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Remboursement et remise de droits de douane en vertu de l'article 239 du Code des douanes: une clause d'équité vraiment équitable?, R.D.C.-T.B.H., 2006/7, p. 689-702

Remboursement et remise de droits de douane en vertu de l'article 239 du Code des douanes:
une clause d'équité vraiment équitable?

Pierre de Bandt [1]

TABLE DES MATIERES

A. Introduction

B. Cadre réglementaire belge et européen 1. Description générale du cadre

2. Qu'entend-on par “remise et remboursement de droits de douane”?

3. Structure générale des dispositions applicables en matière de remise et de remboursement

C. L'article 239 CDC en tant que clause générale d'équité 1. La procédure de remise ou de remboursement a) La demande

b) La procédure d'octroi: vers une décentralisation croissante des compétences au profit des autorités nationales

c) Les recours administratifs et juridictionnels

2. Les conditions de fond a) Absence de manoeuvre ou de négligence manifeste

b) Existence d'une “situation particulière” (i) Les situations décrites aux articles 900 à 904 RACD

(ii) L'erreur visée à l'article 220 § 2, b) CDC en tant que situation particulière

(iii) Analyse de cas de figure spécifiques

D. Conclusion

RESUME
Cette contribution analyse la portée de la possibilité prévue à l'article 239 § 1 du Code des douanes communautaire d'obtenir la remise ou le remboursement de droits de douane qui ont déjà été pris en compte, respectivement ont déjà été acquittés. Cette disposition vise en effet à assurer la protection des opérateurs économiques (importateurs, exportateurs, agents, expéditeurs, transporteurs, etc.) dans des cas où la prise en compte ou le recouvrement a posteriori de droits de douane serait inéquitable. Une analyse de la réglementation applicable et de la jurisprudence belge et européenne relative à cette problématique indique toutefois que cette clause d'équité fait l'objet d'une application toujours plus restrictive.
SAMENVATTING
Deze bijdrage onderzoekt de draagwijdte van de in artikel 239 § 1 van het Communautair Douanewetboek voorziene mogelijkheid om de kwijtschelding of de terugbetaling te bekomen van reeds geïnde respectievelijk reeds betaalde douanerechten. Deze clausule strekt er immers toe om de economische operatoren (invoerders, exportgerichte bedrijven, agenten, expediteurs, vervoerbedrijven, e.d.m.) te beschermen tegen de inning en navordering van douanerechten in omstandigheden waar zulks niet billijk zou zijn. Een onderzoek van de toepasselijke reglementering en omstandige Belgische en Europese rechtspraak over deze problematiek wijst echter in de richting van een steeds restrictievere interpretatie van deze bepaling.
A. Introduction

1.Parmi les risques auxquels les opérateurs économiques doivent faire face dans le cadre de leurs activités, ceux liés au traitement douanier des marchandises qu'ils importent ou exportent constituent assurément un sujet récurrent de débats et de plaintes. En effet, nombreuses - et souvent justifiées - sont les critiques des opérateurs quant à l'opacité et la complexité des réglementations qui gouvernent cet aspect pourtant essentiel des échanges commerciaux avec les pays-tiers (c'est-à-dire situés hors UE) et du transport de marchandises.

2.Ces réglementations font certes, à intervalles réguliers, l'objet de vastes campagnes de remise à jour et de modernisation de la part des autorités tant nationales qu'européennes. C'est ainsi que, fin novembre 2005, la Commission européenne a lancé une nouvelle initiative visant à accélérer l'informatisation des procédures douanières et leur simplification [2].

3.Il n'en demeure pas moins que, même assistés de professionnels en la matière (expéditeurs, commissionnaires, agents, etc.), les opérateurs sont fréquemment confrontés à des problèmes quant au traitement douanier des marchandises qu'ils souhaitent importer, exporter ou encore qu'ils transportent pour le compte d'autres opérateurs sur le territoire européen. Il s'agit généralement d'erreurs quant au classement tarifaire des marchandises, de certificats d'origine délivrés à tort, de documents douaniers incomplets ou manquants, ou encore de faits imprévus survenus au cours du transport des marchandises (vol, destruction, marchandises périmées, etc.).

4.La réglementation douanière est ainsi faite que, dans la vaste majorité des cas où des erreurs voire des irrégularités sont survenues dans le cadre du traitement douanier, les conséquences de ces erreurs devront généralement être supportées par les opérateurs, à charge pour eux de prendre des engagements contractuels pour les couvrir ou encore de souscrire les assurances nécessaires [3]. Le législateur tant européen que belge a en effet souvent tendance à considérer que le devoir de diligence des opérateurs économiques implique qu'ils doivent être aussi bien des experts en matière de réglementation douanière que des professionnels de l'anti-banditisme.

5.Cette tendance est particulièrement bien illustrée par la réglementation applicable à la remise et au remboursement de droits de douane et l'abondante jurisprudence tant belge qu'européenne rendue en la matière. C'est l'analyse de cette réglementation et, en particulier, de la clause générale d'équité qui figure à l'article 239 du Code des douanes [4] (ci-après “CDC”), qui constitue l'objet de la présente contribution. Après avoir procédé à l'examen des conditions tant procédurales que de fond applicables à la remise et au remboursement de droits de douane en vertu de cette disposition, nous examinerons son application dans un certain nombre de cas spécifiques.

B. Cadre réglementaire belge et européen
1. Description générale du cadre

6.Depuis leur entrée en vigueur au 1er janvier 1994, le Code des douanes communautaire (“CDC”) et son règlement d'application [5] (“RACD”), constituent le cadre réglementaire de référence en matière douanière. Les dispositions de base concernant la remise et le remboursement des droits de douanes sont ainsi visées aux articles 235 à 242 CDC tandis que leurs modalités d'application sont prévues aux articles 877 à 912 RACD.

7.L'existence d'un cadre normatif au niveau européen ne saurait toutefois occulter que de nombreuses modalités de la procédure douanière, les possibilités de recours administratifs et juridictionnels, les dispositions pénales ou encore les pouvoirs d'enquête des autorités douanières ont été précisées par les législations nationales; en Belgique, c'est bien évidemment la loi générale sur les douanes et accises, coordonnée par l'arrêté royal du 18 juillet 1977 (“LGDA”), qui constitue à cet égard le point de référence. Notons également que l'administration des douanes et accises [6] a publié, en 1997, une circulaire relative à la remise et au remboursement, qui décrit de manière fort précise l'ensemble de la procédure. Cette circulaire a été remise à jour en 2003.

8.On rappellera également que les modalités complémentaires adoptées au niveau national ne sauraient contrevenir aux dispositions européennes en la matière. En cas de conflits de normes, il incombera au juge national d'écarter la disposition nationale contraire à la norme européenne [7].

9.Enfin, à l'instar d'autres secteurs du droit (tel, par exemple, le droit de la concurrence), l'application du droit douanier fait lui aussi l'objet d'une décentralisation croissante. Là où jusqu'il y a peu de nombreuses décisions en matière de douane étaient adoptées par la Commission européenne, ce sont dorénavant les autorités douanières nationales qui sont les acteurs principaux de l'application de la réglementation douanière. Ainsi qu'il sera souligné ci-dessous, tel est en particulier le cas en matière de remise et remboursement de droits de douane. La plupart des décisions sont désormais adoptées au niveau national, la Commission européenne se réservant les cas les plus importants ou suscitant des risques de divergence dans l'application de la réglementation par les États-membres.

2. Qu'entend-on par “remise et remboursement de droits de douane”?

10.La réglementation douanière est caractérisée par un jargon qui lui est propre. Avant d'examiner les dispositions en matière de remise et de remboursement, il nous semble dès lors opportun de définir leur portée en les situant dans leur contexte réglementaire.

11.Pour qu'il puisse y avoir remboursement ou remise, il faut bien évidemment d'abord qu'une dette douanière existe ou, selon la terminologie douanière, qu'une dette douanière soit “née”. Il résulte ainsi de l'article 201 CDC que font naître une dette douanière à l'importation soit la mise en libre pratique d'une marchandise (c'est le cas le plus fréquent) soit le placement d'une telle marchandise sous un régime d'admission temporaire en exonération partielle des droits à l'importation [8].

12.Il faut ensuite que les autorités douanières aient “pris en compte” le montant de la dette douanière, c'est-à-dire qu'elles aient calculé le montant de cette dette et qu'elles l'aient inscrit dans leurs registres comptables. En principe, la prise en compte doit avoir lieu au plus tard le deuxième jour suivant celui au cours duquel la mainlevée des marchandises a été donnée ou, dans le cas où la mainlevée peut être donnée sous condition de satisfaction de certaines formalités supplémentaires, au plus tard deux jours après celui où sont définitivement déterminés ou fixés soit le montant de la dette, soit l'obligation de payer les droits résultant de cette dette [9]. Dans tous les autres cas, la prise en compte doit intervenir dans un délai de deux jours à compter de la date à laquelle les autorités douanières sont en mesure de calculer le montant des droits en cause et de déterminer le débiteur [10].

