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La loi du 20 décembre 2010 concernant l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées, R.D.C.-T.B.H., 2012/1, p. 7-21

La loi du 20 décembre 2010 concernant l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées

François De Bauw [1]

TABLE DES MATIERES

Introduction

I. Entrée en vigueur

II. Convocation de l'assemblée II.1. Mentions de la convocation

II.2. Délai d'émission de la convocation

II.3. Modalités d'émission de la convocation

II.4. Informations et documents à mettre à disposition

II.5. Inscription de points à l'ordre du jour et dépôt de propositions de décision par les actionnaires

III. Report et prorogation de l'assemblée

IV. Procédure d'enregistrement préalable à l'assemblée IV.1. Interdiction d'exiger l'immobilisation des actions

IV.2. Enregistrement obligatoire

IV.3. Date unique d'enregistrement

IV.4. Enregistrement et preuve de la qualité d'actionnaire

IV.5. Etablissement du registre

V. Participation interactive et vote à distance en temps réel

VI. Vote à distance avant l'assemblée

VII. Vote par mandataire VII.1. Liberté de choix du mandataire

VII.2. Un seul mandataire par actionnaire

VII.3. Mandat à durée limitée

VII.4. Vote d'actions détenues à titre fiduciaire

VII.5. Nombre illimité de mandants VII.6. Procuration écrite et notification à la société

VII.7. Exécution des instructions du mandant

VII.8. Prévention des conflits d'intérêts du mandataire

VIII. Droit de poser des questions

IX. Résultat des votes

Conclusion

Annexe - Chronologie d'une assemblée générale (loi du 20 décembre 2010)

RESUME
La loi du 20 décembre 2010, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2012, modifie de manière significative les règles relatives à l'organisation et à la tenue des assemblées générales d'actionnaires de sociétés cotées. Ces modifications concernent principalement la convocation de l'assemblée, le recours obligatoire à la procédure d'enregistrement préalable des actions sans immobilisation jusqu'à la clôture de l'assemblée, la participation à distance à l'assemblée, le vote préalable à distance, le vote par mandataire et le droit des actionnaires de poser des questions aux administrateurs et commissaires avant l'assemblée et au cours de celle-ci. Ces règles nouvelles requièrent une adaptation des statuts des sociétés cotées. Leur application entraînera par ailleurs des contraintes d'organisation nouvelles, dont il conviendra que tiennent compte tant les sociétés cotées que ceux de leurs actionnaires qui souhaiteront prendre part aux assemblées.
SAMENVATTING
De wet van 20 december 2010, die in werking trad op 1 januari 2012, wijzigt aanzienlijk de regels met betrekking tot de organisatie en het houden van algemene vergaderingen van aandeelhouders in beursgenoteerde vennootschappen. Deze wijzigingen hebben voornamelijk betrekking op de bijeenroeping van de vergadering, de verplichte toepassing van de procedure voor de voorafgaandelijke registratie van de aandelen zonder blokkering tot aan de sluiting van de vergadering, de deelname op afstand aan de vergadering, het op afstand stemmen vóór de vergadering, het stemmen bij volmacht en het recht van de aandeelhouders om vragen te stellen aan de bestuurders en de commissaris vóór en tijdens de vergadering. Deze nieuwe regels vereisen een aanpassing van de statuten van de beursgenoteerde vennootschappen. Hun toepassing brengt bovendien nieuwe organisatorische moeilijkheden met zich mee, waarmee zowel de beursgenoteerde vennootschappen als hun aandeelhouders die wensen deel te nemen aan de vergaderingen, rekening zullen moeten houden.
Introduction

1.La loi du 20 décembre 2010 [2] introduit dans le Code des sociétés une série de règles nouvelles en matière d'organisation et de tenue des assemblées générales d'actionnaires. Ces règles concernent pour l'essentiel les sociétés 'cotées' au sens de l'article 4 C.soc., c'est-à-dire celles dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé belge ou étranger, au sens de l'article 2, 3°, 5° et 6° de la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers [3]. Elle vise les sociétés anonymes, les sociétés privées à responsabilité limitée, les sociétés coopératives et les sociétés européennes. Nous limitons notre examen aux règles relatives aux sociétés anonymes.

2.Cette loi transpose en droit belge la directive 2007/36/CE du 11 juillet 2007 [4], qui constitue l'une des mesures d'exécution du Plan d'action de la Commission des communautés européennes pour la modernisation du droit des sociétés et le renforcement du gouvernement d'entreprise dans l'Union européenne [5]. Ce Plan vise notamment à faciliter l'exercice, par les actionnaires non-résidents de sociétés cotées établies dans un Etat membre, du droit de prendre part aux assemblées générales et d'y voter. Cet objectif est le commun dénominateur des règles nouvelles qu'énonce la directive et que transpose la loi du 20 décembre 2010.

3.Bien que la directive ne vise que les sociétés cotées, la loi du 20 décembre 2010 étend certaines des nouvelles règles aux sociétés ordinaires. Ainsi en est-il de celles relatives à la participation à distance à l'assemblée (voy. n° 38 infra), au vote à distance avant l'assemblée (voy. n° 43) et au droit des actionnaires de poser des questions par écrit avant l'assemblée (voy. n° 67).

I. Entrée en vigueur

4.Les modifications qu'introduit la loi du 20 décembre 2010 sont entrées en vigueur le 1er janvier 2012 (art. 38, 1er al. de la loi) [6]. Deux dispositions sont néanmoins entrées en vigueur le 28 avril 2011. Selon la première, “Les sociétés dont l'acte constitutif a été passé antérieurement au 1er janvier 2010 modifient leurs statuts afin d'en assurer la conformité avec la présente loi avant le 1er janvier 2012. Ces modifications statutaires entrent en vigueur le 1er janvier 2012.” (art. 38, 2ème al. de la loi). La seconde prévoit qu'“à défaut de mise en conformité des statuts” avant le 1er janvier 2012, “les dispositions statutaires contraires à la présente loi sont réputées non écrites et les dispositions impératives de celle-ci sont applicables à la société concernée à partir du 1er janvier 2012” (art. 38, 3ème al. de la loi). Par ailleurs, deux articles de la loi, qui suppriment quelques dispositions relatives aux actions au porteur, n'entreront en vigueur que le 1er janvier 2014, date à laquelle les titres au porteur auront cessé d'exister en droit belge (art. 38, 4ème al. de la loi) [7].

II. Convocation de l'assemblée
II.1. Mentions de la convocation

5.Un nouvel article 533bis C.soc. précise le contenu minimum de la convocation. Il regroupe certaines mentions légalement obligatoires ou consacrées par l'usage: (i) “l'indication de la date, de l'heure et du lieu de l'assemblée”, (ii) “l'ordre du jour contenant l'indication des sujets à traiter ainsi que les propositions de décision”, (iii) “une description claire et précise des formalités à accomplir par les actionnaires pour être admis à l'assemblée générale et pour y exercer leur droit de vote, notamment le délai dans lequel l'actionnaire doit indiquer son intention de participer à l'assemblée” et (iv) “la procédure à suivre pour voter par procuration”.

6.L'article 533bis C.soc. ajoute une série de mentions obligatoires qui reflètent les nouveautés que nous présentons dans la suite de cette étude. Il faudra désormais indiquer dans la convocation: (v) le droit “de requérir l'inscription de sujets à traiter à l'ordre du jour de toute assemblée” et celui de “déposer des propositions de décision concernant des sujets à traiter inscrits ou à inscrire à l'ordre du jour” (nouvel art. 533ter, § 1er C.soc., auquel renvoie l'art. 533bis C.soc.), (vi) “l'adresse électronique à laquelle les actionnaires peuvent adresser leurs demandes” et “la date ultime à laquelle un ordre du jour complété est, le cas échéant, publié” [8], (vii) la faculté pour les actionnaires de poser par écrit aux administrateurs et commissaires des questions auxquelles il sera répondu au cours de l'assemblée (art. 540 modifié, auquel renvoie l'art. 533bis C.soc.), (viii) “le cas échéant, les procédures et délais établis par ou en vertu des statuts, permettant de participer à distance à l'assemblée générale […] et de voter à distance avant l'assemblée”, (ix) “les modalités selon lesquelles la société est prête à accepter les notifications par voie électronique de désignation d'un mandataire, ainsi que le délai dans lequel le droit de vote par procuration doit être exercé”, (x) “la date d'enregistrement” et “l'indication que seules les personnes qui sont actionnaires à cette date auront le droit de participer et de voter à l'assemblée”, (xi) “l'adresse où il est possible d'obtenir […] le texte intégral des documents et des propositions de décision […] ainsi que des démarches à effectuer à cet effet” et (xii) “l'adresse précise du site Internet” sur lequel seront disponibles les informations que la société est tenue de publier conformément au nouvel article 533bis, § 2 C.soc.

