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Cour d'appel Liège, 28/10/2004, R.D.C.-T.B.H., 2005/7, p. 777-778

Cour d'appel de Liège 28 octobre 2004

DROIT JUDICIAIRE
Référé - Urgence
Le retard avec lequel la partie demanderesse porte l'affaire devant le juge, n'exclut pas l'existence de l'urgence lorsque la situation s'est aggravée par l'apparition de faits nouveaux ou par la persistance de la situation.
DROIT JUDICIAIRE
Référé - Balance des intérêts en présence
La demande de délivrance d'un véhicule est déclarée non fondée, du fait que le garagiste qui détenait le véhicule de manière régulière par l'exercice de son droit de rétention vu le non-paiement des travaux de réparation au véhicule et du fait qu'il offre de libérer le véhicule moyennant le cantonnement du montant litigieux.
GERECHTELIJK RECHT
Kort geding - Urgentie
De vertraging waarmee de eisende partij de zaak voor de rechter brengt, sluit het bestaan van een spoedeisendheid niet uit wanneer de toestand verergerde door nieuwe feiten of door het voortduren van de toestand.
GERECHTELIJK RECHT
Kort geding - Belangenafweging
De vordering tot vrijgave van een voertuig wordt ongegrond verklaard, nu de garagehouder die op regelmatige wijze het bezit van het voertuig verkreeg het retentierecht uitoefent omwille van niet betaalde herstellingswerken aan het voertuig en de vrijgave van het voertuig aanbiedt tegen kantonnement van de ter betwisting staande geldsom.

SPRL Immo VSM / SA Henry

Siég.: R. de Francquen (président), M. Ligot et A. Jacquemin (conseillers)
Pl.: Mes Ph. Godin, A. Absil et N. Boveroux

(...)

Attendu que les faits de la cause ont été correctement rappelés par le premier juge; qu'il suffit d'en résumer l'essentiel et de retenir que, après avoir acquis chez l'intimée le 20 février 2003 un nouveau moteur Mercedes qu'elle a placé elle-même dans le camion Vito dont elle est propriétaire, l'appelante a sollicité l'intervention de l'intimée le 16 janvier 2004 pour les problèmes électriques rencontrés par ce même véhicule; que les travaux de l'intimée ont donné entière satisfaction mais ne furent facturés que le 11 mai 2004 après que l'appelante eut ramené la camionnette pour des défaillances de la boîte de vitesse qui auraient impliqué un démontage que l'intimée n'a pas effectué parce que le 19 mai sa facture avait été protestée, que début juin 2004 l'appelante est venue démonter les plaques du véhicule pour les placer sur un véhicule qui lui était prêté et qu'elle faisait intervenir la police le 16 juillet pour tenter de reprendre son bien, l'appelante lui opposant le droit de rétention dont elle entend se prévaloir pour obtenir préalablement le paiement de sa facture;

Que par la citation en référé signifiée le 23 juillet l'appelante sollicite la restitution de la camionnette Mercedes Vito sous peine d'une astreinte de pas moins de 10.000 euros par jour de retard “à dater du prononcé du jugement”, demande que le premier juge a rejetée en considérant que l'appelante avait tardé à s'inquiéter des nouvelles réparations nécessaires à la boîte de vitesse, puisque la camionnette était entrée dans les ateliers de l'intimée le 21 avril 2004 et que l'intéressée n'avait pas “réagi officiellement à la lettre du garage Henry du 7 juin 2004 dans le but de faire valoir ses droits de manière adéquate”;

Qu'il est annoncé qu'une action en paiement de la facture du 11 mai 2004 d'un import de 1.099,74 euros est depuis l'ordonnance pendante devant le juge de paix;

Attendu que le président du tribunal jouit d'un large pouvoir d'appréciation en fait et doit envisager la condition d'urgence jusqu'à la clôture des débats, cette exigence subsistant en degré d'appel; que le retard à porter le différend en justice ou à instruire la cause n'exclut pas nécessairement l'urgence si la situation est aggravée par des faits nouveaux ou par l'effet de sa simple durée; que doit en revanche être repoussée la demande de celui qui crée l'urgence de manière artificielle pour pallier sa négligence et son inertie prolongée;

Attendu qu'en l'espèce, s'il peut être reproché à l'appelante de n'avoir apparemment pas donné son accord au démontage de la boîte de vitesse, ce grief s'atténue par la circonstance qu'un litige était né entre parties à propos de la facturation des réparations antérieures pour lesquelles l'appelante attendait un geste commercial de l'intimée qui le lui a refusé par son courrier du 7 juin;

Que le démontage des plaques début juin n'a de signification que parce que déjà à ce moment, l'appelante entendait reprendre son véhicule et se heurtait à l'invocation d'un droit de rétention qui fut encore opposé même en présence des forces de l'ordre; que l'appelante a donc tenté d'obtenir la restitution d'un véhicule utilitaire dont elle avait et a toujours besoin et a assigné peu de temps après avoir dû constater que même à l'invitation de la police l'intimée n'entendait pas fléchir;

Que pour le fonctionnement de son entreprise, l'appelante ne peut sans inconvénient être privée de l'usage du véhicule retenu et que plus le temps passe, plus il y a urgence pour elle à récupérer son bien;

Que le reproche de passivité adressé à l'appelante par le premier juge ne se vérifie pas et que n'ayant pas d'autre possibilité d'obtenir satisfaction plus rapidement grâce à une action au fond, l'appelante était fondée à saisir le juge des référés;

Attendu que le droit de retenir la chose sur laquelle des prestations ont été effectuées et facturées est admis; que le garagiste est fondé à exercer ce droit puisqu'il a obtenu la possession d'une manière normale et licite, fait valoir une créance née de son intervention sur le bien qui lui a été confié aux fins de réparation en sorte qu'il existe une corrélation directe entre la créance et la chose retenue (voy. Civ. Liège (réf.) 26 avril 1993, J.L.M.B. 1993, p. 1437);

Que la connexité objective n'est pas incompatible avec la conclusion de plusieurs opérations qui s'inscrivent soit dans un contrat unique soit dans des relations commerciales suivies (Bruxelles 18 février 1994, R.D.C. 1995, p. 492);

Attendu que la créance invoquée est celle qui est née du chef des réparations effectuées en janvier 2004; que la facture n'étant alors pas encore établie, l'intimée a restitué le véhicule à l'appelante;

Qu'elle n'en a repris possession qu'à l'occasion d'une autre demande de l'appelante qui lui a conduit la camionnette dans ses ateliers; que l'intimée en a donc eu la possession d'une manière qui n'est pas critiquable, n'ayant utilisé aucun moyen détourné qui aurait constitué un piège pour l'appelante;

Que la créance est certes contestée mais repose sur une facture tracée pour des travaux ayant donné satisfaction et qui donne donc à la créance une apparence de fondement; que le juge de paix saisi du fond sur citation de l'intimée dira si cette créance est certaine et exigible;

Que l'intimée ne s'oppose pas à la restitution du véhicule pour autant que la somme en litige soit cantonnée, l'appelante ne devant la prolongation du dommage qu'elle invoque qu'à l'obstination avec laquelle elle revendique que les travaux de janvier 2004 soient pris en charge à titre commercial par l'intimée qui n'a vendu qu'un moteur;

Attendu que la demande de l'appelante n'est pas fondée;

Par ces motifs,

(...)