Article

Les dettes de masse de l'article 44, alinéa 2, R.D.C.-T.B.H., 2005/3, p. 262-271

CONCORDAT JUDICIAIRE
Faillite - Créancier hypothécaire et gagiste sur fonds de commerce - Dettes contractées pendant le concordat judiciaire avec la collaboration, l'autorisation ou l'assistance du commissaire au sursis - Primauté du créancier gagiste sur fonds de commerce
Le créancier bénéficiant de l'application de l'article 44, alinéa 2, de la loi relative au concordat judiciaire ne prime le créancier gagiste sur fonds de commerce que s'il peut lui opposer un privilège d'un rang préférable.
Le privilège pour frais faits pour la conservation de la chose ne peut être invoqué relativement aux interventions qui ont pour effet de permettre la continuation d'une entreprise ou la conservation d'une universalité.
AKKOORD (GERECHTELIJK)
Faillissement - Hypothecaire schuldeiser en pand op de handelszaak - Schulden aangegaan tijdens het gerechtelijk akkoord met de medewerking, machtiging of bijstand van de commissaris inzake opschorting - Voorrang van de schuldeiser met pand op de handelszaak
De schuldeiser die van de toepassing van artikel 44, lid 2, van de Wet op het gerechtelijk akkoord geniet, heeft enkel voorrang op de schuldeiser met een pand op de handelszaak indien hij deze een voorrecht met een hogere rang kan tegenwerpen.
Het voorrecht voor de kosten die gemaakt zijn voor het behoud van de zaak kan niet worden ingeroepen voor tussenkomsten waardoor de verderzetting van de onderneming of het behoud van een algemeenheid mogelijk wordt gemaakt.
Les dettes de masse de l'article 44, alinéa 2
Jeanine Windey et Thomas Hürner

L'arrêt ci-dessus reproduit, qui porte sur l'application de l'article 44, alinéa 2, de la loi sur le concordat, offre l'occasion d'aborder les difficultés d'interprétation suscitées par cet article relativement à son champ d'application ratione materiae (le type d'actes visés) et au rang occupé par les créances qui en bénéficient.

A. Les faits

1.La SA KBC Vendor Lease, appelante, avait poursuivi ses relations contractuelles avec l'intimée, la SA Media-Waimes en faillite, pendant le sursis provisoire obtenu par cette dernière.

Dans le cadre du concordat, la SA KBC consentit à la SA Media-Waimes une diminution du montant des redevances mensuelles dont elle était créancière à son égard, celles-ci, de l'ordre de 220.973 FB, étant réduites à 100.000 FB.

La faillite de la SA Media-Waimes fut toutefois prononcée, à l'occasion de laquelle la SA KBC déclara sa créance pour un montant total de 9.572.227 FB.

La SA KBC sollicitait que la partie de sa créance relative aux redevances échues pendant le sursis provisoire, soit 1.246.811 FB, soit admise au titre de dette de la masse par application de l'article 44, alinéa 2 de la loi sur le concordat et soit reconnue opposable à la SA Banque Bruxelles Lambert en sa qualité de créancier hypothécaire et créancier gagiste sur fonds de commerce de la SA Media-Waimes en faillite; le solde, soit 8.325.416 FB, devant être admis au passif chirographaire de la faillite.

La créance de la SA KBC fut contestée à un double titre: quant à son montant global, le curateur et la SA BBL faisant valoir que le montant de la créance à déclarer devait être diminué des réductions de redevance accordées en période concordataire, d'une part, et quant au quantum de la dette de masse issue des prestations effectuées pendant le concordat et à son opposabilité au créancier nanti d'une sûreté, d'autre part.

2.Sur le montant total de la créance, la cour d'appel décide que dès lors qu'il a été mis fin au concordat, la SA KBC peut produire l'intégralité de sa créance au passif de la faillite, celle-ci n'ayant pas fait abandon d'une partie de sa créance mais s'étant bornée à consentir une remise expressément motivée par le concordat.

3.La cour examine ensuite l'importance de la dette de masse générée par la poursuite des relations contractuelles entre l'appelante et la société faillie pendant le concordat.

Refusant de faire droit aux prétentions de la SA KBC suivant laquelle ladite dette de masse s'élève à 1.246.811 FB, la cour estime que celle-ci ne peut revendiquer la qualité de créancier hors concordat que “pour ce qui a été expressément admis par le commissaire”, soit une redevance mensuelle de 100.000 FB. En conséquence, le juge d'appel fixe le montant de la dette de masse de l'appelante à 400.000 FB.

Il est permis de déduire de la solution consacrée par la cour que si la réduction du montant des redevances octroyée par la SA KBC à la SA Media-Waimes, alors en concordat, était dépourvue d'incidence quant à l'établissement du montant total de sa créance et, partant, que ladite créance pouvait être produite dans son intégralité au passif de la faillite, celle-ci n'était en revanche pas dénuée de portée relativement au sort à réserver à la dette de masse dont la SA KBC pouvait se prévaloir à l'égard de la faillite par application de l'article 44, alinéa 2 de la loi sur le concordat.

4.La cour tranche enfin la question du rang occupé par la portion de créance de la SA KBC relative aux prestations effectuées au cours du sursis provisoire. Elle observe à cet égard que l'actif de la société faillie se compose exclusivement d'un immeuble, lequel fait l'objet d'une hypothèque constituée au profit de la SA BBL, et d'un fonds de commerce, mis en gage au profit de la même société.

La cour considère que la SA KBC ne peut valablement primer un créancier titulaire de sûretés réelles ou de privilèges spéciaux, en l'espèce la SA BBL, que si elle parvient à démontrer que les dettes nées de la poursuite de ses activités avec la société faillie ont profité auxdits créanciers et, partant, qu'elle est en mesure de se prévaloir d'un privilège de rang préférable.

Le juge d'appel refuse de faire droit à l'argument de la SA KBC suivant lequel les créances nées à son profit au cours du concordat ont permis de sauvegarder une console Sony, élément essentiel du fonds de commerce, en l'absence duquel l'assiette de la sûreté de la SA BBL aurait fortement diminué. Le juge rappelle que l'assiette du privilège institué aux termes de l'article 20, 4°, de la loi hypothécaire suppose une assiette constituée de biens déterminés et identifiables et que cette condition fait défaut en l'espèce, l'assiette étant une universalité de biens, soit un fonds de commerce.

