Cour d'appel de Liège 15 juin 2004
CONCESSION DE VENTE EXCLUSIVE
Résiliation de la concession à durée indéterminée - Acte équipollent à rupture - Pacte commissoire exprès - Validité - Reprise du stock - Obligation de bonne foi
En enlevant les véhicules en consignation chez son concessionnaire sans que celui-ci s'y oppose et alors que le concessionnaire était dans l'impossibilité ou en défaut de payer la majorité de ces véhicules, le concédant n'a pas posé d'acte équipollent à rupture.
Il y a lieu d'admettre la validité d'un pacte commissoire exprès stipulé dans un contrat de concession de vente, sans préjudice au droit du tribunal, lorsque la clause est libellée en termes généraux, d'apprécier la gravité du manquement allégué.
Le fait pour le concédant d'avoir proposé au concessionnaire une résiliation amiable ne le prive pas du droit de se prévaloir du pacte commissoire exprès figurant au contrat après que sa proposition a été rejetée.
En l'absence d'une disposition contractuelle réglant la question, l'exécution de bonne foi des conventions impose au concédant de reprendre le stock à sa valeur à la date de reprise, nonobstant l'application d'un pacte commissoire exprès.
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ALLEENVERKOOP
Concessie voor onbepaalde tijd - Beëindiging - Daad gelijkstaand met verbreking - Uitdrukkelijk ontbindingsbeding - Geldigheid - Terugname stock - Uitvoering te goeder trouw
Is geen daad gelijkstaand met verbreking door de concessiegever de terugname van de in bewaring gegeven voertuigen bij de concessiehouder die in de onmogelijkheid verkeert deze te betalen en zich niet verzet tegen deze maatregel.
Een uitdrukkelijk ontbindingsbeding in een verkoopsconcessie is geldig. De rechtbank kan echter de ernst van de aangehaalde tekortkoming onderzoeken, wanneer de clausule in algemene termen is opgesteld.
Het voorstel van de concessiegever om in der minne de concessie te beëindigen impliceert niet dat hij verzaakt aan het uitdrukkelijk ontbindingsbeding, wanneer het voorstel wordt verworpen.
Wanneer de overeenkomst terzake niets voorziet, en niettegenstaande het bestaan van een uitdrukkelijk ontbindingsbeding, verplicht het principe van de uitvoering te goeder trouw van de overeenkomsten dat de concessiegever de stock terugneemt aan de waarde op de dag van de terugname.
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SA Subaru Benelux / M. Leseine
Siég.: R. de Francquen (président), M. Ligot et A. Jacquemin (conseillers) |
Pl.: Mes N. Bottin loco E. Monard, N. Segers et O. Evrard loco R.-C. Walgraffe |
Vu l'arrêt rendu céans le 3 mai 2004;
Vu l'appel incident formé par Michel Leseine par conclusions du 15 novembre 2002;
Attendu que les parties étaient liées par un contrat de concession à durée indéterminée ayant pris cours le 2 janvier 1987;
que la particularité de ce contrat de concession vient de ce que dans les relations entre concédant et concessionnaire est venue s'immiscer à partir du 4 juin 1998 une troisième partie, la Transamerica Financieringsmaatschappij BV appelée T.D.F. dont la mission était d'assurer le financement des véhicules mis en consignation chez les concessionnaires;
Attendu que les parties s'opposent quant aux circonstances dans lesquelles il a été mis fin au contrat de concession en 2000;
Attendu que le concessionnaire soutient “qu'en reprenant les véhicules ce 29 mai (2000), en préjugeant de (son) accord de résiliation amiable, et en lui enlevant ainsi quasiment toute possibilité d'encore vendre des véhicules Subaru neufs, l'appelante a décidé de rompre la concession de vente dès le 29 mai 2000, sans d'ailleurs à ce moment invoquer à charge (de Michel Leseine) la moindre faute grave, et sans lui octroyer un préavis”;
qu'il considère “qu'ayant choisi la résiliation immédiate, par la reprise des véhicules appartenant à Transamerica qui elle ne s'était plainte de rien, le 29 mai 2000, l'appelante a rompu à cette date la convention et n'est plus fondée à modifier la cause de la rupture par des courriers largement postérieurs au 29 mai 2000” (conclusions, pp. 14 et 15);
Attendu que se fondant sur la loi du 27 juillet 1961 relative à la résiliation des concessions de vente exclusive à durée indéterminée, l'intimé réclame la condamnation de l'appelante au paiement
- d'une indemnité compensatoire de 44.620,83 euros, calculée sur base d'une durée de préavis raisonnable estimée à deux ans;
- d'une indemnité complémentaire de 11.155,21 euros;
- de 29.747,22 euros au titre de “pertes sur stock”;
- de 2.513,57 euros à titre de remboursement du montant indûment perçu par Subaru sur la garantie bancaire des pièces de rechange;
- de 4.957,87 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires destinés à réparer le dommage résultant de l'annulation des commandes en cours;
- de 500 euros à titre de dommages et intérêts en raison du caractère téméraire et vexatoire de la demande reconventionnelle introduite par Subaru.
