Cour d'appel de Mons 22 janvier 2007
MARQUES
Interdiction d'usage d'un signe identique ou similaire pour un produit identique ou similaire (CBPI, art. 2.20, 1°, b) - Marque complexe - Élément distinctif dominant - Risque de confusion comprenant le risque d'association - Renonciation en matière de droits intellectuels - Usage de mauvaise foi - Cession de bénéfice - Dommages et intérêts - Évaluation du dommage
La contrefaçon ne peut être limitée à l'hypothèse où la totalité des termes composant la marque complexe a été reproduite; sa constatation impose seulement de rechercher si l'usage d'une marque ou d'un signe contrefaisant a intégré le ou les termes distinctifs dominants de la marque contrefaite.
Entre les marques invoquées (“Château Mouton Rothschild” et “Mouton Cadet”) et les signes attaqués (“Domaine du Mouton” et “Enclave du Mouton”), il existe, dans l'esprit du consommateur moyen, un risque de confusion comprenant le risque d'association dès lors que ces signes ont été utilisés pour désigner des produits similaires (du vin) et que le terme “Mouton” est le dénominateur commun des marques des sociétés Rothschild et constitue un élément essentiel et distinctif de celles-ci, de telle sorte qu'il est protégeable en lui-même à raison de sa notoriété même s'il n'a jamais été déposé seul.
En matière de droits intellectuels, la renonciation ne se présume pas et la prétendue tolérance vis-à-vis d'usurpations de tiers ne peut être constitutive d'abandon tacite.
Cet usage contrefaisant a eu lieu de mauvaise foi, les intimées n'ayant pu ignorer l'existence des vins remarquables des appelantes. L'usage querellé ne peut s'expliquer que par la volonté délibérée de provoquer dans l'esprit des consommateurs moyens une confusion quant à l'origine du vin vendu sous ces étiquettes.
Toutefois, la contrefaçon relevée n'étant pas un acte de piraterie (à défaut de copie servile), mais un acte parasitaire dont les répercussions ont été moindres puisque le risque de confusion qui en a résulté n'était pas direct, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de cession de bénéfice mais seulement à la réparation du dommage subi.
|
MERKEN
Verbod gebruik identiek of gelijkaardig teken voor een identiek of gelijkaardig product (BVIE, art. 2.20, 1°, b) - Complex merk - Dominerend onderscheidend bestanddeel - Risico van verwarring inhoudende de mogelijkheid van associatie - Afstand inzake intellectuele rechten - Gebruik te kwader trouw - Afdragen van winst - Schadevergoeding - Evaluatie van de schade
Namaak kan niet worden beperkt tot de hypothese waarbij de totaliteit van de bestanddelen waaruit het complexe merk is samengesteld, is nagemaakt; enkel dient onderzocht te worden of het gebruik van een merk of van een inbreukmakend teken het dominante onderscheidende bestanddeel of bestanddelen van het nagemaakte merk heeft geïntegreerd.
Tussen de ingeroepen merken (“Château Mouton Rothschild” en “Mouton Cadet”) en de bestreden tekens (“Domaine du Mouton” en “Enclave du Mouton”), bestaat er bij de gemiddelde consument een gevaar voor verwarring inhoudende de mogelijkheid van associatie, gezien deze tekens werden gebruikt om gelijkaardige producten (wijn) aan te duiden en het bestanddeel “Mouton” de gemeenschappelijke noemer is van de merken van de vennootschappen Rothschild en er een essentieel en onderscheidend bestanddeel van uitmaakt, zodanig dat hij, gezien zijn naamsbekendheid, op zichzelf beschermd kan worden, zelfs wanneer hij nooit alleen werd gedeponeerd.
Inzake intellectuele rechten, wordt de afstand niet vermoed en de voorgehouden tolerantie ten opzichte van de inbreuken door derden houdt geen stilzwijgende verzaking in.
Dit inbreukmakende gebruik was te kwader trouw, aangezien de geïntimeerden niet onwetend kunnen geweest zijn van het bestaan van de opvallende wijnen van de appellanten. Het betwiste gebruik kan enkel worden uitgelegd door de opzettelijke wil om bij de gemiddelde consument verwarring te stichten aangaande de herkomst van de wijn die onder deze etiketten verkocht worden.
Daar de vastgestelde namaak geen daad van piraterij is (bij gebrek aan een slaafse kopie), maar een parasitaire daad waarvan de gevolgen minder erg waren daar er geen rechtstreeks gevaar voor verwarring was, was er geen reden om in te gaan op de vordering tot afdraging van de winst maar enkel op de vergoeding van de opgelopen schade.
|
SA de droit français Baron Philippe de Rothschild et Groupement Foncier Agricole des vignobles de la Baronne Philipinne de Rothschild / SA Carrefour Belgium, SA Unic Florenville, SA Geens Benelux et Société de droit français société civile d'exploitation agricole Saint-Michel Les Vignes, anciennement Domaine du Mouton
Siég.: C. Lefebve (présidente), J. Halbrecq et M. Lemal (conseillers) |
Pl.: Mes A. Braun, E. Cornu et L. Van Bunnen et G. Brahy, R. Vandebroek |
(...)
