Cour d'appel de Liège 2 avril 2009
SOCIETES
SPRL - Capital - Maintien du capital - Prêt en vue de l'acquisition de parts (art. 329 C.soc.)
L'article 329 C.soc., interdisant à une société privée à responsabilité limitée, entre autres, d'accorder des prêts en vue de l'acquisition de ses parts par un tiers, est une interdiction d'ordre public.
Cette disposition vise de manière générale les avances de fonds, sans distinguer selon l'origine desdits fonds, apport des associés ou fonds provenant d'une ouverture de crédit consenti à la société.
Cette disposition ne vise par ailleurs que les avances de fonds consenties en vue de l'acquisition de ses actions de sorte qu'il convient toujours d'analyser la finalité de l'opération. La chronologie n'est pas déterminante de sorte que tombe sous l'interdiction le soutien financier qui, lors du financement du prix d'achat, est consenti au cessionnaire par la société cédée, après transfert des actions, lorsque ce soutien a dès le départ été conçu comme l'un des éléments de la cession. Des indications que le soutien était dès le départ conçu peuvent ressortir du défaut d'analyse du crédit par la banque pour un prêt consenti à des personnes physiques sans la moindre garantie, de la longue durée de l'ouverture de crédit pour laquelle la banque renonce, sans aucune explication, à l'indemnité de remploi habituelle en cas de remboursement anticipé du crédit, du défaut de garanties pour le prêt accordé au cessionnaire contrairement aux différentes garanties imposées à la société cédée et de la contradiction que contient la documentation du crédit par rapport aux buts déclarés dudit crédit (d'une part au profit des fonds de roulement et d'autre part pour servir au remboursement d'un compte courant).
La nullité touche aussi bien le prêt consenti à la société que les actes qui y ont concouru, comme les garanties octroyées, et opère ex tunc.
Les parties doivent dès lors être remises en leur pristin état. Le juge a la faculté de modérer ce principe, soit parce qu'il considère que le rôle préventif de la sanction de nullité absolue serait compromise, soit parce qu'il estime que l'ordre social exige que l'un des cocontractants soit plus sévèrement frappé. Etant donné qu'un professionnel du crédit doit porter une attention particulière à la prohibition de fournir un soutien financier dans le cadre du financement d'opérations de rachat de parts, le juge décide de rejeter la créance de ce professionnel du crédit.
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VENNOOTSCHAPPEN
BVBA - Kapitaal - Instandhouding van het maatschappelijk kapitaal - Financiering van het verkrijgen van aandelen (art. 329 W.Venn.)
Artikel 329 W.Venn., dat onder meer bepaalt dat een besloten vennootschap met beperkte aansprakelijkheid geen leningen mag toestaan met het oog op de verkrijging van haar aandelen door een derde, is een bepaling van openbare orde.
Deze bepaling viseert in het algemeen alle voorschotten van fondsen, zonder onderscheid naar de oorsprong van die fondsen, welke zowel kunnen voortvloeien uit inbrengen door vennoten als uit een krediet toegestaan aan de vennootschap.
Deze bepaling verbiedt verder enkel voorschotten voor zover ze met het oog op de verkrijging van haar aandelen worden toegestaan zodat steeds de finaliteit van de betrokken verrichting geanalyseerd dient te worden. De chronologie is daarbij niet doorslaggevend zodat de financiële bijstand die na de overdracht van de aandelen door de overgenomen vennootschap aan de overnemer wordt verstrekt, onder het verbod valt indien deze steun van in het begin geconcipieerd was als een van de elementen van de overname. Aanwijzingen dat steun van in het begin geconcipieerd was kunnen blijken uit het ontbreken van een kredietwaardigheidsanalyse door de bank voor een lening aan natuurlijke personen zonder de minste zekerheid, uit de lange duurtijd van een lening waarbij de bank zonder duidelijke reden verzaakt aan de gebruikelijke wederbeleggingsvergoeding bij vervroegde terugbetaling, uit het ontbreken van zekerheden voor een lening aan de verkrijger in tegenstelling tot het opleggen van een reeks zekerheden aan de doelvennootschap, wanneer de kredietdocumentatie tegenstrijdigheden bevat inzake de doeleinden van het krediet (enerzijds ten behoeve van het werkkapitaal en anderzijds ten behoeve van een terugbetaling van een rekening-courant).
