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Cour d'appel Liège, 29/04/2004, R.D.C.-T.B.H., 2005/5, p. 535-536

Cour d'appel de Liège 29 avril 2004

TRANSPORT
Transport par route - Qualité de commissionnaire- expéditeur - Transporteur: formalités douanières
Celui qui s'engage à accomplir les formalités douanières pour des marchandises transportées de Suisse vers la Belgique et de délivrer ces marchandises contre rembours, est un commissionnaire-expéditeur et pas un transporteur vu que ces obligations existent indépendamment du contrat de transport en tant que tel.
TRANSPORT
Transport par route - Loi nationale sur le transport du 25 août 1891 - Article 9 - Prescription - Prolongation de la prescription - Article 2220 C.civ.
Conformément à l'article 2220 C.civ., on peut renoncer à une prescription acquise ou au délai déjà couru d'un délai encore à courir mais on ne peut, d'avance, renoncer à la prescription.
La prolongation - accordée par l'assureur du transporteur - du court délai de prescription de 6 mois prévu à l'article 9 de la loi nationale sur le transport du 25 août 1891, au moment où le délai initial de prescription de six mois courait encore et qui valait pour 6 mois complémentaires après l'échéance du premier délai de prescription, ne vaut que pour ce qui concerne les six mois qui suivent la date à laquelle il avait été renoncé à la prescription du délai déjà couru.
VERVOER
Vervoer over de weg - Hoedanigheid commissionair-expediteur - Vervoerder douaneformaliteiten
Degene die zich verbindt om voor goederen die vanuit Zwitserland naar België worden vervoerd te zorgen voor de douaneformaliteiten en voor aflevering van deze goederen tegen remboursement is een commissionair-expediteur en geen vervoerder nu dergelijke verplichtingen afzonderlijk van de eigenlijke vervoerovereenkomst bestaan.
VERVOER
Vervoer over de weg - Nationale Vervoerwet 25 augustus 1891 - Artikel 9 - Verjaring - Verlenging van de verjaring - Artikel 2220 B.W.
Overeenkomstig artikel 2220 B.W. kan men verzaken aan een verworven verjaring of aan de reeds verlopen termijn van een nog lopende verjaringstermijn doch kan niet op voorhand afstand worden gedaan van de verjaring.
De verlenging - verleend door de verzekeraar van de vervoerder - van de korte verjaringstermijn van 6 maanden voorzien in artikel 9 van de Vervoerwet van 25 augustus 1891, op een ogenblik waarop de oorspronkelijke zesmaandelijkse verjaringstermijn nog liep, en die gold voor 6 bijkomende maanden na afloop van deze eerste verjaringstermijn, is slechts geldig voor wat betreft de zes maanden die volgen op de datum waarop aan de reeds verlopen termijn werd verzaakt.

SA Ziegler / defFoxhal Gaëtane q.q. liquidateur S.A. Transports Guy Deliège

Siég.: R. de Francquen (président), M. Ligot et A. Jacquemin (conseillers)
Pl.: Mes J. Delanote loco J. De Maeyer, B. Insel, Moerenhout loco F. Ponet et R. Van Gysel

(...)

Attendu qu'à la demande de l'appelante, la société anonyme Transports Guy Deliège, actuellement en liquidation, devait assurer le transport de marchandises et la livraison de différents colis que l'appelante s'était engagée à acheminer chez les clients de ses commettants;

Que le 28 février 1991, le camion de l'intimée a été volé avec la plus grande partie de la cargaison, alors que le chauffeur avait quitté le véhicule pour demander son chemin; que le camion fut retrouvé vide et que l'appelante, par citation du 28 février 1992, réclamait un total de 194.493 FB et 6.736 francs suisses, sommes qui lui étaient réclamées par ses propres clients; que dans ses conclusions d'instance, l'appelante n'insistait pas à propos de la livraison de chaussures Bally (puisque le vendeur lui-même avait assuré la marchandise et se trouvait indemnisé) et qu'elle demandait 205.718 FB, ce qui correspond à sa demande actuelle;

Attendu que si le chargement des marchandises s'est effectué auprès de “Ziegler Liège Messagerie” (voy. bordereau de tournée du 28 février 1991 - pièce 1 dossier des 2 parties), c'est bien avec l'appelante que le transporteur a contracté; qu'il n'appartient pas à l'appelante de fournir la preuve négative qu'aucune société du même nom qu'elle n'existe à Liège; que les bordereaux de livraison accompagnant la marchandise sont libellés au nom de l'appelante et que c'est à celle-ci que parvinrent les réclamations des différents fabricants qui l'avaient mandatée;

