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Le médicament et internet – Légalité de la vente et de la publicité en ligne au regard des droits belge et européen, et en particulier de l'arrêt rendu le 11 décembre 2003 par la Cour de justice des Communautés européennes (DocMorris), R.D.C.-T.B.H., 2004/5, p. 435

Le médicament et internet

Légalité de la vente et de la publicité en ligne au regard des droits belge et européen, et en particulier de l'arrêt rendu le 11 décembre 2003 par la Cour de justice des Communautés européennes (DocMorris)

Catherine Delforge [1]

TABLE DES MATIERES

Introduction

Section 1. Les limites tenant à la qualité du produit § 1. Remarque préalable: le 'médicament' A. Définition

B. Les médicaments soumis à prescription

§ 2. Les exigences quant à la délivrance en Belgique A. Une autorisation de mise sur le marché a.1. Le principe et ses exceptions

a.2. Les sanctions

B. La notice explicative

§ 3. Les exigences quant à la publicité A. Définition et principes

B. La publicité au public

C. Autres exigences

§ 4. Conclusion provisoire

Section 2. Les limites tenant à la qualité du vendeur § 1. Le titre de 'pharmacien'

§ 2. L'officine de pharmacie A. L'officine physique et l'officine virtuelle

B. Limitation du nombre d'officines

§ 3. Le statut du pharmacien au regard du droit commercial

§ 4. Le monopole légal de délivrance A. Le principe et ses conséquences

B. Le monopole face au droit de la concurrence européen b.1. Le monopole et le secteur de la grande distribution

b.2. Le monopole et les pharmacies européennes: l'affaire DocMorris

§ 5. L'exigence de l'exercice personnel de la pharmacie A. Exercice personnel et identification

B. Exercice personnel et interdiction du 'colportage'

§ 6. La publicité personnelle et le 'drainage' de clientèle

§ 7. Conclusion provisoire

Section 3. Les limites tenant au contrat et à sa nature § 1. La commande du médicament et ses préalables A. Les ordonnances virtuelles

B. Les consultations virtuelles et les ordonnances 'en ligne'

C. La transmission de prescriptions établies par des médecins étrangers

§ 2. La livraison du médicament: le portage à domicile

Section 4. Les limites tenant au mode de communication utilisé § 1. La législation relative aux ventes à distance

§ 2. La législation relative au commerce électronique

§ 3. La protection des données à caractère personnel

§ 4. Conclusion provisoire

Section 5. Conclusion

Section6. Demain...

RESUME
La vente en ligne de produits de santé connaît une expansion considérable. Ce marché est en effet lucratif, non seulement pour les officines qui peuvent ainsi délivrer des produits hors des frontières nationales du pays de leur établissement, mais aussi pour les assureurs et les organismes de soins de santé dès lors que les prix seraient souvent inférieurs à ceux appliqués au sein des officines traditionnelles. Une telle vente donne également l'occasion aux consommateurs d'acheter librement des médicaments interdits en Belgique ou qui y sont soumis à prescription, et ce tout en préservant leur anonymat. L'exemple de produits tels que le Viagra ou la DHEA sont sur ce point parlants.
Pourtant, la spécificité du produit, ainsi que la réglementation de la profession qui le délivre, imposent le respect de certaines exigences impératives. S'y ajoutent celles propres au mode de communication utilisé. Dans cette étude, l'auteur analyse les différents obstacles à la vente et à la publicité des médicaments via un portail internet et apprécie dans quelle mesure ils constituent une entrave réelle au développement des officines virtuelles. L'auteur en déduit que, moyennant le respect de certaines conditions, une telle vente n'est pas nécessairement illégale. La récente jurisprudence communautaire se positionne par ailleurs désormais, au nom de la libre circulation des marchandises, en faveur de ce type de vente lorsqu'il s'agit de médicaments autorisés et non soumis à prescription.
Il est probablement temps pour les législateurs nationaux d'adapter la réglementation pharmaceutique aux réalités de l'internet ou à tout le moins d'accompagner les changements que celui-ci impliquera nécessairement.
SAMENVATTING
De verkoop van gezondheidsproducten via het internet kent een enorme uitbreiding. Deze markt is immers zeer lucratief, niet alleen voor de apotheken die zo producten kunnen leveren buiten de grenzen van het land waar zij gevestigd zijn, maar ook voor de verzekeraars en de gezondheidsinstellingen aangezien de prijzen veelal lager zijn dan de prijzen die door de traditionele apotheken aangerekend worden. Bij een dergelijke verkoop krijgen de consumenten ook de kans om in België volledig anoniem verboden medicijnen te kopen, alsook medicijnen die enkel op voorschrift afgeleverd mogen worden. Producten zoals Viagra en DHEA zijn hiervan de beste voorbeelden.
Nochtans is omwille van de bijzondere aard van het product en omwille van de beroepsreglementering inzake de aflevering ervan vereist dat bepaalde dwingende regels worden nageleefd. Daarbij komen ook nog de vereisten die eigen zijn aan het gebruikte communicatiemiddel. In deze bijdrage analyseert de auteur de verschillende belemmeringen voor de verkoop van en de reclame voor medicijnen via het internet en gaat na in welke mate deze de ontwikkeling van virtuele apotheken daadwerkelijk bemoeilijken. De auteur komt tot het besluit dat een dergelijke verkoop onder bepaalde voorwaarden niet noodzakelijk onwettig is. De recente Europese rechtspraak aanvaardt deze verkoopmethode op basis van het vrij verkeer van goederen wanneer het gaat om toegelaten medicijnen die zonder voorschrift afgeleverd kunnen worden.
Het is waarschijnlijk tijd voor de nationale wetgevers om de wetgeving inzake farmaceutische producten aan te passen aan de realiteit van het internet of, ten minste, om te zorgen voor een kader voor de wijzigingen die het internet noodzakelijkerwijze teweegbrengt.

1.De nombreux produits de santé sont actuellement disponibles à la vente sur internet [2]. Ce secteur, qui a connu un développement spectaculaire au début des années 90 aux États-Unis, y dépasserait aujourd'hui celui de la vente en ligne des livres [3] et atteindrait peu à peu l'Europe.

2.Malgré une politique rigoureuse de lutte contre les actes illicites menée par l'administration Bush, et mise en oeuvre par la Food Drug Administration [4], les États-Unis demeurent encore perçus comme un paradis pour les e-pharmacies comparativement à nos contrées européennes. Il faut dire que le contexte économique et social y est fort différent et que le processus de commercialisation du secteur de la délivrance des médicaments y est plus avancé qu'en Europe. La plus rapide ingérence des NTIC dans ce secteur à part entière de la vie économique ne peut dès lors surprendre. Nul ne s'étonne en effet de trouver sur ce territoire des pharmacies dont la configuration ressemble fortement à celle des supermarchés, et où le consommateur y remplit son caddie comme il le ferait dans ceux-ci. Cette différence, fondamentale, tient en grande partie à une politique des prix plus concurrentielle [5] ainsi qu'à l'admission plus large de la publicité relative aux médicaments. L'attitude du patient y est aussi très différente. Plus revendicatif que le consommateur européen [6], le patient américain a déjà perçu les limites de l'activité médicale et se refuse plus fortement à les subir. Soucieux d'une plus grande autonomie dans le cadre des décisions touchant à sa santé, ce dernier n'hésite pas à consulter les sites internet pour s'informer des traitements existants et, le cas échéant, en demander la prescription à son médecin. Le médicament y est ainsi davantage perçu comme un produit de consommation à part entière, perdant alors une grande part de la spécificité que persistent à lui reconnaître la plupart des pays européens.

Il est bien entendu discutable de prétendre ainsi, en quelques lignes, et de manière nécessairement trop peu nuancée, comparer deux pays, deux cultures. Mais il nous semble important de garder à l'esprit que le développement des NTIC dans le domaine de la santé a trouvé outre-Atlantique un terrain économique et culturel plus propice. Ce constat, aussi certain puisse-t-il être, ne fera bien entendu que ralentir l'ingérence des nouvelles technologies dans le monde médical européen. Il ne permettra pas à lui seul de l'endiguer.

3.Si aucun domaine de la vie économique n'a jusqu'ici résisté longtemps aux avancées des nouvelles technologies, le monde des pharmaciens, jusqu'alors relativement préservé, y résistera-t-il longtemps? Et même plus, est-il justifié qu'il y résiste?

4.Internet constitue un facteur de progrès dans la distribution des biens de consommation et, à ce titre, il est susceptible d'offrir également de multiples avantages dans le domaine plus particulier de la santé [7]. Au patient, tout d'abord, il assure un gain de temps, voire d'argent [8], tout en lui garantissant un relatif anonymat qu'il croit plus difficile à préserver au sein des officines traditionnelles. De même, le commerce électronique des produits de santé pourrait permettre à des patients moins valides, ou établis dans des régions isolées, de pouvoir bénéficier, au même titre que les autres, des progrès pharmaceutiques. Internet peut, ensuite, simplifier le processus de vente en permettant notamment la transmission en ligne d'ordonnances médicales entre des professionnels de la santé - et pas seulement dans le cadre, limité, du renouvellement de prescriptions -, tout en autorisant, comme c'est le cas dans certains pays [9], le patient de bénéficier directement des ristournes que le régime de la sécurité sociale prévoit ou que les compagnies d'assurance lui accordent conventionnellement. Internet constitue enfin, et surtout, un précieux outil dans l'information du monde médical, mais aussi des consommateurs. Il devrait ainsi permettre un progrès médical considérable en offrant la possibilité à des professionnels du monde entier de communiquer, de partager leurs expériences, voire même de collaborer aux bienfaits de la science, et ce au bénéfice direct des malades. Les vertus en termes de prévention et de promotion du bien- être ne peuvent davantage être sous-estimées.

5.Parmi les multiples questions que pose l'avènement de l'internet dans le domaine de la santé, nous avons fait le choix de centrer notre propos sur la légalité d'une pratique encore relativement récente en Europe et qui consiste à proposer à la vente, via un portail internet, des produits de santé.

6.L'exposé se veut cependant doublement limité. D'une part, nous orienterons nos développements tout particulièrement sur la possibilité offerte par le cadre législatif actuel d'ouvrir une e-pharmacie en Belgique et de proposer à la vente des produits de santé à des consommateurs belges. Cette première limitation se justifie par l'urgence qui nous semble s'imposer au législateur de réfléchir à l'adéquation des réponses existantes, et à leur pertinence au regard des récents développements intervenus en Europe. Ceci n'empêchera bien entendu pas, mais à titre plus accessoire, de nous interroger sur la situation des portails étrangers, déjà nombreux, et qui interpellent également les juristes et les professionnels de la santé. D'autre part, la présente étude n'abordera pas les aspects juridiques de la vente en ligne de médicaments entre les distributeurs et leurs fournisseurs - laquelle est par ailleurs très répandue et ne pose souvent que des questions relevant du respect des accords de distribution - de même que celle de la vente de produits de parapharmacie par des parapharmacies [10]. De telles ventes sont en effet parfaitement licites.

7.Plan de l'exposé. Après une brève introduction portant sur les initiatives existantes dans le domaine de l'e- santé, nous envisagerons la problématique qui a principalement retenu notre attention en appréciant dans quelle mesure le cadre législatif actuel tolère ou bannit la vente en ligne des médicaments. Ceci nous conduira à successivement envisager les exigences posées par la loi et que nous avons regroupées en quatre catégories de limites susceptibles de contrarier l'établissement d'une officine virtuelle en Belgique. Dans ce cadre, nous aborderons, dans un premier temps, les limites tenant à la qualité du produit (section 1) puisqu'il est évident que la spécificité de l'objet de la vente justifie ici un certain nombre de contraintes particulières. La seconde catégorie de limites touche directement à la qualité de celui qui est légalement habilité à le dispenser (section 2). La législation belge est en effet très stricte quant aux conditions d'exercice de la profession de pharmacien et, en contrepartie, concède à ceux qui sont détenteurs de ce titre un véritable monopole dans la délivrance. Nous verrons que c'est sur ce point que résident les principaux obstacles actuels à la création d'officines virtuelles. C'est aussi probablement par cette voie que sera insufflé le changement. Dans un troisième temps, nous envisagerons les contraintes portant sur l'exécution du contrat proprement dite (section 3), en envisageant en particulier les règles portant sur la passation d'une commande virtuelle et sur la livraison du produit. Si la vente en ligne est une vente à distance au sens de la législation, sa conclusion appelle en effet le respect de certaines exigences en termes d'information et de protection du consommateur. Enfin, la dernière catégorie de limites que nous envisagerons sont celles imposées en raison du mode de communication utilisé (section 4) et qui sont, pour la plupart, le fruit des législations récentes en matière de commerce électronique et de garanties en termes de protection des données à caractère personnel. Après une succincte conclusion quant aux principes (section 5), nous nous proposerons alors de clore notre étude par une brève réflexion sur les futuribles possibles de la vente en ligne en Europe (section 6).

Introduction

8.Le cadre juridique actuel, tant national qu'international, ne prévoit aucune règle spécifique destinée à encadrer la vente de médicaments par ce mode de communication relativement récent qu'est internet. Contrairement à une opinion largement répandue, cependant, internet ne se développe pas pour autant dans un vide juridique, mais a à s'accommoder de l'adéquation - ou de l'inadéquation - des règles existantes portant sur le secteur dans lequel il prétend ingérer. Dans celui plus particulier de la dispensation des médicaments, il a ainsi à compter avec la législation en vigueur, laquelle assure déjà, quoique dans une mesure partielle, un certain nombre d'obstacles au libre développement des e-pharmacies.

9.On enseigne en effet sur ce point traditionnellement que la vente en ligne de médicaments serait interdite en Belgique [11] et ce même si elle intervient par l'entremise de personnes ayant la qualité légale de 'pharmaciens'. Ce principe découlerait de l'obligation que la loi impose au pharmacien de délivrer tout médicament qu'il vend 'en mains propres' au patient, et ce après s'être fait remettre une ordonnance médicale lorsque celle-ci est exigée (art. 25, 26bis et 29 de l'arrêté royal du 31 mai 1885 [12]). Il en serait de même en France [13]. Ce contexte législatif hostile fait qu'à l'heure actuelle, aucune officine virtuelle belge, ou française, n'a déjà vu le jour. Mais il n'en est pas de même ailleurs. Au contraire, les initiatives se multiplient.

