au règlement Bruxelles I qu'à la convention du 27 septembre 1968 qui l'a précédé, une ambassade d'un Etat tiers située sur le territoire d'un Etat membre pouvait être considérée comme un 'établissement' au sens de l'article 18, 2. du règlement Bruxelles I. Enfin, la Cour a constaté que la clause attributive de juridiction insérée dans le contrat de travail de M. Mahamdia n'était efficace que dans la mesure où elle était conforme à l'article 21 du règlement Bruxelles I. Selon cet article, il ne peut être dérogé aux dispositions protectrices de travailleur établies par le règlement Bruxelles I que par une clause attributive de juridictions postérieure à la naissance du différend et permettant au travailleur de saisir d'autres tribunaux, en plus de ceux indiqués par ces dispositions protectrices. La clause attributive de juridiction en cause devait donc être interprétée comme ajoutant un for supplémentaire au choix du demandeur.