13.Il est assez fréquent que, en raison de déclarations incomplètes ou inexactes, les autorités douanières ne soient pas en mesure de prendre en compte le montant de la dette au moment requis. Dans ces cas, elles procèderont à une prise en compte a posteriori des montants éludés (on parle dans ce cas également de “recouvrement a posteriori”) [11].

14.Dès lors qu'une dette douanière est née, qu'elle a été prise en compte par l'autorité douanière et que son montant a été acquitté, elle pourra, pour autant que les conditions applicables soient satisfaites (voy. ci-dessous), faire l'objet d'une demande de remboursement. Si, en revanche, le montant de la dette douanière n'a pas encore été acquitté, l'intéressé en demandera la remise [12].

3. Structure générale des dispositions applicables en matière de remise et de remboursement

15.Le Code des douanes distingue quatre grandes catégories de cas où il peut être procédé à la remise ou au remboursement des droits de douane.

16.La première catégorie est visée à l'article 236 CDC et concerne les cas où le montant de la dette douanière n'était pas légalement dû au moment de son paiement [13]. Il s'agit notamment du cas où les marchandises avaient déjà fait l'objet d'une déclaration dans un autre bureau de douane, où il peut être démontré que les marchandises n'ont pas été importées ou ont été détruites sous surveillance douanière, ou encore lorsqu'une erreur a été commise quant à la valeur en douane des marchandises [14].

17.La remise ou le remboursement en vertu de l'article 236 CDC concerne en outre tous les cas où le montant de la dette douanière a été pris en compte en violation de l'article 220 § 2 CDC. Cette dernière disposition, dont il sera encore question plus loin, interdit en effet la prise en compte a posteriori de droits de douane lorsque la non-prise en compte initiale résulte d'une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane.

18.Pour obtenir le remboursement ou la remise en application de l'article 236 CDC, il faut que l'intéressé en fasse la demande avant l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la date où le montant des droits lui a été communiqué par l'autorité douanière [15].

19.La deuxième catégorie est celle où la déclaration douanière est invalidée après que les droits aient été payés (art. 237 CDC). Il s'agit notamment des cas où des marchandises sont déclarées pour la libre pratique (et font dès lors l'objet de la délivrance d'un certificat EU4/IM4) avec paiement des droits, alors que les marchandises étaient destinées à un régime ne prévoyant pas le paiement de droits, tel, par exemple, le transit communautaire, l'importation temporaire, le perfectionnement passif ou encore l'entreposage sous surveillance douanière. Il se peut également que les marchandises reçoivent une nouvelle destination douanière qui n'implique pas le paiement de droits. Pour obtenir la remise ou le remboursement dans un tel cas de figure, l'intéressé devra d'abord recourir à la procédure pour l'invalidation de la déclaration en douane et observer les délais applicables en la matière [16].

20.Quant à la troisième catégorie, il vise les cas où les droits de douane qui ont été pris en compte concernent des marchandises qui sont refusées par l'importateur parce que défectueuses ou non conformes aux stipulations du contrat (art. 238 CDC). Le remboursement et la remise sont toutefois subordonnés à la condition que les marchandises n'ont pas été utilisées, et sont réexportées hors du territoire douanier de la Communauté. La demande doit être déposée dans un délai d'un an à compter de la communication des droits au débiteur [17].

21.Enfin, l'article 239 CDC, objet de la présente contribution, s'applique à toutes les situations qui ne sont pas visées par les articles 236 à 238 CDC.

C. L'article 239 CDC en tant que clause générale d'équité

22.L'article 239 § 1 CDC dispose qu'il peut être procédé au remboursement ou à la remise des droits de douane dans des cas autres que ceux visés aux articles 236 à 238 uniquement s'ils “résultent de circonstances n'impliquant ni manoeuvre ni négligence manifeste de la part de l'intéressé”.

23.Cette disposition est généralement considérée comme une clause générale d'équité destinée à couvrir les situations autres que celles qui sont le plus couramment constatées dans la pratique [18]. Elle trouve notamment à s'appliquer lorsque les circonstances qui caractérisent le rapport entre l'opérateur économique et l'administration sont telles qu'il n'est pas équitable d'imposer à cet opérateur un préjudice que, normalement, il n'aurait pas subi [19].

24.Les conditions de forme et de fond pour l'application de cette clause d'équité ont été précisées aux articles 877 à 912 RACD.

1. La procédure de remise ou de remboursement [20]
a) La demande

25.La demande de remise ou de remboursement des droits de douane peut être faite par la personne qui a acquitté ces droits ou qui est tenue de les acquitter, ou par leurs représentants (agents en douane, etc.) [21]. Elle peut également être faite par toute autre personne qui est intervenue dans l'accomplissement des formalités douanières relatives aux marchandises en cause ou qui a donné les instructions nécessaires pour l'accomplissement de ces formalités [22].

26.Dans le cas d'une demande fondée sur l'article 239 CDC, celle-ci doit impérativement être faite dans un “délai de douze mois à compter de la date de la communication des droits au débiteur” [23].

27.La demande de remise ou de remboursement doit être adressée au bureau de douane qui a pris en compte les droits de douane [24]. Elle est établie sur le formulaire standard qui a été établi à cet effet [25]. Elle doit être accompagnée d'une description précise de la situation particulière justifiant la remise ou le remboursement ainsi que de tous les éléments de preuve nécessaire.

28.En Belgique, sous réserve de certains cas limités où la décision est prise par le receveur du bureau de prise en compte, le pouvoir de décision revient en principe au directeur régional de la compétence duquel relève le bureau de douane de prise en compte [26].

b) La procédure d'octroi: vers une décentralisation croissante des compétences au profit des autorités nationales

29.Initialement, la réglementation douanière prévoyait que la procédure relative au traitement des demandes de remise et de remboursement sur base de la clause d'équité était centralisée auprès de la Commission européenne [27]. Cette situation était justifiée par le besoin d'assurer une certaine uniformité dans l'application des règles en la matière [28].

30.Par la suite, fort de l'expérience acquise et du développement d'une ample pratique décisionnelle, les règles sur la délimitation des compétences entre les États-membres et la Commission européenne ont été révisées afin d'assurer une plus grande responsabilité aux États-membres. Ainsi, alors qu'initialement tous les cas qui n'étaient pas visés de manière précise par la réglementation relevaient de la compétence décisionnelle de la Commission, indépendamment du montant des droits en cause, les États-membres ont, par la suite, été autorisés à prendre eux-mêmes des décisions, dans les cas qui n'étaient pas expressément prévus, lorsque la demande de remise n'excédait pas 50.000 euros.

31.Suite à l'entrée en vigueur du Règlement (CE) n° 1335/2003 [29], la situation est radicalement inversée. En effet, désormais les décisions relatives à l'octroi de la remise ou du remboursement des droits sont prises au niveau national, sauf dans les cas suivants: (i) l'État-membre qui soumet le cas est d'avis que des circonstances particulières, au sens de l'article 239 CDC, ont été générées par un manquement de la Commission européenne; (ii) le cas à traiter est fondé sur le résultat d'enquêtes communautaires coordonnées par l'Organisme européen de Lutte Anti-Fraude, ou (iii) le montant des droits de douane dont la remise ou le remboursement sont demandés s'élève à 500.000 euros ou plus [30]. Toutefois, une saisine de la Commission européenne ne sera pas possible si cette dernière a déjà statué sur ou est saisie d'un cas comparable [31].

32.Dans les cas où la saisine de la Commission n'est pas obligatoire, l'autorité douanière nationale (en Belgique, il s'agira en principe du directeur régional) examinera la demande de remise ou de remboursement sur base de tous les éléments transmis. L'autorité peut, si nécessaire, ordonner que des éléments complémentaires soient produits par le demandeur ou que des mesures de contrôles soient effectuées [32]. Une fois qu'elle est en possession de tous les éléments nécessaires, l'autorité douanière de décision statue par écrit sur la demande [33]. Sa décision doit comporter tous les éléments d'information nécessaires à son exécution, et en particulier ceux mentionnés à l'article 886 § 2 RACD. Elle peut subordonner sa décision à la satisfaction préalable ou postérieure de certaines conditions, tel notamment l'accomplissement des formalités douanières (art. 893 RACD).