Attendu que la position de l'appelante est de soutenir qu'elle a dans un premier temps cherché à obtenir l'accord de son concessionnaire sur le principe et les modalités d'une résiliation amiable avant de se prévaloir par lettre recommandée du 22 juin 2000 du pacte commissoire exprès figurant dans le contrat de concession qui prévoit que “le contrat prend fin, sans mise en demeure et de plein droit... si le dealer devient insolvable ou cesse ses paiements” (art. 20.3);
qu'elle explique que si elle a fait procéder à l'enlèvement des cinq véhicules qui se trouvaient en consignation, c'est avec l'accord de Michel Leseine “puisque nous ne voyons pas, ni vous, ni nous, comment vous pourriez vous sortir de cette situation de défaut de paiement répétée” (lettre S. à M.L. du 31 mai 2000);
qu'elle a introduit une demande reconventionnelle afin d'obtenir réparation du préjudice qu'elle a subi en raison de la perte du préavis d'au moins un an auquel elle avait droit en vertu de l'article 20 de la convention afin de pouvoir chercher un nouveau concessionnaire susceptible de remplacer l'intimé; qu'elle réclame de ce chef une indemnité provisionnelle estimée ex æquo et bono à 6.200 euros;
Attendu que les premiers juges ont considéré qu'en faisant procéder à l'enlèvement le 29 mai 2000 des cinq véhicules Subaru qui se trouvaient dans les établissements du demandeur,
- “(l'appelante) a décidé de rompre la concession de vente dès le 29 mai 2000, sans invoquer de faute à charge du demandeur, sans lui octroyer de préavis et sans avoir obtenu son accord sur cette résiliation et qu'elle a notifié cette intention au demandeur le même jour”;
- qu'“il n'y a dès lors pas lieu d'avoir égard aux différents courriers envoyés par la défenderesse ultérieurement, et notamment à la lettre du 22 juin 2000 par laquelle celle-ci prétend rompre la concession par application de la clause résolutoire expresse contenue dans le contrat”
car “la résiliation immédiate, sans juste motif ni préavis, d'une convention comportant des prestations échelonnées dans le temps et conclues pour une durée indéterminée, entraîne l'extinction immédiate de la convention (Cass. 9 mars 1973, Pas. 1973 I, p. 640) et qu'“il en résulte nécessairement qu'il est impossible de revenir sur la décision unilatérale de l'auteur de la rupture” (Mons 6 mars 1996, cité par P. Kileste et P. Hollander, “Examen”, R.D.C. 1998, n° 46, p. 18);
Attendu que la solution du litige passe par un examen attentif des faits et des différentes correspondances échangées entre parties en mai, juin et au début du mois de juillet 2000:
1. Le 26 mai, Subaru écrit à Michel Leseine pour se plaindre de ce qu'un chèque de 21.209 FB du 12 mai lui a été renvoyé par sa banque “faute de provision”. Elle annonce à son concessionnaire que “dès maintenant tous les envois (de pièces de rechange) sont arrêtés et qu'ils ne reprendront dans les limites de la garantie bancaire dont elle dispose que lorsque 'tous les comptes seront apurés'. Elle indique à Michel Leseine que désormais les chèques seront refusés à l'exception des chèques garantis et que s'il lui faut des pièces, il lui faudra 'venir jusqu'ici avec de l'argent liquide'”.
2. Le 29 mai, une réunion se tient au siège de Subaru à l'occasion de laquelle il est proposé à Michel Leseine de mettre fin à son contrat de distributeur. Celui-ci refuse. Le jour même, Subaru procède à l'enlèvement de cinq véhicules en consignation chez Michel Leseine et deux de ses agents.