La cour, après avoir délibéré, rend l'arrêt suivant:
Vu, régulièrement produites, les pièces de la procédure et notamment:
- le jugement entrepris prononcé contradictoirement le 20 octobre 1995 par la quatrième chambre du tribunal de première instance de Bruxelles et la requête d'appel déposée devant la cour d'appel de Bruxelles le 15 mars 1996;
- l'arrêt du 13 septembre 2001 de la cour d'appel de Bruxelles;
- l'arrêt de la Cour de cassation du 6 juin 2005 cassant cet arrêt “en tant qu'il dit non fondée la demande fondée sur les articles 13.A, alinéa 1er, 1° ancien et 13.A. 1, b) de la loi uniforme Benelux, tendant à l'interdiction d'usage des marques des défenderesses 'Domaine du Mouton' et 'Enclave du Mouton' sur la base d'une prétendue ressemblance avec les marques des demandeurs, qu'il dit sans objet la demande en garantie formée par la première défenderesse, qu'il décide n'y avoir lieu d'octroyer des dommages-intérêts et d'ordonner la publication de l'arrêt et qu'il statue sur les dépens”, réservant les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond et renvoyant la cause ainsi limitée devant la cour de céans;
- la signification dudit arrêt de la Cour de cassation et les citations des 13, 14 et 18 octobre 2005 à comparaître devant la cour d'appel de Mons;
- les conclusions des parties.
I. | Faits et rétroactes |
La seconde appelante est actuellement titulaire des enregistrements internationaux des marques suivantes désignant le Benelux pour caractériser notamment des vins:
1. Marque figurative internationale n° RR 219.734 représentant deux sphynx et un mouvement de teinture, déposée le 2 mai 1959, renouvelée le 2 mai 1979 et renouvelée à nouveau le 2 mai 1999;
2. Marque verbale internationale Château Mouton Baron Philippe n° RR 219.735, déposée le 2 mai 1959, renouvelée le 2 mai 1979 et renouvelée à nouveau le 2 mai 1999;
3. Marque verbale internationale Mouton Cadet, n° RR 242.436, déposée le 22 avril 1961, renouvelée le 22 avril 1981 et renouvelée à nouveau le 22 avril 2001;
4. Marque verbale internationale Château Mouton Rotschild n° R 344.503, déposée le 24 avril 1968 et renouvelée le 24 avril 1988;
5. Marque verbale internationale Carruades de Mouton n° R 355.385, déposée le 27 mars 1969, renouvelée le 27 mars 1989;
6. Marque verbale internationale Château Mouton d'Armailhacq, n° R 383.419, déposée le 15 novembre 1971 et renouvelée le 15 novembre 1991;
7. Marque verbale internationale Château Mouton Baronne Philippe n° R 465.820, déposée le 30 décembre 1981 et renouvelée le 30 décembre 2001;
8. Marque verbale internationale Château Mouton Rothschild n° R 476.868, déposée le 17 mai 1983 et renouvelée le 17 mai 2003.
La première appelante est, d'autre part, titulaire de l'enregistrement international de la marque suivante désignant le Benelux pour caractériser notamment des vins:
9. Marque figurative internationale Mouton Cadet, n° R 581.915, déposée le 6 février 1992 et renouvelée le 6 février 2002.
Les appelantes exposent qu'elles ont relevé l'existence de divers dépôts de marques soit:
- une marque verbale internationale n° 572.623 “Domaine du Mouton” inscrite le 5 juillet 1991 par la société civile d'exploitation agricole (SCEA) Domaine du Mouton, 2 Hameau du Stade à F-34270 Saint-Mathieu de Tréviers, pour les classes 32 (bières) et 33 (vins) et plus particulièrement pour le Benelux;
- une marque verbale internationale n° 572.624 “Enclave du Mouton” inscrite le 5 juillet 1991 par la même personne morale et avec les mêmes objectifs;
- une marque “Enclave du Mouton” ayant fait l'objet d'un enregistrement pour le Benelux sous le n° 482.165 au nom de la SA Geens Benelux.
