Article

Cour de cassation, 18/04/2008, R.D.C.-T.B.H., 2008/9, p. 782-783

Cour de cassation 18 avril 2008

ASSURANCES
Assurance terrestre - Contrat d'assurance en général - Assurance RC - Étendue de la garantie - Entrée en vigueur
Dès lors que l'article 82 de la loi sur le contrat d'assurance terrestre s'applique à un contrat en cours, il régit l'étendue de la garantie due en vertu de celui-ci pour autant que l'é­vénement dommageable qui est couvert soit survenu après le moment où cette disposition est devenue applicable à ce contrat.
VERZEKERINGEN
Landverzekeringen - Verzekeringsovereenkomst in het algemeen - Aansprakelijkheidsverzekering - Omvang van de dekking - Inwerkingtreding
Aangezien artikel 82 van de wet op de landsverzekeringsovereenkomst van toepassing is op een lopende overeenkomst, regelt het de omvang van de ingevolge dat artikel verschuldigde dekking, mits de gedekte schadeverwekkende gebeurtenis zich heeft voorgedaan na het tijdstip waarop die bepaling op die overeenkomst toepasbaar is geworden.

Fiduciaire Mosane SA / Axa Belgium

Siég.: Ch. Storck (président), D. Batselé, A. Fettweis, Ch. Matray et S.Velu (conseillers), Ch. Matray (rapporteur)
M.P.: Ph. De Koster (avocat général)
Pl.: Mes C. Draps et Ph. Gérard

(…)

I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 23 mai 2005 par la cour d'appel de Liège.

Le conseiller Christine Matray a fait rapport.

L'avocat général Thierry Werquin a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse présente un moyen libellé dans les termes suivants:

Dispositions légales violées

- article 82, spécialement alinéas 2 et 3 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre;

- articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil;

- article 1138, 3° du Code judiciaire;

- article 149 de la Constitution.

Décisions et motifs critiqués

L'arrêt décide, sans être critiqué, quant à l'action en garantie dirigée par la demanderesse contre la défenderesse, que l'acte à raison duquel la responsabilité de la demanderesse était recherchée relève de ceux visés par la police d'assurance souscrite auprès de la défenderesse, de sorte que celle-ci ne peut, dans son principe, refuser sa garantie.

L'arrêt condamne toutefois, par tous ses motifs réputés ici intégralement reproduits et spécialement ceux figurant en page 4, sub “Appel incident de la (demanderesse)”, et en pages 9 et 10, sub “Quant à la franchise (et) au plafond d'intervention”, la défenderesse “à garantir la (demanderesse) de toute condamnation prononcée contre elle en principal, intérêts et frais à concurrence d'un maximum, en principal, de 123.946,76 EUR (5 millions de FB) sous déduction de la franchise contractuelle”.

Griefs
Première branche

En vertu de l'article 82, alinéas 1er à 3 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre,

“À concurrence de la garantie, l'assureur paie l'indemnité due en principal.

L'assureur paie, même au-delà des limites de la garantie, les intérêts afférents à l'indemnité due en principal.

L'assureur paie, même au-delà des limites de la garantie, les frais afférents aux actions civiles ainsi que les honoraires et les frais des avocats et des experts, mais seulement dans la mesure où ces frais ont été exposés par lui ou avec son accord ou, en cas de conflit d'intérêts qui ne soit pas imputable à l'assuré, pour autant que ces frais n'aient pas été engagés de manière déraisonnable.”

La demanderesse, qui ne contestait ni le plafond assuré par le sinistre ni la hauteur de la franchise, faisait valoir, [dans] ses conclusions de synthèse d'appel, qu'“en vertu de l'article 82, alinéa 2 de la loi du 25 juin 1992, l'intervention de l'assureur doit porter sur l'indemnité en principal sous déduction de la franchise, mais aussi sur les frais et les intérêts, cela même au-delà des limites de la garantie”.

Si l'arrêt doit être lu en ce sens qu'il condamne la défenderesse à garantir la demanderesse à concurrence d'un maximum de 123.946,76 EUR, les intérêts et les frais étant inclus dans ce montant, il viole l'article 82, spécialement alinéas 2 et 3 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre (violation de cette disposition).

(…)

La décision de la Cour
Quant à la première branche

L'article 82, alinéas 2 et 3 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre dispose que l'assureur paie, même au-delà des limites de la garantie, les intérêts afférents à l'indemnité due en principal et les frais.

Cette disposition est, en vertu de l'article 1er de l'arrêté royal du 24 août 1992 fixant la date d'entrée en vigueur des dispositions de la loi du 25 juin 1992, entrée en vigueur le 21 septembre 1992.

Conformément à l'article 148 § 1er et 2 de la loi du 25 juin 1992, les dispositions de cette loi ne s'appliquent aux contrats souscrits avant leur entrée en vigueur qu'à partir de la modification, du renouvellement, de la reconduction ou de la transformation de ces contrats, ou, en l'absence de l'un de ces événements, à partir du 1er septembre 1994.

Dès lors que l'article 82 s'applique à un contrat en cours, il régit l'étendue de la garantie due en vertu de celui-ci pour autant que l'événement dommageable qui est couvert soit survenu après le moment où cette disposition est devenue applicable à ce contrat.

L'arrêt constate que “la date du fait générateur du dommage” se situe “en décembre 1987”, soit au moment où les statuts de la société Distrifood ont été rédigés par la demanderesse et par le notaire Culot, mais que, le 4 octobre 1994, l'administration fiscale, “constatant l'absence de la mention de l'engagement visé au paragraphe 1er, alinéa 3, de l'article 59 [de la loi de redressement du 1er juillet 1984 sur les sociétés situées en zone de reconversion], [a décidé] que 'l'exclusion des bénéfices sociaux prévus par le paragraphe 1er dudit article ne [pouvait] être consentie'”.

En rejetant la demande de la demanderesse tendant, sur la base de l'article 82, alinéas 2 et 3, précité, à la condamnation de la défenderesse aux intérêts et aux frais au-delà des limites de la garantie, l'arrêt viole cette disposition légale.

Le moyen, en cette branche, est fondé.

Il n'y a pas lieu d'examiner les autres branches du moyen, qui ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette la demande de la demanderesse tendant à la condamnation de la défenderesse, au-delà des limites de la garantie, aux intérêts et aux frais visés à l'article 82, alinéas 2 et 3 de la loi du 25 juin 1992, et qu'il statue sur les dépens entre ces parties;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé;

(…)