II.2. Délai d'émission de la convocation

7.Le délai de convocation, pour les sociétés cotées, est actuellement de “vingt-quatre jours au moins avant l'assemblée” [9] (art. 533 C.soc.). Si la première assemblée est de carence et qu'une “nouvelle convocation est nécessaire et que la date de la deuxième assemblée a été indiquée dans la première convocation, le délai est porté à dix-sept jours au moins avant l'assemblée” (art. 533 C.soc.). La loi du 20 décembre 2010 porte le délai de convocation à trente jours avant la première assemblée (nouveau § 2 de l'art. 533 C.soc.). Elle maintient le délai de dix-sept jours pour la deuxième assemblée. Il s'agit de jours calendrier et non de jours ouvrables [10].

II.3. Modalités d'émission de la convocation

8.La loi du 20 décembre 2010 reprend (dans un nouveau § 2 de l'art. 533 C.soc.) la règle actuellement en vigueur (art. 533 C.soc.) selon laquelle les convocations “sont faites par des annonces insérées trente jours [11] au moins avant l'assemblée, dans le Moniteur belge” et “dans un organe de presse de diffusion nationale”. La publication dans la presse n'est pas requise “pour les assemblées générales ordinaires qui se tiennent dans la commune, aux lieu, jour et heure indiqués dans l'acte constitutif et dont l'ordre du jour se limite à l'examen des comptes annuels, du rapport de gestion et du rapport des commissaires, au vote sur la décharge des administrateurs et des commissaires, ainsi qu'au vote sur” le rapport de rémunération (art. 554, 3ème al. C.soc.) et, le cas échéant, sur une clause dérogatoire en matière d'indemnité de départ d'un administrateur exécutif, d'un membre du comité de direction ou d'un 'autre dirigeant' au sens de l'article 96, § 3, dernier alinéa C.soc. (art. 554, 4ème al. C.soc.).

9.La loi ajoute qu'une annonce doit également être insérée, dans le même délai de trente jours au moins avant l'assemblée, “dans des médias dont on peut raisonnablement attendre une diffusion efficace des informations auprès du public dans l'ensemble de l'Espace économique européen et qui sont accessibles rapidement et de manière non discriminatoire” (nouveau § 2 de l'art. 533 C.soc.[12].

10.Si une nouvelle convocation est nécessaire en cas de carence de la première assemblée, les mêmes formalités de publication doivent être accomplies, mais le délai de publication est de “dix-sept jours au moins avant l'assemblée” pour autant “que la date de la deuxième assemblée ait été indiquée dans la première convocation et que l'ordre du jour ne comporte aucun sujet à traiter nouveau” (nouveau § 2 de l'art. 533 C.soc.). A défaut de réunion de ces deux conditions, le délai est de trente jours.

11.Par ailleurs, tout en reprenant le texte actuellement en vigueur, la loi porte de quinze à trente jours le délai de communication personnalisée de la convocation à certains destinataires: les convocations “seront communiquées, dans le délai de convocation” [13] de trente (ou, s'il s'agit d'une deuxième assemblée, de dix-sept) jours (i) “aux actionnaires, porteurs d'obligations ou titulaires d'un droit de souscription en nom”, (ii) “aux titulaires de certificats nominatifs émis avec la collaboration de la société” et (iii) “aux administrateurs et aux commissaires”. Cette communication se fait “par lettre ordinaire sauf si les destinataires ont individuellement, expressément et par écrit, accepté de recevoir la convocation moyennant un autre moyen de communication, sans qu'il doive être justifié de l'accomplissement de cette formalité” (nouveau § 2 de l'art. 533 C.soc.).

12.Enfin, reprenant le prescrit de la directive, la loi précise que la société “ne peut pas facturer aux actionnaires des frais spécifiques” liés aux formalités d'émission des convocations (nouveau § 2 de l'art. 533 C.soc.).

II.4. Informations et documents à mettre à disposition

13.Reproduisant pratiquement mot pour mot le texte de la directive [14], la loi du 20 décembre 2010 dispose (nouvel art. 533bis, § 2 C.soc.) que: “[l]e jour de la publication de la convocation […] et de manière ininterrompue jusqu'au jour de l'assemblée générale, les sociétés [cotées] mettent à disposition de leurs actionnaires sur le site Internet, qu'elles sont tenues de développer [15], au moins les informations suivantes”:

    • le texte de la convocation, “ainsi que, le cas échéant, l'ordre du jour publié conformément à l'article 533ter, § 3” C.soc. à la suite d'une demande faite par un ou plusieurs actionnaires de compléter l'ordre du jour;
    • “le nombre total d'actions et de droits de vote à la date de la convocation, y compris des totaux distincts pour chaque catégorie d'actions, lorsque le capital de la société est divisé en deux catégories d'actions ou plus”;
    • “les documents destinés à être présentés à l'assemblée générale”;
    • “pour chaque sujet à traiter inscrit à l'ordre du jour […], une proposition de décision ou, lorsque le sujet à traiter ne requiert pas l'adoption d'une décision, un commentaire émanant du conseil d'administration. En outre, les propositions de décision formulées par les actionnaires en application de l'article 533ter sont ajoutées au site Internet dès que possible après leur réception par la société” (voy. n° 18 infra);
    • “les formulaires qui peuvent être utilisés pour voter par procuration et, le cas échéant, pour voter par correspondance, sauf si ces formulaires sont adressés directement à chaque actionnaire” [16]. “Lorsque les formulaires […] ne peuvent être rendus accessibles sur le site Internet pour des raisons techniques, la société indique sur son site Internet comment obtenir ces formulaires sur papier. Dans ce cas, la société est tenue d'envoyer sans délai et sans frais les formulaires à chaque actionnaire qui en fait la demande, à l'adresse postale ou électronique qu'il aura indiquée”.

    14.Ces informations doivent rester “accessibles sur le site Internet de la société pendant une période de cinq années à compter de la date de l'assemblée générale à laquelle elles se rapportent” (art. 533bis, § 2, dernier al. C.soc.) [17].

    15.Par ailleurs, une copie de l'ensemble “des documents qui doivent être mis à la disposition des actionnaires nominatifs, des administrateurs et des commissaires […] leur est adressée en même temps que la convocation et selon les mêmes modalités” (art. 535, 1er al. C.soc. modifié). De plus, “tout actionnaire, obligataire, titulaire d'un droit de souscription ou titulaire d'un certificat émis avec la collaboration de la société a le droit d'obtenir gratuitement, sur la production de son titre, ou de l'attestation visée à l'article 474, […],dès la publication de la convocation à l'assemblée générale, une copie de ces documents au siège de la société” (art. 535, 3ème al. C.soc. modifié).

    16.La loi supprime, pour les sociétés cotées, l'obligation de transmettre une copie de ces documents à chaque personne qui a rempli les formalités requises par les statuts pour être admise à l'assemblée (art. 535, 2ème al. C.soc. modifié). Ces documents sont mis à leur disposition sur le site internet de la société (voy. n° 11).

    17.Enfin, la société est tenue, “dès la publication de la convocation à l'assemblée” (et non plus quinze jours seulement avant l'assemblée) de permettre aux titulaires de titres de prendre connaissance au siège social des documents visés à l'article 553 C.soc. (art. 553 C.soc. modifié).

    II.5. Inscription de points à l'ordre du jour et dépôt de propositions de décision par les actionnaires

    18.Selon les règles actuellement en vigueur, le conseil d'administration d'une société cotée ou d'une société non cotée n'est obligé de mettre à l'ordre du jour les points proposés par un actionnaire que si ces points sont présentés par un ou plusieurs actionnaires disposant du droit de requérir la convocation de l'assemblée parce qu'ils représentent 20% ('un cinquième du capital social' - art. 532 in fine C.soc.) ou si les statuts donnent aux actionnaires le droit de faire inscrire à l'ordre du jour des points qu'ils souhaitent voir discuter. Le conseil d'administration peut néanmoins légitimement refuser de mettre ces points complémentaires à l'ordre du jour si la requête lui parvient trop tard pour que, compte tenu des contraintes matérielles d'impression et de publication des convocations, celles-ci puissent être modifiées. Par ailleurs, lorsque la convocation a déjà été publiée avec l'indication des points mis à l'ordre du jour, aucun point supplémentaire ne peut y être ajouté si le nombre de jours qui séparerait la date de sa publication de celle de l'assemblée est inférieur au délai minimum légal de convocation. Toutefois, dans ces deux cas - mais uniquement si la requête des actionnaires se fonde sur l'article 532 C.soc. - le conseil doit veiller à émettre, dans le délai de trois semaines que prévoit l'article 647, 1° C.soc. et dont il sanctionne pénalement le respect, la convocation d'une assemblée spéciale pour l'examen des points supplémentaires.