- une marque “Domaine du Mouton” ayant fait l'objet d'un enregistrement pour le Benelux sous le n° 482.166 au nom de la SA Geens Benelux;
- une marque “Enclave du Mouton” ayant fait l'objet d'un enregistrement pour le Benelux sous le n° 468.553 au nom de la SA Geens Benelux;
Par un arrêt du 13 septembre 2001, la cour d'appel de Bruxelles, chambre supplémentaire B, a prononcé la nullité des enregistrements de marques “Domaine du Mouton” et “Enclave du Mouton” dont étaient respectivement titulaires la SA Geens Benelux et la société civile d'exploitation agricole (SCEA) sur la base des articles 4, 2° et 14 A. c) de la loi uniforme Benelux, la cour considérant que l'usage de ces marques par les intimées était de nature à tromper le public; qu'en outre elles seraient perçues comme indiquant l'origine du vin des intimées et qu'elles contrevenaient aux dispositions du Règlement CE n° 2392/89 du 24 juillet 1989 parce que, d'une part, il n'existe pas d'exploitation viticole du nom “Enclave du Mouton” et, d'autre part, que les vins vendus sous la marque “Domaine du Mouton”, ne proviennent pas exclusivement de cette exploitation.
Sur ce point, l'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles, signifié le 19 août 2002 aux intimées est coulé en force de chose jugée.
Par ce même arrêt du 13 septembre 2001, la cour d'appel de Bruxelles considéra toutefois que les demandes des appelantes tendant à l'interdiction d'usage sous menace d'astreinte des marques “Domaine du Mouton” et “Enclave du Mouton”, de publication et de dommages et intérêts, en raison d'une ressemblance prétendue entre les marques des appelantes et celles des intimées, n'étaient pas fondées.
Sur pourvoi des appelantes, la Cour de cassation, par arrêt du 6 juin 2005, considéra notamment que:
“Il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice Benelux et de celle de la Cour de justice des Communautés européennes que la ressemblance au sens de ces dispositions doit être appréciée d'une manière globale compte tenu des particularités de l'espèce, notamment du pouvoir distinctif de la marque et du signe, considérés en soi et dans leurs rapports mutuels;
Qu'un tel caractère distinctif peut s'attacher à un élément non déposé comme tel d'une marque constituée de la combinaison de plusieurs éléments;
Attendu que l'arrêt considère que, à défaut de dépôt de la seule marque 'Mouton', les [demandeurs] ne peuvent prétendre à un droit exclusif sur ledit mot lorsqu'il est combiné avec d'autres [...]; que le raisonnement (...] selon lequel le mot 'Mouton', qui n'a jamais été déposé et qui n'est jamais utilisé seul, constitue à lui seul l'élément distinctif du vin 'Mouton Rothschild' ne peut être approuvé pour les raisons qui viennent d'être dites [et] que la seule appropriation de l'élément 'Mouton' ne peut donc être constitutive de contrefaçon des marques des [demandeurs] dans [lesquelles] cet élément apparaît également';
Qu'ainsi, l'arrêt viole les dispositions précitées de la loi uniforme Benelux;
Que le moyen, en cette branche, est fondé;
Attendu que la cassation de la décision déclarant non fondée la demande des demandeurs fondée sur les articles 13.A, alinéa 1er et 13.A. 1. b), précités de la loi uniforme Benelux s'étend aux décisions relatives à la demande en garantie formée par la première défenderesse et aux demandes des demandeurs tendant à des dommages-intérêts et à la publication de l'arrêt, en raison du lien étroit établi par l'arrêt entre ces dispositions.”
Les appelantes sollicitent la mise à néant du jugement entrepris, sauf en tant qu'il a dit les demandes principales recevables, l'interdiction faite aux intimées au Benelux, sur la base de l'article 13, A, I alinéa 1er, 11 (ancien) et 13 A, I, b) et c) (nouveau) de la loi uniforme Benelux, devenu l'article 2.20, 1°, b) et c) de la Convention Benelux, tout usage des marques Domaine du Mouton et Enclave du Mouton ou de tout autre signe ressemblant aux marques des appelantes sous peine d'une astreinte de 2.500 EUR par usage qui interviendrait en contrariété à l'arrêt à intervenir, étant entendu notamment que chaque étiquette portant une de ces marques ou d'un signe ressemblant doit être considéré comme un emploi distinct, la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux francophones et dans trois journaux néerlandophones.
Elles demandent en outre la condamnation solidaire des première et deuxième intimées au paiement aux appelantes de la somme de 3.650 EUR du chef de dommages et intérêts au titre de lucrum cessans et damnum emergens confondus, la condamnation de la troisième intimée à la cession aux appelantes du bénéfice réalisé à la suite de la vente de mauvaise foi des bouteilles de vin “Mouton” de 1990 à 1997, soit la somme de 123.000 EUR ou au paiement de la même somme à titre de dommages et intérêts ainsi que la condamnation solidaire des troisième et quatrième intimées à la cession aux appelantes du bénéfice réalisé à la suite de l'usage de mauvaise foi des marques citées supra de 1989 à 1998, de la somme de 4.728.682 EUR ou au paiement de la même somme à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts judiciaires.