33.Dans les cas relativement exceptionnels d'une saisine de la Commission, la procédure se déroulera selon le prescrit des articles 906 à 909 RACD. La demande complète est alors transmise par l'administration centrale des douanes et accises à la Commission européenne, qui en adressera une copie aux autres États-membres [34]. Si elle a l'intention de prendre une décision défavorable, elle doit communiquer ses objections par écrit au demandeur, qui dispose alors d'un délai d'un mois pour y répondre [35]. Cette dernière disposition a été introduite afin d'assurer le respect des droits de la défense des demandeurs [36]. Enfin, après consultation d'un groupe d'experts composé de représentants des États-membres, la Commission prend une décision établissant soit que la situation particulière examinée justifie l'octroi du remboursement ou de la remise, soit qu'elle ne le justifie pas. Cette décision doit intervenir dans un délai de neuf mois à compter de la date de réception du dossier, délai qui peut toutefois être prorogé ou suspendu dans certaines circonstances [37], étant entendu que l'absence de décision équivaut à une décision favorable [38]. C'est sur la base de la décision de la Commission que l'administration nationale prendra sa décision finale [39].

34.Afin d'assurer un maximum de cohérence et de transparence, la Commission publie régulièrement sur son site internet les décisions qu'elle adopte sur base de cette disposition [40]. Elle a également publié des lignes directrices quant à l'interprétation des dispositions en matière de remise et de remboursement [41].

c) Les recours administratifs et juridictionnels

35.Conformément à l'article 243 § 1 CDC, le demandeur de la remise ou du remboursement a le droit d'exercer un recours contre la décision de l'autorité douanière. Ce recours n'a en principe pas d'effet suspensif, mais les autorités peuvent, sous réserve de la constitution d'une garantie adéquate, surseoir à l'exécution de la décision contestée en cas de doutes fondés quant à sa conformité avec la réglementation ou encore en cas de risque de dommage irréparable [42].

36.En Belgique, il aura fallu attendre la loi du 30 juin 2000 modifiant la loi générale sur les douanes et accises et le Code des impôts sur les revenus 1992 [43], pour que soit instaurée une procédure de recours administratif contre la décision de l'autorité douanière qui rejette une demande, qui retire ou modifie une décision positive antérieure ou encore contre l'absence de décision. Conformément au nouvel article 214 LGDA, inséré à la suite de cette loi, “le recours administratif doit être motivé et introduit sous peine de déchéance, par lettre recommandée à la poste dans un délai de trois mois à compter de la date d'expédition de la décision contestée”. Il est introduit auprès du directeur général de l'administration des douanes et accises qui statue par voie de décision motivée [44].

37.En outre, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 23 mars 1999 sur l'organisation judiciaire en matière fiscale, l'épuisement de la procédure de recours administratif est désormais une condition préalable à l'introduction d'un recours juridictionnel [45]. À l'instar des autres décisions en matière de douanes et accises, ce recours devra être introduit, par voie de requête (et non par voie de citation). Le tribunal compétent est le tribunal de première instance du “siège de la cour d'appel dans le ressort duquel est situé le bureau où la perception a été ou doit être faite” [46].

38.Dans la plupart des cas où une demande de remise ou de remboursement aura été rejetée par l'administration, le requérant aura intérêt à inviter la juridiction nationale à poser, sur la base de l'article 234 du traité CE, une ou plusieurs questions préjudicielles à la Cour européenne de justice afin de l'interroger sur la portée de la réglementation applicable en la matière. Ainsi qu'en témoigne l'abondante jurisprudence de la Cour en la matière, les juridictions belges et des autres États-membres de l'UE ont fait fréquemment usage de cette faculté [47].

39.Notons que, dans les cas exceptionnels où l'administration douanière transmet la demande de remise ou de remboursement à la Commission européenne et où elle adopte sa décision sur la base de la décision de cette dernière (ce qu'elle est obligée de faire), le demandeur dispose en principe de deux possibilités. Il peut soit introduire un recours, en vertu de l'article 214 LGDA, devant le tribunal de première instance compétent afin de demander l'annulation de la décision négative du directeur général adoptée sur la base de la décision de la Commission (avec demande de questions préjudicielles sur la base de l'art. 234 CE), soit introduire un recours direct devant le tribunal de première instance des Communautés européennes afin de demander l'annulation de la décision négative de la Commission (en vertu du l'art. 230 al. 4 CE). Il semble toutefois préférable de privilégier la deuxième option. En effet, il n'est pas impossible que, par une application par analogie d'une jurisprudence bien établie en matière de droits anti-dumping [48], le tribunal saisi devra considérer que le demandeur qui n'aura pas fait usage de cette option, n'est plus en droit de soulever l'illégalité de la décision de la Commission européenne dans le cadre de la procédure juridictionnelle nationale [49].

2. Les conditions de fond

40.L'article 239 § 1 CDC pose deux conditions essentielles pour l'octroi de la remise ou du remboursement. Il faut, d'une part, qu'aucune manoeuvre ou négligence manifeste ne puisse être reprochée à l'intéressé et, d'autre part, qu'il y ait une situation particulière. Ces deux conditions sont également explicitées à l'article 905 § 1 RACD.

41.Il s'agit de conditions cumulatives de sorte que, dès qu'une de ces conditions fait défaut, la demande de remise ou de remboursement devra être rejetée [50]. En revanche, tout opérateur qui démontre la satisfaction de ces conditions dispose d'un droit à la remise ou au remboursement [51].

42.Lorsqu'elle examine une demande de remise ou de remboursement sur base de l'article 239 § 1 CDC, l'autorité douanière jouit d'un vaste pouvoir d'appréciation [52]. Elle est tenue d'exercer ce pouvoir en mettant réellement en balance, d'une part, l'intérêt de la Communauté à s'assurer du respect des dispositions douanières et, d'autre part, l'intérêt de l'opérateur de bonne foi à ne pas supporter des préjudices dépassant le risque commercial ordinaire [53].

43.Elle devra toutefois tenir compte du fait que ces dispositions constituent une exception au régime normal des importations et des exportations et que, par conséquent, elles sont d'interprétation stricte [54].

a) Absence de manoeuvre ou de négligence manifeste

44.L'absence de manoeuvre ou de négligence manifeste constitue la condition sine qua non pour le remboursement ou la remise des droits de douane.

45.L'autorité douanière devra ainsi, avant toute chose, examiner si cette condition est satisfaite à la lumière de la situation particulière qui est invoquée par l'opérateur [55].

46.D'une manière générale, il est relativement rare qu'un cas de “manoeuvre” soit reproché à un demandeur de remise ou remboursement. En effet, cette notion correspond à la réalisation d'un acte passible de poursuites judiciaires répressives ou à la tentative de réalisation d'un tel acte, de sorte qu'un opérateur sera généralement peu enclin à demander la remise ou le remboursement au cas où des poursuites de ce genre auront été initiées.

47.Il est, en revanche, assez fréquent qu'une demande de remise ou recouvrement soit rejetée en raison d'une négligence manifeste de la part de l'intéressé.

48.Pour apprécier s'il y a négligence manifeste, au sens de l'article 239 CDC et de l'article 905 RACD, l'autorité douanière doit tenir compte, notamment, de la nature précise de l'erreur, de l'expérience professionnelle et de la diligence de l'opérateur [56]. Ces critères sont les mêmes que ceux qui permettent de déterminer si une erreur des autorités douanières au sens de l'article 220 § 2 CDC, est raisonnablement décelable par l'opérateur [57], et font généralement l'objet d'une interprétation assez restrictive.

49.S'agissant de la nature de l'erreur qui a été commise dans un cas particulier, il faut l'apprécier au vu de la complexité éventuelle de la réglementation en cause [58] et du laps de temps durant lequel les autorités ont persisté dans leur erreur [59]. Or, d'une manière générale, les autorités douanières et juridictions refusent de considérer que la réglementation douanière en cause est complexe. Elle sera considérée comme telle uniquement lorsque la terminologie utilisée peut entraîner des confusions ou n'est pas claire quant à l'objectif poursuivi par la réglementation en cause [60], lorsqu'une modification réglementaire a un caractère peu apparent et que les autorités elles-mêmes ont mis du temps à se rendre compte de cette modification [61], ou encore lorsque la réglementation a été modifiée postérieurement aux opérations litigieuses, en raison du manque de clarté [62]. Également indicatif d'un manque de clarté de la réglementation sera le cas où les autorités douanières des États-membres ont eu des interprétations divergentes ou différentes de la réglementation, et que ces divergences ont nécessité des discussions dans les enceintes compétentes [63], l'adoption d'un règlement tarifaire par la Commission afin de clarifier la situation [64] ou un arrêt préjudiciel de la Cour européenne de justice [65]. Une conclusion similaire s'impose lorsque les autorités ont réitéré ou renouvelé leur erreur pendant un laps de temps relativement long [66].