    19.Pour ce qui est du dépôt de propositions de décision sur les points à l'ordre du jour, le droit belge ne garantit actuellement l'exercice effectif de ce droit qu'en cours d'assemblée et le fondement de ce droit réside dans celui qu'ont les participants de proposer des amendements aux propositions de décision faites dans la convocation, pour autant que l'amendement rentre dans le cadre de l'ordre du jour, ce qui est une question de fait.

    20.La loi du 20 décembre 2010 (art. 533ter) introduit, pour les sociétés cotées, les nouvelles règles suivantes, qui éviteront notamment aux actionnaires de celles-ci de devoir, comme c'est actuellement le cas, recourir à l'article 532 C.soc. (que la loi nouvelle ne supprime ni ne modifie) pour pouvoir compléter l'ordre du jour d'une assemblée déjà convoquée:

      • “[u]n ou plusieurs actionnaires possédant ensemble au moins 3% du capital social d'une société [cotée] peuvent requérir l'inscription de sujets à traiter à l'ordre du jour de toute assemblée générale, ainsi que déposer des propositions de décision concernant des sujets à traiter inscrits ou à inscrire à l'ordre du jour”. L'article 533ter C.soc. précise que ce droit n'est pas reconnu aux actionnaires pour une deuxième assemblée convoquée après une assemblée de carence;
      • les demandes “sont formulées par écrit et sont accompagnées, selon le cas, du texte des sujets à traiter et des propositions de décision y afférentes, ou du texte des propositions de décision à porter à l'ordre du jour” et elles “indiquent l'adresse postale ou électronique à laquelle la société transmet l'accusé de réception de ces demandes”. Les demandes “doivent parvenir à la société au plus tard le vingt-deuxième jour qui précède la date de l'assemblée générale”. Ce délai se compte en jours calendrier et non en jours ouvrables [18];
      • “la société publie, conformément à l'article 533, § 2, un ordre du jour complété des sujets à traiter additionnels et des propositions de décision y afférentes qui y auraient été portés et/ou des propositions de décision qui seules auraient été formulées, au plus tard le quinzième jour qui précède la date de l'assemblée générale”.

      21.Les actionnaires qui entendent exercer ce droit “établissent, à la date de leur requête, la possession de la fraction de capital exigée [(au moins 3% du capital social)] soit par un certificat constatant l'inscription des actions correspondantes sur le registre des actions nominatives de la société, soit par une attestation établie par un intermédiaire financier certifiant le nombre d'actions au porteur correspondantes qui lui ont été produites [19], soit par une attestation, établie par le teneur de comptes agréé ou l'organisme de liquidation, certifiant l'inscription en compte, à leur nom, du nombre d'actions dématérialisées correspondantes” (art. 533ter, § 1er, 2ème al. C.soc.).

      22.Pour que les sujets à traiter et les propositions de décision ainsi ajoutés à l'ordre du jour puissent être examinés le jour de l'assemblée, il faut en outre, selon le nouvel article 533ter, § 1er, 3ème alinéa C.soc., que les actionnaires qui ont exercé ce droit aient accompli, pour un nombre d'actions qui correspond à 3% au moins du capital social, les formalités d'enregistrement requises pour prendre part à l'assemblée (voy. n° 28).

      23.On ne perdra pas de vue l'impact de cet ajout de sujets à traiter et de propositions de décision sur la validité des formulaires de vote à distance et des procurations parvenues à la société avant la publication de l'ordre du jour modifié. La loi du 20 décembre 2010 énonce à ce propos une série de règles nouvelles que nous examinons infra aux nos 48 et 61.

      III. Report et prorogation de l'assemblée

      24.Pour tenir compte des règles nouvelles qui prévoient que le délai de convocation est de trente jours avant l'assemblée (voy. n° 7), la loi du 20 décembre 2010 modifie l'article 534 C.soc. en portant à cinq semaines (au lieu de trois, comme le prévoit le texte actuel) la date à laquelle le conseil d'administration peut reporter l'assemblée “[l]orsque, dans les vingt jours précédant la date pour laquelle une assemblée générale a été convoquée, une société reçoit une déclaration ou a connaissance du fait qu'une déclaration aurait dû ou doit être faite en vertu des articles 514 ou 515, alinéa 1er C.soc. (déclarations dites 'de transparence').

      25.Pour les mêmes raisons liées à l'allongement du délai de convocation à trente jours, la loi modifie également l'article 555 C.soc. qui prévoit le droit pour le conseil d'administration de “proroger, séance tenante, la décision relative à l'approbation des comptes annuels à trois semaines”, en y ajoutant la règle selon laquelle “[d]ans les sociétés [cotées], ce délai est porté à cinq semaines”.

      IV. Procédure d'enregistrement préalable à l'assemblée
      IV.1. Interdiction d'exiger l'immobilisation des actions

      26.Alors que le Code des sociétés en fait actuellement la règle, la directive interdit d'exiger, dans les sociétés cotées, le dépôt et l'immobilisation des actions comme conditions de participation à l'assemblée et au vote [20]. L'interdiction couvre toutes les actions, qu'elles circulent sous la forme nominative, au porteur ou dématérialisée.

      27.Pour respecter cette interdiction, la loi du 20 décembre 2010 sort les sociétés cotées du champ d'application de l'article 536, 2ème alinéa C.soc., qui prévoit que le droit de participer à l'assemblée générale est “subordonné, soit à l'inscription dans le registre des actions nominatives, soit au dépôt des actions au porteur, soit au dépôt d'une attestation, établie par le teneur de compte agréé ou l'organisme de liquidation constatant l'indisponibilité, jusqu'à la date de l'assemblée générale, des actions dématérialisées”. La loi du 20 décembre 2010 maintient ce texte pour les sociétés ordinaires (en supprimant toutefois, avec effet au 1er janvier 2014 [21], les mots 'soit au dépôt des actions au porteur'), qui devient l'article 536, § 1er, 2ème alinéa C.soc.

      IV.2. Enregistrement obligatoire

      28.Après avoir interdit toute exigence d'immobilisation des actions dans les sociétés cotées, la directive érige en principe que “les droits d'un actionnaire de participer à une assemblée générale et d'exercer le vote attaché à ses actions sont déterminés en fonction des actions détenues par cet actionnaire à une date précise antérieure à l'assemblée générale (dénommée 'date d'enregistrement')” (art. 7, par. 2, al. 1er). Cette procédure d'enregistrement des actionnaires, auxquels il suffira d'établir la propriété de leurs actions à une date antérieure à l'assemblée et fixée par les statuts est celle qu'organise déjà, mais à titre facultatif seulement, l'article 536, 3ème alinéa C.soc. La loi du 20 décembre 2010 supprime cette procédure facultative et la remplace par une procédure obligatoire dont nous examinons le détail ci-dessous.

      IV.3. Date unique d'enregistrement

      29.Alors que le Code des sociétés prévoit actuellement que les sociétés cotées peuvent fixer la date d'enregistrement dans une fourchette de quinze à cinq jours avant l'assemblée, la directive impose au législateur belge de prévoir une date unique [22]. La loi du 20 décembre 2010 fixe cette date unique d'enregistrement, qu'il s'agisse d'une première ou d'une deuxième assemblée à la suite d'une assemblée de carence, au “quatorzième jour qui précède l'assemblée générale” (art. 536, § 2 C.soc.): “le droit de participer à une assemblée générale d'une société [cotée] et d'y exercer le droit de vote est subordonné à l'enregistrement comptable des actions au nom de l'actionnaire le quatorzième jour qui précède l'assemblée générale, à vingt-quatre heures (heure belge), […] sans qu'il soit tenu compte du nombre d'actions détenues par l'actionnaire au jour de l'assemblée générale”.

