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Les recours objectifs de pleine juridiction et les pouvoirs limités du juge judiciaire, R.D.C.-T.B.H., 2005/8, p. 799-809

Les recours objectifs de pleine juridiction
et les pouvoirs limités du juge judiciaire [1]

Xavier Taton [2]

TABLE DES MATIERES

1. Les arrêts commentés

2. Le caractère objectif du recours et ses conséquences

3. La notion de recours de pleine juridiction

4. La détermination par les parties du cadre de l'instance

5. Les conditions de la prise de décision administrative

6. Conclusion

RESUME
Depuis la loi du 17 janvier 2003, les décisions de l'Institut belge des services postaux et des télécommunications peuvent faire l'objet d'un recours en pleine juridiction devant la cour d'appel de Bruxelles. Dans les trois arrêts commentés, prononcés les 18 juin, 14 et 15 octobre 2004, la cour d'appel s'est prononcée expressément sur le cadre processuel et sur les limites de ce type de recours.
D'une part, le caractère objectif du recours implique que la cour d'appel statue en premier et dernier ressort, que l'instance est introduite par citation, et que l'arrêt est revêtu d'une autorité absolue de chose jugée.
D'autre part, la cour d'appel s'est limitée à annuler les décisions attaquées à la suite d'un contrôle de légalité. En effet, la cour a refusé, à juste titre, de se substituer à l'autorité administrative, sur pied du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs, et de l'obligation de respecter les conditions de validité auxquelles la prise de décision de l'IBPT est assujettie.
SAMENVATTING
Sinds de wet van 17 januari 2003 bestaat de mogelijkheid om een objectief beroep met volle rechtsmacht in te stellen bij het hof van beroep te Brussel tegen beslissingen van het Belgisch Instituut voor postdiensten en telecommunicatie. In de drie geannoteerde arresten, uitgesproken op 18 juni, 14 en 15 oktober 2004, gaat het hof van beroep uitdrukkelijk in op het processuele kader en de beperkingen van dit soort beroep.
Aan de ene kant houdt de objectieve aard van het beroep in dat het hof van beroep in eerste en laatste aanleg beslist, dat het geding door dagvaarding wordt ingeleid, en dat het arrest een absolute kracht van gewijsde heeft.
Aan de andere kant heeft het hof van beroep zich beperkt tot de vernietiging van de bestreden beslissingen na een wettigheidstoezicht. Het hof heeft inderdaad terecht geweigerd zich in de plaats van de administratieve overheid te stellen, op grond van het grondwettelijk beginsel van de scheiding der machten, en de verplichting om de geldigheidsvereisten van een beslissing van het BIPT te eerbiedigen.
1. Les arrêts commentés

1.La loi du 17 janvier 2003 relative au statut du régulateur des secteurs des postes et des télécommunications belges [3] (ci-après, la “loi relative au statut du régulateur”) a modifié le statut de l'Institut belge des services postaux et des télécommunications (ci-après, “IBPT”) dans le sens d'un accroissement de son autonomie vis-à-vis du Ministre compétent pour les matières relatives aux postes et aux télécommunications [4]. Outre les missions qui sont attribuées à l'IBPT par la loi du 30 juillet 1979 relative aux radiocommunications, par la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, et par leurs arrêtés d'exécution, l'article 14 § 1er de la loi relative au statut du régulateur [5] confie à cet organisme d'intérêt public des compétences d'avis, de prise de décisions administratives [6], de contrôle [7] et de conciliation [8], [9].

À l'occasion de cette réforme, le législateur a également modifié le régime des voies de recours contre les décisions de l'IBPT [10], [11]. En effet, l'article 2 de la loi du 17 janvier 2003 concernant les recours et le traitement des litiges à l'occasion de la loi du 17 janvier 2003 relative au statut du régulateur des secteurs des postes et télécommunications belges [12] (ci-après, la “loi concernant les recours”) dispose que les décisions de l'IBPT peuvent faire l'objet d'un recours en pleine juridiction devant la cour d'appel de Bruxelles statuant comme en référé [13]. Le Code judiciaire s'applique à l'ensemble des aspects ayant trait à la procédure [14].

Depuis l'entrée en vigueur de ces deux lois, la cour d'appel de Bruxelles a eu l'occasion, dans les trois arrêts qui font l'objet du présent commentaire [15], de préciser les limites de ce nouveau contentieux objectif de pleine juridiction.

2.Le premier arrêt, prononcé le 18 juin 2004 [16], concerne une convention d'interconnexion entre les réseaux de télécommunications des opérateurs Belgacom Mobile et Base. Le 30 juin 2003, Base a informé Belgacom Mobile qu'elle modifiait la répartition de ses plages horaires entre heures pleines et heures creuses [17]. À défaut de solution amiable [18], Base a sollicité de l'IBPT qu'il constate le caractère raisonnable de sa demande d'interconnexion et le caractère injustifié du refus de Belgacom et de Belgacom Mobile d'accepter la modification tarifaire [19]. En date du 29 août 2003, l'IBPT a considéré que la demande de Base était raisonnable, et a décidé que les opérateurs puissants (Belgacom, Belgacom Mobile et Mobistar) devaient y répondre favorablement et que la nouvelle répartition des plages horaires de Base entrerait en vigueur le 1er octobre 2003.

Par une requête déposée le 17 septembre 2003 au greffe de la cour d'appel de Bruxelles, Belgacom Mobile a formé un recours contre cette décision, demandant à la cour de la mettre à néant et d'ordonner qu'aucune suite favorable ne peut être donnée à la demande de Base d'imposer une modification de la convention d'interconnexion. Base est intervenue volontairement à la procédure, aux fins d'entendre déclarer ce recours irrecevable, et à tout le moins, non fondé.

L'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles du 18 juin 2004 définit, en premier lieu, l'objet et la nature de l'acte attaqué. Il considère que par cette décision, l'IBPT avait constaté la commission par Belgacom Mobile d'une infraction à l'obligation des opérateurs puissants de répondre à toute demande raisonnable d'interconnexion [20], et qu'il avait mis Belgacom Mobile en demeure d'y remédier, sur pied de l'article 21 de la loi du 17 janvier 2003 relative au statut du régulateur. L'arrêt déclare le recours de Belgacom Mobile recevable et fondé, au motif que l'IBPT ne pouvait pas puiser dans l'article 109ter § 3 de la loi du 21 mars 1991, le pouvoir d'imposer à Belgacom Mobile d'accepter une modification du contrat d'interconnexion [21]. L'arrêt prononce l'annulation de l'acte attaqué, mais refuse d'ordonner qu'aucune suite favorable ne peut être donnée à la demande de Base de modifier la convention d'interconnexion, aux motifs, d'une part, que la cour ne peut pas priver l'IBPT de sa liberté d'appréciation et se substituer à lui, et d'autre part, que les mécanismes de consultation et de coopération prévus par les directives européennes devraient être suivis avant le prononcé d'une nouvelle décision.

3.Le deuxième arrêt, prononcé le 14 octobre 2004 [22], a trait à la fixation des coûts d'établissement par numéro mobile transféré dans le cadre de la portabilité des numéros mobiles [23]. Après une concertation avec tous les opérateurs mobiles, une “décision” de l'IBPT du 16 septembre 2003 [24] a fixé les coûts d'établissement par numéro mobile transféré avec succès [25] pour une période de trois ans s'étendant du 1er octobre 2002 [26] au 1er octobre 2005.

Par une requête déposée le 21 octobre 2003, Mobistar a demandé à la cour d'appel de Bruxelles de mettre à néant la décision de l'IBPT et de fixer les coûts d'établissement en cause [27]. Mobistar a dirigé son recours tant contre l'IBPT, que contre Belgacom Mobile et Base. Par voie de conclusions, Belgacom Mobile a introduit un recours incident, tendant à l'annulation de la décision attaquée et à la fixation d'autres coûts d'établissement [28].

Le deuxième arrêt commenté constate, dans un premier temps, que l'acte attaqué constitue un règlement, c'est-à-dire une norme juridique de caractère général et obligatoire s'appliquant à tous les cas de portage d'un numéro mobile [29]. Après avoir déclaré les recours recevables, l'arrêt considère, prima facie, que le règlement de l'IBPT est dépourvu de base légale, au motif qu'il est pris sur pied de dispositions contraires au nouveau cadre législatif européen, dont le délai de transposition expirait le 24 juillet 2003. Sur ce motif, l'arrêt pose plusieurs questions préjudicielles à la Cour de justice des Communautés européennes et ordonne la suspension du règlement attaqué dans l'attente d'une réponse. En outre, l'arrêt rejette le recours de Mobistar en ce qu'il tend à entendre la Cour fixer les coûts d'établissement litigieux, au motif qu'en organisant un recours de pleine juridiction, le législateur n'a pas entendu confier un pouvoir réglementaire à la cour d'appel de Bruxelles. Enfin, l'arrêt constate que l'annulation d'un règlement a nécessairement un effet erga omnes, de sorte qu'il est sans intérêt d'examiner séparément les demandes de Belgacom Mobile et de Base.

4.Le troisième arrêt, prononcé le 15 octobre 2004 [30], concerne les obligations tarifaires imposées par l'IBPT à Belgacom pour la réalisation des opérations de migration et pour la garantie de disponibilité d'un certain nombre de positions sur des Multiplexeurs d'accès appelés DSLAM, permettant à d'autres opérateurs de fournir aux utilisateurs finaux des services ADSL ou SDSL concurrents. En l'espèce, un “avis contraignant” de l'IBPT du 2 juin 2003 [31] a accordé à Belgacom un délai de 10 jours pour modifier son offre de référence 2003 pour l'accès à un débit binaire [32], tout en précisant que les offres de Belgacom devaient, de toute manière, être considérées comme modifiées dès la parution de cet avis.