10.Les labels de qualité. Partant du sentiment que l'état actuel du droit, mais aussi de la technique, ne permet pas de répondre aux principales exigences qu'impose un souci de protection des consommateurs, certains ordres professionnels nationaux ont déjà élaboré des codes éthiques reprenant un ensemble de normes déontologiques adaptées à l'internet [14]. Sont également apparus des labels de qualité en matière de portails virtuels de pharmacies - comme c'est le cas notamment des certifications VIPPS (Verifiable Internet Pharmacy Practice Sites) ou 'Trust e' applicables à nombre de sites américains - voire des agréments - comme c'est le cas au Royaume-Uni ou en Suisse (site Mediservice) -. De tels labels et agréments, avant tout destinés à rassurer les consommateurs en prétendant faire le départ entre les sites 'respectables' et ceux qui le sont moins, constituent sans doute un premier pas dans la mise en place de critères de qualité, mais aussi de contrôles des sites internet existants.

11.Initiatives nationales et européennes. D'un autre côté, la naissance non contrariée d'e-pharmacies en Norvège, au Danemark, aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni, voire incitée par les pouvoirs publics comme ce fut le cas en Suisse, permet de pressentir que le phénomène ne ralentira plus. Dès lors, au niveau européen [15], les États membres ont désormais compris qu'ils ne pourraient assurer la protection de leurs consommateurs, et la sauvegarde de la libre concurrence sur leurs territoires, que s'ils acceptaient d'engager le débat et de réfléchir aux mécanismes à mettre en oeuvre face au développement des nouvelles technologies dans le secteur de la santé [16]. On retiendra en particulier sur ce point deux déclarations ministérielles, l'une en matière d'e-santé prononcée le 22 mai 2003 lors d'une Conférence tenue à Bruxelles sous la présidence de la Grèce [17], et la seconde en matière de santé prononcée lors de la 7ème Conférence des ministres européens de la Santé - sur le thème 'Health, Dignity and Human Rights' - tenue à Oslo en juin 2003.

12.De même, le Plan d'action 'eEurope' 2005 [18] vise également un certain nombre de politiques nationales et communautaires cibles dans trois domaines propres au monde de la santé: les cartes électroniques de santé [19], les services en ligne et les réseaux d'information sur internet. L'accès aux services en ligne - ce qui vise l'accès à l'information médicale, la téléconsultation, l'e-remboursement, etc. - constitue par ailleurs un des objectifs clé de l'eEurope [20].

13.L'organisation mondiale de la santé. Sur le plan international, plusieurs initiatives ont également vu le jour. Le 12 mai 1997, l'Assemblée mondiale de la santé adoptait une première résolution sur la vente de produits médicaux sur internet, laquelle a été suivie par la mise en place d'un groupe de travail s'étant réuni pour la première fois en septembre 1997 à Genève. Les 23 janvier et 16 mai 1998, l'OMS, rappelant sa résolution intitulée 'Publicité, promotion et vente transfrontières de produits médicaux par internet' [21], invitait en outre 'instamment' les États membres à apprécier lesquelles de leurs dispositions nationales devraient être adaptées en vue de s'associer au mieux aux développements récents de l'internet. Y fera suite, dès janvier 1999, une résolution 'Médicaments et internet - Un guide pour trouver une information fiable' [22]. Depuis, l'OMS travaille en particulier à l'élaboration de labels de qualité pour les sites internet, à un projet de site modèle, de même qu'aux possibilités d'accès à l'information médicale [23].

14.Conclusion. Ces initiatives, quoique partielles, attestent d'une prise de conscience nécessaire aux prémisses d'une véritable réflexion sur les enjeux, en termes de santé, mais aussi de mondialisation du commerce, de l'ingérence des nouvelles technologies dans le domaine médical. Si l'attention est à l'heure actuelle encore focalisée sur la mise en place de critères de qualité axés sur la protection des consommateurs - et relevant de la sorte davantage de l''autorégulation' -, on ne peut douter que ceux-ci seront prochainement relayés par des normes plus contraignantes destinées à envisager cette problématique dans sa globalité. Il est cependant permis de déplorer qu'aucune amorce de législation, si possible harmonisée au niveau européen, voire international, ne soit déjà engagée. L'urgence nous paraît pourtant acquise et il est à craindre que l'inexistence d'un cadre juridique adapté favorise le développement d'e-pharmacies qui, profitant d'un apparent vide juridique, forcent l'évolution dans un sens qui leur serait trop favorable. Dès lors, le risque existe que ce soit dans la précipitation, et sans la distance nécessaire de la réflexion, que soient ébauchées les premières règles en la matière. La crainte paraît d'autant plus justifiée que de nombreuses pharmacies non européennes bénéficient déjà d'une position concurrentielle plus qu'appréciable et ne cessent de séduire de plus en plus de consommateurs.

Section 1. Les limites tenant à la qualité du produit
§ 1. Remarque préalable: le 'médicament' [24]
A. Définition

15.La définition légale. Le siège de la matière réside, en Belgique, dans l'article 1er de la loi du 25 mars 1964 sur les médicaments [25], législation largement modifiée par une loi du 21 juin 1983 ayant eu pour objet de transposer de nouvelles normes européennes.

    Selon cette disposition, la notion de 'médicament' vise:

  • ' toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou animales (al. 1er);
  • toute substance ou composition pouvant être administrée à l'homme ou à l'animal en vue d'établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier des fonctions organiques chez l'homme ou l'animal est également considérée comme médicament' (al. 2).

16.Cette définition, extensive, rejoint celle contenue dans la directive 65/65/CEE du 26 janvier 1965 [26], aujourd'hui abrogée, et remplacée par la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 ayant institué un Code communautaire relatif aux médicaments à usage humain [27].

17.Un double critère de qualification. Relativité de la définition légale. Il ressort de ce qui précède que la notion de 'médicament' recouvre deux réalités distinctes. Une substance peut en effet être légalement qualifiée de 'médicament' soit en raison de sa présentation au public (médicament 'par présentation'), soit en raison de sa fonction (médicament 'par fonction'[28]. Le critère permettant de qualifier la première de ces catégories est la perception que peut en avoir un consommateur moyennement avisé, alors que celui révélant la seconde renvoie davantage à des données scientifiques propres au domaine médical.

18.Le médicament par 'présentation'. Par un arrêt rendu le 30 novembre 1983 [29], la Cour de justice des Communautés européennes a réservé une interprétation particulièrement large de la notion de 'présentation'. Selon elle, en effet, 'il y a lieu de considérer qu'un produit est présenté au public comme possédant des propriétés curatives ou préventives au sens de la directive 65/65 non seulement lorsqu'il est décrit ou recommandé expressément comme tel, éventuellement au moyen d'étiquettes, de notices ou d'une présentation orale, mais également chaque fois qu'il apparaît, de manière même implicite mais certaine, aux yeux d'un consommateur moyennement avisé, que ledit produit devrait avoir un effet tel que décrit par la première définition communautaire'. Il existerait ainsi, à s'en tenir au sens dégagé par la juridiction communautaire, des médicaments 'implicites'  [30].

19.La jurisprudence nationale nous apprend également que toute substance ou composition 'présentée' comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou animales est un médicament et demeure telle [31] qu'elle possède ou non les propriétés qu'elle vante [32], quelle que soit la manière dont elle se présente - c'est-à-dire que cette 'présentation' découle de son conditionnement, de l'information donnée oralement par celui qui la vend ou d'un prospectus séparé - ou encore quelle que soit la maladie - humaine ou animale - qu'elle prétend soigner.

20.Les médicaments 'par fonction'. Quant aux médicaments 'par fonction', la Cour de justice considère qu'il revient au juge national d'apprécier, au cas par cas, les propriétés pharmacologiques du produit qui lui est soumis pour qualification, telles qu'elles reflètent les données actuelles de la science médicale et pharmaceutique [33]. Le produit sera considéré comme un médicament lorsqu'il exerce un effet sur le corps humain, sur ses fonctions organiques, et ce même si cet effet n'est pas celui qui était annoncé dans la notice qui l'accompagne [34]. Il faut dès lors, mais il suffit, que le produit concerné ait pour 'effet' d'altérer les fonctions organiques, même en l'absence d'une 'maladie' - ce qui est le cas, par exemple, des contraceptifs ou des anesthésiants -.

21.Une jurisprudence abondante et peu cohérente [35]. Implications. La notion de 'médicament' a donné lieu à une jurisprudence abondante, principalement au niveau communautaire [36]. C'est qu'une telle qualification est de nature à porter atteinte au marché unique, et aux principes gouvernant le droit de la concurrence. Sur le marché, convoité, des médicaments, doivent en effet se conjuguer, dans le respect des normes communautaires, le monopole des pharmaciens et le principe de libre concurrence que défend avec vigueur le secteur de la grande distribution. Qualifier une substance de 'médicament' au sens de la directive communautaire, c'est nécessairement entraver cette liberté du marché, et interdire par voie de conséquence une distribution plus large de celle- ci. Partant des termes de la directive 65/65/CEE, et qui l'autorisaient à défendre une définition extensive de la notion de médicament, la Cour de justice des Communautés européennes avait dans un premier temps paru, dans un souci de protection du consommateur, limiter l'emprise du secteur de la distribution. Pourtant, depuis 1991 [37], la tendance paraît s'être quelque peu inversée. Désormais, en effet, la cour tient compte, dans l'appréciation de la qualité de 'médicament' d'un produit, des 'dangers sérieux (pour) la santé' que celui-ci fait courir s'il est qualifié comme tel. En ce sens, si le produit ne présente aucun danger sérieux s'il est distribué de manière plus large, le monopole des pharmaciens ne trouverait plus de raison d'être et ne justifierait plus une restriction à la libre circulation de cette marchandise. En ajoutant un tel critère aux composantes indispensables de la qualification, la cour semble avoir réduit le sens qu'elle paraissait pourtant avoir précédemment dégagé de la directive 65/65/CEE.

B. Les médicaments soumis à prescription [38]

22.En Belgique, la délivrance des médicaments enregistrés est soumise à prescription médicale jusqu'à la levée de cette exigence par le ministre de la Santé (art. 6 de la loi du 25 mars 1964 sur le médicament). Demeureront soumis à la remise préalable d'une telle autorisation [39], les médicaments susceptibles de présenter un danger s'ils sont utilisés sans surveillance médicale, s'ils sont utilisés fréquemment dans des conditions anormales d'emploi, s'ils contiennent des substances dont il est indispensable d'approfondir la connaissance des effets indésirables ou s'ils doivent être administrés par voie parentérale (artt. 70 et 71 de la directive 2001/83; artt. 44 et suivants de l'arrêté royal du 6 juin 1960 [40]).

§ 2. Les exigences quant à la délivrance en Belgique
A. Une autorisation de mise sur le marché
a.1. Le principe et ses exceptions

23.Rappel des règles applicables en matière d'enregistrement des médicaments. Pour pouvoir être commercialisé en Belgique, tout médicament fabriqué industriellement doit faire l'objet d'une autorisation préalable de mise sur le marché (ou 'AMM'), délivrée par les autorités compétentes européennes (European Agency for the Evaluation of Medicinal Products ou 'EMEA' établie à Londres) ou nationales (ministère de la Santé publique sur avis de la Commission des médicaments pour la Belgique). Les laboratoires pharmaceutiques doivent, à cette fin, déposer auprès de ces autorités un dossier de demande qui est évalué selon des critères scientifiques de qualité, de sécurité et d'efficacité. Deux types de procédures existent en parallèle [41]: une procédure communautaire utilisée lorsque le médicament est destiné à plusieurs États membres de l'Union, et une procédure nationale pour les médicaments qui ne sont destinés qu'au marché belge.

24.Notons aussi que, depuis le 1er janvier 1998, l'accès au marché communautaire est soumis soit à la procédure centralisée définie par le Règlement CEE du Conseil 2309/93 du 22 juillet 1993 [42] - laquelle est par ailleurs obligatoire pour les produits issus des biotechnologies alors qu'elle demeure optionnelle pour les nouvelles substances actives -, soit à la procédure de reconnaissance mutuelle notamment prévue par la directive 75/319/CEE du 20 mai 1975 [43].

25.L'exigence d'une autorisation de mise sur le marché belge ou européen. Il ressort de ce qui précède qu'en principe ne peuvent être vendus en Belgique, ou sur le territoire européen, que les médicaments ayant obtenu une autorisation de mise sur ces marchés (art. 6 de la loi sur le médicament; artt. 44 et suivants de l'arrêté royal du 6 juin 1960 relatif à la fabrication, à la préparation et à la distribution en gros des médicaments et à leur dispensation [44]).

26.Or, tous les médicaments vendus sur le net ne rencontrent pas cette exigence. Certains sites non européens offrent en effet la possibilité aux consommateurs belges d'acheter des produits pour lesquels aucune autorisation de mise sur le marché n'a été accordée ou pour lesquels celle-ci a été retirée [45]. Ce facteur constitue par ailleurs un incitant important à la vente en ligne dès lors qu'il est certain que c'est précisément cela que recherchent la plupart des internautes ayant recours à ce genre de sites. Il suffit, pour s'en convaincre, de rappeler que c'est précisément grâce à la disparité des législations que le lucratif marché de la vente en ligne médicaments tels que le Viagra(r) (impuissance sexuelle), le Xénical(r) (excès de poids) ou le Propécia(r) (alopécie) s'est au départ développé entre l'Europe et les États-Unis.

27.Première exception. Le pharmacien, importateur 'occasionnel'. L'article 49 de l'arrêté royal du 6 juin 1960 [46] prévoit cependant une exception à la règle et autorise le pharmacien d'officine à 'exceptionnellement' importer en Belgique une 'quantité déterminée' - à savoir celle nécessaire au traitement du patient demandeur - d'un médicament non autorisé s'il dispose d'une ordonnance médicale 'nominative' ainsi que d'une 'déclaration du médecin d'où il apparaît que le patient en question ne peut être adéquatement traité au moyen de médicaments disponibles à ce moment en Belgique et que le traitement au moyen de cette spécialité pharmaceutique en question est nécessaire' [47] (voy. également l'art. 6bis, § 3 de la loi sur le médicament). Cette déclaration sera valable pendant la durée précisée par le médecin et, en cas d'absence de spécification, pendant une durée d'un an maximum à dater de sa signature.

28.Outre la prescription et la déclaration du médecin traitant, le pharmacien devra également obtenir une autorisation spéciale de l'Inspection de la pharmacie pour l'importation de certains médicaments (stupéfiants, psychotropes, bêta adrénergiques, anti-infectieux, anti-parasitaires, anti-inflammatoires ou médicaments à effet hormonal ou anti-hormonal).