      IV.4. Enregistrement et preuve de la qualité d'actionnaire

      30.Pour ce qui est des aspects pratiques de l'enregistrement, la loi du 20 décembre 2010 se limite à indiquer:

        • que la preuve de l'enregistrement des actions le quatorzième jour qui précède l'assemblée générale est établie “soit par leur inscription sur le registre des actions nominatives de la société, soit par leur inscription dans les comptes d'un teneur de compte agréé ou d'un organisme de liquidation, soit par la production des actions au porteur à un intermédiaire financier” [23] (nouveau § 2 de l'art. 536 C.soc.);
        • que l'actionnaire “indique à la société, ou à la personne qu'elle a désigné à cette fin, sa volonté de participer à l'assemblée générale, au plus tard le sixième jour qui précède la date de l'assemblée” (nouveau § 2 de l'art. 536 C.soc.);
        • qu'une “attestation est délivrée à l'actionnaire par l'intermédiaire financier certifiant le nombre d'actions au porteur produites à la date d'enregistrement, ou [24] par le teneur de comptes agréé ou par l'organisme de liquidation certifiant le nombre d'actions dématérialisées inscrites au nom de l'actionnaire dans ses comptes à la date d'enregistrement, pour lequel l'actionnaire a déclaré vouloir participer à l'assemblée générale” (nouveau § 2 de l'art. 536 C.soc.).

        31.La loi du 20 décembre 2010 ne règle pas le détail de la mise en oeuvre de la procédure d'enregistrement. Son exposé des motifs indique qu'il appartient aux sociétés “d'assurer les démarches pratiques visant, notamment, à réconcilier les avis de présence des actionnaires et les informations qui lui seront communiquées par les intermédiaires financiers en ce qui concerne les positions des actionnaires à la date d'enregistrement” [25]. La loi “n'entend pas régler au-delà de ce qui est proposé en matière de tenue d'un registre [26], l'organisation matérielle de ces travaux qui relèvent principalement des relations contractuelles que les sociétés cotées développent avec les intermédiaires financiers auxquels elles recourent pour l'organisation de leurs assemblées générales” [27].

        32.La mise en oeuvre de la procédure d'enregistrement doit permettre à la société de disposer le jour de l'assemblée d'une preuve juridiquement fiable que les personnes qui se sont faites enregistrer possédaient bien la qualité d'actionnaire à la date d'enregistrement. La preuve de cette qualité, indique la directive “ne peut être soumise à d'autres exigences que celles qui sont nécessaires à l'identification des actionnaires, et ce uniquement dans la mesure où celles-ci sont proportionnées à la réalisation de cet objectif” (art. 7, § 4).

        IV.5. Etablissement du registre

        33.L'article 536 C.soc. prévoit actuellement que l'enregistrement est matérialisé par l'indication “de combien d'actions dispose chaque actionnaire à la date d'enregistrement à 24 heures, dans un registre désigné par le conseil d'administration”.

        34.La loi du 20 décembre 2010 modifie ce texte comme suit: “Dans un registre désigné par le conseil d'administration, il est indiqué, pour chacun des actionnaires qui a signalé sa volonté de participer à l'assemblée générale, ses nom ou dénomination sociale et adresse ou siège social, le nombre d'actions qu'il détenait à la date d'enregistrement et pour lequel il a déclaré vouloir participer à l'assemblée générale, ainsi que la description des documents qui établissent la détention des actions à cette date d'enregistrement.” (art. 536, § 2, 5ème al. C.soc.).

        35.Les “documents qui établissent la détention des actions à [la] date d'enregistrement” sont les “attestation[s] délivrée[s] [aux] actionnaire[s]” par l'intermédiaire financier, le teneur de compte agréé ou l'organisme de liquidation (voy. n° 30 infra). La société ne pourra compléter le registre par cette indication que le jour de l'assemblée, lors de la remise de ces attestations par les actionnaires (ou par leurs mandataires).

        36.Pour constater dans le registre la détention des actions nominatives à la date d'enregistrement, il suffit à la société de se référer au registre des actions, dont elle assure la tenue et la conservation. Pour les autres indications à porter dans le registre à propos des actions au porteur et dématérialisées, le plus pratique est sans doute que le conseil d'administration de la société charge une banque centralisatrice d'en confectionner les bases pour le compte de la société. Cette banque doit concevoir et mettre en place une procédure et une logistique qui lui permettent de rassembler, pour les transmettre à la société dans les meilleurs délais le lendemain du sixième jour avant l'assemblée, les notifications parvenues dans ses différentes agences ainsi que les notifications que lui auront fait parvenir d'autres intermédiaires financiers.

        V. Participation interactive et vote à distance en temps réel

        37.Pour rendre le droit belge conforme à la directive [28], la loi du 20 décembre 2010 introduit un nouvel article 538bis C.soc., dont on notera qu'il est applicable aux sociétés cotées et aux sociétés ordinaires, selon lequel “[l]es statuts peuvent prévoir la possibilité pour les actionnaires de participer à distance à l'assemblée générale grâce à un moyen de communication électronique mis à disposition par la société. Les actionnaires qui participent de cette manière à l'assemblée générale sont réputés présents à l'endroit où se tient l'assemblée générale pour le respect des conditions de présence et de majorité”.

        38.Pour que cette participation à distance en temps réel soit valable, il suffit que le système électronique utilisé permette à l'actionnaire de suivre les débats et d'exercer son droit de vote: “le moyen de communication électronique doit au moins permettre à l'actionnaire, de manière directe, simultanée et continue, de prendre connaissance des discussions au sein de l'assemblée et, sur tous les points sur lesquels l'assemblée est appelée à se prononcer, d'exercer le droit de vote”. Les mots 'au moins' indiquent qu'il n'est pas requis de mettre en place un système de communication multidirectionnel qui permette à l'actionnaire de prendre une part active aux débats et de poser des questions [29]. Ceci dit, si la société estime disposer des moyens techniques adéquats, “[l]es statuts peuvent prévoir que ce moyen de communication électronique doit en outre permettre à l'actionnaire de participer aux délibérations et d'exercer son droit de poser des questions”.

        39.On notera que la participation à distance selon les procédures ainsi définies n'est pas autorisée “aux membres du bureau de l'assemblée, aux administrateurs et aux commissaires”, qui doivent être physiquement présents à l'endroit où se tient l'assemblée.

        40.Que la société utilise un système multidirectionnel ou un système limité à la retransmission des débats et à l'exercice du droit de vote, il convient de se montrer particulièrement attentif aux aspects techniques:

          • “la société doit être en mesure de contrôler, grâce au moyen de communication électronique utilisé, la qualité et l'identité de l'actionnaire. Les modalités suivant lesquelles la qualité d'actionnaire et l'identité de la personne désireuse de participer à l'assemblée sont contrôlées et garanties, sont définies par les statuts ou en vertu de ceux-ci”;
          • “[l]es modalités suivant lesquelles il est constaté qu'un actionnaire participe à l'assemblée générale grâce au moyen de communication électronique et peut dès lors être considéré comme présent, sont définies par les statuts ou en vertu de ceux-ci”;
          • “l'utilisation du moyen électronique peut être soumis à des conditions fixées par les statuts ou en vertu de ceux-ci aux seules fins de garantir la sécurité de la communication électronique” [30];
          • “[l]e procès-verbal de l'assemblée générale mentionne les éventuels problèmes et incidents techniques qui ont empêché ou ont perturbé la participation par voie électronique à l'assemblée générale et/ou au vote”;
          • “[l]e Roi peut préciser la nature et les conditions d'application des moyens de communication électronique” qui viennent d'être décrits (nouvel art. 538bis, § 5 C.soc.).

          41.“[L]a convocation à l'assemblée générale contient une description claire et précise des procédures statutaires ou établies en vertu des statuts, relatives à la participation à distance à l'assemblée générale. Le cas échéant, ces procédures sont rendues accessibles à tous sur le site Internet de la société”. Les actionnaires et titulaires d'autres titres qui entendent faire usage de cette faculté de participation à distance sont tenus d'accomplir les formalités d'admission (et notamment la formalité d'enregistrement) prévues par l'article 536 C.soc. (voy. n° 28).

          42.Les statuts peuvent étendre cette faculté de participation à distance “aux titulaires de parts bénéficiaires”, “aux porteurs d'obligations, aux titulaires de droits de souscription ou de certificats émis avec la collaboration de la société”, mais uniquement “compte tenu des droits qui leur ont été attribués” par la loi ou les statuts. Ceux-ci peuvent également “étendre le régime de participation à distance visé à l'article 538bis, aux mêmes conditions, à l'assemblée générale des obligataires” (nouvel art. 571bis C.soc.).

