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Cour d'appel Mons, 26/04/2007, R.D.C.-T.B.H., 2007/10, p. 1024-1028

Cour d'appel de Mons 26 avril 2007

INTERMÉDIAIRES COMMERCIAUX
Franchise - Information précontractuelle - Principe de bonne foi - Obligation de moyen - Position dominante du franchiseur - Conséquences
Le principe d'exécution de bonne foi appliqué au stade précontractuel induit que chaque partie fournisse loyalement à l'autre les éléments d'appréciation permettant à son futur partenaire d'évaluer le plus objectivement possible le risque commercial que comporte l'opération et d'ainsi apprécier en connaissance de cause son opportunité.
En matière de contrat de franchise, cela implique dans le chef du franchiseur d'informer son futur franchisé par des éléments fiables d'appréciation quant à la rentabilité de l'exploitation, eu égard notamment aux conditions générales du marché de ses produits et quant à l'estimation des investissements nécessaires.
Cette obligation s'analyse en une obligation de moyen dans le chef du franchiseur; son exécution doit cependant s'apprécier avec une sévérité proportionnelle à la position dominante du franchiseur.
En l'espèce, le franchiseur s'est abstenu, dans ses prévisions, de toute analyse du marché de ses produits, dont le déclin était pourtant avéré. Le franchisé ne disposant pas de la connaissance du marché dont se revendiquait le franchiseur n'a pu, de cette manière, appréhender correctement les éléments essentiels à sa prise de décision.
Si la preuve d'une intention délibérée de tromper son candidat franchisé n'est pas démontrée dans le chef du franchiseur, il demeure établi qu'il a adopté dans la phase précontractuelle un comportement négligent et non conforme au principe de bonne foi, constitutif d'une faute précontractuelle.
TUSSENPERSONEN (HANDEL)
Franchising - Precontractuele informatie - Principe van de goede trouw - Middelverbintenis - Dominante positie van de franchisegever - Gevolgen
Het principe van de uitvoering te goeder trouw in het precontractuele stadium houdt in dat elke partij loyaal aan de andere partij de beoordelingselementen meedeelt die aan hun toekomstige partner de mogelijkheid bieden om zo objectief mogelijk in te schatten wat het commercieel risico van de operatie is en om met kennis van zaken de opportuniteit ervan te beoordelen.
Inzake franchiseovereenkomsten houdt dit voor de franchisegever in dat hij zijn toekomstige franchisenemer aan de hand van betrouwbare beoordelingselementen inlicht omtrent de rentabiliteit van de onderneming, mede gelet op de algemene toestand van de markt, de producten en de inschatting van de noodzakelijke investeringen.
Deze plicht dient als een middelverbintenis in hoofde van de franchisegever te worden beschouwd: de uitvoering ervan dient echter beoordeeld te worden met een strengheid die evenredig is aan de dominante positie van de franchisegever.
In deze zaak werd door de franchisegever in zijn prognoses geen enkele melding gemaakt van een marktanalyse van zijn producten, waarvan duidelijk was dat ze in een neerwaartse spiraal zaten. Zodoende kon de franchisenemer, die geen kennis had van de markt waarop de franchisegever aanspraak maakte, de elementen die hij nodig had om zijn beslissing te nemen, niet op een correcte manier inschatten.
Het feit dat het opzet in hoofde van de franchisegever om zijn kandidaat-franchisenemer te misleiden niet bewezen is, neemt niet weg dat hij in de precontractuele fase een nalatige houding heeft aangenomen en niet in overeenstemming met het beginsel van goede trouw heeft gehandeld, wat als een precontractuele fout wordt beschouwd.

La Pastourelle / Verstuyfft Ann et Peeters Wim

Siég.: M. Castin (conseiller)
Pl.: Mes G. Herpoel loco E. Van Daele, D. Blommaert et R. Hardy

La Cour, après avoir délibéré, rend l'arrêt suivant:

Vu les pièces de la procédure légalement requises et notamment:

- la copie certifiée conforme du jugement prononcé le 7 janvier 2002 par le tribunal de première instance de Tournai, jugement dont aucun exploit de signification n'est produit aux débats;

- la requête d'appel, déposée le 24 janvier 2006;

Vu les dossiers des parties.