Elles sollicitent enfin la désignation d'un expert lequel, après avoir réuni les parties et s'être entouré de tous renseignements utiles et notamment du rapport de l'expert J.J. Paquier de Bordeaux, du 13 juillet 1999, examinera les comptabilités des intimées sub 1, 3 et 4 et dira la quantité de vin vendue en vrac ou en bouteilles, qui auront été vendues par elles sous les signes “Domaine du Mouton” ou “Enclave du Mouton”, tant en Belgique qu'aux Pays-Bas et au Luxembourg et la perte subie de ce chef par les concluantes, entre 1998 et la fin 2001.
Elles sollicitent la condamnation des intimées aux dépens et à la somme provisionnelle de 10.000 EUR à titre de dommages et intérêts.
Les intimées concluent à la confirmation pure et simple de la décision déférée.
I. | Quant à la demande d'interdiction d'usage des marques “Domaine du Mouton” et “Enclave du Mouton” ou de tout autre signe ressemblant |
1) | Recevabilité de la demande |
Devant la cour d'appel de Bruxelles, les appelantes, ont non seulement réitéré leur demande en annulation des marques Domaine du Mouton et Enclave du Mouton mais ont également réclamé l'interdiction d'usage de ces marques par les intimées en raison de leur ressemblance aux marques des appelantes, la publication du jugement à intervenir et des dommages et intérêts.
Ces demandes ont été reçues par la cour d'appel de Bruxelles qui n'a pas été cassée à cet égard de telle sorte que la question est définitivement tranchée et que la cour de céans n'en est pas saisie par l'arrêt de renvoi.
Il est vain en conséquence de vouloir remettre en cause la recevabilité de ces demandes.
2) | Fondement |
Les appelantes entendent baser leur demande d'interdiction d'usage des marques des intimées principalement sur les articles 13, A, I, alinéa 1er (ancien) et 13, A, alinéa 1er, b) (nouveau) de la loi uniforme Benelux, devenu l'article 2.20, 1°, b) de la Convention Benelux en matière de propriété intellectuelle du 25 février 2005 entrée en vigueur le 1er septembre 2006.
Les marques déposées par les sociétés Rothschild sont des marques complexes incorporant toutes le terme “Mouton”.
Les appelantes établissent qu'il existe entre leurs marques et les signes attaqués, soit Domaine du Mouton et Enclave du Mouton, un risque de confusion comprenant un risque d'association dès lors que:
- les signes ont été utilisés pour désigner des produits similaires, voire identiques, à savoir du vin (qui plus est de même provenance géographique, le sud-ouest de la France);
- le terme “Mouton” est le dénominateur commun des marques des sociétés Rothschild et s'il n'a jamais été déposé seul, il en constitue un élément essentiel et distinctif, le célèbre vin “Mouton Rothschild” étant d'ailleurs traditionnellement connu et appelé entre connaisseurs sous le seul vocable “Mouton” (cf. attestation du courtier Bernard Brun du bureau de courtage D. Balaresque du 12 novembre 1993 et celle du courtier Max Lestapis du 12 novembre 1993, et l'article du magazine Decanter de mars 2006 qui parle du “Mouton”), de telle sorte qu'il est protégeable en lui-même, à raison de sa notoriété (en ce sens, T.G.I. Bordeaux 6 août 1996 qui a annulé les marques Domaine du Mouton et Enclave du Mouton en raison de l'existence d'un risque de confusion, jugement confirmé par l'arrêt du 4 novembre 1998 de la cour d'appel de Bordeaux, pourvoi rejeté par arrêt du 26 février 2002 de la Cour de cassation de France; et le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 11 juin 2002, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 30 août 2004 dans l'affaire SCEA Château Mouton qui indique notamment: “le terme 'Mouton' est le substantif constant des marques enregistrées tant par le Groupement Foncier Agricole des Vignobles de la Baronne Philippine de Rothschild que par la Société Baron Philippe de Rothschild SA. Son originalité et sa caractéristique sont telles qu'on le retrouve dans toutes les marques appartenant aux sociétés en demande, y compris celles qui n'incorporent pas le nom de Rothschild. Ainsi le terme 'Mouton' est indiscutablement rattaché au premier cru de Pauillac dont la notoriété séculaire n'est plus à démontrer, et constitue l'élément distinctif des marques en cause (...)”).
- l'utilisation du vocable “Mouton” par les intimées, pour des produits similaires est de nature à créer dans l'esprit du consommateur moyen des produits concernés, normalement informé, raisonnablement attentif et avisé un risque de confusion direct ou à tout le moins indirect en ce sens que cet usage est de nature à faire croire que les vins vendus sous l'étiquette “Domaine du Mouton” ou “Enclave du Mouton”, proviennent de la même entreprise ou d'une entreprise liée aux appelantes ou bénéficiant d'une licence de celles-ci;
- ce risque de confusion était en l'espèce d'autant plus grand que les étiquettes des bouteilles vendues sous la marque “Domaine du Mouton” représentaient une draperie qui constitue un élément visuel également ressemblant à la marque figurative internationale n° RR 219.734 en tant qu'elle comporte la représentation d'un mouvement de tenture.