          VI. Vote à distance avant l'assemblée

          43.Dans un système de vote à distance sous forme électronique avant l'assemblée, les actionnaires ont accès à des pages spéciales, sur le site Internet de la société ou celui d'un tiers qui agit en qualité de sous-traitant, et peuvent y exprimer le sens de leur vote sur chacune des propositions qui figurent à l'ordre du jour de l'assemblée. D'un point de vue juridique, le procédé de vote à distance sous forme électronique s'est jusqu'ici inscrit dans le cadre légal du vote par correspondance qu'organise l'article 550 C.soc, qui laisse aux rédacteurs des statuts le soin de déterminer les mentions du formulaire lorsqu'il s'agit d'un vote classique par la voie postale. La loi du 20 décembre 2010 vise de manière expresse le vote à distance sous forme électronique en énonçant que “[l]es statuts peuvent autoriser tout actionnaire à voter à distance avant l'assemblée générale, par correspondance ou sous forme électronique, au moyen d'un formulaire mis à disposition par la société” (art. 550, § 1er C.soc.). La loi complète par ailleurs l'article 550 C.soc., en énonçant (nouveau § 2 de l'art. 550 C.soc.) les mentions que doit au minimum contenir le formulaire de vote à distance (par correspondance ou sous forme électronique) “[s]ans préjudice d'autres mentions exigées par ou en vertu des statuts”.

          44.La loi nouvelle précise que “[l]orsque la société autorise le vote à distance, elle doit être en mesure de contrôler la qualité et l'identité de l'actionnaire. Les modalités suivant lesquelles la qualité d'actionnaire et l'identité de la personne désireuse de voter à distance sont contrôlées et garanties, sont définies par les statuts ou en vertu de ceux-ci” (art. 550, § 1er C.soc.).

          45.Il faut en outre que l'actionnaire ait satisfait aux formalités d'admission, que doit accomplir tout actionnaire qui participe à une assemblée, pour que son vote à distance puisse être pris en compte. Dans les sociétés cotées, cela suppose que l'actionnaire ait procédé aux formalités d'enregistrement (voy. n° 28 supra). La loi du 20 décembre 2010 précise, à propos des sociétés cotées, que “[p]our le calcul des règles de quorum et de majorité, seuls les votes à distance exprimés par des actionnaires qui satisfont aux formalités d'admission à l'assemblée visées […] à l'article 536, § 2 sont pris en compte” (art. 550, § 3, 3ème al. C.soc.). Dans les sociétés ordinaires, les formalités à accomplir sont celles que prévoit l'article 536, § 1er, 2ème alinéa C.soc. et la loi nouvelle précise qu'“est considéré comme nul le vote à distance exprimé par un actionnaire qui a cédé ses actions à la date fixée conformément à l'article 536, § 1er, 2ème alinéa C.soc.” (art. 550, § 3, 3ème al. C.soc.).

          46.La loi du 20 décembre 2010 précise que le vote à distance sous forme électronique “peut être exprimé jusqu'au jour qui précède l'assemblée” (art. 550, § 3, 1er al. C.soc.). Cela signifie que l'accès aux pages web devra être fermé à minuit la veille de l'assemblée. En ce qui concerne le vote par correspondance, le formulaire “doit parvenir à la société dans le délai fixé par ou en vertu des statuts ou, pour les sociétés [cotées], au plus tard le sixième jour qui précède la date de l'assemblée” (art. 550, § 3, 1er al. C.soc.). La loi ajoute que “[l]e formulaire de vote à distance adressé à la société pour une assemblée vaut pour les assemblées successives convoquées avec le même ordre du jour” (art. 550, § 3, 2ème al. C.soc.).

          47.La loi nouvelle énonce également le principe selon lequel “[e]n cas de modification, en assemblée, d'une proposition de décision sur laquelle un vote [à distance] a été exprimé, le vote [à distance] émis est considéré comme nul” (art. 550, § 2 C.soc.).

          48.On ne perdra pas de vue que si l'ordre du jour publié est ultérieurement complété à la suite de l'exercice par certains actionnaires de leur droit de requérir l'inscription de sujets à traiter et de déposer des propositions de décision (voy. n° 20), le formulaire initial ne couvre pas ces nouveaux sujets à traiter et propositions de décision: la société est tenue de mettre à disposition de ses actionnaires sur son site Internet, simultanément à la publication de l'ordre du jour complété, “les formulaires qui peuvent être utilisés pour voter par procuration et, le cas échéant, pour voter par correspondance, complétés des sujets à traiter additionnels et des propositions de décision y afférentes qui auraient été portées à l'ordre du jour, et/ou des propositions de décision qui seules auraient été formulées” (art. 533ter, § 3, 2ème al. C.soc.). Toutefois, “les formulaires de vote à distance, par correspondance ou sous forme électronique, qui sont parvenus à la société antérieurement à la publication d'un ordre du jour complété restent valables pour les sujets à traiter inscrits à l'ordre du jour qu'ils couvrent” (art. 550, § 4, 1er al. C.soc.), mais “le vote exercé sur un sujet à traiter inscrit à l'ordre du jour qui a fait l'objet d'une proposition de décision nouvelle en application de l'article 533ter, est nul” (art. 550, § 4, 2ème al. C.soc.) [31].

          49.“L'actionnaire qui a exprimé son vote à distance, que ce soit par correspondance ou sous forme électronique, ne peut plus choisir un autre mode de participation à l'assemblée pour le nombre de voix ainsi exprimées” (art. 550, § 3, 5ème al. C.soc). Il ne peut participer physiquement à l'assemblée ou s'y faire représenter par un mandataire, si ce n'est pour y exercer les droits attachés à d'autres actions que celles pour lesquelles il a exprimé un vote à distance.

          VII. Vote par mandataire
          VII.1. Liberté de choix du mandataire

          50.Pour respecter le prescrit de la directive [32], le nouvel article 547bis, § 1er, 3ème alinéa C.soc. qu'introduit la loi du 20 décembre 2010 prévoit que, dans les sociétés cotées, “sont réputées non écrites les clauses statutaires limitant la possibilité pour des personnes d'être désignées comme mandataires”. Ces limitations statutaires sont toutefois rares dans les sociétés cotées.

          VII.2. Un seul mandataire par actionnaire

          51.La loi du 20 décembre 2010 prévoit, dans un nouvel article 547bis, § 1er C.soc., que “[l']actionnaire d'une société [cotée] ne peut désigner, pour une assemblée générale donnée, qu'une seule personne comme mandataire. Par dérogation […] l'actionnaire peut désigner un mandataire distinct par forme d'actions qu'il détient, ainsi que par compte-titres s'il détient des actions d'une société sur plus d'un compte-titres”. Une deuxième dérogation, que nous examinons ci-dessous (voy. n° 54) vise les actions détenues à titre fiduciaire par des intermédiaires professionnels.

          VII.3. Mandat à durée limitée

          52.La loi du 20 décembre 2010 énonce la règle selon laquelle un mandat de vote “peut être donné pour une ou plusieurs assemblées déterminées ou pour les assemblées tenues pendant une période déterminée” (art. 547, 3ème al. C.soc.).

          53.Ce principe, selon lequel un mandat peut être donné pour un nombre limité d'assemblées ou pour une période limitée, était déjà consacré par la doctrine, qui s'appuyait notamment sur un arrêt du 13 janvier 1938 de la Cour de cassation [33], rendu à propos d'une convention comportant notamment, pour une période de quelques mois, mandat irrévocable de vote donné par un actionnaire à un tiers “pour paraître aux assemblées générales et extraordinaires de la société (…) et d'y agir comme bon lui semble pour les actions”. Jusqu'il y a une vingtaine d'années, les commentateurs se montraient néanmoins prudents quant à l'exacte portée de l'arrêt et à la validité d'un mandat irrévocable [34]. Leurs réserves étaient notamment liées au fait que pareil mandat, même donné pour une période déterminée, pouvait dissimuler une cession du droit de vote, dont la licéité de principe restait discutée. Un arrêt de la Cour de cassation du 13 avril 1989 [35] a levé l'incertitude sur le droit de l'actionnaire de disposer de son vote et, partant, sur la licéité des conventions de vote. Cette licéité fut consacrée par l'article 74ter LCSC (devenu l'art. 551 C.soc.), introduit par la loi du 18 juillet 1991 et modifié par la loi du 13 avril 1995. On s'est dès lors accordé à considérer comme valable un mandat irrévocable, comportant interdiction pour l'actionnaire d'exercer lui-même le droit de vote, et donné en termes généraux pour plusieurs assemblées déterminées ou pour une période déterminée. C'est ce principe que confirme le nouvel alinéa 3 de l'article 547 C.soc.

          VII.4. Vote d'actions détenues à titre fiduciaire

          54.Selon la directive, “[l]orsque le droit applicable limite le nombre de personnes qu'un actionnaire peut désigner comme mandataires” (voy. n° 51) “cette limitation n'empêche pas” cet intermédiaire professionnel “de donner procuration à chacun de ses clients ou à toute tierce personne désignée par un client” (art. 13, § 5). La loi du 20 décembre 2010 prévoit dans un nouvel article 547bis, § 1er C.soc., que “la personne qualifiée d'actionnaire mais qui agit à titre professionnel pour le compte d'autres personnes physiques ou morales, peut donner procuration à chacune de ces autres personnes physiques ou morales ou à une tierce personne désignées par celles-ci”.

