Cour d'appel de Liège 9 septembre 2003
OBLIGATION
Solidarité - Remise de dette à l'égard d'un débiteur - Effets à l'égard des codébiteurs solidaires
Une convention dans laquelle le créancier accorde une remise de dette à l'un des codébiteurs solidaires, libère tous les autres, à moins que le créancier n'ait expressément réservé ses droits contre ces derniers (art. 1285 C.civ.).
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VERBINTENIS
Hoofdelijkheid - Kwijtschelding van schuld tegenover een schuldenaar - Gevolgen tegenover de hoofdelijke medeschuldenaars
Een overeenkomst waarbij de schuldeiser aan één van de hoofdelijke medeschuldenaars kwijtschelding verleent, bevrijdt alle overige hoofdelijke medeschuldenaars, tenzij de schuldeiser uitdrukkelijk zijn rechten heeft voorbehouden tegen deze laatsten (art. 1285 B.W.).
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Petrioli Eliseo / SPRL Reginald Consult
Siég.: R. de Francquen (président), M. Ligot et A. Jacquemin (conseillers) |
Pl.: Mes Hoffelinck loco A. Balland-Lambert et F. Dembour |
(...)
Attendu que l'appelant s'oppose à la saisie-exécution mobilière pratiquée le 7 mars 2001 au motif principalement que l'intimée a consenti une remise de dettes à son codébiteur solidaire, selon convention entre ces parties du 17 avril 2000, et que cette remise le libère à défaut pour l'intimée d'avoir expressément réservé ses droits contre lui;
Attendu qu'un jugement du 3 mai 1999 passé en force de chose jugée a condamné l'appelant solidairement avec son ex-épouse, Michèle Langenaken, à payer à l'intimée 575.089 FB d'arriérés de loyer et 57.890 FB de précompte immobilier; que Michèle Langenaken était encore condamnée à payer seule 187.500 FB d'indemnité de relocation et à garantir son ex-époux des condamnations prononcées contre lui; que la question des dégâts locatifs, contestés, était réservée dans l'attente d'une expertise à diligenter par l'intimée;
Attendu que le 12 novembre 1999 l'intimée a fait signifier un commandement immobilier à l'appelant et à son ex- épouse portant sur un terrain propre à Michèle Langenaken; que cette dernière a alors négocié avec l'intimée sa libération et la radiation de la transcription du commandement préalable à saisie contre paiement d'une somme de 950.000 FB;
Que la convention du 17 avril 2000 porte que Michèle Langenaken ne doit plus rien à l'intimée et que cette dernière déclare 'consentir à la radiation entière et définitive de la transcription du commandement préalable à saisie pris à son profit () contre Madame Langenaken Michèle () et son conjoint Monsieur Eliseo Petrioli';
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Que l'intimée précise que les 950.000 FB acquittés se décomposent comme suit:
- 500.000 FB représentant la quote-part de M. Langenaken en exécution du jugement;
- 450.000 FB forfaitaires correspondant à la moitié des dégâts locatifs tels qu'elle les estimait, l'indemnité pour non-cession de la taxe d'ouverture et une indemnité pour l'indisponibilité des lieux avant la remise tardive des clés,
ce dernier montant ayant fait l'objet d'une transaction entre parties;
Attendu que par cette convention, l'intimée a consenti une remise de dettes à M. Langenaken puisqu'aux termes mêmes du jugement du 3 mai 1999, elle était débitrice non pas de la moitié des montants auxquels elle avait été condamnée solidairement avec l'appelant mais de la totalité de ceux-ci, au même titre que l'appelant qu'elle devait par ailleurs garantir;
Attendu que le fait que l'intimée a libéré la débitrice de ses obligations moyennant paiement n'y change rien: 'l'article 1285 du Code civil ne requiert pas que la remise de dette ou la décharge conventionnelle soit faite à titre gratuit' (Cass. 15 décembre 2000);
Attendu que conformément à cet article, la remise ou la décharge conventionnelle faite au profit de l'un des codébiteurs solidaires libère tous les autres débiteurs à moins que le créancier n'ait expressément réservé ses droits contre ces derniers;
Que 'la clause de réserve des droits vis-à-vis des codébiteurs doit être expresse. Elle ne peut pas être tacite.' (H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, tome III, p. 676);
Attendu que si la convention du 17 avril 2000 ne concerne que M. Langenaken, comme le répète à profusion le notaire qui a reçu l'acte dans ses courriers des 26 juillet 2000 et 18 février 2003, elle ne comporte aucune clause de réserve expresse des droits de l'intimée contre l'appelant, alors même qu'elle fait état de ce dernier au moment de consentir à la radiation entière et définitive de la transcription du commandement préalable à saisie;
Que l'acte notarié au sujet duquel l'intimée conclut qu'il 'est le reflet exact de l'accord intervenu entre d'une part la concluante et d'autre part Madame Langenaken' (p. 4), rencontre dès lors l'hypothèse même de l'article 1285: la remise faite au profit de la seule Michèle Langenaken libère l'appelant, codébiteur solidaire, à défaut pour l'intimée d'avoir expressément réservé ses droits contre lui;
Que les courriers échangés entre le notaire et l'intimée avant la passation de l'acte confirment certes que l'intimée n'avait en vue que de libérer la dame Langenaken mais qu'en aucun cas ils n'établissent que l'intimée aurait jamais réservé expressément ses droits contre l'appelant;
Que l'opposition de ce dernier à la saisie litigieuse est donc fondée;
Par ces motifs,
La cour,
Reçoit l'appel,
Réformant les jugements entrepris,
Condamne l'intimée à donner mainlevée de la saisie-exécution mobilière du 7 mars 2001 et dit qu'à défaut de ce faire dans les 24 heures de la signification du présent arrêt, celui- ci en tiendra lieu.
(...)