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Actualité : Cour de justice Benelux, 23/12/2010, R.D.C.-T.B.H., 2011/3, p. 263

Cour de justice Benelux 23 décembre 2010

MARQUE
Marque Benelux - Acquisition du droit à la marque Benelux - Obligation d'enregistrer

BVBA D. Engels / GmbH Daewoo Electronics Europe

Aff.: n° A 2009/3/14

Dans son arrêt rendu le 23 décembre 2010, la Cour de justice Benelux avait à se prononcer sur une question importante ayant donné lieu à de nombreuses décisions en sens divers [1]. Un signe servant à distinguer les produits ou les services d'une entreprise mais qui ne fait pas l'objet d'un enregistrement à titre de marque peut-il être protégé par le biais des dispositions en matière de concurrence déloyale, notamment celles qui répriment les actes créant la confusion avec les produits ou l'activité d'un concurrent?

D'une part, l'article 2.19. de la Convention Benelux en matière de propriété intellectuelle dispose en effet qu'“à l'exception du titulaire d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6bis de la Convention d'Union de Paris, nul ne peut, quelle que soit la nature de l'action introduite, revendiquer en justice un signe considéré comme marque, au sens de l'article 2.1, 1er et 2ème alinéas, sauf s'il peut faire valoir l'enregistrement de la marque qu'il a déposée”. D'autre part, l'article 10bis de la Convention d'Union de Paris prévoit pourtant que “les pays de l'Union sont tenus d'assurer aux ressortissants de l'Union une protection effective contre la concurrence déloyale”. Or, parmi les actes de concurrence déloyale cités à l'article 10bis figurent les “faits quelconques de nature à créer une confusion par n'importe quel moyen avec l'établissement, les produits ou l'activité industrielle ou commerciale d'un concurrent”.

C'est sur cette relation entre le Traité d'Union de Paris et la CBPI que la Cour de justice Benelux avait à se prononcer dans son arrêt. Se penchant sur les travaux préparatoires à l'adoption de la Convention d'Union de Paris telle que révisée à La Haye en 1925, la Cour rappelle que les actes constitutifs d'une contrefaçon ne sont pas nécessairement régis par l'article 10 de la Convention d'Union de Paris, d'autant que la délégation belge avait précisément à l'époque émis des réserves à cet égard. La Cour en déduit que l'article 10bis de la Convention ne fait pas obstacle à l'application de l'article 2.19. CBPI. Dès lors, selon la Cour, “celui qui invoque l'article 10bis de la Convention d'Union pour obtenir la protection d'un signe pouvant être considéré comme une marque doit pouvoir se prévaloir d'un enregistrement de la marque qu'il a déposée”.

La Cour rappelle enfin utilement l'intérêt que conservent les dispositions en matière de concurrence déloyale interdisant les actes créant la confusion et juge à cet égard que “les dispositions concernées de la CBPI n'excluent toutefois pas que le titulaire d'une marque qui n'est pas enregistrée ou sur laquelle le droit est éteint en vertu du droit uniforme Benelux puisse invoquer la protection du droit commun contre des actes de concurrence déloyale au sens de l'article 10bis, alinéa 3, 1°, de la Convention d'Union, si l'usage de cette marque ou d'un signe ressemblant fait partie des agissements créant la confusion”.

[1] Cf. à cet égard notamment E. De Gryse, “Verpakking van producten: merk, reclame of beide?”, Jaarboek Handelspraktijken 2003, p. 134; V. Wellens, “Bescherming van een verpakking via de wet op de handelspraktijken en buiten de Benelux Merkenwet om: Cassatie brengt geen duidelijkheid”, RDC 2006, p. 221.