          VII.5. Nombre illimité de mandants

          55.Le nouvel article 547bis, § 1er, 4ème alinéa C.soc. qu'introduit la loi du 20 décembre 2010 précise que “le nombre d'actionnaires d'une société [cotée] qu'une personne agissant en qualité de mandataire peut représenter n'est pas limité. Au cas où un mandataire détient des procurations de plusieurs actionnaires, il peut exprimer pour un actionnaire donné des votes différents de ceux exprimés pour un autre actionnaire”.

          VII.6. Procuration écrite et notification à la société

          56.La loi du 20 décembre 2010 complète l'article 547 C.soc. comme suit: “[p]ar procuration, il faut entendre le pouvoir donné par un actionnaire à une personne physique ou morale pour exercer au nom de cet actionnaire tout ou partie de ses droits lors de l'assemblée générale”. Cette définition ne nous paraît pas conforme aux principes du contrat de mandat et entretient la confusion. En effet, la procuration n'est pas la convention qui confère le pouvoir [36]: elle n'est que le document destiné à faire la preuve de ce pouvoir à l'égard de la société [37].

          57.En ce qui concerne le vote par mandataire, la loi du 20 décembre 2010 prévoit deux formalités, chacune devant être accomplie 'par écrit': (i) la désignation du mandataire et (ii) la notification de cette désignation à la société. Selon le nouvel article 547bis, § 2 C.soc.:

            • “La désignation d'un mandataire par un actionnaire d'une société [cotée] intervient par écrit ou par un formulaire électronique [38] et doit être signée par l'actionnaire, le cas échéant sous la forme d'une signature électronique avancée au sens de l'article 4, § 4 de la loi du 9 juillet 2001 fixant certaines règles pour les signatures électroniques et les services de certification, ou par un procédé de signature électronique qui répond aux conditions de l'article 1322 du Code civil;
            • “La notification de la procuration à la société doit se faire par écrit. Cette notification peut également être assurée par voie électronique à l'adresse indiquée dans la convocation publiée conformément à l'article 533bis, § 1er.” “La procuration doit parvenir à la société au plus tard le sixième jour qui précède la date de l'assemblée.”

            58.Ce texte nous paraît lui aussi maintenir la confusion entre contrat de mandat et procuration. En effet, dès lors qu'il distingue la 'désignation d'un mandataire' de la 'notification de la procuration', la première ne peut être qu'une référence au contrat de mandat. Or, cette désignation ne suffit pas à établir l'existence du contrat de mandat, lequel ne naît que lors de l'acceptation de cette désignation par le mandataire [39]. A défaut d'acceptation, cette désignation écrite reste un acte unilatéral. Il aurait été préférable, nous semble-t-il, de ne faire aucune référence dans le texte à la désignation du mandataire en tant que telle, car cette désignation renvoie inévitablement au contrat de mandat, qui peut d'ailleurs être soumis à d'autres droits que le droit belge. Il aurait été mieux indiqué de se limiter à faire référence à la procuration, en mentionnant que “la preuve de la désignation d'un mandataire par un actionnaire d'une société [cotée] intervient par écrit ou par un formulaire électronique [etc.]”.

            VII.7. Exécution des instructions du mandant

            59.La loi du 20 décembre 2010 énonce (nouvel al. 5 de l'art. 547 C.soc.) que “[l]e mandataire bénéficie des mêmes droits que l'actionnaire ainsi représenté et, en particulier, du droit de prendre la parole, de poser des questions lors de l'assemblée générale et d'y exercer le droit de vote”.

            60.La loi du 20 décembre 2010 introduit un nouvel article 547bis, § 3 C.soc., selon lequel “le mandataire vote conformément aux instructions de vote qui auraient été données par l'actionnaire d'une société [cotée] qui l'a désigné”. L'utilisation du conditionnel ('auraient été données') confirme que le mandant reste libre de donner à son mandataire un mandat discrétionnaire lui permettant notamment de voter au mieux des intérêts du mandant en fonction de l'évolution des délibérations au cours de l'assemblée. La disposition réserve l'hypothèse particulière des sollicitations publiques de procurations (art. 549, 2ème al. C.soc.) dans laquelle le mandataire “peut s'écarter des instructions données par son mandant, soit en raison de circonstances inconnues au moment où les instructions ont été données, soit lorsque leur exécution risquerait de compromettre les intérêts du mandant. Le mandataire doit en informer son mandant”.

            61.Si l'ordre du jour publié est ultérieurement complété à la suite de l'exercice par certains actionnaires de leur droit de requérir l'inscription de sujets à traiter et de déposer des propositions de décision (voy. n° 20), le formulaire initial ne couvre pas ces nouveaux sujets à traiter et propositions de décision: la société est tenue de mettre à disposition de ses actionnaires sur son site Internet, simultanément à la publication de l'ordre du jour complété, “les formulaires qui peuvent être utilisés pour voter par procuration et, le cas échéant, pour voter par correspondance, complétés des sujets à traiter additionnels et des propositions de décision y afférentes qui auraient été portées à l'ordre du jour, et/ou des propositions de décision qui seules auraient été formulées” (art. 533ter, § 3, 2ème al. C.soc.). Toutefois, “[l]es procurations de vote notifiées à la société antérieurement à la publication” de cet ordre du jour complété “restent valables pour les sujets à traiter inscrits à l'ordre du jour qu'elles couvrent” (art. 533ter, § 4, 1er al. C.soc.). Néanmoins “pour les sujets à traiter inscrits à l'ordre du jour qui font l'objet de propositions de décision nouvelles déposées en application de [l'article 533ter C.soc.], le mandataire peut, en assemblée, s'écarter des éventuelles instructions données par son mandant si l'exécution de ces instructions risquerait de compromettre les intérêts de son mandant. Il doit en informer son mandant” (art. 533ter, § 4, al. 2 C.soc.[40].

            62.Le mandataire “doit conserver un registre des instructions de vote pendant une période d'une année au moins et confirmer, sur demande de l'actionnaire, que les instructions de vote ont été exécutées” (nouvel art. 547bis, § 3 C.soc.).

            VII.8. Prévention des conflits d'intérêts du mandataire

            63.La loi du 20 décembre 2010 précise, dans un article 547bis, § 4 C.soc. nouveau, qu'il “y a conflit d'intérêts lorsque, notamment, le mandataire: 1° est la société elle-même ou une entité contrôlée par elle, un actionnaire qui contrôle la société ou est une autre entité contrôlée par un tel actionnaire; 2° est un membre du conseil d'administration, des organes de gestion de la société ou d'un actionnaire qui la contrôle ou d'une entité contrôlée visée au 1°; 3° est un employé ou un commissaire de la société, ou de l'actionnaire qui la contrôle ou d'une entité contrôlée visée au 1°; 4° a un lien parental avec une personne physique visée aux 1° à 3° ou est le conjoint ou le cohabitant légal d'une telle personne ou d'un parent d'une telle personne”. L'utilisation du terme 'notamment' confirme que, conformément au voeu de la directive [41], cette énumération n'est pas limitative.

            64.Pour se conformer à la directive [42], la loi du 20 décembre 2010 introduit un article 547bis, § 4 C.soc. nouveau, selon lequel, “[e]n cas de conflits d'intérêts potentiels entre l'actionnaire d'une société [cotée] et le mandataire qu'il a désigné: 1° le mandataire doit divulguer les faits précis qui sont pertinents pour permettre aux actionnaires d'évaluer le risque que le mandataire puisse poursuivre un intérêt autre que l'intérêt de l'actionnaire; 2° le mandataire n'est autorisé à exercer le droit de vote pour compte de l'actionnaire qu'à la condition qu'il dispose d'instructions de vote spécifiques pour chaque sujet inscrit à l'ordre du jour”.