Les intimées font valoir en vain que la comparaison ne peut porter que sur les mots composés (ou complexes) pris dans leur ensemble et que les mots composés “Domaine du Mouton” et “Enclave du Mouton” doivent être comparés aux expressions complètes “Château Mouton Rothchild”, “Mouton Cadet Baron Philippe”, “Château Mouton Baron (ou Baronne) Philippe”, “Carruades du Mouton”, “Château Mouton d'Armailhacq” et qu'il n'y a pas de risque de confusion puisque le mot “Mouton” n'est pas distinctif et qu'il figure dans diverses marques de tiers, comme par exemple “Château Mouton” “Grand Mouton”, “Château Croix Mouton”, etc.
En effet la contrefaçon ne peut être limitée à l'hypothèse où la totalité des termes composant la marque complexe a été reproduite; sa constatation impose seulement de rechercher si l'usage d'une marque ou d'un signe contrefaisant a intégré le ou les termes distinctifs dominants de la marque contrefaite.
Ainsi qu'il vient d'être décidé le mot “Mouton” exerce un caractère particulièrement attractif dans les différentes marques des appelantes de sorte qu'il est devenu un mot vedette, un label de qualité propre aux produits des appelantes auquel se rattache la clientèle.
Les intimées sous 3 et 4 qui n'ont aucun droit à un quelconque toponyme (puisque la cour d'appel de Bruxelles en son arrêt du 13 septembre 2001 non cassé sur ce point, a considéré qu'il n'existe pas d'exploitation viticole du nom “Enclave du Mouton” et que les vins vendus sous la marque “Domaine du Mouton” ne proviennent pas exclusivement de cette exploitation) ne pouvaient ignorer, au moment où elles ont fait le choix de produire des vins sous les marques “Domaine du Mouton” et “Enclave du Mouton” entre 1989 et 1991 (époque des enregistrements de leurs marques) l'existence des vins remarquables des appelantes et celle du “Mouton Cadet” dont la marque est déposée depuis 1961 et qui constitue l'un des vins de bordeaux les plus vendus dans le monde (voir notamment l'article du journal Sudouest du 10 avril 1990: “le phénomène Mouton-Cadet”). Elles auraient aisément pu choisir de faire usage du nom d'un autre animal que le mouton de sorte que l'usage querellé ne peut en l'espèce s'expliquer que par la volonté délibérée de provoquer dans l'esprit des consommateurs moyens une confusion quant à l'origine du vin vendu sous ces étiquettes.
Même si le vocable “Mouton” figurant dans les marques des appelantes a une origine toponymique, puisque le baron Nathaniel de Rothschild a acquis, en 1853, le domaine de Brane Mouton - qui avait appartenu à un sieur Joseph de Brane, seigneur de Mouton - qu'il baptisa aussitôt Mouton Rothschild et que ses descendants désignent sous le simple nom de Mouton (cf. Brochure “L'art et l'Étiquette” imprimée en 1992), pour le consommateur moyen du Benelux, ce mot “Mouton” ne représente pas une petite colline (qui en vieux français se traduisait par le mot “mothon”), ce sens lui étant parfaitement inconnu, mais bien l'animal domestique à la toison laineuse, qui est d'ailleurs représenté depuis longtemps sur certaines étiquettes des vins produits par les appelantes (voir les deux béliers stylisés représentés sur les étiquettes du Château Mouton Rothschild entourant un dessin représentant lui-même une tête de mouton stylisée à partir de 1926, les étiquettes réalisées par certains artistes comme Arnulf en 1950, Alechinsky en 1966, Bona en 1968, Haring 1988 représentant des moutons stylisés; voir aussi la photographie d'une statuette de mouton représentée à la dernière page de la brochure de 1992).
C'est ce même animal qui a été représenté sur l'étiquette de l'Enclave du Mouton.
Le mot “Mouton” présente dès lors le même sens dans les marques des appelantes que dans les marques annulées des deux dernières intimées, ce qui renforce le risque de confusion comprenant le risque d'association.
Contrairement à ce que prétendent les intimées, les appelantes n'ont jamais accepté que d'autres entreprises puissent impunément faire usage du mot mouton pour désigner des productions viticoles, les appelantes démontrant au contraire avoir attaqué avec succès la marque “Le Mouton à cinq pattes” (cf. jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 19 septembre 1983), la marque “Château Mouton Blanc” (cour d'appel de Bordeaux du 9 mai 1982) et la marque “Château Mouton” devenue “Château Croix Mouton” (cf. jugement du 11 juin 2002 du tribunal de grande instance de Bordeaux confirmé par arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 30 août 2004).
Outre qu'en France, il est permis d'user, à certaines conditions, d'un toponyme en y adjoignant un préfixe ou un suffixe permettant d'écarter tout risque de confusion avec la marque antérieure protégée (ce qui a été le cas dans l'affaire Château Mouton où la partie défenderesse avait été condamnée à adjoindre un préfixe de son choix de sorte que la marque est devenue Château Croix Mouton), en matière, de droits intellectuels, la renonciation ne se présume pas et la prétendue tolérance vis-à-vis d'usurpations de tiers ne peut être constitutive d'abandon tacite.