Par une requête déposée le 3 juillet 2003, Belgacom a formé un recours contre cet avis contraignant, tendant à entendre la cour d'appel annuler cette décision et décider d'autres modalités techniques et commerciales de l'accès au débit binaire pour 2003, se substituant à celles édictées par l'IBPT.

Après avoir déclaré le recours recevable, l'arrêt considère que l'IBPT ne pouvait pas légalement, dans le cadre du contrôle de l'offre de référence de Belgacom [33], contraindre celle-ci, en 2003, à modifier les conditions de son offre de référence publiée le 31 décembre 2002 [34]. Sur ce motif, l'arrêt déclare le recours en annulation de Belgacom fondé, maintient la décision attaquée en tant qu'avis non contraignant et refuse, eu égard au motif d'annulation retenu, d'édicter des modalités techniques ou commerciales de l'accès au débit binaire pour l'année 2003.

5.Bien que ces trois arrêts envisagent des problèmes de fond particulièrement intéressants, nous nous limiterons, dans le cadre de la présente note, à les examiner sous un angle processuel. En effet, ces décisions posent de manière explicite la question des limites aux “recours objectifs de pleine juridiction” [35] que le législateur actuel se plaît à créer à l'encontre des décisions des autorités administratives de contrôle.

Dès lors, après avoir déterminé les conséquences du caractère objectif du recours (2) et envisagé la validité constitutionnelle d'un contrôle de pleine juridiction (3), nous examinerons la compatibilité de tels recours avec le caractère accusatoire de la procédure civile (4) et le respect des obligations imposées aux autorités administratives avant leur prise de décision (5).

2. Le caractère objectif du recours et ses conséquences

6.Un recours est qualifié d'objectif lorsqu'il est dirigé contre un acte dont le demandeur conteste la légalité [36]. Ce type de recours diffère fondamentalement des demandes fondées sur des droits subjectifs, par lesquels le demandeur invoque un droit dont il soutient être titulaire, et qui obligent le juge à se prononcer sur l'existence de ce droit et, le cas échéant, sur ses conséquences juridiques [37].

En outre, un recours objectif se distingue d'un appel contre une décision d'une juridiction administrative [38], par la nature de l'acte attaqué. L'appel concerne un acte juridictionnel qui a mis fin à un litige [39]. Par contre, le recours objectif conteste la validité d'un acte administratif édicté à des fins de réglementation ou de régulation [40], [41].

Dans les espèces commentées, les recours introduits devant la cour d'appel de Bruxelles présentaient bien un caractère objectif. En effet, en édictant les actes attaqués, l'IBPT agissait en tant qu'autorité administrative de contrôle [42] ou comme pouvoir réglementaire [43]. En outre, l'IBPT n'a pas tranché des litiges portés devant elle [44], mais a exercé ses fonctions de régulation ou de réglementation. Enfin, les recours tendaient uniquement à l'annulation et à la réformation des actes attaqués, et ne comportaient aucune demande de condamnation de l'IBPT [45].

La nature objective du recours entraîne de nombreuses conséquences sur le plan procédural.

7.Premièrement, son attribution à la cour d'appel de Bruxelles entraîne l'incompétence du Conseil d'État pour connaître des recours en annulation qui seraient dirigés contre les décisions de l'IBPT [46].

8.Ensuite, comme le recours objectif est dirigé contre un règlement ou un acte administratif, et non contre une décision juridictionnelle, la cour d'appel de Bruxelles statue en premier et dernier ressort [47]. Or, dans les arrêts annotés, la cour d'appel de Bruxelles nous paraît avoir appliqué, à tort, les dispositions du Code judiciaire relatives à la procédure en degré d'appel.

D'une part, les trois arrêts commentés qualifient les demanderesses d'“appelantes” et l'IBPT d'“intimée” [48]. Or, aucun lien d'instance n'a pu se former entre ces parties avant l'introduction du recours devant la cour d'appel de Bruxelles, puisque l'IBPT agissait, à ce moment, comme une autorité administrative de contrôle ou un pouvoir réglementaire [49].

D'autre part, les demanderesses ont introduit leurs recours par la voie d'une requête contradictoire déposée au greffe de la cour d'appel. À cet égard, le premier arrêt commenté précise qu'“il ne peut être exigé de la partie requérante qu'elle introduise le recours par voie de citation plutôt que par requête. En outre, s'agissant d'un recours, la règle selon laquelle les demandes principales doivent être introduites par citation ne s'applique pas en l'espèce”. Nous ne pouvons pas adhérer à ce raisonnement. En effet, à défaut d'une instance devant l'IBPT [50], le recours objectif introduit devant la cour d'appel de Bruxelles constitue une demande principale et non un acte d'appel. Comme la loi concernant les recours n'y déroge pas [51], l'article 700 du Code judiciaire impose la signification d'un exploit de citation, sous peine de violation d'une règle touchant à l'organisation judiciaire [52], [53]. En outre, l'exigence d'“un mécanisme de recours efficace”, prévue à l'article 4 § 1er de la directive 2002/21/CE [54], ne permet pas de retenir une interprétation différente du droit judiciaire belge. Cette disposition consacre uniquement le principe d'effectivité du droit communautaire [55], selon lequel une disposition procédurale nationale ne peut pas rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'application du droit communautaire [56]. Tel n'est pas le cas de l'exploit d'huissier à signifier au défendeur pour introduire la demande en justice.

9.À cet égard, il est surprenant que la loi concernant les recours ne précise pas un délai de prescription ou un délai préfix pour l'exercice du recours objectif devant la cour d'appel de Bruxelles [57]. Faut-il, dès lors, appliquer par analogie le délai d'un mois en matière d'appel [58], le délai de soixante jours relatif aux recours en annulation devant le Conseil d'État [59] ou le délai quinquennal de droit commun [60], [61]?

Cette question ne s'est pas posée dans les espèces commentées, car les demandeurs ont prudemment introduit leurs recours dans le délai le plus court, c'est-à-dire dans le mois de la notification de la décision attaquée.

10.En outre, le caractère objectif des recours contre les décisions de l'IBPT renforce l'autorité des arrêts prononcés par la cour d'appel de Bruxelles [62]. Comme le remarquent, à juste titre, les deux premiers arrêts commentés, si la cour déclare le recours fondé, sa décision entraîne non seulement l'annulation ou la réformation avec effet rétroactif de l'acte administratif ou du règlement de l'IBPT [63], mais est en outre revêtue d'une autorité absolue de chose jugée [64], sous la réserve d'une éventuelle cassation [65] à la suite d'un pourvoi non suspensif [66].

11.Enfin, il résulte des développements qui précèdent, que le caractère objectif du recours modifie les positions procédurales des parties au procès.

D'une part, l'autorité administrative n'est pas en elle-même attaquée, mais uniquement l'acte qu'elle a édicté. L'autorité auteur de cet acte n'est appelée à la cause pour en défendre la régularité que parce qu'elle est présumée être le mieux à même de le faire [67]. C'est pourquoi elle est traditionnellement qualifiée de “partie adverse” et non de “défenderesse” [68]. Certes, pour l'application des dispositions du Code judiciaire, qui ne connaissent pas la notion de “partie adverse”, l'IBPT doit, par analogie, être assimilé à un défendeur [69].

D'autre part, ayant un effet erga omnes, l'arrêt par lequel la cour d'appel de Bruxelles annule ou réforme l'acte attaqué, modifie nécessairement les règles applicables à des tiers qui étaient également soumis aux dispositions de l'acte annulé ou réformé. Comme le remarque, à juste titre, le premier arrêt commenté, cet effet erga omnes n'oblige pas, pour autant, le demandeur à diriger son recours contre toutes les personnes dont la situation juridique pourrait être affectée par l'annulation ou par la réformation sollicitée [70]. En effet, l'article 31 du Code judiciaire [71] ne trouve pas à s'appliquer, à défaut d'impossibilité d'exécuter conjointement des décisions distinctes [72]. En outre, en vertu de l'article 811 du même Code, la cour d'appel de Bruxelles ne pourrait ordonner d'office la mise en cause de ces tiers [73].

3. La notion de recours de pleine juridiction

12.En vertu de l'article 2 § 1er de la loi concernant les recours, les recours objectifs dirigés contre les décisions de l'IBPT donnent lieu à un contentieux de “pleine juridiction”. Les travaux préparatoires précisent qu'en vertu de ce pouvoir de pleine juridiction, la cour d'appel de Bruxelles “peut donc statuer au fond et réformer la décision de l'Institut” [74]. Pour le législateur, le pouvoir du juge de réformer l'acte attaqué constitue la caractéristique essentielle d'un contentieux de pleine juridiction [75]. Cette définition rejoint celle qui est retenue par la doctrine majoritaire pour qualifier ce type de recours [76].

13.Outre l'exigence d'un mécanisme de recours efficace, l'article 4 § 1er de la directive 2002/21/CE dispose que “les États membres veillent à ce que le fond de l'affaire soit dûment pris en considération” par l'organisme de recours. Il ne faudrait cependant pas en inférer que le droit communautaire imposerait la reconnaissance d'un pouvoir de réformation à la cour d'appel de Bruxelles. En effet, cette disposition nous semble impliquer le pouvoir de la cour d'examiner toutes les questions de droit et de fait que soulève le litige, mais pas nécessairement la compétence de les rejuger [77]. En principe, il revient donc au droit national de préciser si, après avoir examiné le fond de l'affaire, la cour d'appel pourrait éventuellement réformer la décision attaquée ou devrait se contenter de l'annuler.