            65.Ces règles nouvelles auront un impact non négligeable sur la pratique de nombreuses sociétés cotées auxquelles il est fréquent que des actionnaires adressent des procurations indiquant comme mandataire le président du conseil d'administration. Il en est de même des procurations émises 'en blanc' sans indication du nom d'un mandataire et adressées à la société, à charge pour celle-ci de désigner la personne du mandataire qui représentera le mandant lors de l'assemblée. Lorsque, que ce soit à l'intervention de son conseil d'administration, de l'un de ses administrateurs ou de l'un de ses employés, la société procède à cette désignation, elle le fait en qualité de mandataire de l'actionnaire et se substitue un sous-mandataire. Tant elle-même que ses organes ou employés sont expressément visés par le nouvel article 547bis, § 4 C.soc. nouveau et se trouveront donc en situation de conflit d'intérêts. Ils ne pourront désigner le sous-mandataire, et celui-ci ne pourra voter, que si la procuration comporte des instructions sur le sens du vote pour chaque sujet inscrit à l'ordre du jour. Il faudra attirer l'attention des actionnaires sur ce point, tant dans le texte de la convocation que sur le formulaire de procuration, pour éviter que les procurations indiquant comme mandataire le président du conseil d'administration et celles rédigées 'en blanc' ne puissent produire leurs effets.

            VIII. Droit de poser des questions

            66.Il est fréquent que des actionnaires fassent parvenir à la société, en vue d'une assemblée convoquée, les questions qu'ils comptent poser au cours de l'assemblée. La loi du 20 décembre 2010 formalise cette pratique, en modifiant l'article 540 C.soc.: “les administrateurs répondent aux questions qui leur sont posées par les actionnaires, en assemblée ou par écrit [43], au sujet de leur rapport ou des points portés à l'ordre du jour”. Il étend le même principe aux questions posées aux commissaires [44].

            67.Selon la loi du 20 décembre 2010, qui introduit à cet effet un nouvel alinéa dans l'article 540 C.soc., “[l]es actionnaires peuvent, dès la publication de la convocation, poser par écrit les questions” au sujet des rapports des administrateurs et commissaires ou des points portés à l'ordre du jour. Il y sera répondu “au cours de l'assemblée”, “pour autant que ces actionnaires aient satisfait aux formalités d'admission visées à l'article 536” C.soc. “Ces questions peuvent être adressées à la société par voie électronique à l'adresse indiquée dans la convocation à l'assemblée générale. Les statuts fixent le délai dans lequel ces questions écrites doivent parvenir à la société sauf dans les sociétés [cotées] où les questions écrites doivent parvenir à la société au plus tard le sixième jour qui précède la date de l'assemblée”. “Les administrateurs et les commissaires peuvent fournir une réponse globale à plusieurs questions ayant le même objet.”

            68.C'est aux administrateurs et commissaires qu'il appartient, sous leur propre responsabilité et sous réserve d'un éventuel contrôle judiciaire, de déterminer s'il existe un motif légitime de refuser de répondre à une question posée [45]. Ils peuvent certainement refuser de donner quelque information que ce soit sur un point qui ne figure pas à l'ordre du jour, sauf, bien entendu, s'il n'y figure pas alors qu'il aurait dû légalement s'y trouver [46]. Les administrateurs - et la loi du 20 décembre 2010 étend cette règle aux commissaires - peuvent par ailleurs s'abstenir de répondre, totalement ou partiellement, à la question posée “dans la mesure où la communication de données ou de faits” serait “de nature à porter préjudice aux intérêts commerciaux de la société ou aux engagements de confidentialité souscrits par la société ou ses administrateurs” (art. 540, 1er al. C.soc. modifié) [47], ce qu'il leur appartient d'apprécier sous leur propre responsabilité.

            IX. Résultat des votes

            69.A l'heure actuelle, aucune disposition de droit belge n'indique de manière expresse comment il convient de noter le résultat des votes dans le procès-verbal de l'assemblée générale. Les règles à ce propos peuvent néanmoins être trouvées dans les règles ordinaires des assemblées délibérantes, applicables aux assemblées d'actionnaires en vertu de l'article 63 C.soc. Le procès-verbal de la réunion doit mentionner le mode de scrutin utilisé. Il ne doit mentionner que le résultat du vote, c'est-à-dire le nombre de participants au vote, le nombre de votes positifs, celui des votes négatifs et celui des abstentions. Il ne doit pas, légalement, indiquer l'identité de chacun des votants, ni le sens de leurs votes respectifs, mais rien n'empêche de le faire puisque le vote est public, à moins bien entendu qu'il ne s'agisse d'un scrutin secret. Ces mentions détaillées peuvent s'avérer utiles dans certains cas. Ainsi, les actionnaires qui votent contre la décharge des administrateurs peuvent avoir intérêt à faire acter au procès-verbal le sens de leur vote, pour se ménager la preuve qu'ils remplissent les conditions requises pour mettre en mouvement, le cas échéant, l'action minoritaire en responsabilité (art. 562, 3ème al. C.soc.). Ce droit ne peut leur être refusé, même s'il s'agit d'un scrutin secret.

            70.La loi du 20 décembre 2010 introduit ces principes dans l'article 546 C.soc.: “Les procès-verbaux des assemblées générales des sociétés [cotées] mentionnent, pour chaque décision, le nombre d'actions pour lesquelles des votes ont été valablement exprimés, la proportion du capital social représentée par ces votes, le nombre total de votes valablement exprimés, le nombre de votes exprimés pour et contre chaque décision et, le cas échéant, le nombre d'abstentions”. La loi ajoute (dans l'art. 546 C.soc.) “[c]es informations sont rendues publiques par ces sociétés sur leur site Internet dans les quinze jours qui suivent l'assemblée générale”.

            Conclusion

            71.La loi du 20 décembre 2010 vise, pour l'essentiel, à aligner le droit belge sur le prescrit de la directive 2007/36/CE. Ce nouveau dispositif devrait en principe, notamment par le biais de la procédure d'enregistrement, faciliter l'accès aux assemblées. Les actionnaires devraient également pouvoir prendre une part plus active à celles-ci, puisqu'il leur sera notamment possible de compléter l'ordre du jour d'une assemblée convoquée, de poser des questions par écrit et de participer à l'assemblée à distance. Il reste à voir si les actionnaires, et particulièrement ceux établis à l'étranger dont la directive et la loi entendent favoriser et encourager la participation, feront effectivement usage des dispositions nouvelles. Il faut également souhaiter que le surcroît non négligeable de travail préparatoire à chaque assemblée qui résultera de cette réforme, et les frais supplémentaires que ce travail engendrera, produisent effectivement l'effet escompté par le législateur européen.

            Annexe - Chronologie d'une assemblée générale (loi du 20 décembre 2010)
            [1] Avocat au barreau de Bruxelles, Linklaters LLP.