3. Le 31 mai, Subaru écrit à Michel Leseine par lettre recommandée “pour (lui) confirmer les points abordés lors de (la) discussion du 29 mai”:
“Vous avez dans votre stock deux véhicules Subaru... que vous financez via un financement de stock de la société Transamerica. Conformément aux accords passés avec cette société, les véhicules doivent être payés au plus tard un an après leur livraison chez vous... Ces deux voitures sont présentes chez vous depuis plus d'un an... Dans les deux cas, la date d'échéance pour le paiement (les 24 févruer et 29 avril 2000) est dépassée.
De plus une troisième voiture devra bientôt être payée (le 31 mai 2000).
Vous nous avez déclaré lors de notre conversation qu'il vous était impossible de payer ces trois véhicules comme convenu dans le contrat et que vous souhaitiez donc que Subaru Belgium les reprenne vu votre situation financière.
Nous vous rappelons (…) que vous avez à diverses reprises eu des retards de paiement pour les intérêts que vous avez à payer à partir du quatrième mois de présence des véhicules chez vous et que nous avons à chaque fois dû intervenir auprès de la société Transamerica pour trouver un arrangement.
Vous avez encore deux autres véhicules financés par Transamerica dans votre stock (...) qui ne sont pas encore arrivés à échéance de paiement.
Vous avez également en back-order cinq véhicules que vous souhaitez aussi financer via Transamerica.
Toutes les livraisons de voitures neuves et de pièces détachées sont bloquées jusqu'au règlement complet de toutes les factures échues.
Par ailleurs, notre service comptabilité nous signale que vous avez émis pour payer des pièces détachées un chèque sans provision d'un montant de 21.209 FB ce qui porte votre débit pour des pièces détachées à 278.591 FB alors que votre garantie bancaire ne vous couvre que pour la somme de 250.000 FB. De plus vous disposez d'un délai de paiement de 30 jours alors que la plus ancienne facture à payer date du 28 janvier 2000. Nous vous renvoyons dès lors au point 3 de l'article 20 de votre contrat de concession signé le 2 janvier 1987.
Pour ces raisons et suite à votre accord, nous avons fait reprendre ce 29 mai dans l'après-midi par un transporteur les cinq véhicules se trouvant chez vous.
Nous vous proposons également de signer un document signalant l'arrêt de notre collaboration de commun accord puisque nous ne voyons pas, ni vous, ni nous comment vous pourriez vous sortir de cette situation de défaut de paiement répétée.”
À cette lettre est donc jointe un courrier qui précise les modalités de la terminaison du contrat à la date du 29 mai qu'il est demandé à Michel Leseine de renvoyer après l'avoir signé, ce qu'il se gardera bien de faire.
Le courrier recommandé du 31 mai ne fera cependant l'objet d'aucune contestation de la part de M. Leseine.
4. Le 31 mai, une seconde lettre recommandée est envoyée par Subaru à son concessionnaire. Elle signale la présentation d'un second chèque refusé et contient une mise en demeure de payer le montant de 278.591 FB correspondant au “solde actuel” (de M. Leseine) dans ses livres.
5. Le 8 juin, T.D.F. notifie à Subaru qu'elle lui retourne quatre (des cinq) véhicules repris chez Leseine. Il est indiqué que “cette décision est surtout basée sur la situation financière de Leseine. Cette année, Transamerica a en particulier éprouvé des problèmes de paiement concernant les intérêts et échéances dans toutes les unités (voitures)” (traduction libre et non contestée de la pièce 13 figurant au dossier de S.).
6. Le 14 juin, une nouvelle réunion se tient au siège de Subaru. Il est proposé cette fois à Michel Leseine de mettre fin à la convention au 31 juillet au plus tard de façon à lui permettre d'exécuter les commandes passées par quatre clients. Il est bien précisé que les véhicules seront mis à sa disposition “après paiement cash”.
Cette seconde proposition est également refusée par Michel Leseine.
7. Le 20 juin, Subaru notifie à M. Leseine que les quatre nouveaux véhicules sont bloqués et qu'il est indispensable “que vous respectiez strictement les conditions de paiement, afin de permettre à Subaru de respecter les délais de livraison”.
8. Le 21 juin, T.D.F. signale à Subaru par fax que “Vu la non-exécution en ce qui concerne le contrat de fournisseur-programme de consignation du stock T.D.F. avec le distributeur M. Leseine et vu les données à notre disposition relative à la situation financière de cette entreprise, Transamerica ne peut pas mettre à disposition des facilités.” (traduction libre et non contestée de la pièce 15 figurant au dossier de S.).