La cour relève, de manière surabondante, que la SA KBC ne démontre pas que la poursuite des activités aurait permis au fonds d'acquérir une plus-value égale au passif de masse né en suite de celle-ci et, partant, décide que l'appelante ne saurait primer la SA BBL, créancier hors la masse.

B. Rappel des principes
1. Introduction

5.L'arrêt commenté tranche la question du rapport entre les créances visées à l'article 44, alinéa 2 de la loi sur le concordat et les créances garanties par une sûreté réelle ou un privilège spécial.

L'arrêt subordonne la primauté des premières sur les secondes à la condition qu'il soit démontré qu'elles sont assorties d'un privilège d'un rang préférable.

L'arrêt commenté nous donne ainsi l'occasion d'examiner de manière approfondie la nature des dettes visées à l'article 44, alinéa 2, de la loi sur le concordat.

2. La notion de dette de la masse au sens de l'article 44, alinéa 2

6.Sous l'empire de l'ancienne législation sur le concordat judiciaire, les créanciers qui avaient contracté avec le débiteur pendant la période concordataire étaient, en cas d'échec du concordat et de faillite subséquente, considérés comme des créanciers antérieurs à la faillite et, partant, en concours avec les créanciers dans la masse faillie.

Le législateur de 1997 a apporté une exception importante à ce principe, consacrée à l'article 44 alinéa 2 de la loi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire (ci-après “la loi”) qui dispose que “les actes accomplis par le débiteur au cours de la procédure avec la collaboration, l'autorisation ou l'assistance du commissaire au sursis, sont considérés lors de la faillite comme des actes du curateur, les dettes contractées pendant le concordat étant comprises comme dettes de la masse faillie”.

La qualification de dette de la masse au sens de l'article 44, alinéa 2 requiert ainsi la réunion de deux conditions: il faut que la dette en question résulte d'un acte accompli avec la collaboration, l'autorisation ou l'assistance du commissaire au sursis, d'une part, et qu'elle ait été contractée pendant le concordat, d'autre part.

a) Présomption de collaboration, d'assistance et d'autorisation du commissaire au sursis

7.La portée qui doit être assignée aux termes “collaboration” et “assistance”, auxquels le législateur subordonne la reconnaissance du statut de dette de la masse en cas de faillite résultant de l'échec de la procédure concordataire, dépend de la conception que l'on se fait de l'institution nouvellement mise en place et de la mission dévolue au commissaire au sursis.

Pendant la période de sursis provisoire qui va du jugement statuant sur la requête en concordat (art. 15 de la loi) jusqu'à l'homologation du sursis définitif (art. 31 de la loi), le débiteur reste à la tête de ses affaires, la loi du 17 juillet 1997 substituant à l'obligation légale du débiteur d'obtenir l'autorisation du juge délégué dans les conditions jadis fixées à l'article 11 des anciennes lois coordonnées, une forme différente d'assistance par le commissaire au sursis, désigné en vertu de l'article 15, § 1er, de la loi [1].

Le commissaire au sursis tient ses pouvoirs partim du jugement le désignant et partim de la loi du 17 juillet 1997. La loi lui assigne notamment la mission “d'assister le débiteur dans sa gestion, sous le contrôle du Tribunal” et de faire rapport à ce dernier dès que les circonstances l'exigent (art. 19 de la loi), d'examiner les créances (art. 26 de la loi) et d'assister, le cas échéant, le débiteur dans l'élaboration du plan de redressement (art. 29, § 1er).

Ainsi, indépendamment de l'application de l'article 15, § 1, alinéa 3, la mission légale du commissaire au sursis implique une surveillance et un contrôle permanent de l'ensemble des opérations accomplies par le débiteur, puisqu'il doit être en mesure d'adresser à tout moment au tribunal un rapport sur la situation. À cet égard, le commissaire au sursis endosse une responsabilité importante [2].

Le débiteur concordataire conserve toutefois l'initiative de la gestion de ses affaires et n'est nullement frappé d'incapacité, hormis le cas où, faisant usage de l'article 15, § 1, alinéa 3 précité, le tribunal subordonne l'accomplissement d'actes d'administration ou de disposition déterminés à l'autorisation préalable du commissaire.

8.Il résulte des développements qui précèdent qu'il est permis de déduire du caractère général de la mission de surveillance du commissaire au sursis que l'ensemble des engagements valablement souscrits par le débiteur le sont avec l'assistance de ce dernier, à défaut d'opposition de sa part et ce, même dans l'hypothèse, au demeurant fréquente, où le jugement octroyant le sursis provisoire n'a pas, usant de la faculté qui lui est reconnue à l'article 15, § 1, alinéa 3 précité, subordonné l'accomplissement par le débiteur d'actes déterminés à l'autorisation préalable du commissaire au sursis [3].

Cette présomption de collaboration, d'assistance et d'autorisation du commissaire au sursis, motivée par la portée de la mission légale qui lui est impartie, est très largement admise par la jurisprudence.

La cour d'appel d'Anvers [4] a ainsi décidé, dans une espèce où les commissaires s'étaient abstenus de répondre à une lettre émanant de la banque créancière aux termes de laquelle elle les invitait à l'avertir sans délai dans l'hypothèse où ils s'opposeraient au nouveau crédit octroyé, que bien que cela ne soit à proprement parler pas exigé pour l'application de l'article 44 alinéa 2 [5], il peut être déduit de l'absence de réaction négative des commissaires ainsi que de la poursuite d'exécution du contrat de factoring sans remarques de leur part que ceux-ci avaient marqué leur accord et qu'ils avaient par conséquent autorisé (le débiteur) à poursuivre le contrat”[6]

De manière plus lumineuse encore, le tribunal de commerce de Charleroi [7], dans un jugement du 2 mai 2000, considéra qu'une interprétation restrictive de l'article 44, alinéa 2 limitant l'application de ce dernier aux hypothèses de participation active du commissaire au sursis “ne peut être retenue car elle aurait pour conséquence paradoxale d'exclure du bénéfice de la disposition toutes les créances résultant d'engagements pour lesquels, compte tenu de la capacité du débiteur [8], l'intervention du commissaire au sursis n'est pas requise, par exemple celles qui découlent de la poursuite des contrats en cours”.