            Cet article est une version condensée d'une étude publiée dans Le point sur le droit des sociétés (Séminaire du 26 mai 2011 de la Faculté de Droit de Liège, Commission Royale Droit et Vie des Affaires, Bruxelles, Bruylant, 2011). La rédaction de cette version condensée a été clôturée le 12 septembre 2011.
            [2] Loi du 20 décembre 2010 concernant l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées, MB 18 avril 2011, p. 24.068.
            [3] Sont à ce jour reconnus en qualité de marché réglementé belge: le marché 'Euronext Brussels' et le marché des instruments dérivés d'Euronext Brussels (arrêté ministériel du 11 avril 2003 fixant la liste des marchés réglementés belges, modifié pour la dernière fois par l'arrêté ministériel du 30 mai 2008).
            [4] Directive 2007/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 concernant l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées, JO L 184 du 14 juillet 2007, p. 17. Ces règles s'imposent aux Etats membres, qui étaient tenus de les transposer dans leur droit national pour le 3 août 2009 au plus tard.
            [5] COM (2003) 284 du 21 mai 2003.
            [6] Le texte de l'art. 38 qui fixe cette date d'entrée en vigueur est celui qui résulte de la loi de 'réparation' du 5 avril 2011 modifiant la loi du 20 décembre 2010 (MB 18 avril 2011, p. 24.081) et qui remplace l'art. 38 original.
            [7] Voy. notes 18, 22 et 23.
            [8] “La convocation peut se limiter à indiquer ces délais et adresse électronique, à condition de mentionner que des informations plus détaillées sur ces droits sont disponibles sur le site Internet de la société.” (art. 533bis, § 1er, 3°, a) in fine C.soc.).
            [9] Si la société recourt à la procédure facultative d'enregistrement actuellement prévue à l'art. 536, 3ème al. C.soc., le délai est de “vingt-quatre jours au moins avant la date d'enregistrement” pour la première assemblée et, en cas de carence, de “dix-sept jours au moins avant la date d'enregistrement” pour la seconde assemblée.
            [10] La loi nouvelle adapte également, pour les sociétés cotées, la date ultime à laquelle la société est tenue de faire parvenir au commissaire les documents qui lui sont nécessaires pour établir son rapport à propos des comptes annuels: le délai d'un mois applicable aux sociétés ordinaires est porté, pour les sociétés cotées, à “quarante-cinq jours avant la date prévue pour l'assemblée générale” (art. 143 C.soc.).
            [11] Au lieu de vingt-quatre jours actuellement (voy. n° 7).
            [12] Voy. également l'art. 35 de l'arrêté royal du 14 novembre 2007 relatif aux obligations des émetteurs d'instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé et la circulaire FMI/2007-02 de la FSMA relative aux obligations incombant aux émetteurs cotés sur un marché réglementé.
            [13] Les mots 'dans le délai de convocation' entretiennent une ambiguïté. Il eût mieux valu écrire “seront communiquées trente jours avant l'assemblée ou, s'il s'agit d'une seconde assemblée, dix-sept jours avant celle-ci”.
            [14] Directive 2007/36/CE art. 5, § 4.
            [15] Cette obligation résulte de l'art. 41 de l'arrêté royal du 14 novembre 2007 relatif aux obligations des émetteurs d'instruments financiers admis à la négociation sur un marché réglementé.
            [16] Si l'ordre du jour est ultérieurement complété à la suite de l'exercice par certains actionnaires de leur droit de requérir l'inscription de sujets à traiter et de déposer des propositions de décision (voy. n° 20), la société est tenue de mettre à disposition de ses actionnaires sur son site Internet, simultanément à la publication de l'ordre du jour complété, “les formulaires qui peuvent être utilisés pour voter par procuration et, le cas échéant, pour voter par correspondance, complétés des sujets à traiter additionnels et des propositions de décision y afférentes qui auraient été portées à l'ordre du jour, et/ou des propositions de décision qui seules auraient été formulées” (art. 533ter, § 3, 2ème al. C.soc.).
            [17] Voy. note 15.
            [18] Voy. Doc.parl. Ch. repr., sess. 2010-11, DOC 53 0421/001, pp. 18-19.
            [19] Les mots “soit par une attestation établie par un intermédiaire financier certifiant le nombre d'actions au porteur correspondantes qui lui ont été produites,” sont abrogés avec effet au 1er janvier 2014 (art. 34 de la loi du 20 décembre 2010) pour rendre le texte conforme à la disparition définitive des actions au porteur à cette date (voy. notes 21, 23 et 24).
            [20] Directive 2007/36/CE, art. 7, § 1.
            [21] Art. 34 de la loi du 20 décembre 2010 et art. 38 de la même loi, modifié par l'art. 2 de la loi du 5 avril 2011. Cette suppression est nécessaire pour rendre le texte conforme à la disparition définitive des actions au porteur à cette date (voy. notes 19, 23 et 24).
            [22] “Chaque Etat membre veille à ce qu'une seule date d'enregistrement s'applique à toutes les sociétés.” (Directive 2007/36/CE, art. 7, § 3).
            [23] Les mots “soit par la production des actions au porteur à un intermédiaire financier” sont abrogés avec effet au 1er janvier 2014 (art. 35 de la loi du 20 décembre 2010) pour rendre le texte conforme à la disparition définitive des actions au porteur à cette date (voy. notes 19, 21 et 24). Le dépôt d'actions au porteur sous forme physique auprès d'une banque, dès lors qu'il intervient après le 1er janvier 2008, entraîne automatiquement leur conversion irrévocable en actions dématérialisées et leur inscription sur un compte-titres auprès de la banque, conformément à l'art. 5 de la loi du 14 décembre 2005 portant suppression des titres au porteur.
            [24] Les mots “par l'intermédiaire financier certifiant le nombre d'actions au porteur produites à la date d'enregistrement, ou” sont abrogés avec effet au 1er janvier 2014 (art. 35 de la loi du 20 décembre 2010) pour rendre le texte conforme à la disparition définitive des actions au porteur à cette date (voy. notes 19, 21 et 23).
            [25] Doc.parl. Ch. repr., sess. 2010-11, DOC 53 0421/001, p. 25.
            [26] Voy. n° 34.
            [27] Voy. note 25.
            [28] Directive 2007/36/CE, art. 8, § 1.
            [29] “Cette approche ne porte pas atteinte au droit des actionnaires de participer aux délibérations puisqu'il leur est toujours loisible de participer à la réunion physique de l'assemblée générale. La participation à distance ne se substitue pas à la tenue d'une réunion physique de l'assemblée générale. L'actionnaire qui opte pour ce mode de participation par voie électronique que la société met, par hypothèse, à sa disposition, doit être conscient qu'il renonce de ce fait à prendre la parole en cours d'assemblée.” (Doc.parl. Ch. repr., sess. 2010-11, DOC 53 0421/001, p. 33).
            [30] Ainsi l'obligation pour l'actionnaire de recourir à certains logiciels ou à l'utilisation de la signature électronique (voy. Doc.parl. Ch. repr., sess. 2010-11, DOC 53 0421/001, p. 34).
            [31] Pour les règles applicables, en cas de modification de l'ordre du jour, aux procurations utilisées pour un vote par mandataire, voy. n° 59.
            [32] Directive 2007/36/CE, art. 10, § 1.
            [33] Cass. 13 janvier 1938, Rev.prat.soc. 1938, p. 81. Voy. également Comm. Liège 20 décembre 1937, Rev.prat.soc. 1938, p. 152; Liège 8 décembre 1938, Rev.prat.soc. 1939, p. 102.
            [34] L. Fredericq, Traité de droit commercial belge, T. V, Gand, Fecheyr, 1950, p. 695, n° 490; Ch. Resteau, A. Benoît-Moury et A. Grégoire, Traité des sociétés anonymes, T. II, Bruxelles, Swinnen, 1982, p. 385, n° 1187bis; J. Van Ryn, Principes de droit commercial, T. I., 1954, p. 434, n° 689.
            [35] Cass. 13 avril 1989, RCJB 1991, p. 205 et note J.-M. Nelissen Grade, “De la validité et de l'exécution de la convention de vote dans les sociétés commerciales”, TRV 1989, p. 321 et note M. Wyckaert, “De geldigheid van stemovereenkomsten betreffende de besluitvorming ter algemene vergadering - De ad nutum herroepbaarheid ven het bestuursmandaat”, JT 1990, p. 751 et note D. Michiels.
            [36] Le mandat est le contrat par lequel “une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom” (art. 1984 du Code civil).
            [37] La procuration, laquelle est par définition un écrit, est “le pouvoir donné, en exécution du contrat, au mandataire, afin de lui permettre de justifier de sa qualité et de traiter avec eux en cette qualité” (H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, T. V, Bruxelles, Bruylant, 1975, p. 377, n° 372).
            [38] La désignation 'par un formulaire électronique' recouvre vraisemblablement l'hypothèse de l'octroi d'un mandat à un mandataire professionnel par l'intermédiaire d'un site Internet maintenu par celui-ci à cet effet.
            [39] Ce n'est que dans l'hypothèse où le mandataire fait offre d'accepter un mandat que sa désignation donnera naissance au contrat. Ce sera notamment le cas lorsque le mandataire est un professionnel qui offre ses services: sa désignation emporte acceptation de cette offre et la naissance du contrat.
            [40] Pour les règles applicables, en cas de modification de l'ordre du jour, aux formulaires utilisés pour un vote à distance avant l'assemblée, voy. n° 48.
            [41] Directive 2007/36/CE, art. 10, § 3, 2ème al.
            [42] Directive 2007/36/CE, art. 10, § 3, 2ème al.
            [43] C'est nous qui soulignons l'ajout.
            [44] On ne confondra pas cette démarche avec celle qui consiste à poser des questions à la société en dehors du contexte de la préparation de l'assemblée: la société n'est pas tenue d'y répondre, verbalement ou par écrit (voy. Comm. Ieper 17 mai 1999, TRV 1999, p. 534) et la directive ne modifie pas ce principe.
            [45] Doc.parl. Ch. repr., sess. 1981-82, n° 210/9, pp. 46 et 51; Doc. parl. Sénat 1982-83, n° 390/2, p. 30; A. Van Oevelen, “De rol en de civielrechtelijke aansprakelijkheid van de commissaris-revisor”, XXIste Postuniversitaire Cyclus Willy Delva 1994-1995, Antwerpen, UIA, 10 février 1995, n° 26.
            [46] J.-L. Duplat, “Devoirs, obligations et responsabilité des dirigeants de sociétés en matière d'informations à donner aux actionnaires”, Recyclage en droit, 1988, p. 12.
            [47] Le texte actuel de l'art. 540, 1er al. C.soc. dispose que “dans la mesure où la communication de données ou de faits” serait “de nature à porter gravement préjudice à la société, aux actionnaires ou au personnel de la société”.