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Cour de cassation, 16/11/2006, R.D.C.-T.B.H., 2007/9, p. 889-890

Cour de cassation 16 novembre 2006

ARBITRAGE
Généralités - Arbitrage et tierce décision obligatoire - Convention de New York du 10 juin 1958 - Déclinatoire de juridiction - Conditions - Appréciation - Concession de vente exclusive à durée indéterminée
L'article 2 de la Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères n'indique pas au regard de quelle loi le juge doit vérifier l'arbitrabilité du litige au stade du déclinatoire de juridiction.
Cet article permet au juge d'examiner cette question au regard de sa lex fori.
Lorsque la convention d'arbitrage est soumise à une loi étrangère, le juge saisi d'un déclinatoire de juridiction doit exclure l'arbitrage si en vertu de sa lex fori le litige ne peut être soustrait à la juridiction des tribunaux étatiques.
ARBITRAGE
Algemeen - Arbitrage en bindende derdenbeslissing - Verdrag van New York van 10 juni 1958 - Exceptie van rechtsmacht - Voorwaarden - Beoordeling - Concessie van alleenverkoop van onbepaalde duur
Artikel 2 van het Verdrag van New York van 10 juni 1958 houdende erkenning en tenuitvoerlegging van buitenlandse scheidsrechterlijke uitspraken bepaalt niet op grond van welke wet de rechter die kennisneemt van een exceptie van rechtsmacht, de arbitreerbaarheid van het geschil moet nagaan.
Dit artikel laat de rechter toe om deze vraag volgens de lex fori te beoordelen.
Wanneer het arbitragebeding onderworpen is aan een vreemde wet, dient de overheidsrechter aan wie een exceptie van rechtsmacht wordt opgeworpen de arbitreerbaarheid uit te sluiten wanneer het geschil op basis van de lex fori niet aan de rechtsmacht van de nationale rechtbanken mag worden onttrokken.

Van Hopplynus Instruments SA / Coherent Inc.

Siég: C. Parmentier (président de section), D. Batselé, A. Fettweis, D. Plas et Ph. Gosseries (conseillers)
M.P.: A. Henkes (avocat général)
Pl.: Mes Ph. Gérard et J. Kirkpatrick
I. La procédure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 7 février 2002 par la cour d'appel de Bruxelles.

(...)

III. Le moyen de cassation

Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants:

Dispositions légales violées

- articles 4 et 6 de la loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation unilatérale des concessions exclusives de vente à durée indéterminée;

- articles 2, spécialement alinéas 1er et 3, et 5 de la Convention du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères, faite à New York, approuvée par la loi belge du 5 juin 1975;

- articles 568, alinéa 3, 1676, 1679 et 1704, 2, b) du Code judiciaire;

- articles 3, alinéa 1er, 6, 1131, 1134 et 1135 du Code civil ;

- pour autant que de besoin, article 6, spécialement alinéa 2 de la Convention européenne sur l'arbitrage commercial international, faite à Genève le 21 avril 1961, approuvée par la loi belge du 19 juillet 1975.

(…)

Quant à la première branche

L'arrêt constate, d'une part, que les parties avaient conclu un contrat de concession exclusive de vente, produisant ses effets notamment sur le territoire belge, soumis aux lois fédérales des États-Unis d'Amérique et aux lois de l'État de Californie et comportant une clause stipulant que les litiges seraient tranchés par un arbitre, conformément aux règles de l'Association américaine d'arbitrage, et, d'autre part, que le litige a trait au paiement de diverses indemnités réclamées par la demanderesse à la suite de la résiliation du contrat.

L'article 2.1. de la convention du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères, faite à New York, ratifiée par la loi du 5 juin 1975, dispose que chacun des États contractants reconnaît la convention écrite par laquelle les parties s'obligent à soumettre à un arbitrage tous les différends ou certains de ces différends qui se sont élevés ou pourraient s'élever entre elles au sujet d'un rapport de droit déterminé, contractuel ou non contractuel, portant sur une question susceptible d'être réglée par voie d'arbitrage.

L'article 2.3. de cette convention prévoit que le tribunal d'un État contractant, saisi d'un litige sur une question au sujet de laquelle les parties ont conclu une convention au sens de cet article, renverra les parties à l'arbitrage, à la demande de l'une d'elles, à moins qu'il ne constate que ladite convention est caduque, inopérante ou non susceptible d'être appliquée.

L'obligation de renvoi ne vaut que pour les litiges qui sont susceptibles d'être réglés par voie d'arbitrage.

L'article 2 n'indique pas au regard de quelle loi le juge doit vérifier si le litige est arbitrable. Cette disposition conventionnelle permet au juge d'examiner la question d'après la loi du for et de déterminer ainsi dans quelle mesure, en certaines matières, l'arbitrage peut être admis.

Lorsque la convention d'arbitrage est, comme en l'espèce, soumise à une loi étrangère, le juge saisi d'un déclinatoire de juridiction doit exclure l'arbitrage si, en vertu de la loi du for, le litige ne peut être soustrait à la juridiction des tribunaux étatiques.

En considérant que “les articles 2 § 3, et 5 § 1er et 2 de la Convention de New York ne laissent aucune place à l'application de la loi du for pour l'appréciation de la question de l'arbitrabilité du litige, et que cette question doit être réglée par la loi applicable au contrat”, l'arrêt attaqué ne justifie pas légalement sa décision, par confirmation du jugement entrepris, de se déclarer sans juridiction pour connaître du litige.

Le moyen, en cette branche, est fondé.

(...)

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arrêt attaqué;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé;

Condamne la défenderesse aux frais de la signification du mémoire en réplique;

Réserve le surplus des dépens pour qu'il soit statué sur celui-ci par le juge du fond;

Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.

(...)