9.Il convient toutefois de signaler l'existence d'un courant jurisprudentiel plus nuancé, considérant que la présomption de collaboration, d'assistance et d'autorisation du commissaire au sursis revêt une portée moins large que celle dégagée par les arrêts précités.

Le tribunal de commerce de Turnhout [9] a ainsi estimé dans un jugement du 26 juin 2001, lequel a fait l'objet du recours précité devant la cour d'appel d'Anvers, que les créanciers étaient recevables à prouver ”par toutes voies de droit, témoignages et présomptions compris” [10] que les engagements pour lesquels ils sollicitent l'application de l'article 44, alinéa 2 ont été accomplis avec la collaboration, l'autorisation ou l'assistance du commissaire au sursis [11]. Monsieur Zenner déduit à juste titre des termes de la décision qu'“il s'ensuit, implicitement, que le tribunal ne considère pas que toutes les dettes nées pendant le cours de la procédure en concordat seraient d'office couvertes par la disposition en cause” [12].

La solution retenue par la cour d'appel d'Anvers ainsi que le tribunal de commerce de Charleroi nous paraît plus conforme aux dispositions de la loi du 17 juillet 1997 relatives à la mission du commissaire au sursis [13] en ce qu'elle confère aux engagements souscrits par le débiteur le caractère a priori de dettes de la masse. Seule une opposition expresse émanant du commissaire au sursis ou, dans l'hypothèse de l'article 15, § 1, alinéa 3, le simple constat que l'autorisation de ce dernier n'a pas été accordée, permettraient de refuser la qualification de dettes de la masse aux nouveaux engagements souscrits par le débiteur.

b) Dettes contractées “pendant le concordat”: le critère chronologique

10.L'expression utilisée aux termes de l'article 44, alinéa 2, suivant lequel les dettes contractées “pendant le concordat” sont comprises comme dettes de la masse faillie, n'est pas dénuée d'ambiguïté.

Il est admis que constituent des “dettes contractées pendant le concordat” les dettes issues de contrats conclus après l'octroi du sursis provisoire, ainsi que les dettes issues de l'exécution de conventions conclues avant ledit sursis mais qui résultent de prestations effectuées depuis l'octroi de ce dernier, telles les nouvelles échéances de loyers ou les dettes résultant de la poursuite de contrats de crédit [14]. En revanche, le bénéfice de l'article 44, alinéa 2 ne saurait être accordé aux créanciers pour des créances nées entre le moment du dépôt de la requête en concordat et le jugement statuant sur l'obtention du sursis provisoire.

La question se pose toutefois de savoir dans quelle mesure l'article 44, alinéa 2 peut être invoqué relativement à des créances nées après l'octroi du sursis définitif.

À notre estime, une réponse négative s'impose et ce, en raison des termes mêmes de l'article 44, alinéa 2. En effet, celui-ci vise exclusivement les actes accomplis par le débiteur au cours de la procédure avec la collaboration, l'autorisation ou l'assistance du commissaire au sursis, lesquels seuls sont considérés lors de la faillite ultérieure comme des actes du curateur.

Or, la mission du commissaire au sursis après l'octroi du sursis définitif diverge fondamentalement de celle qui lui est impartie au cours du sursis provisoire. En effet, alors que l'article 19 de la loi assigne au commissaire la mission générale “d'assister le débiteur dans sa gestion, sous le contrôle du tribunal” pendant le sursis provisoire, l'article 36 de la même loi énonce que le commissaire “exerce la surveillance et le contrôle de l'exécution du plan et du concordat” après l'octroi du sursis définitif et fait rapport au tribunal tous les six mois à ce sujet. La mission légale du commissaire est donc d'une nature différente après l'octroi du sursis définitif. Le tribunal de commerce de Mons [15] a fait application de ces principes dans un jugement du 8 novembre 1999, considérant que “la loi a donc clairement, par l'article 36, considéré que la mission du commissaire était différente lorsque le concordat passait en phase de sursis définitif” et que “si les Commissaires doivent surveiller et contrôler l'exécution du plan, c'est bien que la débitrice a retrouvé une autonomie de gestion, sauf au tribunal d'en avoir décidé autrement dans le jugement accordant le sursis définitif”.

Partant, il est permis d'inférer de la condition posée par la loi à la qualification des actes accomplis par le débiteur, pendant le concordat, de dettes de la masse que ladite qualification est exclue lorsqu'il s'agit d'actes accomplis au cours du sursis définitif [16].

11.Un autre argument milite en faveur d'une interprétation restrictive de l'article 44, alinéa 2 relativement à la définition des dettes de masse au regard du critère strictement chronologique, étant celui déduit de la situation économique nouvelle du débiteur lors de la phase du sursis définitif.

Le jugement du tribunal de commerce de Mons précité [17] a ainsi retenu comme autre motif justifiant de refuser le bénéfice de l'article 44, alinéa 2 aux créances nées postérieurement à l'obtention du sursis définitif le fait qu'“un débiteur en phase de sursis définitif n'est (…) plus un débiteur à risque comme il l'était en période de sursis provisoire, mais au contraire un débiteur faible, ne présentant pas plus de risque que tout entrepreneur (…); que dans ces conditions, il ne se justifie plus d'accorder à ses nouveaux partenaires, le super privilège de l'article 44, § 2”.

Les principes qui précèdent ne portent en revanche pas atteinte aux droits des nouveaux créanciers en tant que tels. Si les dettes contractées pendant le sursis définitif valent ainsi comme simples dettes dans la masse en cas de faillite ultérieure du débiteur [18], elles ne seront toutefois pas soumises aux règles de suspension des voies d'exécution individuelles ni au plan de redressement pendant la procédure concordataire.

3. Le rang des créanciers de la masse au sens de l'article 44, alinéa 2

12.Il n'existait aucune disposition équivalente à l'actuel article 44, alinéa 2 sous le régime antérieur à la loi du 17 juillet 1997 sur le concordat judiciaire, en sorte que les engagements pris au cours de la procédure de concordat ne bénéficiaient d'aucune faveur en cas d'échec de la procédure [19].

Les dettes de la masse “classiques” étaient pour leur part visées à l'ancien article 561 du Code de commerce qui disposait que le montant de l'actif mobilier du failli était réparti entre tous les créanciers au marc le franc, “distraction faite des frais et dépenses de l'administration de la faillite”. Il était toutefois admis que cette disposition constituait l'application d'un principe général gouvernant toute procédure de liquidation collective d'un patrimoine [20].