29.En dehors de telles conditions, l'importation en Belgique de médicaments non autorisés est illicite et le pharmacien contrevenant à cette interdiction est passible de sanctions pénales.

30.Seconde exception. La distribution et l'importation parallèles. Une exception plus large est prévue par l'arrêté royal du 19 avril 2001 relatif à l'importation et la distribution parallèles des médicaments à usage humain [48]. Selon ce dernier, en effet, la distribution parallèle [49] en Belgique d'un médicament autorisé dans un autre État membre est licite si elle a fait l'objet d'une notification préalable au ministre belge de la Santé et à l'Agence européenne du médicament (art. 3). L'importation parallèle [50] l'est également suite à une procédure stricte d'autorisation préalable.

31.Cette exception, qui ne vise que le marché intracommunautaire, devrait permettre à des sites européens de délivrer légalement en Belgique des médicaments autorisés dans le pays de leur établissement sous réserve du respect des conditions qu'elle fixe.

a.2. Les sanctions

32.L'achat d'un médicament non autorisé. Le pharmacien qui, en dehors des exceptions prévues par la loi, délivre un médicament non autorisé à un consommateur belge s'expose aux sanctions pénales prévues par les articles 15 et suivants de loi de 1964 sur le médicament (emprisonnement et amende). Cette loi ne prévoit cependant aucune incrimination spécifique du comportement du consommateur, lequel devrait dès lors tout au plus être tenu au paiement d'une amende fiscale pour avoir éludé les droits de douane normalement dus pour une telle 'importation'.

B. La notice explicative

33.Tout médicament délivré en Belgique doit être accompagné de deux notices, l'une destinée au public et l'autre, scientifique, destinée aux personnes habilités à le prescrire ou le délivrer [51]. La notice doit en outre être rédigée dans les trois langues nationales [52] et, pour la première, dans un langage compréhensible pour les consommateurs.

§ 3. Les exigences quant à la publicité [53]
A. Définition et principes

34.Définition. Selon l'article 86 de la directive 2001/83, la notion de 'publicité' renvoie à 'toute forme de démarchage d'information, de prospection ou d'incitation qui vise à promouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation de médicaments'. Elle comprend en particulier la publicité faite pour les médicaments auprès du public ou auprès des personnes habilitées à prescrire, ainsi que la visite de délégués médicaux, la fourniture d'échantillons, l'octroi d'avantages pécuniaires ou en nature, le parrainage promotionnel ou de congrès scientifiques auxquels assistent des personnes habilitées à prescrire ou à délivrer des médicaments (al. 2) [54].

35.La publicité étant, au sens de la législation, entendue dans un sens très large, la question se pose légitimement de savoir si un site internet ou le nom d'un produit qui y apparaît s'y apparentent. La réponse paraît évidente pour nombre de sites vantant à outrance les vertus curatives de leurs produits. Elle l'est moins lorsque le site se borne uniquement à mentionner le nom du produit proposé à la vente. D'un côté, il ne fait nul doute qu'une protection totale des consommateurs impliquerait d'aller jusqu'à interdire de dresser un inventaire des dénominations commerciales des médicaments de sorte de n'éveiller la moindre curiosité des consommateurs et de les inviter à eux-mêmes préciser le produit qu'ils souhaitent acquérir. D'un autre, l'exigence de proportionnalité dans le choix des interdictions éventuelles justifierait de n'interdire que les informations poursuivant des fins strictement commerciales et conduisant à dénaturer le produit en l'assimilant à un produit de consommation courante.

36.Dans son avis du 11 mars 2003 rendu dans le cadre de la récente affaire DocMorris [55], l'avocat général Stick-Halck semblait faire le choix d'une position intermédiaire. Selon elle, en effet, un site internet ouvert par une pharmacie 'peut' constituer une publicité au sens de la législation communautaire, mais une appréciation au cas par cas demeure requise [56].

37.Pareille conclusion rejoint par ailleurs la position de la doctrine en ce qui concerne l'interprétation donnée à la notion au regard de la directive 'commerce électronique'. Selon Th. Verbiest [57], en effet, la notion de publicité telle qu'elle est entendue par la législation communautaire, implique uniquement une 'communication' sur le web - ce qui est le cas d'un site internet - présentant ou assurant 'la promotion' d'un service, d'un bien ou d'une activité (commerciale, artisanale ou libérale). Lorsque la finalité est de vendre, l'auteur considère à bon droit que la communication revêt une nature commerciale et rencontre la condition de 'promotion' imposée par la loi. En ce sens, toute promotion d'un produit sur un site internet peut être qualifiée de publicité au sens de la législation en vigueur de sorte que les exigences que celle-ci impose devront être respectées (publicité identifiable en tant que telle, interdiction de la publicité mensongère,...).

B. La publicité au public

38.Les médicaments conseils [58]. Certains médicaments sont en vente libre. Il s'agit des 'médicaments grand public' (Over the Counter ou OTC) ou 'médicaments conseil'. La publicité au grand public portant sur de tels produits est admise sous réserve d'un contrôle préalable de leur contenu par l'Inspection générale de la pharmacie (procédure de notification) [59][60].

39.La Cour de justice des Communautés européennes a en outre, dans son arrêt du 11 décembre 2003 [61], considéré que ne sont pas compatibles avec le droit communautaire les interdictions nationales portant sur la publicité des médicaments en vente libre puisqu'elles ne peuvent être 'justifiées' par la 'nécessité de la présence physique du pharmacien' [62]. Ainsi, 'l'article 88, § 1, du Code communautaire s'oppose à une interdiction nationale de faire de la publicité pour la vente par correspondance des médicaments dont la délivrance est réservée exclusivement aux pharmaciens dans l'État membre concerné (...) dans la mesure où cette interdiction vise des médicaments qui ne sont pas soumis à prescription' [63].

40.Les médicaments soumis à prescription [64]. La publicité des médicaments soumis à prescription est quant à elle en principe interdite (art. 88 de la directive 2001/83 [65]; artt. 7 à 9 de la loi du 25 mars 1964 sur les médicaments [66]; Recommandation du Conseil national de l'ordre des pharmaciens du 26 mai 1983 [67]), sauf au profit des professionnels de la santé [68] et moyennant dans ce cas une information préalable du ministère de la Santé. Il s'en déduit que les sociétés établies dans les différents États membres ne peuvent jamais rendre accessible aux consommateurs européens le contenu de leurs sites vantant des produits soumis à prescription.

41.Dans son arrêt du 11 décembre 2003, la Cour de justice des Communautés européennes a par ailleurs considéré qu'étaient compatibles avec le droit communautaire les interdictions nationales de publicité portant sur des médicaments non autorisés ou soumis à la remise préalable d'une prescription médicale [69].

C. Autres exigences

42.Rappelons également que d'autres dispositions demeurent applicables aux publicités relatives aux médicaments. C'est le cas en particulier des articles 22 et suivants de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce (interdiction de la publicité mensongère, réglementation de la publicité comparative,...) ou des articles 4 et suivants de la loi du 2 août 2002 relative à la publicité trompeuse et à la publicité comparative, aux clauses abusives et aux contrats à distance en ce qui concerne les professions libérales. Ces textes doivent bien entendu aussi être respectés [70].

43.On tiendra également compte de certaines règles propres à la nature particulière du produit, comme celles imposées par l'arrêté royal du 9 juin 2003 ayant modifié l'arrêté royal du 7 avril 1995 relatif à l'information et à la publicité concernant les médicaments à usage humain [71].

§ 4. Conclusion provisoire

44.Le cadre législatif actuel, tant national que communautaire, impose une série de contraintes à la vente en ligne de médicaments. Mais il ne l'interdit pas. Sous réserve de respect de ces conditions, en effet, un médicament autorisé dans le territoire de destination et accompagné d'une notice explicative rédigée dans une langue que le consommateur comprend pourrait dès lors être légalement délivré par l'intermédiaire d'un portail internet. Nous verrons dans les lignes qui suivent que les principaux obstacles résident principalement ailleurs, dans le respect du circuit légal de distribution.

Section 2. Les limites tenant à la qualité du vendeur
§ 1. Le titre de 'pharmacien'

45.Seules les personnes justifiant du titre de pharmaciens sont habilitées à délivrer [72] des médicaments en Belgique [73].

46.Le contrevenant s'expose à de lourdes sanctions pénales en cas d'exercice illégal de la pharmacie, c'est-à-dire en cas d''accomplissement habituel de tout acte ayant pour objet la préparation, l'offre en vente, la vente au détail et la délivrance, même à titre gratuit, de médicaments' [74].

47.Rappelons que la formation dispensée aux pharmaciens, et l'octroi du diplôme, sont régis, sur le territoire de l'Union, par la directive 85/432/CEE du 16 septembre 1985 [75] relative à la coordination des règles légales et administratives de certaines activités du domaine pharmaceutique. Cette directive prévoit une équivalence des diplômes, en permettant ainsi à tout citoyen européen d'exercer librement sa profession dans chaque État membre, sous réserve du respect de formalités administratives [76].

48.En particulier, un pharmacien ne pourra prendre en charge une pharmacie, ou agir en tant que pharmacien au sein d'une officine, que si son diplôme a préalablement été visé par la Commission médicale de sa province (art. 7 de l'arrêté royal n° 78 [77]) et après avoir obtenu son inscription sur la liste de l'ordre des pharmaciens.

§ 2. L'officine de pharmacie
A. L'officine physique et l'officine virtuelle

49.Droit belge. Plusieurs textes légaux font référence à la notion d'officine. Il en est ainsi en particulier de l'article 26bis, § 3 de l'arrêté royal du 31 mai 1885 qui précise qu''aucune délivrance de médicaments ne peut avoir lieu en dehors de l'officine du pharmacien'. Se pose dès lors la question de savoir quelle réalité recouvre la notion et si une officine virtuelle est envisageable. Et, sur ce point, force est d'admettre que la loi ne fournit guère d'indications. Seul l'arrêté royal du 19 octobre 1978 donne une ébauche de définition lorsqu'il précise que l''officine hospitalière' vise 'les locaux affectés à l'analyse, à la préparation, à la conservation et à la délivrance des médicaments, avec les médicaments qui s'y trouvent et l'équipement qu'ils comportent'. Le terme renverrait de la sorte avant tout à un inventaire de biens corporels (locaux, matériel, médicaments...) [78].

50.Droit français. L'on sait qu'en France, l'article L.1515 du Code de la santé publique définit expressément l''officine' comme étant 'l'établissement affecté à la dispensation au détail des médicaments, produits et objets mentionnés à l'article L.4211-1 ainsi qu'à l'exécution des préparations magistrales ou officinales'. En ce sens, la notion viserait avant tout le lieu où la délivrance doit intervenir (voy. aussi l'art. 1514 du Code de la santé publique) [79].

51.Qu'en est-il alors des portails internet? La pertinence de la question se renforce eu égard à la position rigoureuse de la Cour de cassation française, laquelle a, dans une décision du 16 mai 2000 [80], réservé une interprétation particulièrement large aux obligations imposées à celui qui délivre un médicament. Il conviendrait en effet à ce dernier, non seulement de disposer du titre de pharmacien au sens légal du terme, mais, 'en outre', de procéder à cette délivrance 'au sein' d'une officine de pharmacie.

52.La question posée à la Cour de cassation de France portait sur la légalité de la vente, en dehors d'une officine traditionnelle, de produits dont la délivrance était réservée aux pharmaciens en vertu de l'article L.512 du Code de la santé publique. La société 'Parasanté', gérée par deux pharmaciens, proposait en effet à la vente des produits d'entretien de lentilles de contact, produits spécialement couverts par le monopole légal. Selon la cour, '(...) la Cour d'appel a jugé, à bon droit, que les pharmaciens auxquels la vente des produits litigieux est réservée par l'article L.512 du Code de la santé publique étaient uniquement ceux qui exercent leur profession dans une officine de pharmacie, satisfaisant ainsi à toutes les conditions posées à cet effet par l'article L.514 du CSP'. À en suivre cette jurisprudence, la commercialisation par un pharmacien de produits sous monopole pharmaceutique ne serait permise qu'au sein d'une officine - physique - de pharmacie et disposer de la qualité de 'pharmacien' ne serait qu'une condition nécessaire, mais non suffisante, à l'autorisation légale de délivrance prévue par le Code de la santé publique.

53.Discussion. Malgré une telle interprétation, qui serait soutenable au regard des textes belges également, nous ne pensons pas qu'il soit justifié de refuser l'ouverture d'officines virtuelles pour cette seule raison dès lors que se trouvent rencontrées toutes les autres conditions légales. L'exigence d'une vente 'en officine' tend en effet principalement à lutter contre la vente en dehors des conditions légales de produits relevant du monopole officinal et, ce faisant, à lutter contre les livraisons clandestines. Et une e- pharmacie ne nous paraît pas heurter, en elle-même, une telle exigence. Une interprétation téléologique se justifie dès lors pleinement si l'objectif de protection des consommateurs sous-jacent aux conditions légales est rencontré. Il en est d'autant plus ainsi que, comme nous le verrons, la loi admet à titre exceptionnel une délivrance en dehors de l'officine [81].

B. Limitation du nombre d'officines

54.Il convient également de tenir compte de la répartition légale des officines sur le territoire [82]. La difficulté, au regard de l'internet, est de faire converger ce critère géographique avec l'espace naturellement dépourvu de frontière du web. Cette exigence paraît cependant en l'état actuel au minimum pouvoir être rencontrée en réservant aux seuls pharmaciens exploitant déjà au sein d'une officine physique la possibilité d'ouvrir un portail virtuel de vente.

§ 3. Le statut du pharmacien au regard du droit commercial

55.Le principe. Depuis une loi du 18 juillet 1973 [83], l'achat de médicaments en vue de les revendre n'est plus considéré comme un acte de commerce [84]. Ce principe repose sur la considération que le pharmacien, comme le médecin, ne poursuit aucun but de lucre, mais exerce une mission sociale pour laquelle il perçoit uniquement des honoraires 'de responsabilité' [85].

56.Cette qualification présente un intérêt dans le cadre de l'application de la réglementation assurant la protection des consommateurs, mais aussi, et surtout, sous l'angle du droit de la concurrence. En effet, même s'ils n'ont pas la qualité de 'commerçants' au sens du Code de commerce, les pharmaciens peuvent être considérés comme ayant constitué une 'entreprise' au sens de la loi du 5 août 1991 sur la protection de la concurrence économique 'dès lors qu'ils exercent une activité axée sur l'échange de biens ou de services poursuivant de manière durable un but économique' [86][87]. Nous y reviendrons [88].