Les appelantes justifient ainsi à suffisance leur demande tendant à l'interdiction d'usage au Benelux des marques Domaine du Mouton et Enclave du Mouton ou de tout autre signe ressemblant.
Il est dès lors sans intérêt d'examiner si elles ont également droit à la protection de leurs marques en application de l'article 13, A, I, c) de la loi uniforme Benelux sur les marques, devenu l'article 2.20, 1°, c) de la Convention Benelux qui protège les marques de haute renommée.
La demande de cessation d'usage sous astreinte est dès lors fondée.
II. | Quant aux mesures de publication, aux demandes de réparation du préjudice et quant aux demandes nouvelles tendant à la cession du bénéfice et au remboursement des frais et honoraires d'avocats |
1) | Recevabilité des demandes |
Les deux premières intimées font valoir que les demandes sont irrecevables parce qu'elles n'auraient pas été introduites devant la cour d'appel de Bruxelles par la requête d'appel et les conclusions prises à Bruxelles.
La cour constate que les mesures de publication de l'arrêt et la demande en dommages et intérêts étaient déjà formées par conclusions déposées devant cette cour par les appelantes le 30 octobre 2000.
Les demandes en cession de bénéfice et en répétition des honoraires sont des demandes nouvelles formées pour la première fois devant la cour de céans.
Un arrêt de cassation a pour effet de remettre les parties dans l'état où elles étaient avant la décision attaquée, dans les limites qui lui ont été déférées par la Cour de cassation. En l'espèce, l'arrêt de la Cour suprême a expressément renvoyé à la cour de céans les questions des dommages et intérêts et de la publication de l'arrêt étroitement liées à la demande d'interdiction d'usage.
Dans ce cadre, les appelantes sont recevables à étendre leur appel originaire en application de l'article 1056 alinéa 4 du Code judiciaire et à formuler des demandes nouvelles à la condition qu'elles se fondent sur un fait ou un acte invoqué en citation (art. 807 du Code judiciaire) ce qui est bien le cas (A. Fettweis, Manuel de procédure civile, 2ème éd., P.U. Liège, 1987, pp. 561-562, n° 876, in fine; G. Closset-Marchal et J.-F. Van Drooghenbroeck, “La répétibilité des honoraires d'avocat à l'aune du droit judiciaire”, R.G.A.R. 2005, p. 13945).
Les demandes sont donc recevables.
2) | Fondement de la demande de publication de l'arrêt |
Compte tenu de la cessation d'usage des marques et signes litigieux depuis plusieurs années, les appelantes n'établissent pas que la publicité et les mentions litigieuses auraient encore actuellement un impact suffisant dans le public pour justifier une mesure de publication de la présente décision.
Il y a donc lieu de limiter la condamnation à un ordre de cessation d'usage futur sous peine d'astreinte.
3) | Réparation du préjudice |
a) En ce qui concerne les deux premières intimées |
Les appelantes exposent que celles-ci ont acheté pour les revendre du 12 octobre 1991 au 9 février 1992: 7.242 bouteilles du “Domaine du Mouton” au prix de 76,50 FB la bouteille, et qu'elles reconnaissent en outre quelques ventes “sporadiques” de “l'Enclave Mouton” en 1994; que le préjudice qu'elles ont subi du chef du damnum emergens et du lucrum cessans confondus peut être évalué à 0,5 EUR par bouteille, de sorte que le dommage s'établit à 7.300 bouteilles x 0,5 EUR = 3.650 EUR.
Les deux premières intimées, qui sont des grandes surfaces vendant des bouteilles de vin au consommateur concluent au non-fondement de cette demande.
Selon le rapport de l'expert comptable Jean-Jacques Paquier, désigné par jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux le 6 août 1996, de 1991 à 1998, alors que les marques contrefaisantes s'implantaient sur le marché belge, les sociétés Rothschild, contrairement à ce qu'elles ont écrit, n'ont pas stagné sur le marché belge, ayant connu en 7 ans une progression annuelle de 5,5% plus faible que la période précédente (soit 8% par an entre 1983 et 1991) mais somme toute encore assez forte. Par ailleurs, l'expert note que le préjudice, s'il y en a eu un, se limite aux vins rouges car si les sociétés Rothschild produisent des vins blancs et rosés, ceux-ci ne sont habituellement pas reconnus sous l'étiquette Mouton. L'expert s'est dès lors déclaré assez réservé sur le préjudice allégué par les sociétés Rothschild (pp. 35 et s. du rapport).
Si le préjudice des appelantes ne peut être nié puisque d'une part, la progression des ventes s'est légèrement ralentie, sans que l'on puisse toutefois attribuer totalement ce déficit de progression aux actes de contrefaçon, il est impossible à chiffrer mathématiquement.