50.La seconde condition (l'expérience professionnelle) sera considérée comme satisfaite si l'intéressé est un opérateur économique, dont l'activité consiste, en tout ou en partie, en des opérations d'importation et d'exportation et s'il avait déjà une certaine expérience du commerce de marchandises en cause, notamment s'il avait fait dans le passé de telles opérations pour lesquelles les droits avaient été correctement calculés. La plupart des opérateurs qui ont une activité, même secondaire, d'importation ou d'exportation (commissionnaires, expéditeurs en douane, moyennes et grandes entreprises, etc.) sera ainsi considérée comme expérimentée [67]. Les seuls qui peuvent éventuellement invoquer leur manque d'expérience sont les particuliers, les très petites entreprises, les opérateurs qui procèdent pour la première fois à des opérations d'importation ou qui utilisent pour la première fois des procédures nouvelles [68].

51.Enfin, force est de constater que le degré de diligence (troisième condition) qui est exigé des opérateurs est, en général, particulièrement élevé. C'est en effet à eux de rechercher la réglementation applicable à l'opération qu'ils exécutent, d'assurer que l'opération se déroule en pleine conformité avec cette réglementation et de calculer les droits qui sont dus [69]. Les autorités douanières n'effectuent en effet, au moment de l'acceptation de la déclaration en douane, qu'un contrôle marginal des données reprises dans les déclarations, dès lors que le déclarant a confirmé que toutes les données qui y sont reprises sont correctes et correspondent à la réalité.

52.Partant, lorsque les opérateurs ont des doutes quant à l'exactitude des informations et énonciations nécessaires pour l'établissement de leur déclaration en douane ou des documents joints à la déclaration ou encore quant à la conformité des opérations avec les réglementations en vigueur (p. ex., parce que des autorités douanières d'autres États-membres ont émis des avis divergents), ils ont l'obligation de s'informer par écrit et de chercher tous les éclaircissements possibles pour vérifier si leurs doutes sont ou non justifiés [70]. S'ils ne le font pas, ils seront généralement considérés comme négligents.

53.Toutefois, un opérateur n'est en principe pas considéré comme négligent lorsque l'erreur commise par les autorités douanières porte sur des éléments qui ne sont généralement pas portés à la connaissance des milieux professionnels. À titre d'illustration, lorsque l'octroi d'un traitement tarifaire est subordonné à la condition que les autorités du pays bénéficiaire aient préalablement communiqué à la Commission les noms et adresses des autorités compétentes pour délivrer les certificats et les spécimens des empreintes de cachets utilisés, il ne peut être reproché à l'opérateur de ne pas avoir su qu'une telle communication n'avait pas eu lieu et par conséquent ne pas avoir décelé l'erreur commise par les autorités nationales qui avaient octroyé le traitement préférentiel [71].

54.De même, l'obligation de diligence des opérateurs ne va pas jusqu'à imposer à ces derniers des lectures comparatives des textes publiés au Journal officiel pour vérifier si les versions linguistiques sont bien identiques [72].

55.Ne suffisent pas non plus pour établir un manque de diligence ou une négligence manifeste le simple fait pour l'opérateur ne pas avoir surveillé tous les intervenants dans le cadre du transport des marchandises ou encore de ne pas avoir souscrit d'assurance pour couvrir les risques relatifs à ce transport [73].

56.Enfin, il est à noter que le seul fait qu'un sous-traitant ou un membre du personnel du demandeur de la remise a participé à des irrégularités qui ont résulté dans la naissance d'une dette douanière (p. ex., le vol de marchandises dans le cadre d'une opération de transit) ne signifie pas ipso facto que le demandeur n'aurait pas droit à la remise ou au remboursement [74]. En effet, cette seule circonstance ne constitue pas, en soi, la preuve d'une négligence manifeste de la part du demandeur [75].

b) Existence d'une “situation particulière”

57.Selon une jurisprudence constante, des circonstances de nature à constituer une situation particulière au sens de l'article 239 CDC et de l'article 905 RACD existent lorsque, à la lumière de la finalité d'équité qui sous-tend ces dispositions, des éléments susceptibles de mettre le demandeur dans une situation exceptionnelle par rapport aux autres opérateurs économiques exerçant la même activité sont constatés [76].

(i) Les situations décrites aux articles 900 à 904 RACD

58.Afin de faciliter la tâche des autorités nationales lorsqu'elles doivent apprécier l'existence ou non d'une situation particulière au sens de l'article 239 § 1 CDC et d'éviter d'éventuelles disparités entre les États-membres, le législateur européen a codifié sa pratique en la matière aux articles 900 à 904 RACD.

59.Ainsi, les articles 900 à 903 RACD reprennent la liste positive des “situations particulières” où il peut être procédé à la remise ou au remboursement des droits de douane.

60.Sont notamment repris dans cette liste: (i) les cas où les marchandises ayant bénéficié d'un traitement douanier favorable (régime préférentiel, etc.) ont été volées et retrouvées à bref délai [77], (ii) les cas où les marchandises ont été adressées au destinataire par suite d'une erreur de l'expéditeur [78], (iii) les cas où les marchandises se sont révélées impropres à l'usage prévu en raison d'une erreur matérielle dont était entachée la commande [79]. L'octroi de la remise ou du remboursement dans chacune de ces situations est toutefois subordonné à la satisfaction de conditions strictes quant à la réexportation ou à la destruction des marchandises.

61.Ensuite, à l'article 904 RACD, le législateur a repris la liste négative des situations particulières où il ne peut en aucun cas être procédé à la remise ou au remboursement. Parmi ces situations figure la présentation, même de bonne foi, pour l'octroi d'un traitement préférentiel en faveur de marchandises déclarées pour la libre pratique, de documents dont il est établi qu'ils étaient faux, falsifiés ou non valables pour l'octroi de ce traitement tarifaire préférentiel [80].

62.Pour toutes les situations qui ne relèvent pas des articles 900 à 904 RACD, l'autorité douanière doit apprécier, sur base des éléments de preuve présentés par le demandeur, s'il s'agit d'une situation particulière au sens de l'article 239 § 1 CDC. Rappelons toutefois que, en vertu de l'article 905 RACD, dans certains cas exceptionnels, l'autorité compétente devra transmettre le cas à la Commission européenne (voy. ci-dessus).

(ii) L'erreur visée à l'article 220 § 2, b) CDC en tant que situation particulière

63.À plusieurs reprises dans le cadre de la présente contribution, il a été fait référence à cette disposition particulièrement importante.

64.L'article 220 § 2, b) CDC ne vise pourtant pas, en tant que telle, la remise ou le remboursement des droits de douane. Cette disposition, qui figure au Titre VII “Dette douanière”, chapitre III du Code des douanes, concerne en effet le cas particulier où les autorités douanières constatent ultérieurement que le montant de la dette douanière n'a pas, en tout ou en partie, été pris en compte au moment où il aurait dû l'être conformément aux articles 218 et 219 CDC. Elle prévoit que, dans un tel cas de figure, les autorités douanières doivent renoncer à la prise en compte a posteriori de ce montant lorsque la non-prise en compte initiale résulte d'une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane. Contrairement à la remise ou au remboursement, l'application de cette disposition ne requiert pas une démarche de l'opérateur. C'est en effet à l'administration elle-même d'examiner s'il y a lieu de procéder à la non-prise en compte sur base de cette disposition.

65.Ainsi qu'en témoigne la jurisprudence, cette disposition est très fréquemment invoquée par les opérateurs belges. En effet, devant faire face à un ordre de paiement de l'administration des douanes et accises visant au recouvrement de droits de douane qui ont été éludés au moment de la mise en libre pratique, les opérateurs arguent fréquemment que l'ordre en cause est illégal dans la mesure où l'administration aurait dû faire application de l'article 220 § 2, b) CDC.

66.Il serait toutefois erroné de considérer que l'article 220 § 2, b) CDC, ne peut être invoqué que dans un tel cas de figure. En effet, “l'erreur des autorités douanières elles-mêmes” au sens de cette disposition peut également constituer une situation particulière au sens de l'article 239 § 1 CDC, de sorte qu'une demande de remise ou de remboursement peut également être fondée en invoquant ce motif [81]. La possibilité d'invoquer l'article 220 § 2, b) CDC, à l'appui d'une demande de remise ou de remboursement est en outre reprise explicitement à l'article 236 § 1 CDC [82].