Antécédents
Les faits

Ann Verstuyfft et la SA La Pastourelle ont conclu le 16 février 1995 un contrat de franchise portant sur l'exploitation d'un commerce de détail à l'enseigne Phildar moyennant le paiement par la première d'un droit d'entrée dans le réseau de 216.000 FB;

La signature de cette convention avait été précédée de négociations, au cours desquelles l'appelante avait communiqué un dossier reprenant des prévisions de rentabilité qu'elle avait établies;

Pour des raisons sur lesquelles les parties sont en désaccord, la situation financière de la franchisée s'est progressivement dégradée, les ventes n'atteignant pas le chiffre d'affaires espéré en sorte que les marchandises fournies par l'appelante firent l'objet d'impayés;

Le 31 mai 1999, le conseil de l'intimée écrivait à l'appelante en lui signalant que sa cliente était dans l'impossibilité de régler les factures litigieuses, dont elle contestait être redevable vu les griefs énumérés à l'égard de l'appelante, soit notamment:

- de lui avoir présenté des prévisions incorrectes dans la phase précontractuelle par rapport aux ventes réellement réalisées depuis la prise d'effet du contrat;

- d'avoir été, plutôt qu'un partenaire commercial, la source des pertes encourues en raison notamment:

- de prix imposés fixés trop bas, ne permettant pas au franchisé de couvrir ses frais fixes;

- d'actions promotionnelles supportées en réalité par le franchisé;

- de coûts trop importants liés à une campagne promotionnelle et à l'aménagement des étalages;

- de manquements dans les livraisons de l'obligation imposée de participer à une action “trafic” dont la franchisée avait annoncé qu'elle n'était pas adaptée à son magasin.

Par ce même courrier, le conseil de l'intimée contestait en outre la qualification de contrat de franchise donnée à la convention du 16 février 1995, eu égard au caractère unilatéral des obligations et avertissait l'appelante du conseil donné à sa cliente de se “distancer de Phildar”, considérant cette attitude légitime vu les fautes de l'appelante tant dans la phase précontractuelle que durant l'exécution de la convention;

En réponse à ce courrier, l'appelante écrit le 16 juin 1999 en proposant une rencontre en vue de faire le point sur les problèmes, rencontre qui n'eut pas lieu;

L'intimée, s'y disant contrainte pour éviter la faillite, développa la vente de produits ne relevant pas de la gamme de ceux de l'appelante, ce que cette dernière fit constater par exploit d'huissier de justice du 1er juillet 1999;

Par courrier du 23 juillet 1999, le conseil de l'intimée notifia à l'appelante que sa cliente considérait le contrat comme terminé et, n'ayant pas reçu réponse à ses plaintes, qu'elle ouvrait dès le début août un magasin en exploitation personnelle et à son nom propre;

(...)

Sur les fautes imputées à l'appelante dans la phase précontractuelle

Antérieurement à la loi du 19 décembre 2005, non applicable en l'espèce, aucune réglementation spécifique ne régissait le contrat de franchise et, spécifiquement, l'information précontractuelle imposée au franchiseur;

Ni le “code de déontologie européen de la franchise” élaboré en 1972 ni le code belge mis au point par la Fédération belge de la franchise, auxquels le contrat litigieux ne se réfère d'ailleurs pas, n'avaient de valeur contraignante, dans la mesure où ces codes ne peuvent être considérés comme reflétant les usages professionnels, c'est-à-dire constants et généraux du secteur, et ne constituaient dès lors qu'une source d'obligations morales dans le chef du franchiseur (P. Kileste et A. Somers, “L'information précontractuelle dans le cadre d'accords de partenariat commercial”, J.T. 2006, pp. 15 et s. et ref. cit.);