De nietigheid betreft zowel de lening toegestaan door de vennootschap als rechtshandelingen die ermee samenvallen, zoals de toegekende zekerheden, en heeft uitwerking ex tunc.
De partijen dienen derhalve in hun oorspronkelijke toestand hersteld te worden. De rechter kan dit principe matigen hetzij omdat hij oordeelt dat anders de preventieve rol van de voorziene sanctie van absolute nietigheid in het gedrang zou komen, hetzij omdat hij meent dat de sociale orde vereist dat een bepaalde partij zwaarder moet worden getroffen. Aangezien een professioneel kredietverstrekker bijzondere aandacht moet hebben voor het verbod op financiële bijstand in het kader van de financiering van de overdracht van aandelen, beslist de rechter de schuldvordering van deze professionele kredietverstrekker niet toe te laten.
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BKCP Wallonie SCRL / D. Grignard et A. Tihon
Siég.: R. de Francquen (président), X. Ghuysen et M.-Cl. Ernotte (conseillers) |
Pl.: Mes Fr. Demol et A. Tihon |
Par requête du 31 mai 2007, la SCRL Banque de Crédit Professionnel interjette appel des jugements du tribunal de commerce de Liège des 12 octobre 2005, 7 juin 2006 et 18 avril 2007.
Le 23 janvier 2009, la SCRL BKCP Wallonie dépose un acte de reprise d'instance dès lors qu'elle vient aux droits de la SCRL Banque de Crédit Professionnel suite à une fusion.
Les faits de la cause ont été exposés dans le jugement du 12 octobre 2005.
Dans le courant de l'année 2000, la SPRL Bima qui développe depuis les années '60 une activité dans le domaine de la vente de pièces de rechange pour appareils électroménagers, connaît un changement d'actionnariat: les consorts Bidelot-Cornelis qui détenaient les 250 parts représentant le capital de la société, cèdent le 8 mai 2000; pour le prix de 32.000.250 FB (793.265,48 EUR), la totalité de leur participation à raison de 2 parts à Simon Paradowski et son épouse Anne-Marie Etienne, et de 248 parts à la SA Regina +, société constituée à cette fin par ces derniers le 16 mars 2000.
Le financement de l'opération se réalise comme suit: les consorts Paradowski-Etienne libèrent leur souscription au capital de la SA Regina + qui représente 3.750.000 FB (92.960,07 EUR) grâce principalement à une ouverture de crédit de 2.750.011 FB (68.171 EUR) consentie par Fortis Banque.
Le 23 mars 2000, la SCRL Banque de Crédit Professionnel consent un prêt de 17.500.000 FB (433.813,66 EUR) à la SA Regina + tandis que, agissant au nom et pour le compte du Fonds de Participation; elle lui octroie également un crédit de 7.500.000 FB (185.920,14 EUR), soit un total de 25.000.000 FB (619.733,81 EUR).
Le même jour, la SCRL Banque de Crédit Professionnel accorde aux consorts Paradowski-Etienne une ouverture de crédit de 4.000.000 FB (99.157,41 EUR) dont le but mentionné est “avance associés”, ce montant étant reversé au titre d'avance par les consorts Paradowski-Etienne à concurrence de 3.985.388 FB (98.795,19 EUR) à la société Regina +.
Par ailleurs, le 20 juin 2000, la SCRL Banque de Crédit Professionnel consent à la SPRL Bima une ouverture de crédit de 4.000.000 FB (99.157,41 EUR), que celle-ci avance elle-même aux consorts Paradowski-Etienne pour leur permettre de rembourser le prêt du même montant consenti par cette même banque en mars 2000. Les consorts Paradowski-Etienne deviennent donc débiteurs à l'égard de la SPRL Bima.