9. Le même jour, Michel Leseine adresse à Subaru un fax pour se plaindre du refus de l'approvisionner en pièces de rechange dont il a un besoin urgent et de ce qu'il lui a été indiqué qu'il pourrait obtenir ses pièces en s'adressant à la succursale de Vilvorde. Michel Leseine proteste - il s'agit en fait de sa seule contestation écrite - et insiste en précisant qu'“en tant que concessionnaire, (il a) le droit de commander des pièces directement à votre magasin sans passer par une succursale”.
10. Le 22 juin par lettre recommandée, Subaru notifie à M. Leseine qu'elle constate qu'“il a été satisfait aux conditions de l'article 20 alinéas 3 et 4 (du contrat de concession) et que la convention est résiliée dès maintenant.
La motivation de cette résiliation peut être résumée comme suit:
1. Les paiements à Transamerica n'ont pas été effectués suivant la convention...
2. Les difficultés de paiement (avec Transamerica) se sont produites de manière répétitive...
3. L'exploitation plus avant de votre garage est manifestement compromise en raison des difficultés avec Transamerica...
4. La livraison de nouveaux véhicules et de pièces détachées est bloquée jusqu'au moment du règlement financier.
5. Vous avez émis deux chèques non provisionnés d'un montant de 21.209 FB et 24.705 FB. De plus, le débit pour achat de pièces détachées s'élève à la date du 14 juin 2000 à 278.591 FB et la plupart des factures sont échues, la plus ancienne datant du 27 janvier 2000 alors que vous disposez d'un délai de paiement de 30 jours.
6. Le 29 mai, 5 véhicules ont dû être repris chez vous.
Nous référons également au fait que la société Transamerica nous a fait savoir qu'elle a perdu toute confiance en votre entreprise.
C'est uniquement à titre conservatoire, et sans reconnaissance préjudiciable, que nous confirmons que les faits précités suffisent également à résilier la convention à vos torts, ce sur base de manquements graves...
Il est manifeste que toute collaboration ultérieure est impossible, dès lors qu'il résulte tant de notre relation directe que de la relation avec Transamerica que la confiance financière minimale, nécessaire à la poursuite, est ébranlée.”
11. Le 23 juin, Subaru fait appel à concurrence de 161.990 FB à la garantie bancaire de 250.000 FB dont elle dispose (dossier M.L., pièce 17).
12. Le 26 juin en réponse au courrier du 21 de M. Leseine à propos du refus d'approvisionnement en pièces de rechange, Subaru rappelle ses courriers des 26 et 31 mai qui précisaient que toutes les fournitures étaient bloquées jusqu'au règlement de toutes les factures échues.
13. Le 4 juillet soit cinq jours après l'introduction de la procédure, Subaru notifie à Michel Leseine qu'elle annule les commandes en cours en exécution de l'article 21 du contrat de concession.
Discussion |
Attendu qu'il s'agit donc de décider si en procédant le 29 mai à l'enlèvement des 5 véhicules en consignation chez Michel Leseine, l'appelante a posé un acte équipollent à rupture, ce qui serait le cas si cet enlèvement était intervenu contre la volonté du concessionnaire;
qu'il n'en a pas été ainsi;
que le 29 mai, Michel Leseine a rejeté l'offre qui lui était faite par Subaru de mettre fin de commun accord au contrat qui les liait; que par contre, il peut être admis qu'il ne s'est pas opposé à l'enlèvement des véhicules mis en consignation par Transamerica qu'il était dans l'impossibilité et en défaut de payer pour trois d'entre eux;
que l'on en veut pour preuve que
- Michel Leseine a donné lui-même l'ordre à ses deux “sous-agents”, ses fils Pascal et Philippe de ramener à son garage les véhicules qu'ils avaient en dépôt afin qu'ils puissent être repris par le transporteur délégué par Subaru;
- le procès-verbal de reprise des véhicules dressé contradictoirement qui décrit avec minutie l'état des voitures ne comporte aucune réserve relative au principe même de leur enlèvement;
- Michel Leseine ne proteste pas contre l'enlèvement de ces cinq voitures alors qu'il s'insurge et argue de sa qualité de concessionnaire lorsque le 21 juin, Subaru refuse de l'approvisionner en pièces de rechange;
Attendu que le contrat n'a donc pas été résilié à la date du 29 mai; que les parties ont continué à discuter, l'appelante faisant à l'intimé une contre-proposition qui devait permettre à Michel Leseine d'honorer les dernières commandes enregistrées;