Dans ce contexte, les obligations pesant sur le franchiseur durant la phase précontractuelle découlent du principe d'exécution de bonne foi des conventions instauré par l'article 1134 du Code civil et s'entendent essentiellement d'une obligation d'information et de conseil (P. Sher et C. Smets-Gary, “Chronique de jurisprudence. Le contrat de franchise en droit belge (1987-1996)”, J.T. 1997, p. 489 ; C. Staudt et P. Kileste, note sous Mons 13 janvier 2003, J.L.M.B. 2004, pp. 67 et s.);

Comme dans tout autre contrat, c'est avant de contracter qu'il appartient aux parties d'évaluer l'opportunité de l'opération envisagée; plus concrètement, il appartient au franchiseur d'évaluer si le candidat franchisé correspond au profil recherché et au franchisé d'estimer dans quelle mesure cette forme particulière de partenariat commercial lui convient et si elle est susceptible de lui apporter le profit escompté;

Le principe d'exécution de bonne foi appliqué à ce stade précontractuel induit que chaque partie fournisse loyalement à l'autre les éléments d'appréciation permettant à son futur partenaire d'évaluer le plus objectivement possible le risque commercial que comporte l'opération et d'ainsi apprécier en connaissance de cause son opportunité;

En matière de contrat de franchise et lorsque - comme en l'espèce - il ne s'agit pas de créer un nouveau point de distribution, cela implique dans le chef du franchiseur d'informer le futur franchisé par des éléments fiables d'appréciation, d'une part, quant à la rentabilité de l'exploitation, eu égard aux conditions générales du marché de ses produits ainsi qu'aux résultats de l'exploitation précédente et, d'autre part, quant à l'estimation de l'investissement en équipement, matériel, stock, coût de lancement, etc. (C. Jassogne et D. Etienne, “La franchise”, in T.P.D.C., T. 2, n° 858);

Si cette obligation s'analyse en une obligation de moyen dans le chef du franchiseur, son exécution doit cependant s'apprécier avec une sévérité proportionnelle à la position dominante du franchiseur et au déséquilibre constaté entre les parties en raison de cette position dominante et de leurs savoir-faire respectifs;

En effet, le franchiseur est généralement le seul à pouvoir mesurer avec exactitude les performances commerciales du savoir-faire et des produits qu'il entend céder à titre onéreux au candidat franchisé et en ne communiquant pas les informations exactes à son partenaire, il commet une faute (C. Matray, “Le contrat de franchise”, Dossiers J.T. 1992, p. 65);

En l'espèce, la position dominante de l'appelante dans ses rapports avec l'intimée - simple commerçante indépendante dont il n'est pas allégué qu'elle disposait de compétences particulières en matière d'analyse comptable ou économique - ne nécessite guère de développements, elle est implicitement revendiquée par l'appelante elle-même lorsqu'elle expose posséder un réseau de franchise matérialisé par “un grand nombre de magasins répartis sur l'ensemble du territoire belge” (point 1.1. de ses conclusions d'appel);

Cette position dominante était renforcée en outre par la circonstance que le magasin dont l'exploitation était envisagée avait déjà été auparavant l'objet d'un précédent contrat de franchise conclu avec un tiers, en sorte que l'appelante devait disposer de toutes les informations concrètes utiles à l'estimation de la rentabilité de l'affaire;

L'appelante précise à cet égard qu'elle a élaboré une méthode sérieuse de détermination du chiffre d'affaires prévisionnel, méthode tenant compte tant du nombre d'habitants de la zone géographique concernée, en l'espèce la commune de Asse, que de la surface commerciale à exploiter, de la moyenne des chiffres d'affaires obtenus par d'autres de ses franchisés dans des communes comparables ou dans la même région;

Elle revendique à cet égard avoir fait oeuvre de pionnière en matière d'information de ses franchisés et de création d'un “dossier de préouverture”, devançant ainsi les obligations intégrées au droit positif par la loi du 19 décembre 2005;