Attendu que s'il n'est pas discutable que les parties ont été liées par un contrat de transport soumis à la loi du 25 août 1891, l'intimée argumente longuement sur ce que l'appelante serait non pas un commissionnaire-expéditeur mais un commissionnaire de transport pour en tirer la conclusion que l'intéressée n'aurait pas qualité pour introduire une action, les réclamations devant, d'après elle, émaner directement soit des commettants préjudiciés pour n'être pas payés de leurs fournitures soit des destinataires aux risques desquels la marchandise voyageait suivant les conditions générales de leurs vendeurs;

Que la question est oiseuse en l'espèce dès lors que l'appelante, assumant ses responsabilités, a indemnisé ses commettants qui n'ont en rien inquiété le transporteur;

Qu'au demeurant, encore que la distinction entre les deux catégories d'intermédiaires soit malaisée (Matray et Masson, Les contrats commerciaux, CUP, janvier 2000, le point sur le droit commercial, p. 119), il faudrait opiner pour la catégorie des commissionnaires-expéditeurs dès lors que l'appelante se chargeait, pour les marchandises en provenance de Suisse, des formalités de douane et que pour plusieurs des autres livraisons elle s'engageait à ne remettre la marchandise que contre remboursement, ce qui sont des opérations annexes au transport proprement dit (voy. aussi Foriers, “Les contrats commerciaux”, R.D.C. 1983, p. 163; R.P.D.B., Complt III, v° Commission, n°s 33 et 112); qu'en pratique, commissionnaires et voituriers sont désignés sous la dénomination d'entrepreneurs de transport (R.P.D.B., v° Transport par terre, n° 44);

Que l'appelante a bien qualité pour intenter l'action;

Attendu que les premiers juges ont suivi la thèse de l'intimée selon laquelle la prescription de l'article 9 du contrat de transport était acquise;

Que l'appelante s'était certes engagée dans des pourparlers avec l'assureur du transporteur, la Compagnie européenne d'assurance des marchandises et des bagages, laquelle dans une télécopie du 21 août 1991 dont l'intimée fournit la traduction concédait au nom de l'intimée son accord sur “une prolongation de 6 mois du délai de prescription à partir du 28 août 1991, à condition que Ziegler également puisse être assignée par les intéressés de la marchandise et qu'elle ne puisse invoquer de prescription commencée”;

Attendu que partant de ce qu'on peut renoncer à la prescription acquise tandis qu'on ne peut renoncer d'avance à la prescription (art. 2220 C. civ.) les premiers juges ont à bon droit décidé que dès lors que le 22 août 1991 il a été renoncé à tenir compte du temps déjà écoulé, un nouveau délai de 6 mois commençait à courir qui prenait fin le 21 février 1992, la citation en justice étant par conséquent tardive;

Attendu que l'article 2220 du Code civil autorise à renoncer à une prescription acquise mais aussi à renoncer au temps déjà écoulé d'une prescription encore en cours;

Que la compagnie d'assurance couvrant l'intimée a consenti le 22 août 1991 à renoncer au temps passé depuis le fait donnant lieu à réclamation (28 février 1991), le premier délai de 6 mois n'étant pas encore totalement écoulé mais qu'elle ne pouvait consentir qu'un nouveau délai de 6 mois et n'était donc pas autorisée à renoncer au-delà dudit délai, la renonciation n'étant pas valable pour les quelques jours excédant ce délai de 6 mois (M. Regout-Masson, La prescription en droit civil, CUP, avril 1998, vol. 23, p. 35 et référence à Cass. 23 octobre 1986, Pas. 1987, I, 250);

Attendu certes que la compagnie d'assurance avait consenti un nouveau délai de 6 mois “à partir du 28 août 1991”; que toutefois cette concession n'était valable que pour les 6 mois suivant la renonciation, qu'elle soit du 21 ou du 22 août 1991; qu'en toute hypothèse, l'action en justice devait être intentée au plus tard le 22 février 1992;

Attendu que l'appelante n'incrimine pas la bonne foi de l'intimée qui, après avoir écrit qu'elle accordait un délai de 6 mois à partir du 28 août 1991 lequel permettait d'assigner effectivement au plus tard le 28 février 1992, a soulevé l'argument de prescription;

Par ces motifs et ceux des premiers juges,

(...)

Confirme le jugement entrepris et condamne l'appelante aux dépens d'appel

(...)