14.À l'égard des voies de recours instituées par la loi du 2 août 2002 contre les décisions de la Commission bancaire, financière et des assurances (ci-après, “CBFA”), il a été soutenu en doctrine qu'un tel contrôle de pleine juridiction s'imposait à l'égard des sanctions administratives présentant un caractère pénal au sens de l'article 6 de la CEDH [78]. Par contre, à l'égard des autres décisions pour lesquelles l'autorité administrative dispose d'une marge d'appréciation discrétionnaire, ce pouvoir de réformation serait contraire au principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs [79].

Aujourd'hui, cette analyse nous paraît consacrée par plusieurs décisions de principe.

15.D'une part, en matière de sanctions administratives à caractère répressif [80], la Cour européenne des droits de l'homme a précisé sa jurisprudence [81] dans un arrêt du 4 mars 2004 relatif aux amendes administratives fiscales prévues par l'article 70 du Code belge de la TVA. Dans cette espèce, la Cour de cassation avait considéré que l'article 6 de la CEDH impliquait, certes, que le juge contrôle si les conditions légales de la peine étaient remplies et, à cette fin, apprécie les éléments de fait et de droit, mais que cette disposition ne permettait “pas que le juge [puisse] exonérer le redevable des obligations qui lui sont légalement imposées par les autorités, uniquement par des motifs d'opportunité ou d'équité” [82]. La Cour de Strasbourg a jugé que dans ces circonstances, le requérant n'avait pas eu accès à un “tribunal” au sens de l'article 6 § 1er de la CEDH [83]. Il nous paraît résulter de cet arrêt qu'en matière de sanctions administratives à caractère répressif, le juge de pleine juridiction peut, même en l'absence de disposition légale en ce sens, annuler et réformer les sanctions attaquées pour des motifs de droit, de fait et d'opportunité [84].

16.D'autre part, en matière d'actes administratifs relevant des compétences discrétionnaires de l'IBPT, le premier arrêt commenté confirme que la cour d'appel de Bruxelles ne pourrait pas réformer ces actes, sous peine de priver l'IBPT de sa liberté d'appréciation et de se substituer à lui. Par ces motifs, l'arrêt nous semble faire application du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs [85], [86]. La question se pose néanmoins de savoir si la cour d'appel de Bruxelles pouvait contrôler le respect de ce principe par le législateur.

En effet, la cour d'appel a contrôlé, par voie d'exception [87], la constitutionnalité de la loi concernant les recours [88], en s'écartant de la jurisprudence traditionnelle qui défend ce contrôle aux juridictions de l'Ordre judiciaire [89]. Cependant, pour autant que la Cour de cassation confirme sa jurisprudence récente admettant la validité d'une interprétation conciliante contra legem [90] - qui équivaut à un contrôle diffus de constitutionnalité des lois -, l'entorse aux principes commise par le premier arrêt commenté pourrait être considérée comme purement formelle [91].

17.Le deuxième arrêt commenté permet d'étendre l'analyse à la matière réglementaire.

En effet, attribuer à la cour d'appel de Bruxelles le pouvoir de réformer les règlements de l'IBPT, revient à lui conférer un pouvoir réglementaire. Pour rejeter un tel pouvoir, la cour s'est prudemment limitée à interpréter l'intention du législateur du 17 janvier 2003, et à considérer que celui-ci n'avait pas entendu lui confier un pouvoir réglementaire. Cependant, la même décision aurait pu également être fondée sur la violation du principe de la séparation des pouvoirs, de l'article 108 de la Constitution [92] et de l'article 6 du Code judiciaire [93].

4. La détermination par les parties du cadre de l'instance

18.La pleine juridiction de la cour d'appel de Bruxelles peut également être limitée en raison du pouvoir des parties de fixer les éléments du litige [94].

D'une part, le principe dispositif et l'article 1138, 2° du Code judiciaire interdisent à la cour d'appel de réformer un acte de l'IBPT si le demandeur n'en poursuit que l'annulation [95].

D'autre part, la cour d'appel ne dispose pas des mêmes pouvoirs d'investigation qu'une autorité administrative de contrôle [96]. En effet, c'est en premier lieu aux parties qu'il appartient de produire les pièces qu'elles entendent soumettre à l'examen de la cour [97]. L'article 877 du Code judiciaire permet, certes, à cette dernière de compléter son dossier en ordonnant la production de documents contenant la preuve de faits pertinents. Cependant, le secret professionnel de l'IBPT [98] empêche la cour d'appel d'ordonner la production de documents comportant des informations confidentielles [99], [100].

19.Dans la première espèce commentée, l'IBPT a souligné, à juste titre, l'impossibilité pour la cour d'appel de Bruxelles de recommencer tout le travail d'instruction réalisé par une autorité de régulation. Le premier arrêt annoté reçoit l'argument dans un obiter dictum, par lequel il considère que, si la loi concernant les recours lui reconnaît un pouvoir de réformation, “encore faut-il que la cour puisse substituer sa décision à l'acte attaqué sur la base des éléments versés au dossier” [101].

Dans le souci d'une bonne administration de la justice, cette impossibilité pratique nous paraît la principale justification de limiter les recours objectifs contre les décisions de l'IBPT à un contrôle de légalité, permettant à la cour d'appel de Bruxelles de les annuler pour incompétence, illégalité des motifs, violation de la loi, violation des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité, ou détournement de pouvoir [102].

5. Les conditions de la prise de décision administrative

20.Si la cour d'appel de Bruxelles réforme un acte administratif relevant des compétences réglementaires ou discrétionnaires de l'IBPT, et y substitue sa propre appréciation, elle fait, en réalité, oeuvre d'administration [103]. Par conséquent, pour autant qu'un tel contrôle soit acceptable sur le plan constitutionnel et envisageable en pratique, la décision de la cour d'appel devrait, elle aussi, respecter les formalités auxquelles la prise de décision de l'IBPT est assujettie [104].

La doctrine et la jurisprudence françaises ont mis ce principe en évidence à l'égard du pouvoir de substitution de la cour d'appel de Paris sur les décisions du Conseil de la concurrence et de la Commission des opérations de bourse. Elles considèrent, en effet, que la cour d'appel ne peut réformer la décision annulée de l'autorité de régulation si la nullité affecte la validité de l'instruction antérieure à la décision [105].

21.Les premier et troisième arrêts commentés appliquent fidèlement ces principes.

Dans la première espèce, la cour a considéré que l'imposition par l'IBPT aux opérateurs puissants d'une obligation nouvelle en matière d'interconnexion, devait être précédée d'une soumission du projet de mesure à l'autorisation de la Commission européenne et aux observations des autorités réglementaires nationales des autres États membres [106]. Dans la troisième espèce, la cour a décidé que l'IBPT ne pouvait plus contraindre Belgacom, en 2003, à appliquer d'autres conditions que celles de son offre de référence publiée le 31 décembre 2002 [107].

Dans les deux cas, la cour d'appel de Bruxelles a considéré, à juste titre, qu'elle ne pouvait pas substituer sa décision à celle de l'IBPT, en raison de l'absence de pouvoir qu'elle avait constatée dans le chef de l'autorité administrative [108].

6. Conclusion

22.Les arrêts commentés s'inscrivent dans le contexte de la juridicisation de l'intervention des autorités administratives de contrôle dans le domaine économique. À cet égard, le récent arrêt Lendit prononcé par la cour d'appel de Bruxelles en matière d'OPA [109] est particulièrement riche en enseignements. Dans cette espèce, la CBFA avait appliqué par analogie l'article 3 de l'arrêté royal du 8 novembre 1989 à une offre publique d'acquisition de certificats immobiliers, pour déclarer le dossier de l'offrant irrecevable. La cour d'appel de Bruxelles a annulé, à juste titre, cette décision, au motif que la disposition invoquée n'était pas applicable et que la CBFA avait dépassé les limites de sa mission légale de contrôle en subordonnant l'examen de l'offre à des conditions étrangères à la bonne information du public.

Cette décision illustre le changement fondamental que la loi du 2 août 2002 a entraîné quant à la nature des pouvoirs de la CBFA. Dans une hypothèse où il y a quelques années, le régulateur aurait encore pu exercer une magistrature d'influence efficace et non contrôlée [110], il doit désormais s'en tenir à l'exercice de pouvoirs expressément définis dans des dispositions au champ d'application rigoureusement déterminé, et contrôlé par le biais de recours objectifs devant la cour d'appel de Bruxelles [111].

Cette évolution nous paraît transposable, mutatis mutandis, à l'intervention des autres autorités administratives indépendantes en matière économique. Certes, dans le domaine des télécommunications, les pouvoirs de l'IBPT sont délimités avec beaucoup moins de précision que ceux de la CBFA en matière financière. Les décisions commentées n'en démontrent pas moins que l'exercice de ces pouvoirs est rigoureusement contrôlé, par le biais des recours objectifs institués par le législateur du 17 janvier 2003.

23.Dans ce contexte, les trois arrêts commentés limitent heureusement le pouvoir de censure de la cour d'appel de Bruxelles à un contrôle de légalité. Il est, à cet égard, symptomatique de constater que sur trois hypothèses d'annulation des actes attaqués, la cour n'a jamais réformé ceux-ci.

Par ces décisions, la cour d'appel de Bruxelles a maintenu un juste équilibre entre l'autonomie de l'autorité de régulation et de réglementation d'une part, et l'importance de son contrôle juridictionnel d'autre part, en conservant aux deux pouvoirs la nature et les modes d'intervention qui leur sont propres. Ce faisant, la cour tempère avec sagesse le pouvoir exorbitant que le législateur actuel lui attribue de plus en plus fréquemment.