La SCRL Banque de Crédit Professionnel octroie encore le 12 mars 2001 à la SPRL Bima une ouverture de crédit de 15.500.000 FB (384.234,96 EUR) en vue de l'achat d'un immeuble.
Le 6 décembre 2002, les consorts Paradowski-Etienne et la SA Regina + revendent leur participation dans la SPRL Bima pour le prix de 1 EUR.
La SPRL Bima est déclarée en faillite par jugement du tribunal de commerce de Liège du 3 décembre 2003, Maîtres D. Grignard et A. Tihon étant désignés comme curateurs. La SA Regina + est également déclarée en faillite à cette même date.
La SCRL Banque de Crédit Professionnel déclare à la faillite de la SPRL Bima des créances privilégiées de 373.503,06 EUR et de 88.160,77 EUR.
Dans leur jugement du 7 juin 2006, les premiers juges ont admis la créance de la SCRL Banque de Crédit Professionnel au passif privilégié sur base de l'article 20, 3° de la loi hypothécaire pour 373.503,06 EUR tandis que dans leur jugement du 18 avril 2007, ils ont prononcé la nullité de la convention de crédit du 20 juin 2000, les parties étant invitées à conclure sur leurs restitutions réciproques.
Discussion |
La curatelle considère que le paiement du prix d'acquisition des parts de la société Bima “n'a été possible que grâce à l'octroi à celle-ci par le Crédit Professionnel d'un crédit de 4.000.000 FB dont le produit a été avancé à la famille Paradowski, laquelle, à son tour l'a avancé à la SA Regina +” (conclusions, p. 4). Selon la curatelle, puisque c'est en réalité la société Bima qui a supporté, à concurrence de cette somme de 4.000.000 FB, le poids du rachat de ses parts, il y a violation de l'article 329 du Code des sociétés, par ailleurs sanctionné pénalement.
Dans sa version applicable au moment des faits, la modification introduite par arrêté royal du 8 octobre 2008 entrant en vigueur le 1er janvier 2009, l'article 329 du Code des sociétés interdit à une SPRL d'“avancer des fonds, (...) (d')accorder des prêts, (...) (de) donner des sûretés en vue de l'acquisition de ses parts par un tiers (...)”. Cette disposition vise de manière générale les avances de fonds, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon l'origine desdits fonds, apport des associés ou fonds provenant eux-mêmes d'une ouverture de crédit consenti à la société, une telle distinction étant pour le surplus la plupart du temps impossible à établir en l'absence d'individualisation des fonds.
Si cette disposition d'origine européenne “se rapporte à la conservation du capital”, elle ne se réduit pas à la protection du seul capital social car “à l'égard des tiers, le capital indique le minimum d'actif net en dessous duquel la société s'interdit de faire des distributions au profit de ses actionnaires” (M. Van Der Haegen et C. Verbraeken, “Les sociétés commerciales. Commentaires des lois des 5 décembre 1984, 15 juillet 1985 et 25 juillet 1985”, JT 1985, p. 558, n° 52). Elle “interdit que la charge financière (de l'acquisition de ses parts) ne soit 'in fine' supportée par la société elle-même” (Ph. Lambrecht, “Les modifications de capital dans les SA, SPRL et SCRL”, JDSC 2006, p. 178) et vise donc à éviter que des moyens destinés à la réalisation de son objet social ne soient détournés de leur finalité.
Il est donc irrelevant de soutenir que “à aucun moment la SPRL Bima n'a avancé des fonds ni accordé un prêt à l'aide de ses deniers… mais bien à l'aide de deniers prêtés par (l'appelante)” (ses conclusions, p. 16). Manque également de pertinence la considération qu'en termes comptables, la situation de la SPRL Bima demeurait inchangée, la dette résultant du prêt à l'égard de l'appelante étant contrebalancée par une créance envers les associés.