Les chiffres qu'avancent les appelantes ne peuvent être entérinés car d'une part il n'est pas démontré qu'elles auraient pu vendre toutes les bouteilles en cause et d'autre part le bénéfice de 0,50 EUR par bouteille n'est pas justifié.
Le dommage ne peut dès lors être évalué qu'ex aequo et bono et il sera accordé la somme de 2.000 EUR.
b) En ce qui concerne les autres intimées |
Les appelantes concluent comme il suit:
En ce qui concerne la troisième intimée:
Il ressort du rapport de l'expert Jean-Jacques Paquier du 13 juillet 1999 que la troisième intimée a pratiqué sur les seules importations de bouteilles de vin “Mouton” de 1990 à 1997 une commission de 10% dégageant au minimum un bénéfice incontestable de 800.000 FF sur la revente desdites bouteilles, soit en l'espèce 123.000 EUR, dont la cession est due aux appelantes en application de l'article 13, A, 2 de la LUB (devenu art. 2.21, 2° de la Convention Benelux), ou en tout cas à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au Benelux par les appelantes;
En ce qui concerne les 3ème et 4ème intimées:
Il ressort du rapport de l'expert Jean-Jacques Paquier du 13 juillet 1999 que la 4ème intimée a exporté en Belgique, à sa complice la 3ème intimée (l'importation dans le territoire Benelux est un fait de contrefaçon suivant l'article 13, A, 2 de la LUB) (devenu art. 2.21, 1 et 2) de la Convention Benelux) de 1989 à 1998 des ventes en vrac de vins dénommés “Domaine du Mouton” ou “l'Enclave du Mouton” de 35.554 hectolitres (au prix de 20.977.433 FF);
Le bénéfice réalisé par les intimées s'élève donc “a minima” incontestablement sur les ventes en vrac, soit à 133 bouteilles par hectolitre x 1 EUR = 4.728.682 EUR, bénéfice dont la cession est due aux appelantes en application de l'article 13, A, 2 de la LUB (devenu art. 2.21, 2° de la Convention Benelux), l'usage ayant été fait de mauvaise foi par les 3ème et 4ème intimées ou à tout le moins à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au Benelux par les appelantes, sauf à parfaire suivant expertise relative aux années 1999 à fin 2001.
Les intimées rétorquent que les sociétés appelantes ne démontrent pas l'existence d'un préjudice, la vente de leurs produits ayant continué à progresser de 1991 à 1998.
Les normes applicables sont les suivantes:
1. (...) le droit exclusif à la marque permet au titulaire de réclamer réparation de tout dommage qu'il subirait à la suite de l'usage au sens de cette disposition.
2. Outre l'action en réparation ou au lieu de celle-ci, le titulaire de la marque peut intenter une action en cession du bénéfice réalisé à la suite de cet usage, ainsi qu'en reddition de comptes à cet égard; le tribunal rejettera la demande s'il estime que cet usage n'est pas de mauvaise foi ou que les circonstances de la cause ne donnent pas lieu à pareille condamnation.
En l'espèce, la cour estime que la contrefaçon ne résulte pas d'une inadvertance et que l'usage a eu lieu de mauvaise foi pour les motifs déjà exposés.
Toutefois les circonstances de la cause la conduisent à ne pas faire droit à la demande en cession de bénéfice.
En effet la contrefaçon relevée n'était pas un acte de piraterie (les étiquettes n'ont pas été servilement recopiées) mais un acte parasitaire dont les répercussions ont été moindres puisque le risque de confusion qui en est résulté n'était pas direct.
La constatation de la contrefaçon nécessitait une appréciation en fait du caractère ressemblant des marques en cause, une telle appréciation pouvant varier d'un magistrat à l'autre de même que celle de la mauvaise foi, et force est de constater que le juge du premier degré et la cour d'appel de Bruxelles ont eu, à cet égard, une autre appréciation que la cour de céans, le jugement entrepris du 20 octobre 1995 ayant, en particulier, considéré que les marques n'étaient pas suffisamment ressemblantes en telle sorte que les activités commerciales litigieuses ont pu perdurer jusqu'au 13 septembre 2001, date à laquelle les dépôts des marques litigieuses ont été annulés par la cour d'appel de Bruxelles.
Les chiffres avancés par les appelantes aboutissent à des sommes exorbitantes.
Il faut observer en outre que le rapport d'expertise invoqué ne mentionne pas l'existence d'une “commission” de 10% sur l'importation de bouteilles en faveur de la troisième intimée.
Il n'est pas justifié que chacune des intimées concernées soit condamnée à la cession du bénéfice réalisé par l'autre intimée.
Il n'est pas établi que la vente de vin en bouteille ou en vrac procurait aux intimées concernées un bénéfice de 1 EUR par 75 centilitres, l'expert n'ayant rien dit de tel et les appelantes ne précisant pas le raisonnement permettant d'aboutir à pareille conclusion.