13.Les dettes de la masse faillie sont aujourd'hui visées aux articles 46 et 99 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites.

Pour rappel, l'on peut distinguer deux types de dettes de la masse: d'une part, les frais et dépens de l'administration de la masse faillie (art. 99), soit, notamment, les frais de procédure, les frais de vente, les frais relatifs à l'emploi du failli ou encore les honoraires des curateurs et, d'autre part, les dettes nées de la poursuite des activités commerciales du débiteur (art. 46).

Les dettes de la masse en cas de faillite sont définies, aux termes de la jurisprudence de la Cour de cassation, comme l'ensemble des engagements contractés par le curateur qualitate qua “en vue de l'administration de la masse” et notamment de la poursuite des activités commerciales [21].

14.Il résulte d'une doctrine et d'une jurisprudence constantes que les créanciers de la masse n'entrent pas en concours avec les créanciers du débiteur qui sont dans la masse [22]. Cette absence de concours fait échapper les créanciers de la masse tant à la suspension de leur droit d'exécution individuel qu'à la loi du dividende.

La Cour de cassation justifie l'absence de restriction aux droits d'exécution individuels des créanciers de la masse par la circonstance que seules les créances non assorties d'un privilège spécial ou d'une sûreté et qui sont antérieures à la naissance du concours sont soumises par la loi à la suspension des poursuites, d'une part, et qu'aucune disposition légale ne soumet les créanciers de la masse au même régime que les créances dans la masse d'autre part [23]. La circonstance que les droits des créanciers de la masse soient nés après la formation de celle-ci implique également que ces deux types de créanciers ne peuvent être soumis à un régime identique, sous peine d'aboutir à la constitution d'une “masse dans la masse”, laquelle ne repose sur aucun fondement légal [24].

15.Il est également enseigné que les créanciers de la masse ne priment les créanciers bénéficiaires d'une sûreté ou d'un privilège spécial que lorsqu'ils démontrent avoir contribué soit à la valorisation ou à la conservation de l'assiette d'un privilège spécial ou d'une sûreté, soit que les frais exposés par eux ont permis la réalisation du bien formant l'objet de l'une de ces causes de préférence. Cette dernière caractéristique du régime des créances de la masse repose, par l'effet d'un raisonnement analogique, sur l'idée à la base de la reconnaissance du privilège du conservateur (art. 20, 4°, de la loi hypothécaire du 16 décembre 1851) et du privilège des frais de justice (art. 17, 19 et 21 de ladite loi).

16.Les dettes de la masse nées dans le cadre d'une situation de concours déterminée ne constituent cependant pas, lorsqu'une nouvelle situation de concours succède à la première, des dettes de la masse créée ensuite de ce nouveau concours [25].

Il a été ainsi jugé que si les dettes nées d'engagements contractés par le liquidateur pour les besoins de la liquidation sont des dettes de la masse des créanciers de la société en liquidation, celles-ci ne constituent en revanche nullement, en cas de faillite subséquente de la société en liquidation, des dettes de la masse faillie, mais bien des dettes dans la masse faillie [26].

Cette jurisprudence s'appliquait également aux créances qui dans le cadre du concordat devaient être considérées comme des créances de la masse concordataire, et partant, échapper aux effets du concours issu du concordat. Celles-ci perdaient ce caractère en cas de faillite subséquente, et devaient dès lors être considérées comme des créances dans la masse faillie, venant en concours intégral avec l'ensemble des créances antérieures à la faillite.

17.Le régime décrit ci-dessus a été toutefois substantiellement modifié concernant les créances nées pendant le concordat, et exclusivement pour celles-ci, par la loi du 17 juillet 1997.

En vertu de l'article 44, alinéa 2 de cette loi, les dettes de la masse concordataire qui remplissent les conditions posées par cet article ne deviennent pas, en cas de faillite subséquente, des dettes dans la masse faillie. Il en découle au contraire qu'en cas d'échec du concordat, ces créances, bien qu'antérieures à la faillite, pourront être déduites de l'actif par priorité.

La nouvelle disposition est cependant muette quant au rang que prennent ces créances face aux créanciers titulaires de sûretés réelles ou de privilèges spéciaux, d'une part, et face aux “simples” dettes de masse résultant des articles 46 et 99 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites, d'autre part.

18.Nonobstant l'utilisation d'une terminologie identique, les dettes de masse visées à l'article 44, alinéa 2 ne peuvent se confondre avec les dettes de masse issues de la gestion de la faillite par le curateur.

En réalité, ainsi que la doctrine l'a déjà souligné, la qualification retenue par l'article 44 alinéa 2 est fictive car les créances qui la reçoivent sont nées antérieurement au concours provoqué par le jugement déclaratif de faillite. Si certains auteurs ont considéré à leur propos qu'il “conviendrait de parler d'un nouveau privilège, à forte opposabilité et de haut rang” [27], se pose la question de savoir s'il ne s'agirait pas plutôt de la reconnaissance expresse, par le législateur, d'un cas unique de privilège pour frais de conservation d'une universalité, étant le patrimoine du débiteur.

19.À notre estime, le sort réservé par l'article 44, alinéa 2 aux créances issues d'engagements nés pendant la période concordataire traduit en effet la volonté du législateur d'instaurer un nouveau type de privilège pour frais de conservation, non plus limité à un bien déterminé mais étendu à l'ensemble d'un patrimoine, dans le cadre étroit et spécifique du concordat.

La mise sur pied de ce nouveau privilège s'explique par la philosophie générale de la loi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire. Le concordat ayant pour principal objectif de maintenir en activité le débiteur en difficulté et d'assurer ainsi la continuité de l'entreprise en redressant sa situation financière, le législateur a estimé nécessaire de rassurer les créanciers qui sont amenés à traiter avec le débiteur au cours du concordat en leur octroyant le bénéfice de l'article 44, alinéa 2.

Il aurait été en effet vain de prétendre poursuivre un but d'assainissement des finances du débiteur sans se soucier du sort d'intervenants aussi primordiaux pour le succès de cette procédure que les créanciers. Dès lors qu'ils contractent de nouveaux engagements avec le débiteur concordataire, les créanciers permettent en effet la poursuite des activités de ce dernier et, partant, justifient la finalité de l'institution du concordat.