Voy. la publication des arrêts de la cour d'appel de Bruxelles du 18 juin 2004 , du 14 octobre 2004 et du 15 octobre 2004 sur le site http://tbh-rdc.larcier.be .

[1] Outre les autres sources précisées ci-dessous, les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes, de la Cour européenne des droits de l'homme, de la Cour d'arbitrage et de la Cour de cassation cités dans la présente note peuvent être respectivement retrouvés sur les sites http://www.europa.eu.int , http://www.echr.coe.int , http://www.arbitrage.be et http://www.cass.be .
[2] Assistant à l'Université Libre de Bruxelles. Avocat au barreau de Bruxelles.
[3] M.B. 24 janvier 2003, p. 2.591.
[4] Exposé des motifs, Doc. parl. Chambre, s.o., 2001-02, n° 1.937/1, pp. 3 à 7.
[5] Dans un arrêt du 14 juillet 2004, la Cour d'arbitrage a annulé l'art. 14 de la loi relative au statut du régulateur en tant qu'il attribue à l'IBPT des compétences en matière d'infrastructure de transmission électronique, alors que cette infrastructure est commune à la radiodiffusion et à la télévision, ainsi qu'aux télécommunications. En effet, comme les compétences de l'État fédéral et des Communautés en la matière sont devenues à ce point imbriquées, la Cour d'arbitrage a considéré que le législateur fédéral ne pouvait pas régler unilatéralement la compétence du régulateur, et qu'il ne pouvait exercer ses compétences que par le biais d'un accord de coopération. Néanmoins, l'arrêt a maintenu les effets de la disposition annulée jusqu'à l'entrée en vigueur d'une réglementation de commun accord et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2005 (C.A. 14 juillet 2004, n° 132/2004). L'état du droit belge des télécommunications présente donc un caractère provisoire.
[6] En cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque de préjudice grave et difficilement réparable, l'IBPT peut adopter des mesures provisoires (art. 20 de la loi relative au statut du régulateur). En outre, s'il constate une entorse aux législations dont il contrôle le respect, l'IBPT peut mettre le contrevenant en demeure de remédier à son infraction. Si celui-ci ne s'exécute pas, l'IBPT peut, après l'avoir entendu, lui infliger une amende administrative d'un montant maximal de 12,5 millions d'euros (art. 21 de la loi relative au statut du régulateur). Cette amende administrative nous semble présenter un caractère répressif au sens de l'art. 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (ci-après, “CEDH”) (voy. infra, n° 15).
[7] Plus précisément, l'IBPT contrôle le respect de la loi du 30 juillet 1979, du titre Ier, chapitre X, et des titres III et IV de la loi du 21 mars 1991 et de leurs arrêtés d'exécution (art. 14 § 1er, 3° de la loi relative au statut du régulateur).
[8] En cas de litige entre des fournisseurs de réseaux, de services ou d'équipements de télécommunications ou en cas de litige entre des opérateurs postaux, l'IBPT formule des propositions tendant à concilier les parties dans un délai d'un mois (art. 14 § 1er, 3° de la loi relative au statut du régulateur). Cette procédure de conciliation a un effet suspensif de la procédure contentieuse, qui relève de la compétence du Conseil de la concurrence (art. 4 de la loi concernant les recours), statuant comme juridiction administrative (P. Quertainmont, Droit administratif de l'économie. L'interventionnisme économique des pouvoirs publics, 3ème éd., Diegem, E. Story-Scientia, 2000, p. 197, n° 183).
[9] L'art. 15 de la loi relative au statut du régulateur soumet les décisions de l'IBPT à une tutelle de suspension limitée de la part du Conseil des Ministres.
[10] Cependant, les décisions de l'IBPT concernant son personnel restent de la compétence du Conseil d'État (C.A. 14 juillet 2004, n° 131/2004; Discussion générale, Ann. parl. Sénat, 2002-03, séance du 20 décembre 2002, n° 2-254, p. 7).
[11] Pour une analyse de la situation antérieure, voy. T. Zgajewski, “Les incertitudes judiciaires dans les télécommunications: un révélateur du malaise juridictionnel belge face à la libéralisation européenne?”, J.T. 2000, pp. 505 et s.
[12] M.B. 24 janvier 2003, p. 2.602. La réforme du droit des services postaux et des télécommunications a dû prendre la forme de deux lois distinctes, afin de respecter les art. 77 et 78 de la Constitution. En effet, les règles relatives à la compétence et à la procédure devant les juridictions judiciaires sont soumises au bicaméralisme intégral de l'art. 77, tandis que les autres dispositions relèvent de la procédure bicamérale imparfaite de l'art. 78 (Rapport fait au nom de la Commission de l'infrastructure, des communications et des entreprises publiques, Doc. parl. Chambre, s.o., 2002-03, n° 1.937/9, p. 10).
[13] Comme le relèvent, à juste titre, les deuxième et troisième arrêts commentés, le fait que la procédure se déroule comme en référé, n'impose pas au demandeur d'agir avec célérité. En effet, les procédures comme en référé constituent des procédures qui sont instruites suivant les formes du référé et dans lesquelles l'urgence est légalement présumée (C. Dalcq, “Les actions 'comme en référé'”, in X., Le référé judiciaire, Conférence du Jeune Barreau de Bruxelles, Bruxelles, 2003, pp. 145 et s., spéc. pp. 183 et 184).
[14] Art. 3 de la loi concernant les recours.
[15] À notre connaissance, aucun de ces arrêts n'a fait l'objet d'un pourvoi en cassation.
[16] Bruxelles (9ème ch.) 18 juin 2004, Belgacom Mobile/Institut belge des services postaux et des télécommunications - Base, R.G. 2003/AR/2249, publié sur le site http://www.rdc-tbh.be .
[17] Auparavant situées de 8 à 19 heures du lundi au vendredi, les heures pleines s'écouleraient désormais de 10 à 22 heures. Comme le constate l'arrêt, cette décision entraînait des conséquences sur les plans tarifaires des opérateurs. Elle était donc susceptible d'avoir un impact financier.
[18] Belgacom Mobile a d'abord invité Base à lui adresser une demande officielle de négociations en application de l'art. 7.1 de la convention d'interconnexion et des dispositions de l'arrêté royal du 20 avril 1999 fixant les délais et les principes généraux applicables aux négociations commerciales menées en vue de conclure des accords d'interconnexion et les modalités de publication de l'offre d'interconnexion de référence, et fixant les conditions à régler dans la convention d'interconnexion (M.B. 21 juillet 1999, p. 27.693). Belgacom et Belgacom Mobile ont ensuite demandé à l'IBPT de procéder à la consultation du marché et d'établir des règles de conduite en matière d'interconnexion. Aucune de ces démarches n'a abouti.
[19] Sur pied de l'art. 19 de la loi du 17 janvier 2003 relative au statut du régulateur, l'IBPT a invité Mobistar à présenter oralement ses observations sur la demande de Base et à soumettre à l'Institut toutes les pièces utiles.
[20] Cette obligation est prévue par l'art. 109ter § 3 de la loi du 21 mars 1991. En effet, l'arrêt considère que la constatation du caractère raisonnable de la demande de Base emporte, par elle-même, la constatation du caractère injustifié du refus de Belgacom Mobile. Cette décision relève donc de la mission générale de l'IBPT de contrôler le respect du titre III de la loi du 21 mars 1991. En outre, l'arrêt précise que cet acte doit s'analyser comme un faisceau de décisions individuelles, chacun des opérateurs puissants étant tenu de répondre favorablement à la demande raisonnable de Base.
[21] Au contraire, l'arrêt considère que l'IBPT ne peut imposer une modification du contrat d'interconnexion que dans le respect des conditions de l'art. 109ter § 5, et si cette modification est indispensable pour garantir l'égalité des conditions de concurrence ou l'interopérabilité.
[22] Bruxelles (9ème ch.), Mobistar/Institut belge des services postaux et des télécommunications - Belgacom Mobile - Base, R.G. 2003/AR/2463, publié sur le site http://www.rdc-tbh.be .
[23] En vertu de l'art. 105bis al. 13 de la loi du 21 mars 1991 et de l'art. 19 de l'arrêté royal du 23 septembre 2002 relatif à la portabilité des numéros des utilisateurs finals des services de télécommunications mobiles offerts au public (M.B. 1er octobre 2002, p. 44.124), ces coûts d'établissement sont fixés par l'IBPT.
[24] Cette “décision” a été notifiée en date du 22 septembre 2003.
[25] Ces coûts ont été fixés à 3,86 euros pour une installation simple et 23,41 euros pour une installation complexe.
[26] Comme le relève l'arrêt commenté, la décision attaquée avait un effet rétroactif, remontant à la date d'entrée en vigueur de l'arrêté royal du 23 septembre 2002.