Certes, l'article 329 du Code des sociétés énumère limitativement les transactions prohibées, lesquelles sont d'interprétation stricte (Ph. Lambrecht, o.c., p. 178) et ne vise à cet égard que les avances de fonds consenties en vue de l'acquisition de ses actions de sorte qu'“il convient d'analyser la finalité de l'opération. En effet, les mots 'en vue de' impliquent un élément intentionnel dans le chef de la société (...), il faut qu'elle ait eu l'intention de garantir l'opération de manière à faciliter l'acquisition de ses propres actions” (J.-P. Buyle et M. Delierneux, obs. sous Comm. Bruxelles 3 avril 2001, RDC 2003, pp. 28-29). Mais la chronologie n'est pas déterminante: “tombent sous l'interdiction précitée les actes qui, lors du (re)financement du prix d'achat, sont consentis au cessionnaire par la société cédée, après le transfert des actions, lorsque ce soutien a dès le départ été conçu comme l'un des éléments de la cession” (traduction de M. Verplancke, Art. 629 Code des sociétés, jura, I.B.; voir dans le même sens J.-P. Buyle et M. Delierneux, o.c., p. 29).
Par ailleurs, le financement indirect, c'est-à-dire “l'interposition d'une autre personne (juridique) pour avancer des moyens à des tiers pour qu'ils puissent réaliser l'acquisition d'actions, est de même (interdit)” (M. Verplancke, o.c., I.B.).
En l'espèce, l'opération incriminée, à savoir le prêt consenti à la société Bima est postérieur à la convention d'acquisition des actions du 8 mai 2000 par les consorts Paradowski-Etienne et la société Regina +. Par ailleurs, elle fait intervenir les consorts Paradowski-Etienne à un double titre: d'une part, l'ouverture de crédit qui leur est consentie personnellement par l'appelante le 20 mars 2000 a pour but indirect de financer l'acquisition par Regina + des parts de la société Bima. Regina + ne disposait en effet que de crédits directs de l'appelante à concurrence de 25.000.000 FB (619.733,81 EUR) et des apports des fondateurs lors de sa constitution du 16 mars 2000 pour 3.750.000 FB (92.960,07 EUR), soit un total de 28.750.000 FB (712.693,88 EUR) alors que, selon la convention de cession, elle était redevable de 31.744.248 FB (32.000.250 - 256.002 pour les deux parts non acquises) (786.919,35 EUR). D'autre part, le prêt consenti par la société Bima, au moyen des fonds eux-mêmes empruntés auprès de l'appelante, l'est au profit, non directement de la société Regina + mais des consorts Paradowski-Etienne, ce qui leur permet de rembourser le prêt octroyé trois mois plus tôt par l'appelante.
Le résultat économique de cette opération est bien de faire supporter par la société Bima, à concurrence de la somme de 4.000.000 FB, le poids de l'acquisition de ses parts puisqu'elle emprunte, non pour la réalisation de son objet social, mais pour immédiatement en reverser le montant aux consorts Paradowski-Etienne, intervenus pour financer Regina + dans l'opération d'acquisition des parts, afin de leur permettre d'être dégagés à l'égard de l'appelante.
La question se pose de savoir si l'opération globale a été voulue comme telle par toutes les parties intervenantes dont l'appelante, et si en particulier, celle-ci a prêté aux consorts Paradowski-Etienne le 20 mars 2000 tout en étant certaine à ce moment-là que trois mois plus tard un prêt consenti à la société Bima aurait pour objet d'annuler l'opération à l'égard des consorts Paradowski-Etienne.
Les premiers juges ont à juste titre répondu affirmativement à cette question.