En instaurant l'article 44, alinéa 2, le législateur a donc posé comme prémisse que les nouveaux créanciers, en plus de revêtir une importance capitale sur le plan de la sauvegarde d'une entreprise déterminée, oeuvraient à la défense de l'intérêt général, soit celui de l'ordre économique de la société envisagée dans son ensemble.

Il en découle qu'à la différence des dettes de la masse nées pendant la faillite, qui ne peuvent être mises à charge des créanciers gagiste ou hypothécaire que dans la mesure où elles ont effectivement contribué au maintien ou à la réalisation de leur sûreté, le privilège issu de l'article 44, alinéa 2 repose sur la présomption légale irréfragable que ces créances ont contribué à la conservation de l'ensemble du patrimoine du débiteur et, de ce fait, “sont opposables à tous les créanciers, parce qu'elles ont été contractées de façon identique en vue du maintien de la continuité ou du rétablissement de l'entreprise” [28].

La notion de dette de masse au sens de l'article 44, alinéa 2 présuppose ainsi en elle-même la condition posée par la doctrine et la jurisprudence au droit de priorité des créanciers de la masse “classiques” sur les créanciers titulaires de sûretés réelles ou de privilèges spéciaux.

C'est donc à tort qu'une doctrine et une jurisprudence, certes majoritaires, limitent l'emprise du droit de préférence issu de l'article 44, alinéa 2 sur le produit de la réalisation de l'assiette des biens grevés d'une hypothèque ou d'un gage sur fonds de commerce aux cas dans lesquels ces dettes de la masse sont “nécessaires à la valorisation ou à la conservation de l'assiette de ces créanciers” [29].

M. Zenner, qui souscrit pourtant à cette analyse, observe à très juste titre qu'“à s'en tenir à ce principe, le paiement effectif de ces dettes de masse resterait aléatoire” [30].

20.En réalité, la réticence dont font montre la doctrine et la jurisprudence à l'égard du principe de primauté des créanciers bénéficiant de l'article 44, alinéa 2 s'explique par le fait qu'une telle solution aboutirait à modifier fondamentalement l'efficacité des sûretés [31].

Force est dès lors de constater que nous nous trouvons confrontés à deux conceptions radicalement opposées, lesquelles dépendent du modèle économique sous-jacent à l'institution du concordat.

Opter en faveur de la primauté des créances de la masse au sens de l'article 44, alinéa 2 revient à considérer que ces créances ont été contractées dans l'intérêt général de l'ensemble des créanciers du débiteur, y compris ceux titulaires de sûretés réelles ou de privilèges spéciaux, dans la mesure où ce sont précisément les titulaires de celles-ci qui ont permis de maintenir l'activité de l'entreprise et, ce faisant, tenté d'éviter la faillite. Cet objectif de maintien d'activité et de tentative de sauvegarde d'un patrimoine constitue, sans doute, la motivation profonde du statut particulier réservé à ces créances par le législateur et est à la base, ainsi que nous l'avons expliqué supra, de la reconnaissance d'un nouveau type de privilège pour frais de conservation portant sur la totalité du patrimoine du débiteur.

Le deuxième terme de l'alternative revient quant à lui à privilégier une conception plus individualiste du droit des entreprises en difficulté en ce qu'il s'inscrit dans une perspective d'atomisation des intérêts de la masse des créanciers au profit, indirect, de certains d'entre eux, étant ceux titulaires de sûretés ou de privilèges spéciaux.

21.Enfin, la position suivant laquelle l'article 44, alinéa 2 reconnaît l'existence d'un privilège pour frais de conservation portant sur une universalité paraît trouver appui dans les travaux préparatoires de la loi du 17 juillet 1997.

L'amendement, introduit à deux reprises, qui tendait à supprimer le second paragraphe de l'article 44, aux motifs que cette disposition aurait “pour effet de créer un gigantesque passif super privilégié, qui primera les droits du personnel d'une part et ceux des créanciers hypothécaires, gagistes et privilégiés spéciaux d'autre part” [32] a en effet été systématiquement rejeté.

Il se déduit nécessairement du rejet de cet amendement, que le législateur, pleinement conscient de cette conséquence de l'article 44, alinéa 2, n'a estimé ni devoir l'écarter, ni même devoir l'atténuer.

Partant, pour l'ensemble des motifs sus énoncés, il y a lieu de considérer que le créancier de la masse au sens de l'article 44, alinéa 2 de la loi du 17 juillet 1997 dispose d'un privilège absolu, sur l'ensemble des actifs du failli et que ce privilège est opposable tant aux créanciers titulaires de sûretés réelles qu'aux créanciers titulaires de privilèges spéciaux.

22.En toutes hypothèses, il convient de rappeler que les créanciers - qu'ils soient chirographaires, titulaires d'un privilège général ou spécial ou encore d'une sûreté réelle - peuvent engager la responsabilité du commissaire au sursis dans le cas où ils estimeraient que les engagements contractés par le débiteur avec la collaboration, l'autorisation ou l'assistance de ce dernier ne l'ont pas été dans leur intérêt. Il en va de même concernant les dettes de masse visées aux articles 46 et 99 de la loi sur les faillites, lorsque les dettes contractées par le curateur qualitate qua en vue de l'administration de la masse heurtent l'intérêt de certains créanciers. Ainsi que l'écrit très justement M. Verougstraete à ce propos, “il importe peu que les engagements nouveaux soient profitables ou ruineux. S'ils sont ruineux, les créanciers dans la masse devront exercer un recours contre le curateur fondé sur sa faute de gestion. Mais le tiers cocontractant n'a comme gage que les biens de la masse, et non ceux du curateur” [33].

23.La question se pose toutefois de savoir dans quelle mesure les créances bénéficiant de l'application de l'article 44, alinéa 2 priment les “simples” dettes de masse, soit celles nées de l'administration de la faillite par le curateur.

La solution que nous avons dégagée ci-dessus, qui consiste à considérer que les créances nées pendant le sursis provisoire sont assorties du privilège pour conservation de la chose, appréhendée en tant qu'universalité, nous conduit à répondre de manière nuancée.