[27] Mobistar a également demandé à la cour d'appel d'ordonner à l'IBPT de produire l'ensemble des pièces de son dossier dans leur version complète, à l'exception des informations précises et chiffrées provenant directement des opérateurs mobiles et leur appartenant, et que ceux-ci auraient expressément désignées comme confidentielles (sur cette question, voy. infra, n° 18), et a formé deux demandes subsidiaires, tendant à entendre constater que l'IBPT n'est pas en mesure de fixer les coûts d'établissement litigieux, ou ordonner la suspension de la décision attaquée.
[28] Par voie de conclusions, Base a conclu au bien-fondé du recours de Mobistar et au rejet de celui de Belgacom Mobile.
[29] L'arrêt relève, sans que ce point n'ait fait l'objet d'une contestation entre les parties, que l'art. 2 de la loi concernant les recours soumet également les règlements de l'IBPT à un recours de pleine juridiction.
[30] Bruxelles (9ème ch.) 15 octobre 2004, Belgacom/Institut belge des services postaux et des télécommunications, R.G. 2003/AR/1664, publié sur le site http://www.rdc-tbh.be .
[31] Cet “avis” a été notifié à Belgacom le 4 juin 2003.
[32] Sous peine de mise en oeuvre de la procédure de mise en demeure visée à l'art. 21 de la loi relative au statut du régulateur.
[33] L'arrêt considère, à juste titre, que le contrôle que l'IBPT exerce sur la proposition d'offre de référence “a pour objet l'examen préalable de la conformité des conditions techniques et commerciales que l'opérateur puissant envisage d'offrir pour l'accès au débit binaire avec les critères énoncés dans l'arrêté royal [du 22 juin 1998] de manière à ce que les bénéficiaires de l'offre soient informés en temps utile des conditions de l'accès, en ce compris des conditions qui auraient été imposées par l'IBPT à l'opérateur au terme de cet examen” (à ce sujet, voy. les art. 6septies al. 1er et 2, 5° et 6nonies de l'arrêté royal du 22 juin 1998 relatif aux conditions d'établissement et d'exploitation de réseaux publics de télécommunications (M.B. 24 juillet 1998, p. 23.990), tel que modifié par un arrêté royal du 12 décembre 2000 (M.B. 29 décembre 2000, p. 43.241)).
[34] L'arrêt fonde sa décision sur le principe de non-rétroactivité des décisions administratives, et sur les conditions de délai prévues par l'arrêté royal du 22 juin 1998.
[35] Selon la formule consacrée, à juste titre, par la doctrine française (voy. C.S. Delicostopoulos, L'encadrement processuel des autorités de marché en droits français et communautaire. Contentieux de la concurrence et de la bourse, Paris, L.G.D.J., 2002, pp. 318 à 324, nos 207 à 209; Y. Gaudemet, “Le pouvoir de réformation de la CA de Paris dans le contentieux des décisions du conseil de la concurrence”, J.C.P. 1999, I, n° 188, pp. 2.241 et s.).
[36] C.S. Delicostopoulos, o.c., p. 319, n° 207; M. Leroy, Contentieux administratif, 2ème éd., Bruxelles, Bruylant, 2000, pp. 86 et 87.
[37] Le nouveau régime des procédures contentieuses en matière d'offres publiques d'acquisition illustre la différence entre les recours objectifs et les demandes fondées sur des droits subjectifs, puisqu'ils font l'objet de deux procédures distinctes, respectivement organisées par l'art. 121 de la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, et par le nouvel art. 18ter de la loi du 2 mars 1989 relative à la publicité des participations importantes dans les sociétés cotées en bourse et réglementant les offres publiques d'acquisition (sur ce sujet, voy. notamment X. Dieux, “Examen de jurisprudence (1990-2003). Droit financier (Première partie)”, R.C.J.B. 2004, pp. 207 et s.; J.-M. Nelissen-Grade, “Kroniek van de openbare overnamebiedingen (1996-2003) (Deel I)”, Dr. banc. fin. 2004, pp. 30 et s., spéc. pp. 38 à 42, nos 15 à 23; X. Taton, “Les nouvelles procédures contentieuses en matière d'offres publiques d'acquisition”, R.D.J.P. 2003, pp. 319 et s.; X. Taton, “La nature des nouvelles compétences de la cour d'appel de Bruxelles en matière d'offres publiques d'acquisition”, R.D.C. 2003, pp. 811 et s.; D. Van Gerven, “Verhaalmiddelen tegen de beslissingen van de toezichtorganen”, Dr. banc. fin. 2003, pp. 160 et s.; P.A. Foriers, “Le référé en droit des sociétés et des offres publiques”, in X., Le référé judiciaire, Conférence du Jeune Barreau de Bruxelles, Bruxelles, 2003, pp. 231 et s., spéc. pp. 252 à 256, nos 13 à 17).
[38] Sur le régime procédural des litiges portés devant des juridictions administratives, voy. notamment Cass. 21 juin 2004, R.G. S.03.0139.N; Cass. 16 mars 2000, R.G. C.99.0258.N; Cass. 2 mai 1994, Pas., I, 434; Cass. 10 avril 1986, Pas., I, 979.
[39] Rappelons que la notion d'acte juridictionnel ne se confond pas avec celle d'acte judiciaire. D'une part, tous les actes accomplis par des membres du pouvoir judiciaire ne constituent pas des actes juridictionnels. A titre d'exemple, la mission du juge de paix d'organiser et de surveiller la tutelle, prévue par les art. 390 et s. du Code civil, requiert principalement l'accomplissement d'actes non juridictionnels. D'autre part, tout ce qui est juridictionnel n'a pas forcément une nature judiciaire. L'arbitrage en est l'exemple le plus évident (voy. M. Huybrechts et I. Verougstraete, “Relations avec les juges. Relatie met de rechters”, in X., Macht en onmacht van de arbiter. L'arbitre: pouvoirs et statut, Bruxelles, Bruylant, 2003, p. 314, n° 4).
[40] C.S. Delicostopoulos, o.c., note 34, p. 343, n° 225. Pour des exemples d'application de la distinction entre autorité administrative et juridiction administrative, voy. Cass. 11 janvier 2001, R.G. C.00.0721.F; Cass. 17 août 1982, Pas., I, 1328. En matière de recours juridictionnels, les confusions entre les notions de juridiction administrative et d'autorité administrative sont fréquentes. À titre d'exemple, au cours de la discussion générale des lois du 17 janvier 2003 au Sénat, un intervenant a considéré, à tort, que l'IBPT constituait une juridiction administrative et que la cour d'appel de Bruxelles intervenait comme son instance d'appel (Discussion générale, Ann. parl. Sénat, 2002-03, séance du 20 décembre 2002, n° 2-254, p. 6).
[41] En vertu de cette différence fondamentale, la situation de l'IBPT diffère sensiblement de celle du Conseil de la concurrence, à tout le moins lorsque celui-ci statue sur l'existence de pratiques restrictives de concurrence prohibées. Dans cette hypothèse, le Conseil de la concurrence agit, en effet, en tant que juridiction administrative exerçant des compétences à caractère quasi répressif (voy. l'art. 16 al. 1er des lois coordonnées du 1er juillet 1999 sur la protection de la concurrence économique, M.B. 1er septembre 1999, p. 32.315; Bruxelles 14 novembre 1996, R.D.C. 1997, p. 66 (reflet D. Putzeys); G. Jakhian, L. Van Eyll et E. Van Nuffel d'Heynsbroeck, “Les procédures en droit belge de la concurrence et le droit à un procès équitable”, in X., Les autorités de contrôle des marchés financiers, des assurances et de la concurrence, bilan et perspectives, Bruxelles, Bruylant, 2002, pp. 333 et s., spéc. p. 346, n° 12; P. Quertainmont, o.c., note 7, p. 197, n° 183). Par contre, la nature de l'intervention du Conseil de la concurrence paraît plus délicate à déterminer en matière d'admissibilité des concentrations (voy. l'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles du 5 avril 1996 qui, dans ce cas, qualifie le Conseil de la concurrence d'“instance administrative” (Bruxelles 5 avril 1996, R.D.C. 1996, p. 916)).
[42] Dans les premier et troisième arrêts commentés.
[43] Dans le deuxième arrêt commenté.
[44] Dans la première espèce, Base a soutenu que le recours aurait dû être dirigé contre elle sur pied de l'art. 1053 al. 3 du Code judiciaire. Le premier arrêt commenté rejette, à juste titre, ce moyen d'irrecevabilité, au motif que l'IBPT n'avait tranché aucun litige et que Base n'avait pas la qualité de demandeur devant lui. Toutefois, voy. infra, n° 8 et note 50.
[45] Sous réserve de la condamnation automatique aux dépens.
[46] Exposé des motifs, Doc. parl. Chambre, s.o., 2001-02, n° 1.937/1, p. 24; C.A. 14 juillet 2004, n° 131/2004. Le contentieux de l'annulation devant le Conseil d'État présente en effet un caractère supplétif, en vertu duquel celui-ci ne peut connaître d'une requête en annulation lorsque le requérant dispose d'autres recours d'effet équivalent (Discussion à la Chambre, Pasin. 1946, pp. 1304 et s., spéc. p. 1307; M. Leroy, Contentieux administratif, o.c., note 35, p. 270; P. Lewalle, “La place de la justice administrative dans la Constitution: la répartition des compétences entre le pouvoir judiciaire et le Conseil d'État”, in X., Le Conseil d'État de Belgique cinquante ans après sa création (1946-1996), Bruxelles, Bruylant, 1999, pp. 159 et s., spéc. p. 163; C. Huberlant, “La compétence respective des cours et tribunaux et du Conseil d'État”, J.T. 1953, pp. 269 et s., spéc. pp. 273 et 274, nos 11 à 15). Le Conseil d'État reste cependant compétent pour les décisions de l'IBPT concernant son personnel (voy. supra, note 10).