Attendu que le fait pour l'appelante d'avoir proposé à l'intimé les modalités d'une résiliation de commun accord ne la prive pas du droit de se prévaloir du pacte commissoire exprès figurant au contrat après que ses propositions aient été rejetées;
qu'il doit être précisé d'emblée qu'il n'y a pas matière à application en l'espèce de l'article 20.4. du contrat qui prévoit la résolution automatique de celui-ci en cas de violation des conditions d'exclusivité; que rien de tel ne figure au dossier et qu'il est permis de considérer que c'est par erreur que cette disposition a été invoquée dans la lettre du 22 juin 2000;
Attendu que le litige porte sur l'application de l'article 20.3. dont le contenu a été reproduit plus haut;
Attendu que “la loi du 27 juillet 1961 est étrangère au droit de la résolution de la concession pour inexécution fautive et, par conséquent, n'interdit pas aux parties de définir anticipativement les obligations auxquelles elles attachent une importance telle que leur inexécution justifierait la résolution” (T.P.D.C., tome 2, n° 988);
que la Cour de cassation a admis successivement la validité d'une clause résolutoire expresse en cas d'inexécution des obligations contractuelles (Cass. 19 avril 1979, Pas. 1979, I, 981) puis celle d'une clause résolutoire expresse n'ayant pas pour objet un manquement contractuel (Cass. 30 juin 1995, Pas. 1995, I, 724);
Attendu que dans la mesure où l'événement futur et incertain dont la survenance entraîne la dissolution du contrat est lié à l'inexécution fautive de celui-ci, la clause mise en oeuvre par l'appelante constitue un pacte commissoire exprès;
Attendu que la clause étant libellée en des termes généraux, il est permis au tribunal d'apprécier et de se prononcer sur la gravité du manquement invoqué (Fierens et Mottet-Haugaard, “Chronique”, J.T. 1998, n° 27, p. 110);
que la référence au caractère potestatif de la clause est hors de propos puisque seules les obligations contractées sous une condition suspensive purement potestative dans le chef de celui qui s'oblige sont nulles (Kileste et Hollander, “Examen”, R.D.C. 2003, n° 44, p. 422) tandis qu'une condition purement potestative dans le chef du créancier est valable (Van Ommeslaghe, Les obligations, 1987, 762);
Attendu qu'en l'espèce, la gravité de l'état de cessation de paiements de l'intimé ne saurait être contestée tant à l'égard de Subaru que de Transamerica;
qu'en ce qui concerne Subaru, à aucun moment, l'intimé n'a contesté le montant de 278.591 FB qu'il a été mis en demeure de payer le 31 mai 2000; que les paiements dont l'intimé explique qu'il n'a pas été tenu compte qui totalisent 65.371 FB (conclusions, pt. 23, dossier M.L., annexes pièce 17) ont été effectués le 27 juin;
Attendu que dans la mesure où l'exécution du contrat de concession est intimement liée à celle du contrat de revendeur “programme T.D.F. de consignation de stock” conclu par Michel Leseine avec Transamerica, il est permis d'avoir égard à la situation financière de l'intimé à l'égard de Transamerica;
qu'ainsi donc, non seulement de très nombreuses factures dressées par Subaru pour la fourniture de pièces de rechange n'ont pas été payées dans le délai de 30 jours prévu mais encore, Michel Leseine était dans l'impossibilité de faire face à ses obligations à l'égard de Transamerica, partenaire obligé de la concession;
qu'à l'allégation de l'appelante exprimée dans la lettre du 31 mai 2000, “nous ne voyons pas ni vous, ni nous, comment vous pourriez vous sortir de cette situation de défaut de paiement répétée”, l'intimé n'a opposé aucun démenti;
que les propres chiffres de l'intimé révèlent d'ailleurs que sa marge bénéficiaire était faible et que l'on voit dès lors mal comment il aurait pu faire face à ses obligations principalement à l'égard de Transamerica;
que celle-ci a d'ailleurs notifié à Subaru le 21 juin 2000 son refus de consentir les facilités dont Michel Leseine avait besoin pour financer l'exécution des dernières commandes en cours, ce qui explique la décision prise par Subaru le lendemain;
que les considérations de Michel Leseine concernant diverses erreurs intervenues dans la comptabilité de Subaru n'énervent en rien les considérations qui précèdent; qu'il existait bien le 22 juin 2000 un arriéré important de paiement tant à l'égard de Subaru que de Transamerica; que cet arriéré révélateur d'une situation financière tendue rendait malaisée la poursuite des relations entre parties et qu'il ne pouvait être imposé à Subaru et à Transamerica de poursuivre des relations commerciales avec un distributeur qui ne présentait plus des garanties suffisantes de solvabilité;