L'article 3 du contrat liant l'appelante et l'intimée prévoit “qu'à l'occasion de l'agencement du magasin et sur demande du client, (l'appelante) propose, tout ou une partie des services suivants: étude du marché local et choix de l'implantation en fonction des possibilités et des souhaits du client,...”;

Même si, en stricte application du contrat, l'initiative de la demande d'exécution de cette étude revenait à l'intimée, le devoir de loyauté prérappelé imposait à l'appelante de mettre en oeuvre une telle étude avant d'avancer des chiffres de rentabilité;

Certes, comme le souligne l'appelante, la notion d'étude du marché doit s'apprécier concrètement à l'aune de la dimension du point de vente envisagé, à savoir en l'espèce la reprise d'une exploitation existante;

L'appelante affirme s'être basée sur les facteurs suivants pour constituer les informations de rentabilité communiquées préalablement au contrat:

- la supposition que le caractère très largement inférieur des “performances” de l'exploitation antérieure, par rapport à d'autres du même réseau, était essentiellement imputable à la démotivation de la franchisée précédente, affectée par le décès de son époux;

- la fixation d'un objectif prévisionnel situé dans la moyenne entre les meilleures et les plus mauvaises performances relevées chez les autres franchisés de l'appelante;

- la prévision d'un alignement du chiffre d'affaires projeté sur cette moyenne, sous l'impulsion d'une nouvelle exploitante;

Le tableau figurant au dossier de l'appelante (farde IX) et qui n'apparaît pas avoir été communiqué à l'intimée dans la phase précontractuelle révèle que:

- les chiffres d'affaires de la franchisée précédente représentaient une moyenne de 117 FB par habitant sur la période allant de 1996 à 1998 inclus, alors que la moyenne des franchisés hors Asse s'élevait pour la même période à 235 FB;

- les chiffres d'affaires annuels, pour la même période et pour les mêmes magasins hors Asse, vont d'un minimum de 3.795.000 FB à un maximum de 6.741.000 FB;

Le “dossier d'ouverture” communiqué à l'intimée avant la signature de la convention litigieuse, indique un chiffre d'affaires prévisionnelles de 5.500.000 FB pour la 1ère année, 6.000.000 FB pour la deuxième et 6.500.000 FB pour la 3ème, ce qui ne constitue pas la moyenne alléguée par l'appelante mais se situe plutôt dans la frange supérieure par rapport aux chiffres d'affaires que l'appelante affirme avoir pris comme référence dans l'application de sa méthode;

Le même “dossier d'ouverture” révèle également dans le “bilan d'ouverture” un “investissement Phildar” de 216.900 FB, qui correspond en réalité au droit d'entrée dans le réseau financé, droit payable par le franchisé et devant être ristourné par le franchiseur - aux termes d'un avenant du 24 février 1995 - sous forme de note de crédit à titre d'aide à l'investissement;

Force est de constater que, contrairement à ce qu'elle affirme, la “méthode” utilisée par l'appelante pour procéder à une estimation du chiffres d'affaires et des résultats d'exploitation prévisionnels manque de fondements objectifs et repose essentiellement sur des données subjectives, à savoir la différence supposée de dynamisme commercial entre l'intimée et la franchisée qui l'avait précédée;

Plus essentiellement, il apparaît que l'appelante s'est, dans ses prévisions, abstenue de toute analyse du marché des articles de tricot et couture commercialisés dans son réseau de franchisés alors qu'il apparaît tant des pièces déposées que de la commune renommée qu'à l'époque où se sont inscrites les négociations précontractuelles le “déclin de la confection domestique” était avéré, “seule une petite minorité de ménagères, passionnées et expertes, maintiennent l'existence de la couture et du tricot” (N. Herpin et D. Verger, “Consommation: un lent bouleversement de 1979 à 1997”, in Économie et statistique 1999, nos 324-325, p. 43);

L'appelante soutient vainement qu'elle aurait été consciente de ce déclin et qu'elle en aurait tenu compte en diversifiant ses produits par l'intégration du “prêt-à-porter dames”;