[47] Certes, l'utilisation des notions de “recours” et de “beroep” dans les versions française et néerlandaise de l'art. 2 de la loi concernant les recours favorise l'amalgame avec les voies de recours du Code judiciaire. Néanmoins, cette disposition vise bien des demandes en annulation ou en réformation de règlements ou d'actes administratifs, portées en première instance devant la cour d'appel de Bruxelles.
[48] La cour d'appel de Bruxelles a encore qualifié l'IBPT de “partie intimée” dans un arrêt du 15 février 2005 (Bruxelles (9ème ch.), Belgacom Mobile/Institut belge des services postaux et des télécommunications - The Phone Company, R.G. 2005/AR/296, inédit). Par contre, dans son arrêt du 25 février 2005 prononcé en matière de recours objectif contre une décision de la Commission bancaire, financière et des assurances en matière d'OPA, la cour d'appel de Bruxelles a qualifié, à juste titre, les candidats offrants de “parties demanderesses” et la Commission de “partie défenderesse” (Bruxelles (9ème ch.), Lendit - Lendit Louise/Commission bancaire, financière et des assurances, R.G. 2004/SF/1 - 2004/SF/2, inédit).
[49] En effet, le lien d'instance se crée par la rencontre des actes juridiques unilatéraux que constituent la demande et la défense (voy. S. Dufrene, “La détermination des parties en litige et le lien d'instance (spécialement en cas de reprise de l'instance)”, in X., Le rôle respectif du juge et des parties dans le procès civil. De respectieve rol van rechter en partijen in het burgerlijk geding, Bruxelles, Bruylant, 1999, pp. 32 et s., spéc. p. 33).
[50] Le premier arrêt commenté n'est, d'ailleurs, pas exempt de contradiction sur ce point, puisqu'il considère auparavant que le Conseil de l'IBPT n'a tranché aucun litige et que Base n'avait pas la qualité de demandeur devant lui (voy. supra, note 44).
[51] Contrairement à d'autres procédures comme en référé (voy. X. Taton, o.c., note 36, pp. 331 et 342, nos 27 et 55; C. Dalcq, o.c., note 12, p. 173; G. Closset-Marchal, “Éléments communs aux procédures comme en référé”, in X., Le développement des procédures 'comme en référé'. De ontwikkeling van de procedures 'zoals in kort geding', C.I.D.J./I.C.G.R., Diegem, Kluwer, 1994, pp. 17 et s., spéc. p. 28, n° 33).
[52] Cass. 27 mai 1994, et la note de G. Closset-Marchal, “Exceptions de nullité, fins de non-recevoir et violation des règles touchant à l'organisation judiciaire”, pp. 643 et s. Toutefois, au regard de la jurisprudence actuelle de la Cour de cassation, cette violation n'aurait pas nécessairement privé d'effet les requêtes déposées par les parties demanderesses. Dans plusieurs décisions récentes, la Cour a en effet considéré que l'art. 867 du Code judiciaire s'appliquait à des vices de forme non prescrits à peine de nullité (Cass. 18 décembre 2003, R.G. 01.0150.N; Cass. 27 mars 2003, R.G. C.02.0239.F; Cass. 19 avril 2002, et la note de E. Leroy, “Repenser le formalisme”, pp. 325 et s.; Cass. 7 juin 2001, R.G. C.99.0496.F). Par conséquent, pour autant que les autres parties aient été informées de la procédure, à la suite de l'acte introductif d'instance irrégulier, à un moment où elles disposaient encore du temps nécessaire pour organiser leur défense - ce qui semble avoir été le cas en l'espèce -, l'exception péremptoire découlant du défaut de citation sera dépourvue de fondement.
[53] À titre de comparaison, lorsqu'une saisie conservatoire est faite sans ordonnance préalable du juge des saisies, le débiteur saisi doit introduire sa demande de mainlevée par citation (art. 1420 C.jud.).
[54] Directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, J.O.C.E. 24 avril 2002, L 108, p. 33.
[55] C.J.C.E. 27 février 2003, Santex, C-327/00, Rec. 2003, p. 1877. Dans cet arrêt, la Cour de justice des Communautés européennes a interprété en ce sens les dispositions similaires de l'art. 1er de la directive 89/665/CEE du Conseil du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l'application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux.
[56] Sur le principe d'effectivité du droit communautaire, voy. notamment C.J.C.E. 19 juin 1990, Factortame, C-213/89, Rec. 1990, p. 2433; C.J.C.E. 9 novembre 1983, San Giorgio, 199/82, Rec. 1983, p. 3595; C.J.C.E. 9 mars 1978, Simmenthal, 106/77, Rec. 1978, p. 629; C.J.C.E. 16 décembre 1976, Rewe, 33/76, Rec. 1976, p. 1989.
[57] En matière de recours objectifs contre les décisions de la CBFA, voy. X. Taton, o.c., note 36, pp. 328 à 330, nos 22 à 25.
[58] Art. 1051 du Code judiciaire. L'art. 3 de la loi concernant les recours prévoit, certes, l'application des dispositions du Code judiciaire pour l'ensemble des aspects ayant trait à la procédure. Cependant, la prescription d'une action ne nous paraît pas constituer une question de procédure.
[59] Art. 4 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'État (Pasin. 1948, p. 583). Toutefois, comme le recours devant la cour d'appel de Bruxelles exclut la compétence du Conseil d'État, ce délai ne nous semble pas pouvoir être retenu.
[60] Art. 2262bis du Code civil. Bien que ce délai paraisse fort long pour la remise en cause d'actes administratifs avec effet rétroactif, il nous paraît s'imposer, dans l'état actuel des textes.
[61] La notion de “recours efficace” de l'art. 4 de la directive 2002/21/CE ne nous paraît pas davantage régler la question, dans la mesure où sa portée se limite à exclure l'application d'un délai de prescription qui rendrait pratiquement impossible ou excessivement difficile l'introduction d'un recours contre les décisions de l'IBPT. Certes, il en irait autrement en cas de disposition expresse au sein de la directive (conclusions de l'avocat général Alber dans l'affaire Santex précitée (note 55)). Voy. également, C.J.C.E. 17 juin 2004, Recheio/Cash & Carry, C-30/02; C.J.C.E. 24 septembre 2002, Grundig Italiana, C-255/00, Rec. 2002, p. 8003; C.E.D.H. 12 novembre 2002, Zvolsky et Zvolská/Tchéquie, spéc. § 46 et 47; C.E.D.H. 11 janvier 2001, Platakou/Grèce, spéc. § 35 à 38.
[62] Dans le même sens, voy. J. Van Compernolle, “La rançon d'un succès: le développement des procédures 'comme en référé'. Conclusions générales”, in X., Le développement des procédures 'comme en référé'. De ontwikkeling van de procedures 'zoals in kort geding', C.I.D.J./I.C.G.R., Diegem, Kluwer, 1994, pp. 207 et s., spéc. pp. 212 et 213, n° 10.
[63] P. Lewalle, “L'autorité de chose jugée des arrêts prononcés par le Conseil d'État au contentieux de l'excès de pouvoir et le juge judiciaire”, in X., Le contentieux interdisciplinaire. Het interdisciplinair geschil, C.I.D.J./I.C.G.R., Diegem, Kluwer, 1996, pp. 174 et s., spéc. pp. 181 à 192, nos 8 à 16.
[64] L'autorité absolue de chose jugée des arrêts d'annulation d'actes administratifs se justifie en effet par le caractère objectif, institutionnel et organique du recours pour excès de pouvoir (P. Lewalle, o.c., pp. 192 à 200, nos 17 à 21).
[65] En effet, la loi du 17 janvier 2003 concernant les recours ne déroge pas aux art. 608 et 609 du Code judiciaire, selon lesquels la Cour de cassation connaît des pourvois formés contre les décisions des cours et tribunaux formés en dernier ressort.
[66] Art. 1118 du Code judiciaire.
[67] M. Leroy, o.c., note 35, p. 87.
[68] Voy. notamment les art. 6 à 8 de l'arrêté du Régent du 23 août 1948. Contra: art. 21 des lois coordonnées sur le Conseil d'État.
[69] Voy. en matière de recours objectifs contre les décisions de la Commission bancaire, financière et des assurances, X. Taton, o.c., note 36, p. 325, n° 12.
[70] Voy. également Bruxelles (9ème ch.) 15 février 2005, précité note 48.
[71] L'art. 1053 al. 3 du même Code ne trouve pas à s'appliquer, puisque la cour d'appel de Bruxelles statue en premier ressort (voy. supra, n° 8).
[72] Si la cour d'appel de Bruxelles annule ou réforme un acte de l'IBPT, cette décision aura autorité de chose jugée à l'égard des tiers auxquels cet acte a vocation à s'appliquer (voy. Cass. 28 avril 1989, Pas., 1989, I, 914; Cass. 16 octobre 1981, Pas., 1982, I, 245; P. Taelman, “Gezag van gewijsde en rechtsmiddelen”, in X., Le contentieux interdisciplinaire. Het interdisciplinair geschil, Diegem, Kluwer, 1996, pp. 134 et s.).