La manière dont le prêt a été octroyé aux consorts Paradowski-Etienne le 20 mars 2000 permet d'établir que, nonobstant les termes de ce crédit, il dissimulait une autre réalité. Ce crédit, d'un montant substantiel de 4.000.000 FB (99.157,41 EUR), est consenti à des personnes physiques, sans la moindre garantie, et alors que l'appelante, dûment invitée par les premiers juges, reste en défaut de produire un quelconque “document ayant servi de base à l'analyse des crédits consentis (...)” (jugement du 7 juin 2006), ce qui est tout à fait inhabituel. L'appelante prétend qu'elle aurait à tout le moins exigé un effort personnel des consorts Paradowski-Etienne à concurrence de 3.750.000 FB pour la constitution de Regina + et que cela conditionnait l'octroi du prêt litigieux mais cela ne résulte pas des termes dudit prêt, par ailleurs postérieur à la constitution de Regina +, aucune vérification n'ayant été opérée par l'appelante quant aux moyens mis en oeuvre par les consorts Paradowski-Etienne pour constituer cette société.
Par ailleurs, alors que l'ouverture de crédit a une durée de dix ans, l'appelante prévoit, sans aucune explication, que “l'indemnité de remploi ne sera pas d'application en cas de remboursement anticipé total ou partiel du crédit”.
Le caractère fictif de l'opération du 23 mars 2000 apparaît d'autant plus lorsque celle-ci est mise en relation avec le prêt consenti à Bima le 20 juin 2000: l'appelante reconnaît “qu'elle ne disposait pas des documents de base spécifiques ayant servi à l'analyse du crédit mais d'un rapport Graydon” (conclusions, p. 10) alors que celui-ci date du 12 janvier 2000, soit antérieurement à l'opération de rachat, ce qui accrédite le fait que l'opération était envisagée globalement.
Alors que le prêt aux consorts Paradowski-Etienne était accordé sans aucune garantie, l'ouverture de crédit du même montant accordée à Bima, sans abandon de l'indemnité de remploi, est assortie quant à elle d'une mise en gage en premier rang des différents fonds de commerce exploités par la société ainsi que par la caution solidaire et indivisible des consorts Paradowski-Etienne.
Ce prêt contient enfin une contradiction flagrante entre les buts déclarés: le “but du crédit” est “fonds de roulement” mais sous la rubrique “mise à disposition des fonds”, il est en revanche stipulé que “les fonds provenant de la présente avance devront servir au remboursement du compte n° 127-5126964-78 ouvert au nom de Monsieur et Madame Simon Paradowski-Etienne”, soit, ce qui n'est pas contesté, le compte correspondant à l'ouverture de crédit du 23 mars 2000. L'intention réelle de l'appelante est donc bien que les fonds prêtés servent au remboursement du prêt consenti aux personnes physiques, ce qui ne peut s'expliquer, en l'absence de toute autre justification avancée, que par le fait que l'opération avait été voulue comme telle dès le départ.
Cette situation est d'autant plus problématique dans le chef de l'appelante que, à l'égard des tiers, elle s'est prévalu de l'objectif de “fonds de roulement” pour obtenir la garantie de la SGRW dans le cadre de l'octroi, en mars 2001, d'un crédit complémentaire à Bima pour acquérir un immeuble. En effet, dans la “demande de garantie”, il est à plusieurs reprises fait référence à ce “fonds de roulement” dont 2.000.0000 FB en crédit de caisse (rapport, pp. 7 et 8).
C'est dès lors à juste titre que les premiers juges ont considéré que l'appelante “a suivi l'opération de rachat des parts de Bima dès l'origine” et que dans ce cadre, il a été convenu que ce serait en réalité Bima qui supporterait le poids du rachat de ses parts à concurrence de 4.000.000 FB, le prêt octroyé à cette dernière ayant pour seul fondement le désintéressement des consorts Paradowski-Etienne qui devait intervenir, par le biais de Regina +, dans l'opération de rachat.
Si l'appelante fait grand cas de ce que l'avance consentie par Bima aux consorts Paradowski-Etienne aurait été remboursée en 2002, cette circonstance est irrelevante.
L'interdiction prévue par l'article 329 du Code des sociétés, sanctionnée pénalement, est d'ordre public (M. Verplancke, o.c., III.A.), aucune confirmation n'étant possible et la nullité touche l'acte de prêt par la société mais également les actes qui y ont concouru: “en ce qui concerne l'octroi d'un crédit pour une opération contraire à l'article 629 (329), cela signifie soit que la garantie est perdue, soit que le crédit est annulé (...)” (M. Verplancke, o.c., III.A.).
