Article

Cour de cassation, 25/06/2004, R.D.C.-T.B.H., 2005/8, p. 855-856

Cour de cassation 25 juin 2004

ASSURANCE
Assurance en responsabilité - Droit des tiers - Responsabilité partagée des conducteurs - Opposabilité du partage au propriétaire d'un des véhicules qui n'a pas commis de faute
Lorsque le dommage subi par la victime est dû aux fautes concurrentes de plusieurs personnes, chacune de celles-ci est tenue, en règle, envers la victime à la réparation intégrale de ce dommage. En considérant qu'il convient de condamner l'assureur de l'un des conducteurs responsables de l'accident, à indemniser la défenderesse de la totalité du dommage causé à son véhicule, aux motifs que celle-ci ne conduisait pas son véhicule lors de l'accident et n'était pas civilement responsable du conducteur, et que le partage de la responsabilité ne lui est, dès lors, pas opposable, les juges d'appel ont légalement justifié leur décision.
VERZEKERING
Aansprakelijkheidsverzekering - Recht van derden - Gedeelde aansprakelijkheid van bestuurders - Tegenwerpelijkheid van de verdeling aan de foutloze eigenaar van een van de voertuigen
Wanneer de door de getroffene geleden schade te wijten is aan de samenlopende fouten van verscheidene personen, is elk van hen, in de regel, jegens de getroffene gehouden tot volledig herstel van die schade. Door te oordelen dat de verzekeraar van een van de voor het ongeval aansprakelijke bestuurders, veroordeeld moet worden om verweerster te vergoeden voor het geheel van de schade aan haar voertuig, op grond dat zij het voertuig niet bestuurde op het ogenblik van het ongeval en niet burgerlijk aansprakelijk was voor de bestuurder, en dat de verdeling van de aansprakelijkheid haar bijgevolg niet kan worden tegengeworpen, hebben de rechters hun beslissing naar recht verantwoord.

KBC Assurances / L.C.

Siég.: Ph. Echement (président), D. Batselé, A. Fettweis, Ch. Matray et S. Velu (conseillers)
M.P.: A. Henkes (avocat général)
Pl.: Me C. Draps
I. La décision attaquée

Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 21 février 2003 par le tribunal de première instance de Namur, statuant en degré d'appel.

(...)

III. Le moyen de cassation

La demanderesse présente un moyen libellé dans les termes suivants:

Dispositions légales violées

- article 12 de la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs;

- articles 1134, 1382 et 1383 du Code civil.

Décisions et motifs critiqués

Le jugement attaqué, statuant sur l'action directe de la défenderesse, propriétaire du véhicule conduit par le sieur D., qu'il reconnaît responsable pour moitié de l'accident de la circulation du 7 mars 1998, contre la demanderesse, assureur de l'autre véhicule impliqué dans l'accident, condamne cette dernière à l'indemniser de la totalité de son dommage, soit la somme de 3.166,54 euros augmentée des intérêts compensatoires au taux légal depuis le jour de l'accident, des intérêts judiciaires et des dépens des deux instances, aux motifs que “le partage de responsabilité ne lui (est) pas opposable; (qu')en effet, elle ne conduisait pas le véhicule lors de l'accident et n'était pas civilement responsable pour le conducteur”.

Griefs

L'action directe reconnue à la personne lésée contre l'assureur par l'article 12 de la loi du 21 novembre 1989 visée au moyen n'a lieu, en règle, que dans les cas où l'assureur est tenu d'apporter sa garantie en vertu du contrat ou de la loi. Pour que l'assureur doive couvrir la responsabilité du conducteur d'un véhicule automoteur, il faut que soit établie l'existence d'un dommage, d'une faute et d'un lien de causalité entre cette faute et ce dommage. L'assureur de la responsabilité ne couvre que le dommage causé par la faute de son assuré.

Le jugement attaqué constate qu'“il convient (...) de délaisser la moitié de la responsabilité” à M.D., qui conduisait le véhicule, propriété de la défenderesse.

En décidant néanmoins que le partage de responsabilité n'était pas opposable à la défenderesse et en condamnant la demanderesse, assureur de la responsabilité de M.J., dont la faute n'a contribué à la réalisation du dommage qu'à concurrence de la moitié, à réparer intégralement le dommage subi par la défenderesse exerçant contre elle l'action directe, le jugement viole tant l'article 12 de la loi du 21 novembre 1989 que l'article 1134 du Code civil en imposant à l'assureur d'apporter une garantie au-delà de ce qui est prévu par la loi et par le contrat et, par voie de conséquence, les articles 1382 et 1383 du Code civil en retenant dans le chef de l'assureur de la responsabilité une obligation de couverture supérieure au dommage réparable en application de ces dispositions.

IV. La décision de la Cour

Attendu que lorsque le dommage subi par la victime est dû aux fautes concurrentes de plusieurs personnes, chacune de celles-ci est tenue, en règle, envers la victime à la réparation intégrale de ce dommage;

Attendu que le jugement attaqué constate qu'un accident de la circulation est survenu le 7 mars 1998 entre le véhicule assuré par la demanderesse et conduit par J.-C.J. et celui appartenant à la défenderesse et conduit par D.D.; qu'il décide que chacun des conducteurs est pour moitié responsable de l'accident;

Attendu qu'en considérant qu'il convient de condamner la demanderesse, assureur de l'un des conducteurs responsables de l'accident, à indemniser la défenderesse de la totalité du dommage causé à son véhicule, aux motifs que celle-ci ne conduisait pas son véhicule lors de l'accident et n'était pas civilement responsable du conducteur, et que le partage de la responsabilité ne lui est, dès lors, pas opposable, les juges d'appel ont légalement justifié leur décision;

Que le moyen ne peut être accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi;

(...)