67.D'une manière générale, plutôt que de contester la légalité de l'ordre de recouvrement sur base de l'article 220 § 2, b) CDC, il nous semble d'ailleurs préférable pour les opérateurs d'introduire une demande de remise ou de remboursement sur la base de l'article 239 § 1 CDC, en invoquant, comme situation particulière, notamment qu'une erreur des autorités douanières au sens de l'article 220 § 2, b) CDC, a été commise. Il est également conseillé de ne pas se limiter à ce seul argument. En effet, la notion de situation particulière étant plus large que la notion d'erreur des autorités douanières [83], il est assez fréquent de voir des demandes de remise ou de remboursement acceptées par l'autorité nationale ou par la Commission, bien que ces dernières aient exclu la présence d'une erreur des autorités douanières au sens de l'article 220 § 2, b) CDC et, partant, aient considéré qu'il y avait lieu de prendre en compte les droits [84]. La pratique des autorités douanières belges de combiner demandes de non-recouvrement avec demandes de remise semble, de ce point de vue, assez opportune.

(iii) Analyse de cas de figure spécifiques
a. Irrégularités quant à la délivrance de certificats par une autorité d'un pays-tiers

68.Un cas de figure assez récurrent dans les recours administratifs et juridictionnels en matière de remise et de remboursement de droits de douane a trait aux irrégularités quant à la délivrance de certificats par une autorité d'un pays-tiers, notamment dans le cadre de régimes tarifaires préférentiels [85].

69.Il s'agit généralement de cas où, sur la base d'un accord avec un pays-tiers, des marchandises sont importées dans la Communauté en exemption de droits de douane ou en bénéficiant de tarifs préférentiels, sur présentation d'un certificat attestant que les marchandises ont été produites dans le pays-tiers (certificats d'origine). Par la suite, les autorités douanières nationales ou les instances européennes découvrent, dans le cadre de contrôles a posteriori des déclarations ou d'enquêtes communautaires, que les certificats ont été délivrés à tort par les autorités du pays-tiers dans la mesure où les marchandises ne satisfaisaient pas aux conditions pour l'octroi des certificats. Sur base des résultats de ces contrôles et enquêtes, les autorités douanières procèdent alors à la prise en compte a posteriori des droits de douane auprès des importateurs européens.

70.Confrontés à de telles décisions, les opérateurs invoquent généralement qu'ils ne pouvaient pas déceler l'erreur affectant les certificats litigieux dans la mesure où ils pouvaient avoir une confiance légitime dans la délivrance de ces certificats par les autorités compétentes des pays-tiers. La délivrance des certificats serait ainsi à considérer comme [erreur] des autorités elles-mêmes” au sens de l'article 220 § 2 CDC, qui, ainsi qu'il a été souligné plus haut, peut également constituer une situation particulière au sens de l'article 239 § 1 CDC.

71.En principe, cet argument ne suffit pas pour justifier la remise ou le remboursement. En effet, selon une jurisprudence constante, la confiance légitime du redevable n'est digne de la protection prévue à cet article que si ce sont les autorités compétentes “elles-mêmes” qui ont créé la base sur laquelle reposait sa confiance [86]. Ainsi, seules les erreurs imputables à un comportement actif desdites autorités ouvrent droit au non-recouvrement a posteriori des droits de douane [87]. Cette condition ne peut être considérée comme satisfaite lorsque les autorités compétentes sont induites en erreur - notamment sur l'origine de la marchandise - par des déclarations inexactes de l'exportateur dont elles n'ont pas à vérifier ou à apprécier la validité. En pareil cas, c'est le redevable qui supporte le risque émanant d'un document commercial qui se révèle faux lors d'un contrôle ultérieur [88].

72.Toutefois, la remise ou remboursement doivent être acceptés s'il s'avère que les autorités qui ont délivré le certificat “savaient ou auraient dû savoir que les marchandises ne remplissaient pas les conditions requises” et “si l'opérateur a fait diligence pour s'assurer que toutes les conditions pour bénéficier du traitement préférentiel ont été respectées” [89].

73.Notons que, depuis la modification en ce sens de l'article 220 § 2, b) CDC, la Commission européenne publie régulièrement des avis au Journal officiel lorsqu'il y a des doutes fondés quant à la bonne application d'un régime préférentiel par un pays-tiers [90]. L'opérateur ne pourra bien évidemment plus invoquer sa bonne foi pour les opérations postérieures à cette publication.

74.L'arrêt de la Cour de cassation du 8 novembre 2002 dans l'affaire État belge/Presse Labo Service BVBA illustre bien cette problématique [91].

75.Les faits étaient les suivants: dans le cadre d'une mission d'enquête européenne, il avait été établi que les certificats d'origine délivrés par les autorités de Macao relatifs à des écrans de télévision et attestant que les écrans avaient été produits dans ce pays étaient erronés dans la mesure où la valeur des marchandises importées de Hong Kong dépassaient largement 40% du prix ex works. En fait, les composants des écrans avaient été importés en provenance de ce dernier pays dans le cadre d'un trafic visant à contourner les droits anti-dumping pour les écrans de télévision originaire de Hong Kong. Suite à ces constats, les autorités douanières européennes avaient procédé à la prise en compte a posteriori des droits de douane et des droits anti-dumping [92].

76.C'est de l'appel contre une décision du tribunal de première instance confirmant la décision de prise en compte a posteriori de l'administration des douanes et accises que la cour d'appel d'Anvers a été saisie. Dans son arrêt du 10 janvier 2000, la cour d'appel a considéré que cette prise en compte a posteriori était contraire à l'article 5 § 2 du Règlement n° 1697/79 (précurseur de l'art. 220 § 2, b) CDC) dans la mesure où la non-prise en compte au moment de l'importation des marchandises résultait directement d'une erreur des autorités douanières de Macao, qui n'était pas décelable par l'importateur belge ayant de bonne foi et dans le respect des dispositions applicables. En conséquence, elle a annulé le jugement a quo.

77.Dans son arrêt du 8 novembre 2002 [93], la Cour de cassation casse cet arrêt au motif qu'il ne pourrait y avoir de droit à non-prise en compte des droits que si les autorités du pays-tiers ont “activement” contribué à créer une confiance légitime dans le chef de l'importateur. Or, selon la Cour, les juges d'appel ne pouvaient déduire des faits tels que repris dans l'arrêt que, par leurs agissements, les autorités de Macao avaient effectivement contribué à créer une telle confiance légitime en délivrant les certificats alors qu'ils savaient ou auraient dû savoir que les marchandises ne satisfaisaient pas aux conditions d'octroi.

78.Cette interprétation relativement restrictive de la notion d'erreur des autorités compétentes souligne derechef la difficulté principale dans ce type d'affaires: qu'entend-on précisément par un comportement “actif” des autorités douanières? En outre, comment l'importateur européen sera-t-il en mesure de démontrer que les autorités du pays-tiers étaient en réalité pleinement informées du fait qu'elles ne pouvaient pas délivrer les certificats litigieux? Contrairement aux autorités douanières, il ne dispose en effet que rarement de moyens juridiques et financiers suffisants pour réaliser des enquêtes auprès des autorités des pays-tiers. Lorsqu'une enquête a été réalisée, la solution peut toutefois consister à formuler, dans le cadre de la procédure juridictionnelle, une demande de production du dossier de l'enquête afin d'y trouver d'éventuels éléments à décharge [94].

b. Manquement des autorités compétentes

79.Les graves manquements des autorités douanières nationales et/ou de la Commission européenne quant à l'application des règles en vigueur et quant au contrôle de l'application desdites règles, peuvent constituer des situations particulières au sens de l'article 239 § 1 CDC, lorsqu'ils sont de nature à contribuer à la survenance d'irrégularités graves [95]. L'existence d'un manquement ne donne pas droit ipso facto à un remboursement ou à une remise au titre de l'article 239 CDC. Les opérateurs concernés doivent également ne pas s'être rendus responsables de manoeuvres ou avoir été manifestement négligents.