Les créanciers bénéficiaires de l'article 44, alinéa 2 devraient être payés par préférence dès lors qu'ils sont titulaires d'un privilège spécial expressément reconnu par la loi, à la différence des créanciers de la masse faillie qui, en règle, ne priment pas les créanciers titulaires de privilèges spéciaux ou d'une sûreté réelle. Ce dernier principe reçoit toutefois exception lorsque les créanciers de la masse faillie démontrent que leurs créances ont contribué à la valorisation ou à la sauvegarde de l'assiette des créanciers privilégiés spéciaux ou titulaires d'une sûreté réelle.

Dans cette dernière hypothèse, le produit de réalisation du bien ainsi valorisé par la dette de masse “classique” est alors amputé de tout ou partie de cette dette, suivant que celle-ci a permis la sauvegarde spécifique du bien ou a simplement contribué, à concurrence d'une certaine somme, à son maintien.

Un concours pourrait ainsi surgir entre les créanciers de la masse faillie et les créanciers bénéficiaires de l'article 44, alinéa 2 lorsqu'ils exercent des prétentions concurrentes sur un bien spécifique compris dans l'universalité constituant l'assiette du privilège des derniers cités.

Un tel concours se résoudra toujours en faveur du créancier de la masse faillie par application de la règle qui, en cas de concours entre créanciers titulaires du privilège pour frais faits pour la conservation de la chose, veut que le créancier titulaire de la créance la plus récente soit préféré. Il en est de même dans le cas où la dette de masse bénéficierait du privilège pour frais de justice (tels les honoraires du curateur), ceux-ci primant les créanciers titulaires du privilège du conservateur.

24.Enfin, il reste à examiner la question de la répartition, entre les différents créanciers titulaires de privilèges spéciaux ou de sûretés réelles, de la charge des créances bénéficiant de l'application de l'article 44, alinéa 2.

Il convient de la résoudre par analogie avec les principes dégagés par la doctrine et la jurisprudence en matière de frais et honoraires dus au curateur, qui constituent des dettes de masse et bénéficient du privilège des frais de justice [34].

Par arrêt du 13 septembre 1991 [35], la Cour de cassation a dit pour droit que “lorsque le curateur a vendu un bien faisant l'objet d'un privilège ou d'une hypothèque, les frais, débours et honoraires dus au curateur et nécessités par la réalisation du bien sont, conformément aux articles 17 et 21 de la loi hypothécaire, d'abord prélevés sur le produit de cette vente; qu'il est contraire auxdits articles 17 et 21, ainsi qu'à la nature même du privilège spécial et de l'hypothèque, d'imputer tous les frais, débours et honoraires du curateur sur la totalité du produit de réalisation de tout l'actif, y compris des biens faisant l'objet d'un privilège spécial ou d'une hypothèque”.

S'il ressort certes de l'arrêt que les frais et honoraires du curateur ne peuvent être déduits de l'ensemble du produit de réalisation de l'actif de la faillite, avant toute répartition, la Cour ne fournit en revanche aucune indication quant au mode d'imputation requis.

25.Il est unanimement admis que les frais et honoraires spécifiques aux biens formant l'assiette du privilège ou de la sûreté, soit ceux engagés par le curateur au profit exclusif des créanciers titulaires d'un privilège spécial ou d'une sûreté réelle, peuvent être imputés sur le produit de réalisation des actifs concernés. Comme l'observe avec pertinence M. Verougstraete, “ce créancier pourrait agir seul, dans les limites que la loi indique: s'il fait appel au curateur pour réaliser le bien, il est approprié qu'il en subisse les effets” [36].

La question du sort à réserver aux frais et honoraires généraux du curateur qui, sans viser spécifiquement le bien grevé du privilège ou de la sûreté, profitent néanmoins à ces créanciers en ce qu'ils découlent des tâches exercées par le curateur dans l'intérêt de la masse, a quant à elle été résolue en sens divers par la jurisprudence.

La solution dégagée par la cour d'appel de Mons dans son arrêt du 27 novembre 1991 [37] nous paraît la plus équitable. La cour décide que “les frais et honoraires (qui) ont été exposés par les curateurs non seulement en vue de conserver le patrimoine mobilier et immobilier du failli et de le réaliser dans les meilleures conditions mais également en vue de réaliser l'ensemble des tâches leur incombant qui, quoique non productives d'actifs sont essentielles dans l'intérêt de tous les créanciers qu'ils soient hypothécaires, privilégiés ou chirographaires” doivent être imputés sur l'assiette des créanciers titulaires d'un privilège spécial ou d'une sûreté suivant un prorata déterminé par la proportion qu'occupent les actifs mobiliers ou immobiliers réalisés dans l'actif total.

Dans une note remarquée sous l'arrêt précité, M. Van Buggenhout et Mme Grégoire soulignent à juste titre que “dans ce système, l'imputation des frais généraux (…) est éclatée en plusieurs affectations par sous-masse. En d'autres termes, les biens grevés d'une sûreté ou d'un privilège spécial constituent des sous-masses distinctes, subissant de manière proportionnelle au produit de leur réalisation respective la charge des frais et honoraires généraux” [38].

Ce mode d'imputation a été consacré, en ce qui concerne les immeubles grevés d'hypothèques ou de privilèges, par l'article 6 de l'arrêté royal du 10 août 1998 établissant les règles et barèmes relatifs à la fixation des honoraires et des frais des curateurs [39].

26.Nous sommes d'avis que cette solution dégagée en matière d'imputation des frais et honoraires des curateurs devrait être transposée aux dettes nées pendant la période concordataire en cas de conflit entre les créances de la masse au sens de l'article 44, alinéa 2, considérées comme assorties du privilège pour frais de conservation d'une universalité, et les créances bénéficiant de privilèges spéciaux ou de sûretés réelles. À l'instar des frais et honoraires du curateur, les dettes de masse de l'article 44, alinéa 2 feraient l'objet d'une proratisation, chaque sous-masse en supportant la charge de manière proportionnelle.