57.Discussion. La question de la nature commerciale de l'activité du pharmacien s'est également posée eu égard aux 'autres' produits qu'est susceptible de vendre le pharmacien. Ce dernier ne devrait être considéré comme un 'commerçant' que dans le cadre de la vente d'articles de parapharmacie ou de droguerie, à moins que ces ventes ne constituent que l'accessoire de son activité principale [89].

§ 4. Le monopole légal de délivrance
A. Le principe et ses conséquences

58.Principe. La spécificité du produit, et la nécessité que sa délivrance soit contrôlée et fasse l'objet de conseils avisés, justifient que le législateur ait 'réservé' aux seuls pharmaciens le droit de vendre les médicaments [90][91]. Ce faisant, le circuit légal de distribution au consommateur ne peut être contourné, notamment au profit du secteur de la grande distribution, et certaines limites sont perçues comme des entraves légitimes à la libre circulation de ces marchandises.

59.Conséquences du monopole. Le monopole reconnu aux pharmaciens justifie certaines entraves à la libre circulation des marchandises. La question se pose dès lors de sa compatibilité avec le droit de la concurrence: de telles atteintes sont-elles véritablement justifiées et proportionnées au regard de l'objectif de santé publique que s'est assigné le législateur? Si la réponse peut sembler aller de soi concernant les tentatives de mainmise du secteur de la grande distribution, elle devient cependant plus délicate lorsqu'elle s'envisage sous l'angle plus large de la concurrence entre les officines elles-mêmes [92]. Une telle concurrence est -  juridiquement - inconcevable sur le territoire national, mais qu'en est-il lorsque l'on étend le champ spatial au territoire de l'Europe? La question revêt d'autant plus de pertinence lorsque l'on constate, au niveau européen, l'existence de disparités tant dans le contenu légalement reconnu à ces monopoles que dans les conditions imposées à la délivrance des médicaments aux consommateurs. La mise en place d'un marché communautaire, dépourvu d'entraves, tant directes qu'indirectes, entre les États membres risque dès lors d'avoir pour effet d'aligner les exigences nationales sur le plus petit commun dénominateur en l'absence d'une harmonisation plus rigoureuse. La décision rendue le 11 décembre 2003 par la Cour de justice des Communautés européennes dans le domaine précis de l'e-santé nous en donnera un exemple [93].

B. Le monopole face au droit de la concurrence européen
b.1. Le monopole et le secteur de la grande distribution

60.Une première décision, antérieure à celle qui retiendra tout particulièrement notre attention, mérite d'être soulignée. Il s'agit de l'arrêt rendu le 21 mars 1991 [94] par la Cour de justice des Communautés européennes.

61.En l'espèce, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence avait été saisie de poursuites pénales engagées à l'encontre du directeur du magasin 'Casino' de Marseille, ainsi que du directeur du centre d'approvisionnement de ce magasin, pour exercice illégal de la pharmacie en raison de la vente d'éosine à 2% et d'alcool à 70% modifié. Après avoir été condamnés en première instance, les deux protagonistes avaient en effet interjeté appel de la décision les condamnant estimant que les produits visés ne pouvaient être considérés comme étant des médicaments au sens de l'article L.511 du Code français de la santé publique et de l'article 1er de la directive 65/65 [95]. Les questions préjudicielles tendaient dès lors à savoir 1) si les produits visés constituaient des médicaments au sens de la législation communautaire et 2) en cas de réponse affirmative, dans quelle mesure le droit communautaire autorisait les États membres à réserver la délivrance de tels produits aux seuls pharmaciens.

62.La cour considéra que les deux produits pouvaient être qualifiés de médicaments au sens de l'article 1er de l'article 65/65 'lorsqu'ils sont présentés comme ayant des propriétés curatives ou préventives' (médicament 'par présentation') ou si leurs propriétés pharmacologiques, ainsi que '(...) [leurs] modalités d'emploi, (...) l'ampleur de [leur] diffusion, (...) la connaissance qu'en ont les consommateurs et les risques que peut entraîner [leur] utilisation' autorisent le juge national à les classer parmi les médicaments 'par fonction'. Quant à la question de la marge de manoeuvre abandonnée aux États dans la détermination du monopole pharmaceutique (seconde question préjudicielle), la cour déclara qu'en l'absence d'harmonisation des règles régissant la commercialisation et la distribution des produits visés par la directive 65/65, les États peuvent établir des normes restrictives de commercialisation et ainsi préciser que des médicaments, voire 'des produits qui n'entrent pas dans le champ d'application de la directive 65/65' [96], ne peuvent être distribués que dans des officines pharmaceutiques. La différence de régimes auxquels devront se soumettre les opérateurs en fonction des États où ils entendent écouler leurs produits ne serait donc pas en soi contraire au droit communautaire.

Pourtant, et comme le précisa la cour, 'un monopole conféré aux pharmaciens d'officine pour la distribution de médicaments et d'autres produits peut constituer une entrave aux importations. Si un État choisit d'en réserver la distribution aux pharmaciens, une telle entrave est, en principe et sauf preuve contraire, justifiée en ce qui concerne les médicaments, au sens de la directive 65/65 relative aux spécialités pharmaceutiques. S'agissant des autres produits, quelle que soit leur qualification en droit national, il appartient à la juridiction nationale de vérifier si le monopole conféré aux pharmaciens pour leur commercialisation est nécessaire à la protection de la santé publique des consommateurs et si ces deux objectifs ne peuvent pas être atteints par des mesures non restrictives du commerce intracommunautaire'.

63.Par cette décision, la Cour de justice invitait donc les États membres à s'assurer, dans la détermination de l'étendue du monopole officinal, de la conformité de celui-ci avec une double exigence: celle de la 'nécessité' de l'entrave afin de protéger les consommateurs et celle de l'inexistence de mesures alternatives engendrant un préjudice moindre ou équivalent pour le marché. Si la rencontre de ces conditions est - réfragablement - présumée concernant les médicaments, elle ne l'est pas concernant les autres produits. La preuve contraire est toujours admise.

b.2. Le monopole et les pharmacies européennes: l'affaire DocMorris [97]

64.La décision du 21 mars 1991 trouve un prolongement logique dans la récente affaire DocMorris ayant donné lieu à l'arrêt de la Cour de justice du 11 décembre 2003 [98]. Cet arrêt fait suite à trois questions préjudicielles posées, le 10 août 2001, par le Landgericht Frankfurt am Main (Allemagne) et portant d'une manière générale sur l'admissibilité, au regard des règles communautaires de la concurrence, des limites nationales imposées à la vente à ses ressortissants de produits pharmaceutiques par une officine électronique établie sur le territoire d'un autre État membre.

65.Les faits. L'action avait été introduite par une association de défense et de promotion des intérêts de la profession de pharmacien et dont les membres sont les fédérations et les associations de pharmaciens relevant des Länder (Deutscher Apothekerverband eV). Les défendeurs étaient d'une part, une pharmacie néerlandaise établie à Landgraaf - la société '0800 DocMorris n.v.' (http://www.0800docmorris.com) -, et, d'autre part, un de ses représentants légaux, Monsieur Waterval. Outre le commerce par correspondance de médicaments, la société DocMorris exerçait une activité pharmaceutique par la voie d'une officine traditionnelle, ouverte au public, située aux Pays-Bas et qui bénéficiait de toutes les autorisations requises à cette fin.

66.Depuis le 8 juin 2000, la société DocMorris offrait à la vente, notamment en langue allemande pour les consommateurs établis en Allemagne, des médicaments à usage humain, soumis ou non à prescription médicale. Certains de ces produits étaient autorisés en Allemagne, mais la plupart l'étaient uniquement dans un autre État membre de l'Union.

67.Les médicaments offerts à la vente par DocMorris étaient répertoriés par ordre alphabétique et par catégories. L'internaute était averti lorsque le produit qu'il souhaitait acheter était soumis à prescription aux Pays-Bas ou dans l'État sur le territoire duquel il avait sa résidence. La délivrance n'avait alors lieu que sur remise préalable de l'ordonnance médicale originale. La livraison s'effectuait ensuite soit en mains propres dans la pharmacie de la société DocMorris établie en Allemagne soit, et sans frais supplémentaire, par la poste.

68.L'Apothekerverband contestait la légalité de l'offre de médicaments sur la toile [99] ainsi que leur délivrance par la voie postale [100]. Selon lui, les lois allemandes sur les médicaments et sur la publicité dans le secteur de la santé ne le permettaient pas et ces interdictions étaient conformes au traité CE puisqu'elles ne constituaient pas une atteinte disproportionnée au jeu de la concurrence.

69.Les questions préjudicielles. Les trois questions préjudicielles posées à la Cour de justice des Communautés européennes peuvent être résumées comme suit.

70.Premièrement, il s'agissait de savoir si une législation nationale qui interdit l'importation commerciale de médicaments à usage humain sous monopole pharmaceutique, réalisée par la voie de la vente par correspondance par des pharmacies agréées dans d'autres États membres, à la suite de commandes individuelles passées par internet par les consommateurs, viole le principe de libre circulation des marchandises au sens des articles 28 et suivants du Traité CE.

71.La seconde question tendait à savoir s'il était compatible avec les articles 28 et 30 du Traité CE qu'une interdiction nationale de publicité pour la vente par correspondance de médicaments à usage humain soumis à prescription médicale ou en vente exclusive en pharmacie et qui ne sont pas autorisés dans l'État de destination reçoive une interprétation large au point que l'on qualifie de publicité interdite le portail internet d'une pharmacie d'un État membre de sorte que les commandes transfrontalières de médicaments, en ce compris la livraison transfrontalière de ces médicaments, soient rendues sensiblement plus difficiles.

72.Enfin, il s'agissait de savoir s'il convenait de déduire des articles 28 et 30 du Traité CE que le commerce transfrontalier de médicaments doit être considéré comme légalement admissible, malgré notamment la prohibition de sa publicité, pour assurer une mise en oeuvre plus efficace du principe de la libre circulation des marchandises.

73.Avis de l'avocat général du 11 mars 2003. L'avocat général Chr. Sticx-Hackl a présenté son rapport le 11 mars 2003 [101].

74.Quant à l'importation. L'avocat général considéra qu'une interdiction nationale frappant l'importation de médicaments, réalisée par une pharmacie établie dans un autre État membre à la suite d'une commande virtuelle, constitue une restriction à la libre circulation des marchandises. La question demeurait cependant de savoir si cette mesure rendait l'accès au marché 'sensiblement plus difficile'. Tel est le cas en Allemagne pour les pharmacies étrangères en comparaison des pharmacies allemandes. Toutefois, elle souligna que l'interdiction peut être justifiée par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes lorsqu'il s'agit de médicaments soumis à autorisation qui n'ont pas fait l'objet d'une autorisation dans l'État d'importation ou au niveau communautaire. Une telle interdiction ne serait alors pas disproportionnée. Une appréciation différente se justifie cependant lorsqu'il s'agit de médicaments autorisés ou qui ne sont pas soumis à autorisation. Il incomberait alors à l'État membre concerné de démontrer que l'interdiction de la vente par correspondance satisfait également au principe de la proportionnalité, c'est-à-dire qu'elle est nécessaire et adéquate. Or, l'Allemagne ne lui paraissait pas avoir rapporté une telle preuve.

75.Quant à la publicité. Quant à la question de savoir si une interdiction nationale portant sur la publicité en faveur de la vente par correspondance de médicaments viole le principe de libre circulation des marchandises, l'avocat général avait conclu que cette restriction est admissible - car elle est nécessaire et adéquate - s'il s'agit de médicaments soumis à autorisation mais non autorisés. Elle ne l'est par contre pas s'agissant de médicaments qui sont autorisés ou qui ne sont pas soumis à une autorisation préalable.

En ce qui concerne plus particulièrement l'interdiction allemande de la publicité pour les médicaments non autorisés (art. 3bis du HWG) ou pour les médicaments soumis à prescription médicale (art. 10 du HWG), l'avocat général rappela que cette interdiction est conforme à la législation communautaire et n'en constitue que la transposition en droit interne. Le portail internet de la société DocMorris relèverait en outre de la notion de 'publicité auprès du public' au sens de la directive, cette notion devant recevoir une interprétation large [102].

76.Dans la mesure où l'interdiction de la vente par correspondance et de la publicité qui s'y rapporte concerne également les médicaments autorisés, ou non soumis à autorisation, l'avocat général considéra que le principe de proportionnalité était violé du fait que la réalisation des objectifs de protection de la santé poursuivis par l'État membre d'importation pouvait être assurée d'une autre manière. À son avis, des contrôles lors de la commande, de l'expédition, du transport et de la réception des médicaments constituaient en l'espèce des mesures plus adéquates.

77.Quant à la directive 'commerce électronique'. L'avocat général avait enfin estimé, en ce qui concerne la directive sur le commerce électronique, que sa transposition en droit interne ne devait être assurée qu'au 17 janvier 2002 de sorte qu'elle n'était pas applicable aux faits du litige.

78.La décision du 11 décembre 2003 [103]. La Cour de justice des Communautés européennes s'est ralliée à l'avis de l'avocat général.

79.Quant à l'importation. Quant à l'importation des médicaments, et à la compatibilité des entraves nationales posées à la vente par correspondance, la cour considère que l'interdiction visant les médicaments non autorisés dans le pays de destination est seule conforme au droit communautaire. Dans ce cas, en effet, la restriction imposée à la libre circulation des marchandises se justifie par la nécessité de protéger la santé et la vie des personnes.

80.Lorsqu'il s'agit de médicaments autorisés, un régime différent doit être retenu selon que ceux-ci sont ou non soumis à la remise préalable d'une prescription médicale. En effet, selon la cour, '(...) l'article 30 CE ne peut être invoqué pour justifier une interdiction absolue de vente par correspondance des médicaments qui ne sont pas soumis à prescription médicale dans l'État membre concerné (...)'. Les restrictions nationales ne sont dès lors pas justifiées lorsqu'il s'agit de médicaments en vente libre [104] alors qu'elles le sont lorsqu'il s'agit de médicaments soumis à prescription médicale. Dans ce dernier cas, en effet, la cour estime que la présence du pharmacien se justifie par la nécessité de donner au patient un conseil de qualité et de permettre un contrôle de la régularité formelle de la prescription remise, ainsi que de son adéquation avec l'état de santé du patient.