80.Un exemple de manquement de ce type a été constaté dans les nombreuses affaires relatives à des importations de téléviseurs couleur en provenance de Turquie qui ont été effectuées de 1991 à 1994, sous couvert de certificat de circulation ATR, par diverses entreprises (dont plusieurs belges). En effet, dans un arrêt du 10 mai 2001, Kaufring e.a., le tribunal de première instance C.E. a annulé toutes les décisions de la Commission européenne rejetant les demandes de remise ou de non-recouvrement au motif que les autorités turques, la Commission et le Conseil d'association avaient contribué à la survenance des irrégularités dans les exportations de téléviseurs à destination de la Communauté. En effet, la juridiction européenne a considéré que les autorités turques savaient ou, à tout le moins, auraient dû raisonnablement savoir que les marchandises pour lesquelles elles délivraient des certificats ATR (permettant l'importation de ces marchandises dans la Communauté) ne remplissaient pas les conditions requises pour pouvoir bénéficier du régime de libre circulation. En outre, pendant plus de 20 ans, les autorités turques n'avaient pas transposé la réglementation relative au prélèvement compensateur et avaient mis en place, durant la période litigieuse, des mesures qui, soit ne respectaient pas les dispositions de l'accord d'association et du protocole additionnel, soit ne permettaient pas d'assurer une correcte application de ces dispositions. La Commission avait quant à elle failli à ses obligations dans la mesure où elle n'avait pas assuré la correcte surveillance de l'application de l'accord d'association et dans la mesure où elle n'avait pas averti au plus vite les importateurs communautaires des risques potentiels qu'ils encouraient en important des téléviseurs couleur de Turquie. Enfin, un manquement avait également été reproché au Conseil d'association CEE-Turquie dans la mesure où, pendant plus de 20 ans, il n'avait pris aucune mesure afin d'assurer le respect par la Turquie des dispositions de l'accord d'association et du protocole additionnel.

81.Il va sans dire que la constatation de “graves manquements” de ce type est assez peu fréquente.

c. Vol de marchandises dans le cadre d'enquêtes douanières

82.Le vol de marchandises n'est, en principe, pas constitutif d'une situation particulière au sens de l'article 239 § 1 CDC [96], sauf dans les cas relativement exceptionnels où les marchandises sont “retrouvées à bref délai et remises dans l'état où elles se trouvaient au moment du vol, dans leur situation douanière initiale” [97].

83.Il n'est toutefois pas inhabituel que, dans le cadre d'une enquête destinée à identifier et à appréhender les auteurs ou complices d'un vol de marchandises qui a été perpétré ou est en préparation, les autorités douanières omettent délibérément d'informer le principal obligé de l'existence de cette fraude ainsi que de l'objet de leur enquête.

84.Dans ce cas de figure se pose bien évidemment la question de savoir si, en agissant de la sorte, les autorités douanières commettent un manquement qui serait susceptible de constituer une situation particulière justifiant la remise ou le remboursement des droits de douane.

85.La réponse est négative. Il est en effet généralement admis que les autorités nationales peuvent laisser délibérément se commettre des infractions ou irrégularités pour mieux démanteler un réseau, identifier des fraudeurs et établir ou conforter des éléments de preuve. À cette fin, elles peuvent légitimement justifier l'omission délibérée d'informer, en tout ou en partie, le principal obligé des éléments de l'enquête, alors même que ce dernier ne serait nullement impliqué dans la perpétration de la fraude [98].

86.De même, le fait de ne pas communiquer immédiatement à l'intéressé la découverte d'une fraude le concernant et de procéder au préalable à des enquêtes à son égard ne constitue pas un comportement négligent des autorités douanières [99]. En effet, elles peuvent légitimement entamer des enquêtes sur les irrégularités découvertes dans le cadre d'une opération douanière sans en informer au préalable le principal obligé, aux fins notamment de déterminer la nature et l'ampleur des irrégularités identifiées et d'apprécier la responsabilité des divers opérateurs participant à l'opération en cause, y compris le principal obligé lui-même. La communication préalable aux intervenants dans l'opération douanière en cause de l'existence d'une fraude pourrait en effet compliquer la réunion des éléments de preuve pertinents [100].

87.Cependant, la Cour de justice C.E. a considéré que, dans certains cas de figure limités, la mise à la charge du redevable d'une dette douanière découlant de ces choix liés à la poursuite des infractions pouvait être de nature à heurter la finalité de la clause d'équité qui sous-tend l'article 239 § 1 CDC et l'article 905 RACD. En particulier, elle a confirmé que l'omission d'avertir le redevable, pour les besoins d'une enquête diligentée par les autorités douanières ou policières, du déroulement de celle-ci est, en l'absence de toute manoeuvre et de négligence imputables au redevable, constitutive d'une situation particulière [101]. Notons que la solution contraire aurait été parfaitement inéquitable dans la mesure où, si le redevable avait été informé des irrégularités, il aurait pu prendre des mesures afin de les empêcher ou à tout le moins d'en limiter les conséquences.

88.L'octroi de la remise ou du remboursement s'impose, a fortiori, lorsque les infractions à la réglementation douanière ont été commises ou provoquées par les autorités douanières elles-mêmes. Tel est notamment le cas lorsque la soustraction des marchandises à la surveillance douanière résulte du comportement d'un agent infiltré appartenant aux services d'enquêtes douanières [102].

d. Erreurs des autorités douanières quant au classement tarifaire

89.Un opérateur peut-il obtenir la remise ou le remboursement des droits de douane lorsque les autorités douanières ont commis des erreurs quant au classement tarifaire d'une marchandise?

90.Ici aussi, la réponse semble généralement négative. En effet, à dater de leur publication au Journal officiel des Communautés européennes, tout opérateur est censé connaître les dispositions tarifaires communautaires applicables aux marchandises qu'il importe ou exporte [103].

91.Certes, dans certains cas où des erreurs de classement tarifaire ont été commises, la remise ou le remboursement pourront être acceptés. Tel est notamment le cas si les autorités douanières ont accepté pendant une (très) longue période de temps de nombreuses déclarations erronées alors que les éléments figurant sur les déclarations permettaient de découvrir que le classement tarifaire n'était pas correct. Dans un tel cas, l'on considérera en effet que les autorités ont commis une erreur au sens de l'article 220 § 2, b) CDC [104].

92.Toutefois, et certainement depuis l'instauration de la faculté pour les opérateurs de demander des renseignements tarifaires contraignants (“RTC”), la possibilité d'obtenir la remise ou le remboursement en cas d'erreurs de classement tarifaire est devenue plutôt rare. En effet, dans la mesure où, conformément à l'article 12 CDC, les opérateurs peuvent demander, par écrit, aux autorités de délivrer des renseignements relatifs au classement tarifaire de marchandises qui lient ces autorités, il sera difficile pour eux de justifier une demande de remise ou de remboursement en cas d'erreur de classement alors qu'ils n'ont pas demandé de RTC. En effet, dès lors qu'il peut être établi que, compte tenu de leur expérience professionnelle et du caractère complexe du classement en cause, les opérateurs avaient ou auraient dû avoir des doutes quant à l'exactitude du classement tarifaire, le fait de ne pas avoir solliciter un RTC dans pareil cas de figure constituera quasi automatiquement un manque de diligence de leur part.

93.Ce n'est que si les opérateurs peuvent établir qu'ils n'avaient aucune raison de douter de l'exactitude du classement tarifaire que l'erreur des autorités douanières pourra éventuellement constituer une situation particulière au sens de l'article 239 § 1 CDC [105]. Tel sera notamment le cas s'ils disposaient d'un certain nombre d'éléments matériels confirmant le classement, tel, par exemple, la délivrance de RTC par des autorités douanières d'autres pays confirmant le classement tarifaire litigieux, ou encore lorsque des contrôles des marchandises ont été effectués par les autorités douanières sans que leur classement ait été remis en cause [106].

94.Plus délicate est la situation où les autorités douanières de plusieurs États-membres ont opéré des classements divergents des mêmes marchandises ou ont délivrés des RTC contradictoires. En effet, dans un tel cas de figure, il sera difficile pour l'opérateur de prétendre qu'il n'avait aucune raison de douter de l'exactitude du classement tarifaire. Mais ne pourrait-il pas arguer que les classements divergents démontrent que la réglementation applicable n'était pas claire?

D. Conclusion

95.Il résulte de l'analyse susvisée que l'octroi de la remise ou du remboursement de droits de douane sur base de l'article 239 § 1 CDC, est - et restera vraisemblablement - assez exceptionnel. L'analyse de la pratique décisionnelle des autorités douanières et de la jurisprudence indique en effet que ce n'est que dans des cas de figure peu communs que la confiance légitime de l'opérateur sera protégée en cas d'erreurs ou d'irrégularités affectant le traitement douanier des marchandises qu'il importe.

96.Il semble d'ailleurs que le récent arrêt par la Cour de justice C.E. dans l'affaire Commission/Danemark, n'incitera pas les autorités douanières à faire une application moins restrictive de la clause d'équité prévue à l'article 239 § 1 CDC, que du contraire [107].

97.Par cet arrêt, la Cour accueille en effet le recours qui avait été introduit par la Commission européenne contre le Danemark afin de constater que celui-ci avait manqué à ses obligations en vertu du traité CE, en ne versant que les montants des droits de douane pour lesquels les autorités danoises avait décidé de ne pas procéder à la prise en compte a posteriori sur la base de l'article 220 § 2, b) CDC. Selon la Cour, les États-membres ont l'obligation de constater un droit des Communautés sur les ressources propres dès que les autorités douanières sont en mesure de calculer le montant des droits qui résulte d'une dette douanière et de déterminer le redevable. À cet égard, il importe peu que les États-membres ne peuvent pas prendre en compte certains montants en raison d'une erreur des autorités douanières au sens de l'article 220 § 2, b) CDC. En effet, selon la Cour, cette faculté ne les exempte pas de constater les ressources propres [108].