En réalité, pour fixer le bénéfice net réalisé par les deux dernières intimées, il faudrait vérifier dans leurs propres comptes, pour les années concernées (soit de 1990 à 2001), tous les bénéfices réalisés et désigner expert pour ce faire.
Cependant le commentaire commun des gouvernements du protocole du 2 décembre 1992 a indiqué que “au cas où l'ayant droit a intenté tant une action en réparation qu'une action en cession du bénéfice réalisé illicitement, le tribunal peut, tout en rejetant l'action à la portée la plus étendue, faire droit à l'action la moins extrême” (J.-J. Evrard et P. Peters, La défense de la marque dans le Benelux, Larcier, 2000, p. 221, n° 435).
En l'espèce, les deux actions ont été intentées et le préjudice souffert par les sociétés appelantes est certainement moins important que les bénéfices engrangés par les deux dernières intimées.
Pour l'ensemble de ces raisons, la cour estime ne pas devoir faire droit à la demande de cession de bénéfice mais à la demande de réparation.
L'expert, en prenant pour hypothèse que les sociétés appelantes ont été totalement privées des ventes réalisées par la SCEA Domaine du Mouton, a indiqué que le préjudice subi par les appelantes jusqu'en 1998 aurait pu être égal à 2.930.355 FF (p. 37 du rapport).
Ce chiffre doit être relativisé puisque s'il peut être admis que la preuve est apportée à suffisance que les intimées ont par leurs agissements, fait du tort aux appelantes, l'impact de la contrefaçon ne peut être rigoureusement chiffré, la diminution du taux de progression annuel des produits des appelantes sur le marché belge pouvant être due à d'autres causes telles la saturation du marché en cause, l'augmentation du prix de leur vin, l'apparition de vins concurrents, etc. L'expert a d'ailleurs fait part à cet égard de ses réserves.
Mais il y a lieu de tenir compte aussi de ce que le dommage a perduré jusqu'en 2001 sans que pour autant une expertise soit ordonnée puisque le préjudice ne peut être mathématiquement fixé.
En tenant compte de l'ensemble de ces observations, il échet de fixer ex aequo et bono le préjudice des appelantes pour la totalité de la période, soit jusqu'en 2001, à la somme de 300.000 EUR en principal.
En ce qui concerne les frais de défense, il convient de faire droit à la demande de répétition, vu la mauvaise foi des deux dernières intimées. Il peut être accordé, mais à titre définitif, la somme de 10.000 EUR qui peut représenter bona fide, indemnités de procédure en sus, les frais de défense qui devaient être exposés par les appelantes pour toutes les instances.
Enfin, la cour de céans n'est plus saisie d'une demande en garantie comme l'était la cour d'appel de Bruxelles.
Par ces motifs,
La cour, statuant contradictoirement en tant que cour de renvoi, dans les limites de sa saisine,
Vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935 relative à l'emploi des langues en matière judiciaire,
Reçoit les demandes nouvelles,
Confirme le jugement dont appel en tant qu'il a dit recevables les demandes,
Émendant pour le surplus,
Met à néant le jugement dont appel et interdit au Benelux, sur la base de l'article 13, A, I, alinéa 1er, 1° (ancien) et 13, A, I, b) (nouveau) de la loi uniforme Benelux devenu l'article 2.20, 1°, b) de la Convention Benelux en matière de propriété intellectuelle du 25 février 2005 (marques et dessins ou modèles), tout usage des marques Domaine du Mouton et Enclave du Mouton ou de tout autre signe ressemblant sous peine d'une astreinte de 2.500 EUR par usage, étant entendu notamment que chaque étiquette portant une de ces marques ou signe ressemblant doit être considérée comme un emploi distinct;
Condamne solidairement la SA Carrefour Belgium et la SA Unic Florenville à payer à la SA de droit français Baron Philippe de Rothschild et au Groupement Foncier Agricole (GFA) des vignobles de la Baronne Philippine de Rothschild la somme de 2.000 EUR à titre de dommages et intérêts, majorée des intérêts judiciaires depuis le 20 février 1992 jusqu'au parfait paiement.
Condamne solidairement la SA Geens Benelux et la société de droit français société civile d'exploitation agricole (SCEA) Saint-Michel Les Vignes à payer à la SA de droit français Baron Philippe de Rothschild et au Groupement Foncier Agricole (GFA) des vignobles de la Baronne Philippine de Rothschild la somme de 300.000 EUR du chef de dommages et intérêts majorée des intérêts depuis le 20 février 1992 jusqu'au parfait paiement, et celle de 10.000 EUR du chef de remboursement de frais de défense majorée des intérêts judiciaires depuis le 22 janvier 2007, jour du présent arrêt jusqu'au parfait paiement.
Déboute les appelantes du surplus de leurs prétentions.
(...)