81.Quant à la publicité. Quant à la publicité, la cour décide que 'l'article 88, § 1, de la directive 2001/83/CE (...) s'oppose à une interdiction nationale de faire de la publicité pour la vente par correspondance des médicaments dont la délivrance est réservée exclusivement aux pharmacies dans l'État membre concerné (...) dans la mesure où cette interdiction vise des médicaments qui ne sont pas soumis à prescription médicale'.

82.Ainsi, selon la Cour de justice, les interdictions nationales de vente en ligne de médicaments non autorisés ou soumis à prescription médicale peuvent être justifiées, alors que ce n'est pas le cas lorsqu'une telle prohibition porte sur d'autres médicaments. La cour opère, de la sorte, une double distinction: celle entre les médicaments autorisés et ceux qui ne le sont pas, et, au sein de la première de ces catégories, celle entre les médicaments soumis à prescription et ceux qui ne le sont pas. Le fait pour un État - comme c'était le cas de l'Allemagne -, d'interdire la vente sur son territoire de médicaments non autorisés est donc compatible avec le droit communautaire. S'agissant des médicaments autorisés, les mesures ayant un effet restrictif sur les importations ne sont conformes au droit communautaire que pour autant qu'elles soient nécessaires à la protection de la santé, situation qui n'existe que lorsque le médicament concerné est soumis à une prescription médicale dans le pays de destination et que celle-ci n'est pas demandée par l'officine virtuelle établie dans un autre État membre. Selon la cour, en effet, '(...) au vu des risques pouvant s'attacher à l'utilisation de ces médicaments, la nécessité de pouvoir vérifier de manière efficace et responsable l'authenticité des ordonnances établies par les médecins et d'assurer ainsi la délivrance du médicament soit au client lui-même, soit à une personne chargée par ce dernier de venir le chercher, serait susceptible de justifier une interdiction de la vente par correspondance (...)'. Lorsque le médicament n'est soumis à aucune autorisation médicale préalable, par contre, d'autres mesures, plus adéquates, paraissent suffisantes dès lors qu'il ne peut être exclu en tant que tel qu'une information et un conseil soient donnés au moment de l'achat.

83.Conclusion. Par cette décision, la Cour de justice des Communautés européennes s'est ouvertement positionnée en faveur de la vente par correspondance des médicaments non soumis à prescription et autorisés dans l'État de destination. Un consommateur belge devrait dès lors pouvoir commander en ligne, et se faire livrer en Belgique, un tel médicament en recourant à un portail étranger.

84.Il ne faut cependant pas faire dire à cet arrêt davantage que ce qu'il dit. En particulier, et s'il est incontestable qu'il constitue un premier pas dans le développement des officines virtuelles, cet arrêt ne porte nullement atteinte au monopole des pharmaciens. Les interdictions nationales frappant les autres médicaments - et en particulier ceux qui ne sont pas autorisés ou qui demeurent soumis à prescription - sont en effet en principe conformes au droit communautaire. De même, la cour a expressément souligné l'importance de l'intervention d'une personne qualifiée dans la délivrance des médicaments [105].

85.On peut en tout cas déplorer que l'arrêt suscite autant de questions qu'il apporte de réponses. La cour ne s'est en effet pas prononcée sur toutes les interrogations qu'appelle la création d'une officine virtuelle. En particulier, demeure ouverte la question de savoir si la seule présentation d'un médicament sur un portail internet peut constituer une publicité au sens de la législation communautaire et si, dans l'affirmative, un contrôle préalable - comme c'est le cas en Belgique - peut être imposé. De même, la décision rendue semble fortement dépendante du contexte factuel de l'affaire qui lui était soumise, ainsi que de la rigueur de la réglementation allemande qui s'y appliquait. Il y a dès lors fort à penser que seule une appréciation au cas par cas puisse en ce domaine être retenue.

86.Lien avec l'affaire Gambelli [106]. Cette jurisprudence atteste à tout le moins du souci croissant des institutions européennes de maintenir les monopoles nationaux dans des limites strictes afin qu'ils n'atteignent pas de manière déraisonnable la réalisation du marché unique [107]. Elle rejoint par ailleurs une autre décision récente rendue par la Cour de justice le 6 novembre 2003. La Cour de justice s'est alors prononcée sur la question de savoir si une entreprise établie sur le territoire d'un État membre de l'Union pouvait proposer des services de paris en ligne aux ressortissants établis des autres États membres [108] en dépit de l'existence d'un monopole national de concession [109]. Des restrictions, justifiées par un tel monopole, n'étaient-elles pas contraires aux principes de libre circulation des biens et services et de la liberté d'établissements consacrés par le traité CE? Prolongeant sa jurisprudence antérieure, dégagée lors des arrêts Schindler [110], Läärä [111] et Zenatti [112], la cour a abandonné aux juges nationaux le pouvoir exclusif d'apprécier si une atteinte portée auxdits principes est conforme au droit européen en ce sens qu'elle serait justifiée par un principe supérieur, comme le respect de l'ordre public [113].

§ 5. L'exigence de l'exercice personnel de la pharmacie
A. Exercice personnel et identification

87.Principe. La loi impose au pharmacien d'exercer 'personnellement' ses activités, ce qui implique notamment, comme corollaire, une responsabilité (pénale, civile et disciplinaire) personnelle [114]. De même, l'autorisation d'exercer la pharmacie au sein d'une officine appartient personnellement à celui qui l'a reçue.

88.Exigence d'identification. La conséquence directe de cet exercice personnel consiste en l'obligation faite au pharmacien d'apposer sur le médicament qu'il vent son cachet (art. 44bis de l'arrêté royal du 6 juin 1960) [115]. Le Conseil national de l'ordre des pharmaciens conseille en outre d'y mentionner la date exacte de la délivrance [116].

B. Exercice personnel et interdiction du 'colportage'

89.La loi impose au pharmacien, non seulement d'exercer personnellement ses activités, mais aussi de ne pas recourir aux services d'intermédiaires [117] - qu'il s'agisse de préposés, de courtiers, de livreurs ou autres - afin de 'solliciter' ou d''encourager' la délivrance de médicaments (art. 26ter de l'arrêté royal du 31 mai 1885 [118]). Il semble dès lors falloir déduire de cette exigence que seuls les titulaires du titre légal de pharmaciens pourraient le cas échéant ouvrir une officine virtuelle en Belgique.

§ 6. La publicité personnelle et le 'drainage' de clientèle [119]

90.La publicité des officines est soumise à des conditions réglementaires et déontologiques strictes, l'idée étant que la mission sociale du pharmacien est incompatible avec toute promotion s'apparentant à ce qui est d'usage dans le monde commercial. La règle n° 2 du Code de déontologie précise notamment sur ce point '... qu'il est anti-déontologique de faire de la publicité pour l'officine, de la provoquer ou de la tolérer; qu'il peut tout au plus être admis ou toléré que l'enseigne porte soit le nom du prédécesseur, soit une raison sociale, pour autant que celle-ci soit compatible avec la dignité professionnelle'. Plusieurs décisions ordinales sanctionnent les pharmaciens ayant manqué à cette exigence perçue comme inhérente à la dignité de la profession [120]. À en suivre l'ordre, toute forme de publicité, qu'elle soit directe ou indirecte (promotions, ristournes, etc.), devrait dès lors être prohibée.

91.De son côté, l'arrêté royal n° 80 du 10 novembre 1967 relatif à l'ordre des pharmaciens permet d'interdire 'toute activité qui serait incompatible avec l'exercice honnête de la pharmacie ou de nature à porter atteinte à la considération des pharmaciens' [121].

92.Ces règles doivent cependant désormais se conjuguer avec la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects de la société de l'information, et notamment le commerce électronique. Celle-ci oblige en effet les États membres à s'assurer que les titulaires de professions réglementées puissent utiliser les communications commerciales en ligne s'il est établi qu'ils respectent les règles déontologiques que leur impose l'exercice de leur art [122]. La Belgique a transposé ce principe et la publicité en ligne devrait dès lors désormais être permise lorsque certaines conditions, notamment en termes de dignité de la profession, sont respectées. Le Conseil de l'ordre n'a pas encore précisé les exigences qui lui paraissent devoir être imposées dans ce cadre.

§ 7. Conclusion provisoire

93.Les principaux obstacles au développement des e- pharmacies résident, nous le voyons, dans le respect des exigences relatives à la profession elle-même. Qu'elles soient d'origine déontologique, ou puisent leurs racines dans la loi, ces contraintes rendent les pharmacies non européennes souvent hors la loi lorsqu'elles proposent des produits à des consommateurs belges. Et il n'en est autrement au niveau de l'Europe que par une volonté affirmée, notamment par la Cour de justice, de maintenir toute entrave à la libre concurrence dans des limites strictes.

94.Une telle conclusion peut paraître excessive au regard de la réalité virtuelle. Nous en convenons volontiers. Pourtant, il ne nous semble pas permis, au regard des textes actuellement en vigueur, de soutenir une position inverse. Les portails internet étrangers devraient en effet, pour légalement délivrer en Belgique des produits couverts par le monopole officinal, avoir obtenu la reconnaissance du diplôme du pharmacien qui les gère et, ensuite, se soumettre aux exigences prévues par la loi. Internet ne saurait aboutir en l'état à prévoir un régime plus favorable aux officines virtuelles par rapport à celles qui souhaitent s'implanter physiquement sur le territoire belge. La spécificité du produit vendu, et le souci de lutter contre les effets négatifs que sa consommation non contrôlée pourrait engendrer, justifient en outre à notre sens une plus grande sévérité. Cette situation atteste à tout le moins le caractère inadapté de la législation en vigueur aux regards des réalités de l'internet.

Section 3. Les limites tenant au contrat et à sa nature [123]
§ 1. La commande du médicament et ses préalables

95.L'acte de délivrer un médicament est un acte médical [124] en ce qu'il participe étroitement au traitement choisi par un médecin pour soigner le patient. Il l'est d'autant plus lorsque, dans un souci de protection de la santé, le législateur a imposé que la délivrance soit précédée d'une 'autorisation' préalable du médecin [125].

96.L'exigence de la remise préalable d'une ordonnance médicale est diversement rencontrée par les sites existants et il n'est dès lors pas inutile d'apprécier dans quelle mesure ces différentes pratiques rencontrent les exigences légales.

A. Les ordonnances virtuelles

97.L'ordonnance matérielle. Certains sites, soucieux de respecter la législation en vigueur, n'acceptent de délivrer un médicament soumis à prescription que contre la remise préalable de l'ordonnance médicale. Le consommateur est alors invité soit à l'envoyer par la poste, soit à la remettre en mains propres dans l'officine où il prendra livraison du produit commandé. Cette pratique, qui seule paraît conforme au droit en vigueur, est celle retenue par la majorité des officines européennes.

98.L'ordonnance virtuelle. La technique actuelle ne permet pas encore au médecin d'adresser directement à une officine une ordonnance électronique [126]. Mais, si tel était le cas, pareille prescription serait-elle admissible au regard de la loi et des règles déontologiques en vigueur?

99.La législation encadre strictement l'acte de prescription [127]. Et, parmi les exigences qu'elle impose, figure celle inscrite dans les articles 21 de l'arrêté royal n° 78 relatif à l'art de guérir et 15 de l'arrêté royal du 31 mai 1885 [128] que toute ordonnance médicale soit 'signée' par le médecin prescripteur.

100.En 1997, le Conseil de l'ordre des médecins avait considéré qu'une ordonnance électronique non signée de la main du médecin prescripteur ne constituait pas une ordonnance valable [129] et ne pouvait, dès lors, être admise comme faisant foi. Moyennant le respect de certaines exigences, notamment en termes de vérification de l'identité du prescripteur et du respect de la confidentialité des données transmises - sécurités que prévoit la récente loi sur la signature électronique [130][131] -, il semble cependant qu'une conclusion différente pourrait être soutenue. Le Conseil de l'ordre a par ailleurs considéré que la transmission d'une prescription via le réseau (ordonnance électronique), pour autant qu'elle fasse suite à un examen du patient, pourrait être admise si des mécanismes de contrôle et de sécurité sont mis en oeuvre pour en préserver la confidentialité des données transmises et le respect de la vie privée [132]. Telle est également la position du Conseil de l'ordre français [133].

B. Les consultations virtuelles et les ordonnances 'en ligne'

101.Le principe. L'acte de prescription est un acte médical qui, en droit belge, est conçu comme étant nécessairement la suite d'un examen médical pratiqué par une personne justifiant du titre de médecin [134]. Cette consultation nécessite en outre un interrogatoire précis du patient, ainsi qu'un examen clinique - exigence imposée par l'obligation faite au médecin d'agir de manière prudente et diligente sous peine d'engager sa responsabilité en cas de dommage -.

102.Les consultations sur internet. Le questionnaire standard. Les consultations actuellement proposées par certains portails internet de pharmacies ne respectent pas cette exigence. En outre, elles posent des problèmes de responsabilité non encore résolus, notamment dans la détermination de la personne responsable en cas de dommage. Il arrive que les sites concernés prétendent en effet suppléer à l'absence de consultation physique en soumettant aux internautes un questionnaire standard, qui est par ailleurs souvent facturé comme une véritable consultation et dont le coût s'adjoint au prix de vente du médicament. Il serait cependant douteux que, dans l'état actuel de notre droit, ce genre de pratique soit admissible, à tout le moins telle qu'elle est conçue actuellement [135]. Il semble tout d'abord profondément réducteur de limiter l'examen médical à un simple inventaire de questions posées au malade, sans qu'il ne soit possible d'analyser sur son corps certains symptômes pouvant être significatifs. Il n'est pas certain, ensuite, que les exigences légales en matière de prescription soient véritablement rencontrées dès lors que, notamment, aucune assurance n'est donnée quant à la qualité de l'auteur du questionnaire. Enfin, et en tout état de cause, l'idée d'un suivi non personnalisé des patients heurte profondément la conception de la relation devant exister entre un médecin et son patient.

103.La téléconsultation. La téléconsultation se distingue du questionnaire standard en ce qu'elle permettrait au médecin et au patient de se rencontrer 'virtuellement', par exemple grâce à l'usage d'une vidéo interactive. Certains auteurs soulignent que cette forme de consultation pourrait, dans certains cas, se justifier, notamment lorsqu'il s'agit de procéder à un renouvellement de prescriptions, à la rédaction de certificats ou de procéder à des visites de routine [136]. Qu'en penser?

104.Le Conseil national belge de l'ordre des médecins a rendu un avis négatif le 19 août 2000 [137]. Selon lui, de telles consultations seraient 'en opposition formelle' avec le principe selon lequel le diagnostic suppose un examen préalable du patient [138][139]. Il a en outre affirmé, dans un avis du 21 septembre 2002, que 'les consultations et les prescriptions par le réseau internet ne sont pas autorisées' [140].