98.Le message de la Cour est clair: si les États-membres font application de cette disposition ou de l'article 239 § 1 CDC, en reconnaissant les erreurs commises par leurs autorités douanières, c'est à leurs propres frais! Un avertissement qui incitera vraisemblablement les autorités douanières à une attitude encore plus restrictive en matière de remise ou de remboursement.

[1] Avocat Eubelius.
[2] Il s'agit de deux propositions présentées par la Commission le 30 novembre 2005, visant, d'une part, à l'adoption d'une décision par le Conseil et le Parlement européen relative à un environnement sans support papier pour la douane et le commerce, et, d'autre part, à l'adoption d'un règlement modifiant le Code des douanes sur certains points précis. La première des deux propositions a pour objectif de rendre les systèmes douaniers électroniques des États-membres compatibles entre eux, d'introduire l'analyse de risque électronique à l'échelle de l'UE, d'améliorer l'échange d'informations entre les autorités chargées du contrôle des frontières, de généraliser le recours à la déclaration électronique ainsi que de mettre en place un système de dédouanement centralisé. Quant à la seconde, elle vise à simplifier et rationaliser les procédures douanières (plus que trois procédures différentes au lieu de treize actuellement). Dans l'optique de la Commission européenne, ces propositions devraient entraîner une augmentation de la compétitivité des entreprises opérant en Europe, une réduction des coûts de mise en conformité, ainsi qu'une amélioration de la sécurité dans l'UE.
[3] C.J.C.E. 17 juillet 1997, aff. C-97/95, Pascoal & Filhos, point 60.
[4] Règl. (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992, établissant le Code des douanes communautaire, J.O. L. 302, p. 1.
[5] Règl. (CEE) n° 2454/93 de la Commission du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du Code des douanes, J.O. L. 253, p. 1.
[6] Conformément à l'art. 4 LGDA, l'Administration des douanes et accises, est compétente pour les droits à l'importation et à l'exportation, et, depuis le 1er janvier 1994, également pour les prélèvements et autres impositions dans le cadre de la politique agricole commune en cas d'importation ou d'exportation de produits agricoles. Pour les situations nées et définitivement acquises avant le 1er janvier 1994, le recouvrement des prélèvements agricoles était de la compétence de l'Office des contingents et licences (actuellement le Bureau d'intervention et restitution belge ou “BIRB”). Voy. Cass. 27 janvier 2004, État belge/M. e.a. et Cass. 9 février 2006, État belge et BIRB/Lensing et Brockhausen, www.cass.be .
[7] Voy., pour une illustration, Cass. 18 novembre 2004, État belge/Wattex, www.cass.be , qui écarte les modalités particulières pour l'interruption du délai de prescription de 3 ans prévues à l'art. 143 de la loi générale sur les douanes et accises au motif que ces modalités ne sont prévues nulle part et donc contraires à l'art. 2 du règlement CEE n° 1697/79 du 24 juillet 1979 concernant le recouvrement “a posteriori” des droits à l'importation ou des droits à l'exportation qui n'ont pas été exigés du redevable pour des marchandises déclarées pour un régime douanier comportant l'obligation de payer de tels droits (J.O. L. 197, p. 1). Ce règlement a été repris aux art. 220 et s. CDC, de même que son pendant (le Règl. (CEE) n° 1430/79 concernant la remise et le remboursement des droits) a été repris aux art. 236 et s. CDC.
[8] Art. 217 CDC.
[9] Art. 218 § 1 et 2 CDC.
[10] Art. 218 § 3 CDC.
[11] Art. 220 CDC.
[12] Art. 235 CDC.
[13] Art. 236 § 1 CDC.
[14] Pour une description complète des cas de figure, voy. K. Vanderwaeren, Douanedossier: terugbetaling en kwijtschelding, Kluwer, 2003, pp. 14 et s.
[15] En vertu de l'art. 221 § 3 CDC, cette communication doit intervenir dans un délai de trois ans à compter de la naissance de la dette douanière. Il s'agit d'un délai de prescription: voy., en ce sens, C.J.C.E. 23 février 2006, aff. C-201/04, Molenbergnatie, points 39 à 41.
[16] Pour une description complète des cas de figure, voy. K. Vanderwaeren, précité, pp. 19 et s.
[17] Art. 238 § 4 CDC.
[18] T.P.I.C.E. 18 janvier 2000, aff. T-290/97, Mehibas Dordtselaan/Commission, point 76.
[19] Voy. notamment l'arrêt de la Cour de justice du 26 mars 1987, aff. 58/86, Coopérative agricole d'approvisionnement des Avirons, point 22.
[20] Pour une description de la procédure: Circulaire Remboursements et Remises 1997; voy. également K. Vanderwaeren, précité, pp. 37 et s. et P. Vanvaeck, “Terugbetaling en kwijtschelding van douanerechten en accijnzen en BTW bij invoer”, T.F.R. 2005, p. 935.
[21] Art. 878 § 1 CDC.
[22] Art. 899 § 3 CDC.
[23] Art. 239 § 2 CDC.
[24] Art. 879 § 1 RACD.
[25] Voy. annexe 111 au RACD.
[26] Sur la répartition des compétences, voy. la Circulaire Remboursement et Remise 1997.
[27] Il s'agissait en particulier du Règl. (CEE) n° 1430/79 dont l'art. 13 était le précurseur de l'actuel art. 239 CDC.
[28] M. Lux, La réforme des règles de procédures relatives au non-recouvrement, à la remise et au remboursement des droits de douane, publié sur le site internet de la Commission européenne à l'adresse http://ec.europa.eu/taxation_customs/customs/procedural_aspects/general/debt/index_en.htm .
[29] J.O. L. 187 du 26 juillet 2003, p. 16.
[30] Art. 905 § 1 CDC.
[31] Art. 905 § 2 CDC.
[32] Art. 885 RACD.
[33] Art. 886 § 1 RACD.
[34] Art. 906 RACD.
[35] Art. 906bis RACD.
[36] M. Lux, précité.
[37] Art. 907 RACD.
[38] Art. 909 RACD.
[39] Art. 908 RACD.
[40] Voy. l'adresse suivante: http://ec.europa.eu/taxation_customs/customs/procedural_aspects/general . Deux types de décisions sont distinguées, à savoir les décisions relatives à la remise/remboursement d'une part (en abrégé “REM”) et les décisions relatives au non-recouvrement d'autre part (en abrégé “REC”). Pour les références à ces décisions, nous utiliserons les mêmes abréviations.
[41] Ibid.
[42] Art. 244 § 1 et 2 CDC.
[43] M.B. 12 août 2000.
[44] Il est à noter qu'aucun délai précis n'est prévu dans la loi pour l'adoption de la décision. Nous rappelons toutefois qu'il résulte du nouvel art. 1385undecies, qui est inséré par cet article dans le Code judiciaire par l'art. 9 de la loi du 23 mars 1999 sur l'organisation judiciaire en matière fiscale (M.B. 27 mars 1999), que, si l'administration omet de prendre une décision dans un délai raisonnable, le demandeur peut introduire l'affaire devant un tribunal. En effet, selon cette disposition, ce recours ne peut intervenir qu'au plus tôt six mois après la réception du recours administratif “au cas où ce recours n'a pas fait l'objet d'une décision”.
[45] Cette loi (M.B. 27 mars 1999) a en effet inséré un nouvel art. 1385undecies C. jud. qui dispose que “l'action en matière d'impôt n'est admise que si le demandeur a introduit préalablement le recours administratif organisé par ou en vertu de la loi”.
[46] Art. 569 al. 1er, 32° et 632 C. jud.
[47] Voy. notamment Anvers 27 avril 2004, Belgische Staat/Molenbergnatie, interrogeant la Cour de justice C.E. sur l'application dans le temps des art. 217 à 232 CDC. L'arrêt préjudiciel de la Cour de justice a été prononcé le 23 février 2006 (aff. C-201/04).