[73] Cette disposition constitue une application du principe général du droit judiciaire dit principe dispositif (J. Linsmeau et X. Taton, “Le principe dispositif et l'activisme du juge”, in X., Finalité et légitimité du droit judiciaire. Het gerechtelijk recht: waarom en waarheen?, actes du Colloque du 9 décembre 2004 organisé par le Centre interuniversitaire de droit judiciaire, inédit, n° 25) et est compatible avec les art. 10 et 11 de la Constitution (C.A. 30 juin 1999, n° 75/99, M.B. 19 novembre 1999, p. 42.856). Néanmoins, il est à remarquer que ce principe général n'a qu'une valeur législative, de sorte que le législateur du 17 janvier 2003 aurait pu valablement y déroger, sur le modèle de l'art. 120 § 3 al. 4 de la loi du 2 août 2002 pour les recours objectifs introduits devant la cour d'appel de Bruxelles à l'encontre des décisions de la CBFA (voy. X. Taton, o.c., note 36, p. 331, n° 29). D'ailleurs, les “dialogues Justice” de F. Erdman et de G. de Leval proposent d'insérer dans le Code judiciaire une dérogation générale à cette disposition, qui permettrait au juge d'“inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présence lui paraît nécessaire à la solution du litige” (F. Erdman et G. de Leval, Les dialogues Justice, rapport de synthèse rédigé à la demande de L. Onkelinx, vice-première ministre et ministre de la Justice, juillet 2004, p. 46).
[74] Exposé des motifs, Doc. parl. Chambre, s.o., 2001-02, n° 1.937/1, p. 24.
[75] En ce sens, les travaux préparatoires de la loi concernant les recours sont conformes à ceux d'autres législations ayant institué des recours de pleine juridiction. À titre d'exemple, en matière de recours contre les décisions de la CBFA, l'exposé des motifs de la loi du 2 août 2002 indique que la compétence de pleine juridiction de la cour d'appel de Bruxelles lui permet d'annuler et de réformer les décisions attaquées pour des motifs de droit, de fait et d'opportunité (Exposé des motifs, Doc. parl. Chambre, s.o., 2001-02, nos 1.842/1 et 1.843/1, pp. 131 et 132). Lors des travaux préparatoires des lois coordonnées du 1er juillet 1999 sur la protection de la concurrence économique, l'attribution à la cour d'appel de Bruxelles d'une compétence de pleine juridiction a été également présentée comme “[permettant] d'éviter de renvoyer l'affaire devant le Conseil de la concurrence” (Doc. parl. Sénat, s.o., 1998-99, n° 1-614/8, pp. 305 et s.).
[76] M. Leroy, o.c., note 35, p. 813; M. Melchior, “La notion de compétence de pleine juridiction en matière civile dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme”, in X., Présence du droit public et des droits de l'homme. Mélanges offerts à Jacques Velu, Bruxelles, Bruylant, 1992, pp. 1327 et s., spéc. pp. 1331 et 1332, n° 6; C.S. Delicostopoulos, o.c., note 34, p. 319, n° 207.
[77] La même distinction a été retenue par M. Melchior dans son analyse de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme sur la notion de pleine juridiction en matière civile. Cet auteur enseigne que “ce qui est exigé par l'article 6, à l'égard des décisions administratives, ce n'est pas de façon générale un recours de pleine juridiction - le terme prête à confusion -, c'est un recours de pleine légalité ou en contrôle complet de la légalité habilitant la juridiction à examiner toutes les questions de fait et de droit relatives à l'acte administratif contesté” (M. Melchior, o.c., p. 1345, n° 23). Bien que les questions soient différentes, la même distinction nous semble devoir être effectuée à l'occasion de l'interprétation de l'art. 4 de la directive 2002/21/CE.
[78] À l'heure actuelle, la Cour européenne des droits de l'homme, la Cour d'arbitrage et la Cour de cassation s'accordent, en effet, pour considérer que des sanctions administratives peuvent, si elles remplissent certains critères, présenter un caractère pénal au sens de l'art. 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (C.E.D.H. 3 mai 2001, J.B./Suisse, spéc. § 48; C.E.D.H. 14 novembre 2000, T./Autriche, spéc. § 63; C.E.D.H. 24 février 1994, Bendenoun/France, spéc. § 45 à 47; C.E.D.H. 27 août 1991, Demicoli/Malte, spéc. § 34; C.E.D.H. 22 mai 1990, Weber/Suisse, spéc. § 34; C.E.D.H. 21 février 1984, Öztürk/Allemagne, spéc. § 50 à 53; C.E.D.H. 8 juin 1976, Engel et autres/Pays-Bas, spéc. § 81; C.A. 24 février 1999, R.W. 1998-99, p. 1.346; C.A. 2 mars 1995, n° 18/95, Amén. 1995, p. 28; Cass. 25 mai 1999, Bull. Cass. 1999, n° 307; Cass. 5 février 1999, R.W. 1998-99, p. 1.352. Sur cette question, voy. notamment, S. Van Drooghenbroeck, La Convention européenne des droits de l'homme. Trois années de jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. 1999-2001, Les dossiers du Journal des tribunaux, n° 39, Bruxelles, Larcier, 2003, p. 77, n° 92; C. Bertsch, “Le pouvoir de sanction des autorités de contrôle des marchés financiers et des assurances”, in X., Les autorités de contrôle des marchés financiers, des assurances et de la concurrence, bilan et perspectives, Bruxelles, Bruylant, 2002, pp. 153 et s., spéc. pp. 200 et 201, n° 48; L. De Geyter, “De controle van de civiele rechter op de opgelegde administratieve geldboete”, T.B.P. 2001, pp. 4 et s.; A. Alen, “Naar een betere rechtsbescherming inzake administratieve geldboeten na de koerswijziging van het Hof van cassatie in zijn arresten van 5 februari 1999”, R.W. 1999-2000, pp. 630 et s.; M. Maus, “Kanttekeningen rond de fiscaal-administratieve sancties en de fiscale geschillenprocedure in het licht van art. 6 EVRM”, T.F.R. 1999, pp. 332 et s.; M. Maus, “Kritische bemerkingen bij de arresten van het Hof van cassatie van 5 februari 1999 inzake de fiscaal-administratieve sancties”, A.J.T. 1998-99, pp. 981 et s., spéc. p. 985, n° 9).
[79] J.-M. Nelissen-Grade, o.c., note 36; X. Taton, o.c., note 36, pp. 817 à 822, nos 24 à 39. Contra: P.-A. Foriers, o.c., note 36, pp. 259 et 262, n° 15, note 82, et n° 17. Sur le raisonnement à base d'interprétation conciliante, voy. infra, note 88.
[80] Les amendes administratives infligées par l'IBPT sur pied de l'art. 21 § 2 de la loi relative au statut du régulateur (voy. supra, note 6) nous paraissent pouvoir être qualifiées de sanctions pénales au sens de l'art. 6 de la CEDH.
[81] Dans plusieurs arrêts, la Cour européenne des droits de l'homme avait déjà considéré que “le pouvoir de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise, rendue par l'organe inférieur” constituait une caractéristique essentielle d'un juge disposant d'une pleine juridiction (voy. C.E.D.H. 23 octobre 1995, Gradinger/Autriche, spéc. § 44; C.E.D.H. 23 octobre 1995, Palaoro/Autriche, spéc. § 43; C.E.D.H. 23 octobre 1995, Pramstaller/Autriche, spéc. § 41; C.E.D.H. 23 octobre 1995, Pfarrmeier/Autriche, spéc. § 40; C.S. Delicostopoulos, o.c., note 34, p. 439, n° 293; A. Alen, “Administratieve geldboeten: hun internationaal- en internrechtelijke kwalificatie”, in X., Liber Amicorum Prof. Dr. G. Baeteman, Deurne, Kluwer, 1997, pp. 369 et s., spéc. p. 401, n° 17.3).
[82] Cass. 5 février 1999, J.L.M.B. 1999, p. 539 . Dans le même sens, C.A. 24 septembre 2003, n° 125/2003, R.W. 2003-04, p. 1337 et la note P. Hannes, “Art. 74/4bis Vreemdelingenwet: de onschuld van de vervoerder mag worden aangetoond”, pp. 1338 et s.
[83] C.E.D.H. 4 mars 2004, Silvester's Horeca Service/Belgique, T.F.R. 2004, p. 636, spéc. § 25 à 30 et la note de B. Coopman, “Rechterlijke toetsing van fiscale boetes: cassatie teruggefloten door Straatsburg”, pp. 641 et s. Dans le même sens, voy. C.A. 12 juin 2002, n° 96/2002; C.A. 14 juillet 1997, n° 45/97, M.B. 26 août 1997, p. 21.773; C.A. 14 juillet 1997, n° 40/97, M.B. 21 août 1997, p. 21.427; Cass. 10 mai 2004, R.G. S.02.0076.F; Cass. 24 janvier 2002, R.G. C.00.0307.N; Cass. 12 novembre 2001, R.G. S.01.0023.N/12; Cass. 15 mars 1999, Bull. Cass. n° 156.
[84] Cette conclusion est d'ailleurs conforme aux caractères du droit pénal, qui implique une appréciation de l'opportunité de la sanction (voy. C. Henneau et J. Verhaegen, Droit pénal général, 2ème éd., Bruxelles, Bruylant, 1995, p. 23, n° 8; P.-E. Trousse, “Les principes généraux du droit pénal positif belge”, in X., Novelles, Droit pénal, t. 1er, vol. 1er, Bruxelles, Larcier, 1956, p. 156, n° 666).
[85] En effet, non seulement l'arrêt reprend l'énoncé de ce principe constitutionnel, tel qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation, mais se réfère, en outre, à l'arrêt du 4 mars 2004 qui en fait une application expresse (Cass. 4 mars 2004, RABG 2004, p. 589, les conclusions du ministère public, pp. 596 et s., et la note de R. Verbeke, “Het 'nachtvluchtenarrest' en de grenzen van de rechterlijke macht. De begrippen 'rechtsmacht' en 'bevoegdheid'”, pp. 600 et s.; Cass. 10 juin 1996 et la note de D. Lagasse, “Le principe de la séparation des pouvoirs en droit de la sécurité sociale”, pp. 461 et s., spéc. p. 465; Cass. 19 avril 1991, J.T. 1992, p. 345; Cass. 4 décembre 1990, Pas. 1991, I, 330; S. Lust, Raad van State Afdeling Administratie. Rechtsherstel door de Raad van State, Bruges, die Keure, 2000, pp. 155 et 156, n° 84).