105.La jurisprudence et la doctrine. À notre connaissance, aucune décision n'a été rendue par les juridictions belges concernant la pratique des téléconsultations ou des questionnaires standard. On sait cependant que la jurisprudence est particulièrement stricte dans l'appréciation de la responsabilité des médecins et qu'elle offre de nombreux cas où la prescription de médicaments sans consultation préalable a été considérée comme fautive [141].

106.Un médecin ne pourrait dès lors, sans méconnaître les exigences de diligence qui s'imposent à lui, prescrire des médicaments à un de ses patients, ou un membre de la famille de celui-ci, sans préalablement le voir et l'examiner [142]. Il en serait de même s'il acceptait de soigner par correspondance un patient et de lui adresser, au seul su de ses plaintes subjectives, des prescriptions qu'il juge indiquées à son mal. Un tel comportement devrait être considéré comme constitutif d'une faute. Il en serait nécessairement de même de la délivrance, par le pharmacien, d'un médicament soumis à prescription sans assurance que l'état du patient a fait l'objet d'un avis médical circonstancié.

C. La transmission de prescriptions établies par des médecins étrangers [143]

107.Si l'on se confronte à l'espace de l'internet, se pose bien entendu la question de savoir quel sort réserver aux prescriptions dressées par un médecin étranger et adressées à une officine belge. La réponse n'est pas évidente.

108.Tout d'abord, en vertu de l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967, nul ne peut exercer l'art médical que s'il n'est porteur du diplôme légal de docteur en médecine, chirurgie et accouchements, obtenu conformément à la législation sur la collation des grades académiques et le programme des examens universitaires ou s'il n'en est légalement dispensé [144]. Est assimilé au titulaire du diplôme belge de médecin, le ressortissant européen, titulaire d'un diplôme, certificat ou autre titre de médecin répondant aux dispositions fixées par le ministre, conformément aux dispositions de la directive 'Médecins' [145], et reconnu par le ministre [146]. Ce faisant, en principe, les prescriptions des médecins étrangers n'ayant pas obtenu la reconnaissance de leur titre par le ministre ne seraient pas valables en Belgique et ne pourraient donc donner lieu à la délivrance de médicaments de la part de pharmacies belges [147].

109.La Commission européenne a cependant été amenée à se prononcer sur cette question [148]. Celle-ci a d'abord souligné que la directive 92/26/CEE concernant la classification des médicaments [149] en vue de leur délivrance définissait la prescription médicale comme 'toute prescription émanant d'un professionnel habilité à prescrire des médicaments' sans aucune condition de nationalité ou de résidence du médecin prescripteur. La Commission a en outre insisté sur le fait que les conditions d'accès à la profession ayant été harmonisées, la prescription d'un médicament par un médecin d'un quelconque État membre offre autant de garanties que celle émanant d'un médecin du pays en question. Elle en conclut qu'une autre nationalité dans le chef du prescripteur, ou sa résidence dans un autre État membre, ne peuvent constituer des critères systématiques d'interdiction ou de refus d'honorer une prescription.

110.Bien que la directive 92/26/CEE ait été abrogée et remplacée [150], la définition de la prescription est restée quasiment inchangée [151].

111.Suite à cette réponse de la Commission, certains pharmaciens ont cru - et continuent de croire - qu'ils peuvent accepter toute ordonnance prescrite par un médecin ressortissant d'un des pays de l'Union européenne, ce qui ne correspond pas à la réalité [152].

§ 2. La livraison du médicament: le portage à domicile

112.Le principe. L'arrêté royal du 31 mai 1885 précise que '(...) tout médicament est délivré en mains propres au malade ou à son mandataire' (art. 26bis, § 1er). Cette délivrance doit en outre intervenir au sein de l'officine (art. 26bis, § 3) [153][154].

113.Exception. L'envoi par la poste. L'article 26bis, § 3 prévoit cependant qu''est toléré l'envoi par la poste ou la remise au domicile ou à la résidence du malade des médicaments commandés à l'officine par le malade ou son mandataire'. Dans ce cas, le conditionnement devra être effectué sous pli scellé individualisé au nom du malade [155].

114.La doctrine semble considérer que cette exception doit recevoir une interprétation stricte et ne devrait concerner que des personnes isolées ou invalides [156]. La jurisprudence belge ne s'est pas prononcée sur ce point, mais l'on trouve une décision intéressante en France. Dans un récent arrêt du 16 mai 2000 [157], la Cour de cassation française a en effet considéré que les tentatives menées par l'ordre des pharmaciens d'entraver la livraison de médicaments par la voie postale constituaient une infraction au droit de la concurrence. Selon elle, la livraison à domicile de produits de santé est légale sous la seule condition qu'elle soit effectuée suite à une demande du patient et sous un pli scellé. Ce faisant, elle refusait de suivre l'interprétation donnée par le Conseil de l'ordre aux dispositions du Code de la santé publique selon laquelle ce portage ne serait admissible que si le patient était dans l'incapacité de se déplacer.

115.Nous avons vu, au moment d'aborder l'affaire DocMorris, que cette exigence d'une remise en mains propres au sein de l'officine peut se révéler problématique. En Belgique, le texte légal autorise le portage à domicile, certes dans des conditions strictes, justifiées avant tout par un souci de permettre un égal accès aux soins à des personnes étant dans l'incapacité, physique ou matérielle, de se rendre dans une officine. Pour autant, le respect des termes de la loi ne paraît pas être méconnu en cas de vente en ligne de médicaments dès lors que la commande peut être considérée comme ayant été passée, par le malade ou son mandataire, 'dans' l'officine [158].

Section 4. Les limites tenant au mode de communication utilisé
§ 1. La législation relative aux ventes à distance

116.Une vente à distance. La vente en ligne de produits de la santé - si et quand elle est autorisée - constitue juridiquement une 'vente à distance' au sens de la législation belge. Pareille qualification de la convention passée entre le pharmacien et son client appelle le respect de certaines règles de nature impérative (informations préalables à la conclusion du contrat [159], droit de renonciation, charge de la preuve incombant au professionnel...). La base légale sera cependant différente selon que le produit proposé à la vente est couvert par le monopole officinal - auquel cas il conviendra de se référer à la loi du 2 août 2002 (artt. 11 à 17) [160] - ou non. Dans le cas négatif, et si cette activité n'est pas accessoire, c'est bien aux articles 77 et suivants de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce qu'il conviendra de se référer [161].

§ 2. La législation relative au commerce électronique

117.La directive 'commerce électronique' [162] et la loi du 11 mars 2003 [163]. Outre les exigences précitées, le dispensateur du produit veillera à respecter, pour ce qui concerne l'information du consommateur et la passation de la commande, la loi du 11 mars 2003 sur la société de l'information [164]. Cette loi prévoit également des règles particulières aux titulaires d'une profession réglementée [165] (art. 13 et suivants).

§ 3. La protection des données à caractère personnel

118.On notera également que tout professionnel de la santé est tenu de préserver la confidentialité des données personnelles transmises par le patient. Cette exigence pose bien entendu des contraintes particulières aux opérateurs de sites internet [166].

119.Ce droit à la confidentialité des données relatives à la santé trouve, en Belgique, une base légale tant dans l'article 35 de l'arrêté royal du 31 mai 1885 que dans la loi du 22 août 2002 relative aux droits des patients.

120.Notons enfin que, le 17 mai 2001, et dans le souci d'aider les responsables de sites internet, la Commission relative à la protection de la vie privée a proposé plusieurs lignes directrices destinées à fixer les conditions minimales devant être respectées [167]. En particulier, lorsque les données récoltées sont destinées à être transférées hors de l'Union européenne, le site concerné devra préciser s'il assure un niveau suffisant de protection. La recommandation précise en outre que les informations doivent être données à l'internaute dans une langue qui lui est compréhensible.

§ 4. Conclusion provisoire

121.La vente à distance appelle, par sa nature même, le respect de règles particulières tendant à suppléer aux écueils pouvant être générés par l'absence de rencontre physique entre les parties contractantes. Ces exigences se renforcent encore davantage lorsque l'objet de la prestation du vendeur est un bien d'une nature particulière, comme c'est le cas des médicaments. Cependant, et sous réserve de leur respect, la vente en ligne devrait être admise.

122.Il reste qu'en ce domaine plus qu'en tout autre, un contrôle strict des sites existants devrait être mis en oeuvre. Et, sur ce point, les labels de qualité ou agréments déjà octroyés devraient permettre aux consommateurs d'avoir l'assurance du respect d'un seuil minimal de qualité des services proposés. L'enjeu du commerce en ligne des produits de santé dépasse en effet ici le seul souci de protéger les intérêts financiers du consommateur, objectif traditionnellement poursuivi par les différentes initiatives européennes en la matière. Il s'agira, dans un même mouvement, de protéger sa santé. Et c'est dans cette double voie que devra oeuvrer le législateur européen - ou toute autre instance reconnue - s'il souhaite permettre le développement des nouvelles technologies dans ce domaine. S'il ne fait nul doute que les réticences actuelles des consommateurs envers les portails des pharmacies virtuelles sont largement celles exprimées vis-à- vis de toute forme de commerce en ligne (identité et qualité de la société proposant des produits, insécurité des paiements effectués [168], non-livraison des produits achetés ou absence de recours en cas de non-conformité ou de vice de la marchandise), elles présentent en ce domaine une acuité toute particulière dès lors que s'y adjoignent des risques évidents en termes de santé publique et de protection des données médicales [169]. Il conviendra donc sur ce plan de lutter en faveur d'une plus grande confiance dans l'usage de l'internet [170], évolution qui ne paraît possible que moyennant la mise en oeuvre, et le respect, de contrôles stricts et réguliers.

Section 5. Conclusion

123.Si le pouvoir politique et les autorités ordinales demeurent encore largement réticents à l'apparition des officines virtuelles, il n'en demeure pas moins que, dans l'état actuel de notre droit, leur développement n'est pas nécessairement contraire à la loi. Autre est la question de s'assurer que demeurent respectées les contraintes, légales et déontologiques, que leur existence implique. Nous avons vu sur ce point que la plupart des restrictions imposées peuvent être rencontrées moyennant un contrôle similaire à celui dont font actuellement l'objet les officines traditionnelles.

124.Sur le plan strictement légal, la création d'une e-pharmacie est en effet dès aujourd'hui admissible sous la condition qu'elle soit effectivement gérée par une personne disposant du titre de pharmacien et pour autant que les autres contraintes légales posées quant au produit proposé à la vente et à la nature du contrat soient respectées. En outre, s'il s'agit de médicaments soumis à prescription, la délivrance ne devrait avoir lieu qu'après la remise de l'original de l'ordonnance et un contrôle formel et technique de son contenu. Sur ce point, les questionnaires standard et les téléconsultations ne peuvent être admis. Le pharmacien aura également tout particulièrement égard aux règles régissant la publicité des produits offerts à la vente. Dans ces conditions, et dans ces conditions seulement, une pharmacie virtuelle semble pouvoir répondre aux exigences légales.

125.Deux questions demeurent cependant problématiques et il conviendrait probablement d'y répondre grâce à une intervention législative. La première est de savoir si la création d'une e-pharmacie, même respectant les contraintes précitées, ne porte pas atteinte à la répartition géographique des pharmacies imposée par la loi. Comme nous l'avons dit, ce premier obstacle ne paraît pas à lui seul suffire à contrarier la vente en ligne dès lors que l'officine est gérée par un pharmacien disposant déjà d'une autorisation de tenir une officine physique. Mais, pour ce qu'il en est des autres, aucune réponse claire ne peut en l'état être donnée.

126.La seconde question, qui n'est pas spécifique au commerce électronique puisqu'elle se pose dans toute vente à distance, est de savoir comment prévoir un mode de livraison répondant aux exigences légales. Nous avons vu sur ce point qu'en l'état actuel de notre droit, le portage à domicile pourrait être admis, 'à titre exceptionnel', et sous la condition que la commande ait été préalablement passée 'dans' une officine. L'envoi par la poste pourrait ainsi être toléré dès lors que la commande a été effectivement passée sur le site et que le contrôle joint à la délivrance proprement dite a été effectué par le pharmacien. Pourtant, la réponse ne paraît pas pleinement satisfaisante, en particulier parce qu'elle revient à poser en principe ce qui n'a été conçu que comme une exception. Il serait dès lors plus approprié de poser une fois pour toutes le principe dans un texte clair. Sur ce point, une modification de l'article 26bis de l'arrêté royal du 31 mai 1885 serait requise.

127.Le statut des officines belges vendant des produits à des consommateurs belges étant acquis, se pose bien entendu la question du statut des officines étrangères dispensant des produits aux consommateurs belges. La disparité des législations nationales fait que l'on pourrait être tenté de condamner des officines qui, bien que ne respectant pas le droit belge, sont parfaitement licites au regard de leur propre droit national [171]. La récente décision rendue par la Cour de justice des Communautés européennes refuse cependant une telle conclusion dans le cadre du marché commun. Selon elle, ne sont en effet justifiées, au regard du droit communautaire de la concurrence, que les restrictions 'nécessaires' à la protection de la santé publique et 'proportionnées' à cet objectif. Quant à la légalité des officines non européennes, la question nous paraît plus délicate et, en l'état actuel, ne pas pouvoir être résolue de manière affirmative.

Section 6. Demain...

128.Il ne se passe désormais plus un jour sans que de nouvelles initiatives voient le jour en faveur du développement des technologies de l'information, sans que les juristes soient interpellés par les questions qu'il pose et sans que les internautes se voient reconnaître de nouvelles prérogatives. C'est un enjeu majeur de ce nouveau millénaire et nul domaine ne peut désormais y rester indifférent. Pas même le monde médical.

129.Il est vrai qu'internet est, comme tout progrès technologique, porteur d'espoirs, mais aussi d'inquiétudes [172]. Il l'est d'autant plus lorsque le domaine dont il s'empare touche à ce fait la fragilité de l'être et qu'il invite à se conjuguer des intérêts divergents et reposant sur des conceptions profondément attachées à un peuple et sa culture. Et s'interroger sur la légalité - voire l'opportunité - de la vente en ligne de médicaments relève d'une telle difficulté. Il s'agit en effet tant de protéger les intérêts, financiers et sanitaires, des consommateurs que de permettre une libre circulation des marchandises et, ainsi, de ne pas entraver de manière excessive le libre jeu du marché et les acteurs qu'il concerne. Il s'agit, en même temps, de protéger la spécificité d'un produit, et de reconnaître la mission éminemment sociale de celui qui le délivre, tout en permettant le développement de technologies qui, en elles-mêmes, supposent que soit accepté le risque d'un contrôle moindre, parce que moins docile à ses formes traditionnelles. L'enjeu est de taille. Et le défi qui s'impose aux politiques est grand.