que la mise en oeuvre par Subaru du pacte commissoire exprès est donc licite;
Attendu que la demande de Michel Leseine tendant à obtenir la condamnation de Subaru au paiement d'une indemnité compensatoire et d'une indemnité complémentaire n'est donc pas fondée;
qu'il en va de même de la demande portant sur la rupture par Subaru des contrats en cours; que l'article 21 du contrat de concession autorise en effet l'appelante à “annuler toute commande du dealer qui n'aurait pas été exécutée lors de l'expiration du contrat”;
Attendu qu'en ce qui concerne la reprise du stock, c'est à raison que le tribunal a décidé en l'absence d'une disposition contractuelle réglant la question que “l'exécution de bonne foi des conventions impose (…) à la défenderesse de reprendre le stock à sa valeur au 29 mai 2000” (jugt., p. 940, pt. 2.2.3.); que le fait que la fin du contrat soit la conséquence de l'application par l'appelante d'un pacte résolutoire exprès n'y change rien;
que “l'exécution des conventions peut, en effet, du point de vue de la bonne foi, comprendre la dissolution des conventions plus particulièrement lorsqu'une partie prend l'initiative de la dissolution. On s'accorde à dire qu'une partie doit mettre fin à un contrat ou appliquer une sanction de l'inexécution, en respectant les exigences de la bonne foi. C'est en particulier - mais non exclusivement - au créancier, victime de l'inexécution par son débiteur, qu'incombe, dès lors, l'obligation de déterminer son comportement en tenant compte des intérêts légitimes de son cocontractant” (Stijns, Van Gerven et Wéry, “Chronique. Les obligations: Les sources”, J.T. 1996, p. 703; qu'un arrêt de la cour d'appel de Mons (17 décembre 1991, R.R.D. 1992, 49) cité par les mêmes auteurs (même référence) rappelle “que la solidarité, que le lien contractuel établit en vue de l'utilité sociale, défend à chacune des parties de se désintéresser de l'autre, impose à celles-ci une collaboration loyale et requiert que le créancier de l'obligation s'abstienne de tout acte ou omission susceptible de rendre plus lourde ou plus onéreuse la situation du débiteur”);
que cette obligation porte sur le seul stock non obsolète, présentant encore une certaine valeur ou utilité à la date du 22 juin 2000; qu'elle ne doit pas être limitée aux pièces de rechange que l'intimé aurait pu écouler pendant la durée d'un préavis mais qu'il s'agit de vérifier si l'intimé a procédé à une gestion normale de son stock compte tenu de l'importance réelle de la concession et n'a pas effectué des achats inconsidérés;
que la mesure d'instruction ordonnée par les premiers juges doit dès lors être adaptée; qu'il paraît plus opportun compte tenu du caractère technique de la mission de recourir à un expert automobile plutôt qu'à un réviseur d'entreprises;
Attendu que pour ce qui est du remboursement des montants indûment perçus par l'appelante dans le cadre de l'appel à la garantie bancaire, il convient de s'en tenir aux paiements dont l'intimé établit qu'il n'a pas été tenu compte et qui totalisent 65.371 FB (voir plus haut); que les factures dont l'intimé réclame paiement ont été protestées et que l'intimé n'établit pas qu'elles sont dues;
Attendu que s'il peut être admis que l'appelante n'a pas agi de façon arbitraire et contraire au principe de l'exécution de bonne foi des conventions lorsqu'elle a décidé de mettre fin au contrat sur base du pacte commissoire exprès et de se “débarrasser” d'un concessionnaire peu fiable sur le plan financier, sa demande reconventionnelle tendant à obtenir la condamnation de celui-ci au paiement d'une indemnité provisionnelle de 6.200 euros en raison de la perte du préavis dont elle aurait dû bénéficier et qui lui aurait permis de le remplacer, est indécente;
que cette décision trouve en effet sa place dans le cadre d'une politique de restructuration de l'ensemble de son réseau dont elle a fait choix pour des raisons qui lui sont propres;
que cette demande est téméraire et vexatoire et justifie qu'elle soit condamnée à payer à l'intimé 500 euros à titre de dommages et intérêts;
Par ces motifs
Vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935,
La cour statuant contradictoirement
Dispositif conforme aux motifs.