Dans d'autres arrêts, la Cour de cassation a également appliqué cette limite tirée du principe de la séparation des pouvoirs, en matière de sanctions administratives (Cass. 17 janvier 2005, R.G. S.04.0096.F; Cass. 13 septembre 2004, R.G. S.03.0129.F; Cass. 17 décembre 2001, R.G. S.00.0012.F; Cass. 14 décembre 1998, Bull. Cass., n° 520). Ces derniers arrêts nous semblent cependant contraires aux exigences de l'art. 6 de la CEDH telles qu'elles ont été précisées par la jurisprudence précitée de la Cour de Strasbourg.
[86] Il est d'ailleurs permis de s'interroger sur la compatibilité d'un contrôle objectif de pleine juridiction des actes administratifs avec le système constitutionnel belge de séparation des pouvoirs et de répartition des compétences entre juridictions judiciaires et administratives. En effet, en cas de compétence liée de l'autorité administrative, l'administré peut se prévaloir d'un droit subjectif, ce qui exclut le caractère objectif du recours (voy. Cass. 13 décembre 2001, R.G. C.99.0383.N; Cass. 24 novembre 2000, R.G. C.99.0382.N; M. Uyttendaele, Précis de droit constitutionnel belge. Regards sur un système institutionnel paradoxal, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 548, n° 534; J. Velu, “Extraits des conclusions du Ministère public (traduction)”, conclusions avant Cass. (ch. réunies) 10 avril 1987, A.P.T. 1987, pp. 292 et s., spéc. pp. 307 et 308, n° 21). Par contre, en cas de compétence discrétionnaire, le pouvoir de réformation qui caractérise le contrôle de pleine juridiction semble contraire au principe de la séparation des pouvoirs. Seule l'interdiction des cours et tribunaux de contrôler la constitutionnalité des lois permettrait donc au législateur belge de soumettre des actes administratifs à un recours objectif de pleine juridiction. Sur l'opposition entre droit subjectif et compétence discrétionnaire, voy. également Cass. 17 janvier 2005, R.G. S.04.0096.F.
[87] Sur le contrôle par voie d'exception, voy. M. Uyttendaele, o.c., pp. 129 à 135, nos 122 à 126.
[88] À l'égard des recours objectifs contre les décisions de la CBFA, le pouvoir de pleine juridiction résulte uniquement des travaux préparatoires. Par conséquent, la technique de l'interprétation conciliante permet de rechercher une interprétation de l'art. 121 de la loi du 2 août 2002 qui diffère de celle proposée par les travaux préparatoires (X. Taton, o.c., note 36, pp. 817 et 818, nos 24 à 27). Par contre, l'art. 2 de la loi concernant les recours prévoit expressément un recours “en pleine juridiction”. Par conséquent, le premier arrêt commenté n'a pas effectué une interprétation conciliante, même contra legem, mais a procédé à un véritable contrôle de constitutionnalité.
[89] Cass. 10 janvier 1939, Pas., I, 4; P.-E. Trousse, “Le contrôle juridictionnel des lois. État de la question. La jurisprudence”, in X., Actualité du contrôle juridictionnel des lois, Bruxelles, Larcier, 1973, pp. 299 et s.
[90] Dans un arrêt du 12 février 2003, la Cour de cassation a procédé à une interprétation contra legem de l'art. 16 § 3 de la loi du 16 juin 1993 relative à la répression des violations graves du droit international humanitaire, dans un sens compatible avec le principe du droit international coutumier de l'immunité des représentants officiels d'un État étranger (Cass. 12 février 2003, J.T. 2003, p. 243 , et les observations de P. d'Argent, “Monsieur Sharon et ses juges belges”, pp. 247 et s.). L'interprétation conciliante n'en devient pas pour autant un principe général du droit (Cass. 28 septembre 2001, R.G.D.C. 2005, p. 58, et la note de P. Van Orshoven, “Gelukkig zijn niet alle beginselen van het recht algemene rechtsbeginselen”, pp. 58 et s.).
[91] En toute hypothèse, ce grief ne nous semble pas de nature à entraîner la cassation du premier arrêt commenté. En effet, l'arrêt fonde son refus de substituer son appréciation à celle de l'IBPT non seulement sur le principe de la séparation des pouvoirs, mais également sur les obligations de coopération prévues par le droit dérivé européen. De ce fait, le moyen qui critiquerait le contrôle de constitutionnalité effectué par le premier arrêt commenté, critiquerait un motif surabondant de cet arrêt, dans la mesure où celui-ci resterait légalement justifié sur la base d'un autre motif (B. Maes, Cassatiemiddelen naar Belgisch recht, Gand, Mys & Breesch, 1993, pp. 334 et 335, n° 392). Sur cet autre motif, voy. infra, n° 21.
[92] Cass. 23 juin 1978, Pas., I, 1212.
[93] Cass. 28 novembre 2000, R.G. P.99.0163.N.
[94] Cass. 28 juin 1999, Bull. Cass., n° 402; J. Vincent et S. Guinchard, Procédure civile, 25ème éd., Paris, Dalloz, 1999, p. 487, n° 456.
[95] Sur la situation en droit français, voy. C.S. Delicostopoulos, o.c., note 34, pp. 352 à 356, nos 230 à 232.
[96] À titre d'exemple, la cour d'appel de Bruxelles ne peut pas organiser les enquêtes ou consultations publiques, visées à l'art. 14 § 2 de la loi relative au statut du régulateur. Le caractère limité des pouvoirs d'investigation de la cour d'appel de Bruxelles a également été mis en évidence dans le cadre du contentieux des recours contre les décisions du Conseil de la concurrence. En effet, la doctrine majoritaire considère que la cour ne peut pas demander une instruction complémentaire au corps des rapporteurs institué auprès du Conseil de la concurrence (J. Steenlant, A. Vanderelst et F. Wijckmans, “De gewijzigde wet op de mededinging: een tweede kans?”, T.P.R. 2001, pp. 703 et s., spéc. p. 740, n° 56; H. Swennen, “De wijzigingen van de Wet tot bescherming van de economische mededinging”, R.D.C. 1999, pp. 372 et s., spéc. p. 379, n° 18).
[97] À défaut de disposition lui imposant de transmettre le dossier administratif à la cour d'appel de Bruxelles, l'IBPT peut également déterminer les pièces qu'il entend soumettre aux débats. Il s'agit d'un nouveau point de divergence avec le régime des recours contre les décisions de la CBFA, puisque ceux-ci entraînent l'envoi du dossier de la procédure administrative dans les 5 jours de l'inscription de la cause au rôle (voy. X. Taton, o.c., note 36, pp. 331 et 332, n° 30).
[98] Le secret professionnel de l'IBPT est consacré par l'art. 23 de la loi relative au statut du régulateur. Contrairement à ce que l'art. 74 al. 2, 4° prévoit pour la CBFA, les lois du 17 janvier 2003 n'autorisent pas l'IBPT à communiquer des informations confidentielles dans le cadre des recours formés contre ses décisions.
[99] Cass. 20 mars 1989, Pas., I, 749; P. Lambert, Le secret professionnel, Bruxelles, Nemesis, 1985, pp. 64 et 65; J. Van Compernolle, “La production forcée de documents dans le Code judiciaire”, Ann. dr. Louvain 1981, pp. 89 et s., spéc. p. 97.
[100] Dans la deuxième espèce commentée, Mobistar a décidé de lever la confidentialité sur les données communiquées à l'IBPT, de sorte que celui-ci a pu produire une version des documents rendant lisibles les seules informations relatives à Mobistar.
[101] Par contre, le deuxième arrêt commenté n'a, à juste titre, pas suivi le raisonnement de l'IBPT, selon lequel l'insuffisance d'éléments permettant à la cour d'appel de Bruxelles de substituer sa décision à celle de l'IBPT, entraînerait l'irrecevabilité du recours.
[102] Par analogie avec les compétences du Conseil d'État statuant au contentieux de l'annulation (voy. M. Leroy, o.c., note 35, pp. 311 à 401).
[103] Y. Gaudemet, o.c., note 34, pp. 2.242 et 2.243, nos 4 à 7.
[104] Un contrôle de pleine juridiction ne saurait en effet constituer un prétexte à des décisions administratives illégales.
[105] Y. Gaudemet, o.c., note 34, pp. 2.243 à 2.245, nos 8 à 14, et les références citées.
[106] Art. 6 et 7 de la directive 2002/21/CE; art. 8 de la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu'à leur interconnexion, J.O.C.E. 24 février 2002, L 108, p. 7.
[107] Sur le fondement de cette condition, voy. supra, note 34.
[108] Dans la première espèce commentée, il n'appartenait pas davantage à la cour d'appel de Bruxelles d'exécuter les procédures de coopération imposées par les directives européennes précitées, car cela “équivaudrait à la négation de la raison d'être de [l'autorité indépendante contrôlée]” (C.S. Delicostopoulos, o.c., note 34, p. 362, n° 236).
[109] Bruxelles (9ème ch. bis) 25 février 2005, précité note 48.
[110] A. Bruyneel, “Les offres publiques d'acquisition. Réforme de 1989”, J.T. 1990, pp. 141 et s., spéc. p. 143, n° 9; R. Wtterwulghe, “De la nature du contrôle des OPA par la Commission bancaire”, in X., Modes de rapprochement structurel des entreprises. Tendances actuelles en droit des affaires, CDVA, Bruxelles, E. Story-Scientia, 1988, pp. 153 et s., spéc. p. 163; C. Lempereur, La commission bancaire et les cessions privées de participations de contrôle, Louvain, Van Linthout, 1975, pp. 9 et 10, nos 17 et 18; G. Schrans, “L'offre publique d'achat d'actions au porteur (take over bid)”, Rev. Banq. 1965, pp. 495 et s., spéc. p. 519, n° 29; J. Van Ryn, Principes de droit commercial, t. 2, 1ère éd., Bruxelles, Bruylant, 1957, p. 341, n° 1.373.
[111] À ce sujet, voy. l'interview de E. Wymeersch dans l'Echo du 12 mars 2005, p. 15.