130.Pourtant, au même moment où le phénomène effleure l'Europe, le temps de s'interroger sur l'opportunité des développements que connaît la distribution des médicaments paraît déjà révolu. Les réticences manifestées, bien que parfaitement justifiées, se heurtent en effet à une réalité évolutive contre laquelle il paraît désormais, sinon impossible, du moins déraisonnable de lutter. Tous les points de vue convergent pour considérer que le phénomène ne ralentira plus [173], notamment parce qu'il est susceptible de générer des gains conséquents en termes de soins de santé [174].

131.Sur le plan de la légalité, force est de constater que la protection actuellement accordée par la législation pharmaceutique et les règles déontologiques constitue déjà un rempart. Mais il convient de s'interroger sur la question de savoir si celui-ci n'est pas davantage de nature à effrayer les pharmaciens belges, soit précisément ceux qu'il conviendrait de protéger. La législation belge demeure en effet fortement ancrée dans un contexte économique et culturel relativement ancien, où le médicament demeurait de l'ordre du sacré par les vertus qu'il portait. Il s'agissait avant tout de protéger les consommateurs et de freiner l'immixtion de considérations perçues comme purement commerciales dans un secteur qui devait en être traditionnellement - et légalement - préservé. Et, à cette fin, les principales règles mises en oeuvre tendent à éviter toute tentative de mainmise par le secteur de la libre distribution. La récente jurisprudence européenne a cependant désormais quelque peu déplacé le débat dès lors que la concurrence mettra directement aux prises des personnes justifiant d'un même titre et bénéficiant d'un même monopole de vente. Répondre aux attentes des pharmaciens, en leur permettant de participer, sans contraintes excessives, à la libéralisation du marché tout en préservant la spécificité du médicament, seul véritable gage de la protection des consommateurs, voilà l'enjeu principal qu'il reviendra aux législateurs nationaux de relever dans les années à venir.

132.Et, sur ce point, une modification en profondeur des textes actuellement en vigueur ne nous paraît pas utile [175]. Une reformulation de certaines dispositions éparses pourrait suffire. La seule exigence qui nous semble devoir être mise en oeuvre plus impérativement consiste à préciser les instruments devant assurer une meilleure protection des consommateurs. Deux voies complémentaires mériteraient ici à tout le moins d'être explorées. D'une part, et si le principe devait être admis, il semble judicieux d'institutionnaliser des instruments de co-régulation impliquant un partenariat entre le public et le privé dans la mise en oeuvre de mécanismes de contrôle - notamment en termes de qualité des produits et d'intégrité des sites -, par exemple grâce à la mise en oeuvre de labels de qualité ou d'agréments qui pourraient être accordés par une autorité fédérale. D'autre part, la Belgique devrait travailler à renforcer sa coopération avec les autres États, en particulier au niveau de l'Union, afin de lutter de manière plus efficace contre les comportements illicites.

133.Cela étant, l'urgence que nous avons évoquée demeure toute relative. L'ère des pharmacies virtuelles n'a pas encore atteint la Belgique [176]. Les mentalités ne paraissent en effet pas encore prêtes à franchir le pas. Nous pouvons, pour l'heure, nous en réjouir... à tout le moins parce que nous est laissé le temps nécessaire à l'élaboration d'une réponse adaptée aux enjeux de demain.

