Cour de justice 13 mars 2008
CONCURRENCE
Loi relative à la publicité en matière de soins dentaires - Article 81 Traité CE - Article 10 Traité CE - Les règles de concurrence ne s'opposent pas à une législation nationale - Article 43 Traité CE - Restriction justifiée - Proportionnalité
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Arrêt C-446/05 |
Résumé |
La loi belge du 15 avril 1958 relative à la publicité en matière de soins dentaires (ci-après “loi du 15 avril 1958”) interdit à chacun de faire de la publicité, directement ou indirectement, pour soigner ou faire soigner, par une personne qualifiée ou non, en Belgique ou à l'étranger, des affections, lésions ou anomalies de la bouche ou des dents. À titre d'exemple, la loi du 15 avril 1958 contient une énumération de ce qu'on peut qualifier comme étant de la publicité interdite. L'infraction à l'interdiction de publicité précitée est sanctionnée pénalement.
En l'espèce le tribunal correctionnel de Bruxelles avait poursuivi en justice l'exploitant d'un laboratoire et d'une clinique dentaires, ayant fait de la publicité dans un annuaire téléphonique. Les annonces publicitaires ne contenaient pourtant que des informations objectives comme les services offerts, l'adresse, le numéro de téléphone et les heures d'ouverture respectivement du laboratoire et de la clinique. La Cour de justice fut saisie de la question préjudicielle suivante: “L'article 81, lu conjointement avec les articles 3, point 1, g) et 10 § 2 du Traité CE doivent-ils être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à ce qu'une loi nationale, en l'espèce la loi du 15 avril 1958 relative à la publicité en matière de soins dentaires, interdise (à quiconque et) à des prestataires de soins dentaires, dans le cadre d'une profession libérale ou d'un cabinet dentaire, de se livrer à quelque publicité que ce soit, directement ou indirectement, dans le domaine des soins dentaires?”
La Cour a décidé que malgré que les articles 81 et 82 du Traité CE ne concernent que le comportement des entreprises et ne visent donc pas des mesures législatives ou réglementaires émanant des États membres, il n'en reste pas moins que ces articles, lus en combinaison avec l'article 10 Traité CE, qui instaure un devoir de coopération, imposent aux États membres de ne pas prendre ou maintenir en vigueur des mesures, même de nature législative ou réglementaire, susceptibles d'éliminer l'effet utile des règles de concurrence applicables aux entreprises. Or, selon la Cour, la loi du 15 avril 1958 ne relevait pas des hypothèses d'application combinée des articles 10 et 81 Traité CE.
Malgré que ce ne fût pas en cause, l'avocat-général avait également étudié la compatibilité de la loi du 15 avril 1958 avec les articles 43 et 49 Traité CE, à savoir respectivement la liberté d'établissement et la libre prestation de services. Il était d'avis que les restrictions aux libertés précitées, contenues dans la loi du 15 avril 1958 étaient justifiées, en raison du déséquilibre d'information entre le patient et le professionnel de la santé, mais également en raison du fait que le patient, lorsqu'il recourt à des prestations de soins, ne satisfait pas une envie, mais répond à une nécessité. L'interdiction de se livrer à une publicité ne peut cependant être absolue. Les dentistes doivent garder la possibilité de faire connaître, dans un annuaire téléphonique ou dans un autre média, d'une façon simple et neutre, des données objectives.