Surabondamment, si, selon la balance des comptes généraux, le compte courant a été soldé au cours de l'année 2002, soit vraisemblablement juste avant la cession des parts du 6 décembre 2002, la cour ne peut vérifier, à défaut de production de l'historique dudit compte, la manière dont ce compte a été soldé et si cela a donné lieu à un remboursement effectif au profit de Bima.
Si la nullité opère en principe ex tunc et donne lieu à la remise des choses en leur pristin état, “ces obligations nouvelles naiss(ant) du jugement qui prononce la nullité ou la rescision, et non du contrat, puisque celui-ci n'a jamais eu d'existence juridique” (H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, T. II, n° 815), ces créances de restitution ne sont pas privilégiées sur base des sûretés qui garantissaient l'exécution du contrat: “en cas d'annulation d'un contrat de prêt, la nullité se répercute sur les garanties constituées” (T. Starosselets, Effets de la nullité, CUP, La nullité des contrats, vol. 88, p. 238, n° 3).
Il reste que “le juge a la faculté de rejeter la répétition, soit parce qu'il considère que l'avantage ainsi reconnu à l'un des cocontractants compromettrait le rôle préventif de la sanction de nullité absolue prévue à l'article 1131 du Code civil, soit parce qu'il estime que l'ordre social exige que l'un des cocontractants soit plus sévèrement frappé” (Cass. 24 septembre 1976, Pas. 1976, I, p. 101). Dans cette appréciation, “le juge sera tenu d'opérer un arbitrage délicat entre des considérations de plusieurs ordres: celles relatives à l'enrichissement que procure aux parties la restitution ou le refus de celle-ci, celles relatives aux culpabilités respectives des parties et, enfin, celles relatives à l'intérêt social, l'objectif ultime étant de décourager la conclusion de conventions analogues” (T. Starosselets, o.c., p. 275, n° 32).
En l'espèce, l'objectif même de l'article 329 du Code des sociétés conduit à refuser toutes restitutions entre parties: il importe de rendre l'appelante, professionnelle du crédit, attentive au respect de cette disposition dans la mise en oeuvre de financements d'opérations de rachat de parts. L'ordre social impose de sanctionner le comportement de l'appelante qui, de manière détournée, a participé à la violation de cette disposition, son cocontractant, la société cible, ayant quant à elle supporté le risque économique de cette opération.
En conséquence, la créance de l'appelante de 88.160,77 EUR doit être rejetée.
En ce qui concerne la demande de l'appelante portant sur les intérêts de la créance de 373.503,06 EUR, admise au passif privilégié de la faillite de la société Bima par jugement précité du 7 juin 2006, jugement non frappé d'appel sur ce point, il y a lieu de faire droit à cette demande à défaut de toute contestation de la curatelle, la débition des intérêts n'étant pas suspendue à l'égard des créanciers privilégiés spéciaux (I. Verougstraete, Manuel de la faillite et du concordat, n° 524).
Par ces motifs
La cour, statuant contradictoirement
Reçoit l'appel,
Donne acte à la SCRL BKCP Wallonie de sa reprise d'instance pour la SCRL Banque de Crédit Professionnel, Confirme les jugements entrepris sous l'émendation que la créance de 373.503,06 EUR admise à titre privilégié doit être majorée des intérêts échus et à échoir depuis le 3 décembre 2003 au taux maximum des avances en compte courant plus 0,50% l'an avec pour minimum, pour chaque avance, le taux des avances de même nature augmentée de 0,50%, soit jusqu'au 31 décembre 2007 10,75% et depuis le 1er janvier 2008, 8,50%,
Vidant sa saisine, rejette la créance de l'appelante de 88.160,77 EUR outre les intérêts échus et à échoir depuis le 3 décembre 2003, du passif de la faillite de la SPRL Bima,
Délaisse les dépens d'instance et d'appel à charge de l'appelante.
(…)