Si, effectivement, le détail des chiffres d'affaires prévisionnels vise d'autres articles que le fil à tricoter, il se voit toutefois que ce poste constitue 40% du chiffres d'affaires, soit ainsi le poste le plus important par rapport aux autres articles dont le prêt-à-porter qui n'en représente que 20% et, surtout, que l'évolution - prévisible - à la baisse de la demande dans le secteur du tricot n'est nullement intégrée aux prévisions communiquées par l'appelante à l'intimée, les taux et proportions des divers secteurs demeurant constants sur les trois années de la prévision d'exploitation;

L'intimée, ne disposant pas de la connaissance du marché dont se revendiquait l'appelante, n'a pu de cette manière appréhender de manière correcte les éléments essentiels à sa prise de décision;

L'appelante affirme dès lors tout aussi vainement que l'intimée aurait manqué de sens critique en s'abstenant de solliciter des renseignements complémentaires et aurait signé le contrat litigieux en parfaite connaissance de cause;

Si la preuve d'une intention délibérée de tromper son candidat franchisé n'est pas démontrée dans le chef de l'appelante, il demeure établi qu'elle a adopté dans la phase contractuelle un comportement négligent et non conforme au principe prérappelé de la bonne foi en sorte que le tribunal a décidé à bon droit qu'elle avait commis une faute précontractuelle.

Sur les manquements imputés à l'appelante dans l'exécution du contrat

Le devoir de collaboration et d'assistance qui incombe au franchiseur tout au long de l'exécution du contrat en constitue une caractéristique essentielle, le différenciant notamment d'autres contrats telle la concession exclusive de vente;

Le contrat du 16 février 1995 décrit en son article 3 la collaboration et l'assistance à laquelle l'appelante s'est engagée pour “mettre en oeuvre les moyens résultant de sa structure personnelle et de l'expérience acquise dans ce type de commercialisation pour favoriser les vente de produits Phildar et l'essor de l'entreprise de son client”, le contrat énumérant ensuite une série de services tels que la fourniture gratuite de plans d'agencement établis à partir des normes types d'aménagement Phildar, le suivi et les conseils sur les travaux, la participation à la recherche et négociations d'éventuels emprunts à taux favorables, l'étude du plan de financement et de trésorerie à partir des prévisions d'exploitation, les plans de promotion et démarches publicitaires;

Ledit contrat avait été conclu sous la condition suspensive de “l'obtention des prêts et crédits auprès de l'organisme bancaire dans le cadre du financement du magasin”;

L'aide matérielle apportée par l'appelante en ce domaine s'est limitée à la prise en charge d'une partie du coût des aménagements effectués, sous forme d'une note de crédit de 216.900 FB, venant d'ailleurs en compensation du droit d'entrée dans le réseau, versé par l'intimée;

Aucune aide financière ne fut effectivement accordée par l'appelante, l'intimée ayant par elle-même recherché et obtenu les crédits nécessaires à son installation et au démarrage de son exploitation;

Durant le contrat, l'assistance de l'appelante s'est bornée à l'envoi régulier de son délégué, dont les rapports de visite attestent par ailleurs du dynamisme et des efforts accomplis par l'intimée, infirmant ainsi les allégations de l'appelante quant à de prétendues défaillances de sa part qui seraient à l'origine de ses difficultés financières;

Il n'apparaît pas des pièces soumises à l'appréciation de la cour que l'appelante ait donné suite aux inquiétudes exposées par l'intimée à son délégué quant aux difficultés rencontrées face aux pertes enregistrées;

En effet, se fondant sur les prévisions établies par l'appelante dans la phase précontractuelle, l'intimée et son époux ont acheté l'immeuble dans lequel se trouvait le magasin et ont procédé à des investissements d'aménagement du magasin pour un montant de 500.000 FB, le tout en souscrivant divers crédits bancaires à savoir: un crédit de caisse de 750.000 FB, deux crédits à terme de 1.500.000 FB chacun et un crédit logement de 3.320.000 FB;