SAMENVATTING
In het geannoteerde arrest wordt de voorrang van de vorderingen uit artikel 44, lid 2, van de Wet betreffende het gerechtelijk akkoord op de vorderingen die gewaarborgd worden door een bijzonder voorrecht of een zakelijke zeker­heid onderworpen aan de voorwaarde dat bewezen wordt dat zij ten goede zijn gekomen aan schuldeisers met een bijzonder voorrecht of een zakelijke zekerheid en, bijgevolg, dat zij verband houden met het voorrecht voor gerechtskosten of met het voorrecht voor de kosten die gemaakt zijn voor het behoud van de zaak.
De auteurs van deze noot verzetten zich tegen de restrictieve benadering ten aanzien van de rang van de schuldvorderingen en verdedigen de idee dat de wetgever in artikel 44, lid 2 een bijzonder voorrecht voor de kosten voor het behoud van een algemeenheid erkend heeft.
Deze oplossing, die gegrond wordt op de algemene filosofie achter de herziening van het gerechtelijk akkoord, vindt ook steun in de voorbereidende werken van de Wet van 19 juli 1997.
De problematiek van de toerekening van de schuldvorderingen uit artikel 44, lid 2 op de waarborg van de bijzonder bevoorrechte schuldeisers en de houders van een zakelijke zekerheid moet worden opgelost aan de hand van de principes uit de rechtsleer en de rechtspraak inzake de toerekening van de kosten en de erelonen van de curator.
[1] X. Dieux et J. Windey, “Nouvelles observations sur la théorie générale du concours entre les créanciers”, in Mélanges offerts à Pierre Van Ommeslaghe, Bruylant, 2000, p. 390.
[2] Voy. J. Windey et S. Letocart, “Missions et responsabilités du commissaire au sursis”, J.T. 2003, p. 101 .
[3] A. Zenner, Dépistage, faillites et concordats, Larcier, 1998, p. 960; Ph. Gérard, J. Windey et M. Grégoire, “Le concordat judiciaire et la faillite”, Dossiers du J.T., n° 17, p. 195; X. Dieux et J. Windey, o.c., p. 404, n° 18; M. Grégoire, “Le sort des créanciers”, in Concordat et faillite, Actes du séminaire organisé le 11 octobre 2001 par Vanham & Vanham, p. 5.
[4] Anvers 26 juin 2003 (2001/AR/2603), inédit.
[5] Nous mettons en gras.
[6] Traduction libre de: “Hoewel strikt genomen dit niet eens vereist is voor de toepassing van art. 44, 2 WGA kan uit de afwezigheid van negatieve reactie vanwege de commissarissen en uit de verderzetting van de uitvoering van de factorovereenkomst zonder opmerkingen van de commissarissen afgeleid worden dat dezen hiermee instemden en aldus (de schuldenaar) gemachtigd hebben tot deze verderzetting”.
[7] Comm. Charleroi 2 mai 2000, J.L.M.B. 2001, p. 1745 . Contra, à tort, Comm. Anvers 22 novembre 2001, R.D.C. 2003, p. 350.
[8] Nous mettons en gras.
[9] Comm. Turnhout 26 juin 2001, R.D.C. 2003, p. 342 et note A. De Wilde, “Opeenvolgende situaties van samenloop en artikel 44, tweede lid W.G.A.”. Ce jugement a été confirmé, non sans nuances, par l'arrêt de la cour d'appel d'Anvers du 26 juin 2003 précité.
[10] Traduction libre de: “(Medewerking, machtiging of bijstand mag in handelszaken) met alle middelen van recht, getuigen en vermoedens inbegrepen, bewezen worden”, in Comm. Turnhout, o.c., p. 344.
[11] Voy., dans le même sens, Comm. Kortrijk 19 avril 2001, R.W. 2001-02, p. 928.
[12] A. Zenner, “Faillites et concordats 2002, La réforme de la réforme et sa pratique”, Dossiers du J.T., n° 38, Larcier, 2003, p. 454, n° 426.
[13] Cette solution fut également retenue, semble-t-il, par le tribunal de commerce de Turnhout dans un jugement inédit du 12 mars 2002 cité par Monsieur Dirix in “Recente rechtspraak insolventierecht”, Insolventierecht, Themis, n° 20, 2003-04, p. 66, n° 11.
[14] E. Dirix, “Positie van schuldeisers en hun zekerheidsrechten”, in Faillissement en gerechtelijk akkoord: het nieuwe recht, Kluwer, 1998, p. 378.
[15] Comm. Mons 8 novembre 1999 (RG: 04951/99), inédit. Contra, à tort, Comm. Liège 29 juin 1998, J.L.M.B. 1998, p. 1479 .
[16] Dans le même sens, voy. E. Dirix, “Positie van schuldeisers en hun zekerheidsrechten”, o.c., p. 382, n° 21 et E. Dirix et R. De Corte, Zekerheidsrechten, Story-Scientia, 1999, p. 59, n° 70.
[17] Comm. Mons 8 novembre 1999, o.c. Cité par E. Dirix, “Recente rechtspraak insolventierecht”, o.c., p. 67, n° 13. Contra, à tort, Comm. Anvers 22 novembre 2001, R.D.C. 2003, p. 350.
[18] Dans le même sens, voy. E. Dirix, “Positie van schuldeisers en hun zekerheidsrechten”, o.c., p. 382, n° 21 et, du même auteur, “La problématique des privilèges et des hypothèques”, in Nouvelle mission pour l'expert-comptable dans le cadre de la Loi sur les faillites modifiée, Le bilan de la faillite, la Charte, 2004, p. 43.
[19] Y. Dumon et H. Stranart, “Le concordat judiciaire - Loi du 17 juillet 1997”, J.T. 1997, p. 870 et les références citées.
[20] Voy. notamment: Ph. Gérard, “Observations sur la nature juridique des dettes et des créances de la masse des créanciers en faillite”, sous Cass. 28 avril 1983 et Cass. 6 mai 1983; A. Zenner, “Des frais et dépenses de l'administration de la faillite aux dettes de la masse”, in Les créanciers et le droit de la faillite, Bruylant, 1983, p. 685; Y. Dumon, “Dettes de la masse dans les procédures de liquidation collective des patrimoines, R.D.C. 1994, p. 908.
[21] Voy. notamment Cass. 16 juin 1988, Pas. 1988, I, p. 1250; Cass. 27 avril 1992, Pas. 1992, I, p. 758; Cass. 20 janvier 1994, Pas. 1994, I, p. 78; Cass. 30 mars 1995, Pas. 1995, I, p. 374.