[48] Voy. notamment C.J.C.E. 15 février 2001, aff. C-239/99, Nachi, point 37: “[le principe général prévu à l'article 241 CE], qui tend à garantir que toute personne dispose ou ait disposé d'une possibilité de contester un acte communautaire qui sert de fondement à une décision qui lui est opposée, ne s'oppose nullement à ce qu'un règlement devienne définitif pour un particulier, à l'égard duquel il doit être regardé comme une décision individuelle et qui aurait pu sans aucun doute en demander l'annulation en vertu de l'article 230 CE, ce qui empêche ce particulier d'exciper devant la juridiction nationale de l'illégalité de ce règlement”.
[49] Voy., en ce sens, M. Lux, précité.
[50] T.P.I.C.E. 12 février 2004, aff. T-282/01, Aslantrans/Commission, point 53.
[51] T.P.I.C.E. 10 mai 2001, Kaufring e.a./Commission, aff. T-186/97, aff. T-187/97, aff. T-190/97 à T-192/97, aff. T-210/97, aff. T-211/97, aff. T-216/97 à T-218/97, aff. T-279/97, aff. T-280/97, aff. T-293/97 et aff. T-147/99, point 217.
[52] T.P.I.C.E. 9 novembre 1995, aff. T-346/94, France-aviation/Commission, point 34.
[53] Voy., par analogie, T.P.I.C.E. 11 juillet 2002, aff. T-205/99, Hyper/Commission, point 95.
[54] C.J.C.E. 11 novembre 1999, aff. C-48/98, Söhl & Sölke, point 52.
[55] T.P.I.C.E. 27 septembre 2005, aff. T-26/03, Geologistics/Commission, point 84.
[56] Arrêt Söhl & Söhlke, précité, point 56.
[57] Arrêt Kaufring e.a., précité, points 278 et 279.
[58] Voy. C.J.C.E. 16 juillet 1992, aff. C-187/91, Belovo, Rec., p. I-4937, point 18 et 14 mai 1996, aff. C-153/94 et C-204/94, Faroe Seafood e.a., point 100.
[59] Voy. C.J.C.E. 12 décembre 1996, aff. C-38/95, Foods Import, point 30 et 14 novembre 2002, aff. C-251/00, Illumitronica, point 56.
[60] Arrêt Hewlett-Packard, précité, point 23.
[61] Arrêt Foods Import, précité, points 30 et 31.
[62] Déc. REC 1/97.
[63] Déc. REC 2/94, REC 1/95, REC 4/97.
[64] Déc. REC 1/90
[65] Déc. REC 3/93 et REC 1/01.
[66] Arrêt Foods Import, précité, point 30; arrêt Illumitronica, précité, point 56.
[67] Voy. notamment le point 96 de C.J.C.E. 13 mars 2003, aff. C-156/00, Pays-Bas/Commission: “En ce qui concerne le deuxième critère, relatif à l'expérience de l'opérateur, force est de constater, ainsi que la Commission le relève à juste titre, que Cargill est une entreprise multinationale qui est habituée depuis de nombreuses années à appliquer la réglementation douanière et, notamment, les règles relatives aux différents régimes douaniers”.
[68] Voy. les décisions citées par la Commission européenne à la page 11 de son “Document d'information relatif à l'application des articles 220 § 2, b) et 239 du Code des douanes communautaire”, publié à l'adresse suivante: http://ec.europa.eu/taxation_customs/customs/procedural_aspects/general .
[69] Arrêt Behn, précité, points 13 à 16.
[70] Voy. C.J.C.E. 26 juin 1990, aff. C-64/89, lication des articles 220Deutsche Fernsprecher, point 22 et 1er avril 1993, aff. C-250/91, Hewlett Packard France, point 24.
[71] Déc. REC 4 à 7/94.
[72] Déc. REC 1/94.
[73] Arrêt Geologistics, précité, points 83 et 84.
[74] C.J.C.E. 29 avril 2004, aff. C-222/01, BAT, point 68.
[75] Ibid.
[76] C.J.C.E. 27 septembre 2001, aff. C-253/99, Bacardi, Rec., p. I-6493, point 56 et Aslantrans/Commission, précité, point 56.
[77] Art. 900 § 1, a) RACD.
[78] Art. 900 § 1, h) RACD.
[79] Art. 900 § 1, g) RACD.
[80] Art. 904, c) RACD.
[81] Voy. notamment Déc. REM 05/2004, point 10.
[82] Une demande fondée sur cette dernière disposition présente d'ailleurs l'avantage que le délai de prescription est de trois ans à compter de la communication (au lieu d'un an dans le cas d'une demande fondée sur l'art. 239 § 1 CDC).
[83] Arrêt du 19 février 1998, aff. T-42/96, Eyckeler & Malt/Commission, point 87.
[84] Voy., pour une illustration, la décision de la Commission du 19 décembre 2003 relative à une demande présentée par la Belgique (dossier REC 04/03), dans laquelle la Commission a admis l'existence d'une erreur des autorités compétentes (il s'agissait des autorités indonésiennes) pour les droits de douane mais a rejeté l'existence d'une telle erreur pour les droits anti-dumping. Pour ces derniers, elle a toutefois admis le droit à la remise de ces droits.
[85] Voy. notamment Cass. 12 avril 1994, État belge/Huygen, Arr.Cass. 1994, p. 359 (erreur des autorités autrichiennes sur la provenance d'un produit pour lesquels elles ont délivré un certificat EUR1). Voy. également Saisie Anvers 13 janvier 1998, J.P.A./R.H.A., p. 296 (erreur des autorités du Bangladesh sur l'origine des produits pour lesquels elles ont délivré des certificats d'origine).
[86] C.J.C.E. 3 mars 2005, aff. C-499/03 P, Biegi, point 46 et les références.
[87] Arrêt Faroe Seafood e.a., précité, point 91.
[88] Arrêt Faroe Seafood e.a., précité, point 92.
[89] Art. 220 § 2, b) al. 3 et 4 CDC.
[90] Art. 220 § 2, b) al. 5 CDC.
[91] Cass. 8 novembre 2002, T.F.R., p. 237, avec note C. Waerzeggers.
[92] Ces irrégularités ont fait l'objet de nombreux recouvrements de droits en Belgique et ont donné lieu à divers jugements et arrêts. Voy. notamment Anvers 27 mars 2004, Belgische Staat/Molenbergnatie (avec questions préjudicielles à la Cour de justice - aff. C-201/04).
[93] Cass. 8 novembre 2002, T.F.R., p. 237, avec note C. Waerzeggers.
[94] Voy., pour un exemple d'une telle mesure ordonnée par un tribunal, l'arrêt Kaufring e.a., précité.
[95] Un exemple de graves manquements des autorités douanières était en cause dans l'affaire ayant abouti à l'arrêt de la Cour de cassation du 12 avril 1994, État belge/Huygen, précité. Il est à noter que le manquement des autorités douanières est, dans cet affaire, qualifié de force majeure. Il nous semble que, au vu de l'évolution de la jurisprudence en la matière, il pourrait être également qualifié de “situation particulière” au sens de l'art. 239 CDC.
[96] T.P.I.C.E. 12 février 2004, aff. T-281/01, Aslantrans/Commission, point 58. Voy. également Anvers 14 décembre 1998, J.P.A./R.H.A. 1999, p. 116 et 4 mai 1992.
[97] Art. 900 § 1, a) RACD.
[98] C.J.C.E. 7 septembre 1999, C-61/98, De Haan Beheer, point 32.
[99] Arrêt Geologistics, précité, point 59.
[100] Ibid.
[101] Arrêts De Haan Beheer, précité, point 53 et BAT, précité, point 64; T.P.I.C.E. 14 décembre 2004, aff. T-332/02, Nordspedizionieri di Danielis Livio e.a./Commission, point 51.
[102] Arrêt BAT/Commission, précité, point 66.
[103] Arrêt de la Cour du 28 juin 1990, aff. C-80/89, Behn, points 14 et 15. Voy. également Bruxelles 22 juin 1987, F.J.F., p. 42: “Lorsqu'il appert des circonstances de fait que l'importateur a, en connaissance de cause, déclaré des marchandises importées sous une position tarifaire plus avantageuse que celle sous laquelle les biens auraient dû être déclarés et ce sur base d'indications manifestement erronées dans les factures et autres documents, on ne peut reprocher aucune faute à l'administration des douanes qui, sur base de ces données, a fourni des informations verbales à l'importateur relatives à la position tarifaire applicable.”.
[104] Arrêt Hewlett Packard, précité.
[105] Arrêt Hewlett-Packard, précité.
[106] Voy., par exemple, la Déc. REM 20/2002, concernant une demande de remise présentée par le Danemark.
[107] Arrêt du 15 novembre 2005, Commission/Danemark, aff. C-392/02, non encore publié au Recueil, point 60.
[108] Il semble probable que ce raisonnement s'applique également aux demandes de remise ou de remboursement fondées sur la clause d'équité de l'art. 239 § 1 CDC (sauf peut-être le cas où la situation particulière est constituée par un manquement de la Commission).