Lesdites prévisions se sont rapidement avérées surréalistes;

Les accords d'avancement conclus entre l'intimée et l'appelante fixaient les objectifs à atteindre par la franchisée chaque semestre, en termes de chiffre d'affaires, d'agencement, de produits;

Or, le montant des ventes réelles, s'il a progressé, n'a jamais atteint les prévisions initiales et ce nonobstant les efforts consentis par l'intimée et dont attestent les rapports de visite établis par son délégué (cf. pièces déposées par l'intimée);

D'autre part, les campagnes promotionnelles menées par l'appelante se déroulaient dans des conditions telles que les coûts de ces actions étaient supportés pour l'essentiel par le franchisé dès lors que:

- le franchisé, obligé d'y participer en application de l'article 15 b du contrat de franchise, était tenu d'accorder à ses clients des ristournes calculées sur le prix de vente tandis que les marchandises en promotion étaient vendues par le franchiseur avec une ristourne d'un taux moindre, calculé en outre sur le prix d'achat, par définition inférieur au prix de vente;

- ces actions promotionnelles entraînaient de surcroît des frais de “mailing” pour le franchisé, frais dont seulement la moitié était supportée par le franchiseur sur un maximum de 2% des achats de l'année, maximum porté à 3% en 1997;

Le système “Actua's” mis en place par l'appelante en 1998-1999 n'a fait qu'aggraver la situation, imposant au franchisé des ventes devant représenter 25% du chiffre d'affaires et portant sur des articles de confection sur le choix desquels le franchisé n'avait aucun droit de regard, le franchiseur modifiant ainsi un des éléments essentiels du contrat, à savoir la liberté des choix du franchisé quant aux produits qu'il commercialise dans la gamme offerte par le franchiseur;

L'appelante a également manqué à son obligation d'approvisionnement, comme le révèle notamment le courrier recommandé du 12 mai 1999 par lequel l'intimée se plaint de l'absence de livraison des marchandises nécessaires à l'aménagement de la vitrine “obligatoire”;

L'appelante reproche vainement à l'intimée d'être responsable des pertes encourues par son point de vente; les pièces versées aux débats démontrent en effet que le caractère déficitaire de l'exploitation n'est pas imputable à l'intimée, laquelle n'a pas manqué de mettre tout en oeuvre pour atteindre les objectifs de chiffre d'affaires que lui avait fait miroiter l'appelante;

L'appelante fait tout aussi vainement grief à l'intimée d'avoir consenti des engagements financiers importants et prétend à tort y déceler les causes des difficultés financières avérées de la franchisée dont les causes déterminantes doivent être trouvées dans les manquements relevés ci-avant à charge de l'appelante;

Il ne peut, dans les circonstances de l'espèce, être fait grief à l'intimée d'avoir, devant l'échec de ses efforts commerciaux et vu les carences de l'appelante, préféré - afin d'éviter la faillite de son exploitation - mettre fin à ses relations avec l'appelante et d'avoir repris l'exploitation indépendante de son négoce;

Des considérations qui précèdent, il suit que le tribunal a déclaré à juste titre la convention de franchise résolue aux torts de l'appelante, en sorte que la demande de dommages et intérêts formée par celle-ci n'est pas fondée;

L'intimée est quant à elle fondée à obtenir indemnisation du préjudice subi ensuite des fautes précontractuelles et contractuelles établies dans le chef de l'appelante;

L'intimé, qui n'était pas lié contractuellement à l'appelante, n'est pas fondé à obtenir pareille indemnisation;

Il résulte à suffisance des pièces versées aux débats que le préjudice financier subi par l'intimée est à tout le moins égal au montant des factures établies par l'appelante du chef des livraisons effectuées et demeurées impayées en sorte qu'il convient de constater, après compensation des dettes réciproques des parties, qu'elles ne sont redevables d'aucun montant l'une envers l'autre;

(...)