[22] Cass. 26 novembre 1981, Pas. 1982, I, p. 427. Cet arrêt a été rendu dans le cas d'un concordat par abandon d'actif. Voy. également I. Verougstraete, “Dettes de masse, privilèges et monnaie de faillite”; M. Grégoire, Théorie générale du concours des créanciers en droit belge, Bruxelles, Bruylant, 1992, pp. 124 et 312.
[23] Conclusions conformes de l'avocat général Liekendael sous l'arrêt de la Cour de cassation du 26 novembre 1981, Pas. 1982, I, p. 430.
[24] Ibid., p. 431.
[25] Voy. notamment A. Zenner, “Des frais et dépenses de l'administration de la faillite aux dettes de la masse”, o.c., n° 28; Coppens et T'Kint, “Les faillites, les concordats et les privilèges (Examen de jurisprudence 1997 à 2003)”.
[26] Anvers 22 avril 1996, R.W. 1996-97, p. 712 et note E. Dirix, “Boedelschulden en opeenvolging van situaties van samenloop”. Voy. également du même auteur “La problématique des privilèges et des hypothèques”, in Nouvelles missions pour l'expert-comptable dans le cadre de la Loi sur les faillites modifiée, Le bilan de la faillite, la Charte, 2004, p. 42, n° 8.
[27] M. Grégoire, “Le sort des créanciers”, o.c., p. 6.
[28] Traduction libre de “(…) deze schulden (…) aan alle schuldeisers tegenwerpelijk zijn, omdat ze op gelijke wijze in het voordeel van het behoud van de continuïteit en het herstel van de onderneming zijn aangegaan”, C. Van Buggenhout, “Kanttekeningen bij de wetten betreffende het gerechtelijk akkoord en het faillissement”, R.W. 1997-98, p. 454; voy. dans le même sens E. Dirix, “Positie van schuldeisers en hun zekerheidsrechten”, in Faillissement en gerechtelijk akkoord: het nieuwe recht, Kluwer, 1998, p. 380; K. Creyf, “De gevolgen verbonden aan de opeenvolging van situaties van samenloop”, in Liber Amicorum Yvette Merchiers, Bruges, die Keure, 2001, p. 477, n° 7.3; M. Grégoire, “Le sort des créanciers”, o.c., p. 5. Il convient toutefois de signaler que M. Dirix a changé d'opinion dans une récente contribution: E. Dirix, “Recente rechtspraak insolventierecht”, o.c., p. 67, n° 14.
[29] J. Cattaruzza et G. Van Verdeghem, “La situation du banquier dispensateur de crédit”, in La faillite et le concordat en droit positif belge après la réforme de 1997, Liège, CDVA, 1998, p. 606; voy. dans le même sens, A. Zenner, Dépistage, faillites et concordats, Larcier, 1998, p. 961, n° 1345; Th. Bosly, “Quatre années d'application de la loi sur le concordat judiciaire”, in Faillite et concordat judiciaire: un droit aux contours incertains et aux interférences multiples, Bruylant, 2002, p. 494, n° 46; J. Caeymax, “Les dettes de masse antérieures à la faillite”, note sous Comm. Bruxelles 25 janvier 2001, J.L.M.B. 2001, p. 1761 ; Turnhout 26 juin 2001, o.c., p. 343; Comm. Verviers 27 mars et 6 novembre 2001, J.L.M.B. 2002, p. 243 ; Comm. Bruges 6 février 2002, R.W. 2002-03, p. 791.
[30] A. Zenner, Dépistage, faillites et concordats, o.c., p. 961, n° 1345.
[31] Voy. Ph. Gérard, J. Windey et M. Grégoire, o.c., p. 195 et M. Grégoire, “Le sort des créanciers”, o.c., p. 6.
[32] Amendement de Messieurs Simonet et Hotermans, Doc. parl. Ch. 1995-96, session ord., doc. n° 329/4, p. 7; amendement de Monsieur Hatry, Doc. parl. Sénat 1996-97, session ord., doc. n° 498/4, p. 10.
[33] I. Verougstraete, Manuel de la faillite et du concordat, Kluwer, 2003, p. 455, n° 749.
[34] Voy. au sujet des honoraires des curateurs, C. Van Buggenhout et M. Grégoire, note sous Mons 27 novembre 1991, R.D.C. 1992, pp. 333 et s.; J. Caeymax, “Concours entre le curateur et les créanciers privilégiés spéciaux”, note sous Liège 31 octobre 1997, J.L.M.B. 2000, p. 872 ; A. Zenner, Dépistage, faillites et concordats, o.c., p. 341, n° 466.
[35] Cass. 13 septembre 1991, Pas. 1992, I, p. 39.
[36] I. Verougstraete, Manuel de la faillite et du concordat, o.c., p. 451.
[37] Mons 27 novembre 1991, R.D.C. 1992, p. 325; dans le même sens, Mons 15 décembre 1992, R.D.C. 1994, p. 935; Comm. Namur 14 mai 1998, J.T. 1999, p. 114 ; Comm. Namur 16 décembre 1999, J.L.M.B. 2000, p. 1002 ; Mons 21 décembre 2000, J.L.M.B. 2001, p. 1733 qui souligne avec pertinence qu'“en pratique, vu le développement des privilèges et hypothèques, le travail du curateur est le plus souvent exécuté dans le seul intérêt des créanciers non chirographaires, l'actif étant insuffisant pour leur allouer un tantième”. Une partie de la jurisprudence considère toutefois que les frais et honoraires généraux du curateur doivent être prioritairement mis à charge des créanciers privilégiés généraux et chirographaires: Comm. Namur 25 mai 1989, J.L.M.B. 1989, p. 1177; Liège 26 mars 1996, J.L.M.B. 1996, p. 1564; Liège 31 octobre 1997, J.L.M.B. 2000, p. 871 ; Liège 25 octobre 1999, J.L.M.B. 2000, p. 1296 ; Comm. Namur 3 février 2000, R.D.C. 2000, p. 442.
[38] C. Van Buggenhout et M. Grégoire, o.c., p. 335.
[39] J. Caeymax, “Concours entre le curateur et les créanciers privilégiés spéciaux”, o.c., p. 874. Cet auteur observe que la solution retenue par l'arrêté royal fait un sort à la thèse, soutenue par une partie de la jurisprudence, suivant laquelle les créanciers privilégiés spéciaux ou titulaires de sûretés réelles ne doivent pas supporter les honoraires du curateur lorsque le prix de réalisation du bien grevé est supérieur à la créance garantie. L'arrêté royal laisse toutefois intacte la question du concours entre un créancier titulaire d'un privilège spécial mobilier et le curateur.