[1] Assistante U.C.L. Avocat au barreau de Bruxelles.
[2] L'e-pharmacie représenterait en effet aux États-Unis 25% de la délivrance de médicaments. Voy. notamment l'enquête 'E-pharmacies aux USA, 15 milliards de dollars prévus en 2004', Pharmaceutiques janvier 2003, n° 103, pp. 37 à 39; 'Les Américains peuvent acheter en ligne leurs médicaments', Le Monde 13 février 2001, p. 25. 60% des pharmacies américaines seraient aujourd'hui également présentes sur la toile. La National Community Pharmacists Association compte que 76% des pharmacies indépendantes disposeraient actuellement d'un accès direct à internet et que près de la moitié auraient mis en place un portail virtuel permettant la vente en ligne.
[3] Cette situation explique certainement en partie le fait que la plupart des grandes librairies du net se sont associées à d'autres entités commerciales afin d'étendre le spectre des produits offerts à la vente, parmi lesquels figurent désormais aussi les médicaments. Ainsi, par exemple, Drugstore.com est le fruit d'une association intervenue en 1998 entre Amazon.com et la joint-venture Kleiner Perkins Caufield et Byers. Le réseau s'est par ailleurs étoffé grâce à des alliances ultérieures, notamment avec certaines officines 'traditionnelles' comme Rite Aid, permettant de la sorte aux patients qui le souhaitent de prendre livraison des produits commandés via internet dans une pharmacie proche de leur résidence. Voy. 'E-pharmacies aux USA, 15 milliards de dollars prévus en 2004', Pharmaceutiques janvier 2003, n° 103, p. 37.
[4] Consultez le site http://www.fda.gov/oc/buyonline/default.htm.
[5] En Belgique, les prix des médicaments à usage humain font l'objet d'une réglementation stricte. Voy. notamment M. Roland, Pharmacie et société, volume I, Législation et déontologie pharmaceutiques, Cabay, 1984, Louvain-la-Neuve, pp. 343 et s.
[6] Notre propos est bien entendu nuancé. Il est évident que ce phénomène se constate aussi en Europe. La relation médecin/patient s'est en effet là aussi développée dans le sens d'une plus grande autonomie du second. L'Union européenne le reconnaît: voy. sur ce point la Communication du 1er juillet 2003 faite par la Commission au Conseil, au Parlement, au Comité économique et social ainsi qu'au Comité des régions tendant à renforcer l'industrie pharmaceutique européenne dans l'intérêt des patients (Propositions d'action): [COM (2003) 383 final, pp. 28-29]. Voy. également P. Queneau, 'Le malade, acteur et demandeur d'informations', Revue hospitalière de France, n° 481, juillet 2001.
[7] Voy. notamment sur les développements à attendre dans ce domaine, le Rapport du Professeur R. Beuscart, Rapport sur les enjeux de la Société de l'information dans le domaine de la santé, soumis au Premier ministre français en 2000 (document disponible sur le site www.medcost.fr).
[8] Des études menées aux États-Unis montrent en effet que certains produits sont facturés en moyenne 12% moins cher que ceux vendus en officine traditionnelle. Voy. 'E-pharmacies aux USA, 15 milliards de dollars prévus en 2004', Pharmaceutiques janvier 2003, n° 103, p. 38. Ce constat pousse certains organismes publics nationaux à recommander aux consommateurs l'achat en ligne de médicaments. C'est le cas notamment au Royaume-Uni ainsi qu'en Suisse. Voy. sur ce point également l'étude de H. Charrondière, La distribution du médicament en Europe, Eurostat, France, février 2003, 2 volumes, 470 p.
[9] L'exemple le plus intéressant est celui de la Suisse où a été créée une pharmacie publique - Mediservice - travaillant main dans la main avec les caisses sociales. Ces dernières incitent par ailleurs vivement les consommateurs à acheter leurs produits en ligne afin de réduire les coûts des soins de santé.
[10] La présence d'un pharmacien n'est en effet dans ce cas pas requise. Il en est de même dans le cadre de la vente de produits cosmétiques: Prés. Comm. Bruxelles 6 mai 1996, D.C.C.R. 1996, 325 et note M. Goyens, 'Le statut ambigu de la distribution pharmaceutique en Belgique'.
[11] Ordre national des médecins, avis du 19 août 2000 relatif aux consultations médicales et la vente par correspondance de médicaments via internet, Bull., n° 90, p. 13.
[12] Arrêté royal du 31 mai 1885 approuvant les nouvelles instructions pour les médecins, pour les pharmaciens et pour les droguistes, M.B. 19 juin 1885.
[13] A. Laude, 'L'e-commerce des produits de santé: dimension interne', Gaz. Pal., Recueil mars-avril 2002, pp. 531 et s.; Le Quotidien du Médecin 7 décembre 2000. La jurisprudence française paraît cependant évoluer.
[14] Voy. p. ex. Les indications du GPUE concernant les services pharmaceutiques en ligne du 14 juin 2001 (disponible sur le site internet du GPUE) ainsi que le document Bonnes pratiques de pharmacie en Europe, approuvé par le GPUE lors de son Assemblée générale d'octobre 1996 et l'International Code of Ethics for health care sites and services on the Internet - eHealth Code of Ethics - de l'Internet Healthcare Coalition (IHC) du 24 mai 2000 accessible à l'adresse http://www.ihealthcoalition.org/ethics/ethics.html.
[15] Voy. notamment le programme Healthcare disponible sur le site http://europa.eu.int/information_society/topics/health/index_en.htm.
[16] Voy. notamment sur le point la résolution du Conseil de l'Europe du 21 mars 2001 sur le rôle du pharmacien dans le cadre de la sécurité sanitaire. Cette résolution reprend une série de principes que le Conseil de l'Europe invite à mettre en oeuvre dans les législations nationales. La plupart de ceux- ci prennent en compte le développement de l'internet.
[17] Notons que les ministres ont convenu de se retrouver pour une seconde Conférence qui se tiendra en Irlande les 5 et 6 mai 2004. Voy. aussi le Congrès Ehealth des 16 et 17 octobre 2003.
[18] COM (2002) 263. Voy. aussi la résolution du Conseil du 18 février 2003, J.O.C.E. (C) 048, 28 février 2003, pp. 2-9.
[19] Son principe a été approuvé au Conseil de Barcelone. Voy. aussi la Communication de la Commission concernant l'introduction d'une carte européenne d'assurance sociale, COM (2003) 73 final, 17 février 2003.
[20] Les discussions portent encore aujourd'hui sur les critères de qualité. Voy. notamment sur ce point la Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions du 29 novembre 2002, COM (2002) 667 final.
[21] OMS, Document WHA51.9 du 16 mai 1998.
[22] OMS, Medical Products and the Internet - A Guide to finding reliable informations, Genève, janvier 1999. Ce document est disponible à l'adresse internet www.who.int/medicines/library/qsm/who-edm-qsm-99-4/medicines-on-internet-guide.html.
[23] Voy. notamment la Déclaration de Principes 'Building the Information Society: a global challenge in the New Millennium', présentée lors du Sommet mondial de la société de l'Information du 12 décembre 2003 (Genève), Doc. WSIS-09/GENEVA/DOC/4-E, en particulier le point 7 'ICT applications: benefits in all aspects of life' ainsi que le Plan d'action 'Genève 2003 - Tunis 2005' présenté le même jour. On notera, enfin, qu'un réseau européen de co-régulation de l'internet, constitué d'organismes relevant de sept pays européens dont la Belgique, a été présenté par le Commissaire E. Liikanen le 11 décembre 2003. Celui-ci travaille notamment au suivi du Sommet mondial de la société de l'information.
[24] Voy. notamment S. Callens (éd.), Chapters on Pharmaceutical Law, Anvers, Intersentia, 2000, pp. 3 et s.; S. Callens, 'Definitie van het geneesmiddel', in Het geneesmiddel juridisch bekeken, Gand, Mys & Breesch, 1998, p. 1; S. Callens, 'De definitie van het geneesmiddel', Rev. dr. Santé 1998- 99, pp. 24-26; A.H.R. De Meijer et L. Hombroeckx, 'Definitie 'geneesmiddel' geïnterpreteerd in de Belgische rechtspraak', Rev. dr. Santé 1993, pp. 23-33; M. Goyens, 'Le statut ambigu de la distribution pharmaceutique en Belgique', D.C.C.R. 1996, pp. 335 et s.; Y. Petit, 'La définition du médicament en droit communautaire', E.C.R. 1992, pp. 571 et s.; M. Roland, Pharmacie et société, législation et déontologie pharmaceutiques, Cabay (Louvain-la-Neuve), volume I (1984), en particulier les pp. 119 et s. et volume II (1988) pour les textes législatifs; A. Vandeplas, 'De definitie van een geneesmiddel', R.W. 1990-91, 649-650; 'Internet, droit et santé', Premières rencontres Droit et Santé, Faculté de droit de l'université Paris V (Palais du Luxembourg, 14 juin 2001), dossier établi sous la direction de A. Laude publié in Gaz. Pal., Doctrine, 2002, pp. 496 et s.
[25] Loi du 25 mars 1964 sur les médicaments, M.B. 17 avril 1964 (entrée en vigueur le 17 avril 1964) modifiée à plusieurs reprises.
[26] J.O.C.E., n° 22, 9 février 1965. Voy. également dans ce sens: CJCE 30 novembre 1983, Van Bennekom, aff. 227/82, Rec. C.J.C.E., 3883 et s.
[27] J.O.C.E. 28 novembre 2001, pp. 67 et s. Cette directive a été modifiée par la directive 2003/63/C.E (essais cliniques). Voy. aussi la proposition modifiée de la directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/83, COM/2003/0163 final - COD 2001/0253 - COM/2001/0404 final et la Position Commune en vue de l'adoption de la directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2001/83 instituant un Code communautaire relatif aux médicaments à usage humain du 8 octobre 2003, 2001/0253(COD), C5-0464/2003 (reprenant notamment une modification de l'art. 1er de la directive contenant la définition de la notion de médicament).
[28] Comp. avec l'art. L.511 du Code français de la santé publique.
[29] Arrêt Van Bennekom du 30 novembre 1983, 227/82, Rec. C.J.C.E., p. 3883.
[30] Voy. aussi le point 23 de la décision du 21 mars 1991, aff. C-60/89, Rec. C.J.C.E. 1991, p. I-1547; J. Calvo, 'La notion de médicament en droit communautaire', Les Petites Affiches 17 juillet 1987, pp. 30-33; O. Longlois, Pour une histoire juridique du médicament, Mémoire élaboré sous la direction du Professeur Jean-Pierre Baud, Université Robert Schuman, Strasbourg III, année universitaire 1997-98, p. 63.
[31] Voy. les références jurisprudentielles reprises par la circulaire ministérielle du 28 juillet 1987 relative à l'art. 1er de la loi du 25 mars 1964 sur les médicaments.
[32] Anvers 4 décembre 2001, R.W. 2002-03, liv. 33, 1303 et note C. Desmet 'Enkele gevolgen van de kwalificatie van producten als geneesmiddel'.
[33] La Cour de justice a en effet considéré, dans un arrêt du 21 mars 1991 (aff. C-60/89, Rec. C.J.C.E. 1991, p. I-1547, précité) qu''en l'état actuel du droit communautaire', un État demeure compétent pour fixer les règles relatives à la distribution des produits qualifiés de médicaments par fonction au sens de la directive 65/65 et ce dans le respect des règles du traité CE.
[34] Il a ainsi été jugé que constituent des médicaments 'par fonction', les 'kits' de préparation remis aux pharmaciens - et contenant des substances qui, prises isolément, ne sont pas des médicaments mais qui sont destinées à être mélangées par un pharmacien, lesdites compositions étant présentées avec une indication thérapeutique dans le cadre d'affections bronchiques ou de l'alopécie androgénique (Cass. 12 février 1992, Pas. 1992, I, p. 515) -, la vitamine C - à tout le moins lorsque son dosage unitaire excède 500 mg [voy. cependant Angers 30 octobre 2001, arrêt n° 460 (inédit). La Cour d'appel d'Angers a quant à elle jugé que, pour être un médicament, ce dosage devait atteindre 1.000 mg] - ou encore les pastilles anti-tabac (C.T. Gand 8 décembre 1998, Rev. dr. Santé, 2000-01, pp. 46-48).
[35] Notons que dans le cadre de la révision en cours des dispositions relatives à la législation pharmaceutique, il est envisagé de préciser qu''en cas de doute, lorsqu'un produit répond à la définition du 'médicament', la présente directive s'applique même si le produit entre également dans le champ d'application d'une autre législation communautaire'. Voy. la décision en deuxième lecture du Parlement européen du 17 décembre 2003. Cette définition, large, devrait permettre d'éviter que certains produits 'frontières' ne soient exclus du monopole des pharmaciens.
[36] Voy. notamment les conclusions de l'avocat général M.L.A. Geelhoed, 16 mai 2002, aff. C-387/99, en cause de la Commission des Communautés européennes c. République fédérale d'Allemagne et aff. C-150/00 en cause de la Commission des Communautés européennes c. République d'Autriche, soutenue par le Royaume du Danemark et la République de Finlande (classement de préparations vitaminées et de préparations contenant des sels minéraux comme médicaments et non plus comme aliments).
[37] CJCE 21 mars 1991, aff. C-60/89, Recueil de Jurisprudence 1991, p. I-1547, précité. Voy. les nombreux commentaires parus: G. Raymond, C.C.C. 1991, n° 6, pp. 14-15; L. Cartou, Les petites affiches 1991, n° 97, pp. 23-24; J. C. Berr, J.D.I. 1992, pp. 430-432; B. Fauran, Gaz. Pal. 1992, III, Doctrine, pp. 654-661.
[38] Voy. également infra, nos 95 et s.
[39] La Commission européenne définit la prescription médicale comme 'toute prescription émanant d'un professionnel habilité à prescrire des médicaments' (question écrite n° 2491/92 de M. Karel De Gucht à la Commission du 12 octobre 1992 - Délivrance sur ordonnance des médicaments réservés aux médecins établis en Belgique, J.O.C.E. (C) 099, 7 avril 1993, p. 0009).
[40] Arrêté royal du 6 juin 1960 relatif à la fabrication, à la préparation et à la distribution en gros des médicaments et à leur dispensation, M.B. 22 juin 1960.
[41] Art. 6 de la directive 2001/83/CE du 6 novembre 2001, J.O.C.E. (L) 311, p. 67.
[42] J.O.C.E. (L) 214/1, 24 août 1993.
[43] J.O.C.E. (L) 147, 9 juin 1975.
[44] M.B. 22 juin 1960.
[45] Arrêté royal du 3 juillet 1969 relatif à l'enregistrement des médicaments (M.B. 10 juillet 1967) pris en application de l'art. 4 de la loi de 1964. Le ministre peut en particulier refuser l'enregistrement d'un médicament à usage humain (artt. 6quater et 7 de la loi de 1964) lorsqu'il apparaît que celui- ci est nocif dans les conditions normales d'emploi; que l'effet thérapeutique du médicament fait défaut ou est insuffisamment justifié par le demandeur de l'enregistrement; que le médicament n'a pas la composition qualitative ou quantitative déclarée; que la documentation jointe à la demande d'enregistrement n'est pas complète ou conforme aux dispositions de l'arrêté royal.
[46] M.B. 22 juin 1960.
[47] Voy. concernant la déclaration du médecin, également l'arrêté royal du 8 novembre 2001 (M.B. 21 décembre 2001).
[48] M.B. 30 mai 2001. Voy. aussi, au niveau européen, notamment la Communication de la Commission sur les importations parallèles de spécialités pharmaceutiques ayant fait l'objet d'une autorisation du 30 décembre 2003, COM (2003) 839 final, 30 p.
[49] Celle-ci est définie comme 'la mise sur le marché en Belgique d'un médicament pour lequel une autorisation de mise sur le marché est accordée conformément à l'article 3 du Règlement (CE) n° 2309/93 du 22 juillet 1993 (...), par un distributeur indépendant du détenteur de cette autorisation, en provenance d'un autre État membre ou d'un État qui est partie à l'Accord sur l'Espace économique européen et qui dispose à cet effet d'une notification issue der l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments pour la distribution parallèle' (art. 1er, 2° de l'arrêté royal). Voy. également CJCE, n° C-94/98, 16 décembre 1999 (Rhône-Poulenc Rorer), concl. La Pergola, Rec. C.J.C.E., Liv. 12, I, 8789. Voy. en ce qui concerne notamment les restrictions aux importations parallèles en cas de demande de retrait de l'autorisation d'un médicament: CJCE, n° C-15/01, 8 mai 2003 (Paranova Läkemedel e.a.), concl. F. Jacobs, J.O.C.E. 21 juin 2003, Liv. 146, 5.
[50] Celle-ci est définie comme 'l'importation en Belgique en vue de la mise sur le marché en Belgique d'un médicament pour lequel une autorisation de mise sur le marché est autorisée dans un autre État membre ou dans un État qui est partie à l'accord sur l'Espace économique européen et pour lequel il existe un médicament de référence (...) par un distributeur indépendant du détenteur de l'autorisation de mise sur le marché du médicament de référence et qui dispose à cet effet d'une autorisation d'importation parallèle' (art. 1er, 1° de l'arrêté royal).
[51] Arrêté royal du 7 avril 1995 relatif à l'information et à la publicité concernant les médicaments à usage humain, M.B. 12 mai 1995, 12694.
[52] Arrêté royal du 3 juillet 1969 relatif à l'enregistrement des médicaments, M.B. 10 juillet 1969.
[53] Nous n'aborderons pas sur ce point les récents développements en matière de publicité par courrier électronique dont les principes sont contenus dans la loi du 11 mars 2003 ainsi que les arrêtés royaux du 4 avril 2003 (M.B. 28 mai 2003, p. 29296 - Rapport au Roi, p. 29292). Cet arrêté d'exécution tend à préciser les exceptions à l'interdiction de publicité par cette voie établie dans l'art. 14 de la loi (voy. aussi la proposition de loi du 20 novembre 2003 modifiant l'art. 14 de la loi du 11 mars 2003 déposée par messieurs Mahoux et Istasse, Doc. parl. Sénat, proposition 355/1).
[54] Comp. avec la définition reprise l'art. 2 de la loi du 11 mars 2003.
[55] Voy. infra, nos 64 et s.
[56] Il est à noter que la cour, qui a rendu son arrêt le 11 décembre 2003, a laissé cette question sans réponse.
[57] Sur ce point, voy. Th. Verbiest, La protection juridique du cyber-consommateur, Publicité, Contrats, Contentieux, Litec, 2002, en particulier les pp. 10 et s., ainsi que les pp. 27 et s.
[58] Sur ce point, voy. notamment Th. Verbiest, La commercialisation de médicaments par internet: quelle légalité en droit français? 21 novembre 2003, disponible sur le site 'Droits & Nouvelles technologies', http://www.droit-technologie.org/1_2.asp?actu_id=852; Th. Verbiest, La protection juridique du cyber-consommateur, Publicité, Contrats, Contentieux, Litec, 2002, en particulier pp. 3 et s.; H. de Suremain, 'Publicité de commercialisation de médicaments via internet', Gaz. Pal., n. 294, 21 octobre 1999, pp. 39-41.
[59] Voy. aussi la circulaire n° 407 du 26 avril 2001 relative à la lisibilité des mentions légales sur les publicités de médicaments.
[60] Ce système existe également en France où l'art. L.5122-6 du Code de la santé publique impose un contrôle a priori de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Dans la plupart des autres pays européens, cependant, ce contrôle est effectué a posteriori.
[61] Arrêt du 11 décembre 2003, aff. C-322/01. Voy. infra, nos 64 et s.
[62] Arrêt du 11 décembre 2003, aff. C-322/01, point 144.
[63] Arrêt du 11 décembre 2003, aff. C-322/01, points 148-149.
[64] Pour le régime applicable en France, voy. Th. Verbiest, La protection juridique du cyber-consommateur, Publicité, Contrats, Contentieux, Litec, 2002, pp. 51 et 52.
[65] Rappelons qu'une proposition de la Commission européenne tendant à unifier les dispositions nationales applicables en matière de publicité relative aux médicaments soumis à prescription a été soumise au Parlement européen à la fin de l'année 2002 (Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2001 modifiant la directive 2001/83 instituant un Code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, COM 2001/0404 final, J.O.C.E. (C) 075, 26 mars 2002). Le 23 octobre 2002, le Parlement a approuvé la proposition de la Commission, moyennant certains amendements qui ont ensuite été repris, le 24 mai 2003, par la Commission. La position commune du Conseil a été adoptée le 29 septembre 2003 (voy. Position commune du Parlement européen et du Conseil en vue de l'adoption de la directive modifiant la directive 2001/83, 8 octobre 2003, C5-0464/ 2003, 2001/0253(COD)). La proposition est actuellement soumise pour une deuxième lecture au Parlement.
[66] Voy. l'art. 9, § 1, al. 2 de la loi sur les médicaments et l'arrête royal du 7 avril 1995 relatif à l'information et à la publicité concernant les médicaments à usage humain tel que modifié notamment par l'arrête royal du 9 juin 2003, M.B. 30 juin 2003.
[67] Par cette communication du 26 mai 1983, le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a en effet rappelé que '(...) le médicament n'est pas un objet de commerce et que par conséquent, toute forme de publicité pour celui-ci à l'officine est anti-déontologique (...) il est interdit au pharmacien d'attirer la clientèle de quelque manière que ce soit (...)'.
[68] Voy. en particulier les artt. 91 et s. de la directive 2001/83.
[69] Arrêt du 11 décembre 2003, aff. C-322/01, points 138 à 142 et 145.
[70] Voy. infra, nos 55 et s. en ce qui concerne l'application de l'une ou l'autre de ces lois.
[71] M.B. 30 juin 2003.
[72] En réalité le terme 'dispensation' usité en France paraît plus adéquat en ce qu'il souligne mieux la complexité de l'activité du pharmacien. Selon l'art. 6 de l'arrêté ministériel français du 9 août 1991, cette notion recouvre en effet 'l'acte pharmaceutique associant la délivrance des médicaments, à l'analyse pharmaceutique de l'ordonnance médicale, la préparation éventuelle des doses à administrer, la mise à disposition d'informations nécessaires au bon usage des médicaments'. Cette définition rejoint par ailleurs l'art. R. 5015-48 du Code de la santé publique.
[73] Sous certaines conditions, cependant, des personnes exerçant l'art médical peuvent se voir également autoriser cette délivrance: voy. notamment l'art. 16 de l'arrêté royal de 1885.
[74] Voy. art. 4 de l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967; S. Callens, o.c., 2000. pp. 181 et s.; M. Roland, Pharmacie et société, législation et déontologie pharmaceutiques, Cabay (Louvain-la-Neuve), volume I (1984), pp. 157 et s.
[75] J.O.C.E. (L) 253, 24 septembre 1985, pp. 0034-0036. Cette directive a été transposée, en droit belge, dans l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions des soins de santé (M.B. 14 novembre 1967 - voy. aussi les art. 35ter et quater). La méconnaissance de ces règles expose leur auteur à des sanctions pénales et disciplinaires (voy. notamment les artt. 38 et 43).
[76] L'art. 1bis de l'arrêté royal n° 78 précise qu'il s'applique aux 'ressortissants européens'. Cette notion regroupe: - les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne; - les ressortissants de la Norvège, de l'Islande ou de la Principauté de Liechtenstein; - les ressortissants d'un État avec lequel les Communautés européennes et leurs États membres ont conclu un Accord d'association, entré en vigueur et stipulant que, dans le cadre de l'accès à et de l'exercice d'une activité professionnelle, ce ressortissant ne peut pas être discriminé en raison de sa nationalité.
[77] Art. 7.
[78] M. Roland, o.c., volume II, pp. 245 et s.
[79] Voy. not. Th. Verbiest, o.c., 2002, p. 92 et s. L'art. 44 de l'arrêté royal du 6 juin 1960 précise en effet uniquement que la dispensation des médicaments est réservée 'aux pharmaciens d'officine', lesquels sont définis comme 'toute personne autorisée à pratiquer la pharmacie, qui gère effectivement soit une officine ouverte au public, soit une officine installée dans les établissements de soins ou dans les prisons' (art. 1, 6°).
[80] Cass. fr. 16 mai 2000, Bull. 2000, I, n° 145, p. 95.
[81] Voy. infra, nos 112 et s.
[82] L'art. 4, § 3 de l'arrêté royal n° 78 précise en effet que le nombre de pharmacies ne peut dépasser certains critères prédéfinis:
[83] M.B. 19 septembre 1973.
[84] Voy. l'art. 2bis du Code de commerce selon lequel en effet 'ne sont toutefois pas réputés actes de commerce, les achats en vue de la vente à des particuliers, ainsi que les ventes à des particuliers, de produits relevant de la profession de pharmacien lorsque ces achats et ventes sont accomplis par une personne légalement autorisée à exercer l'art de guérir ou l'art vétérinaire, pour autant que cette personne n'accomplisse pas également d'autres actes qualifiés commerciaux par la loi dans le cadre d'une profession habituelle exercée soit à titre principal, soit à titre d'appoint'. Voy. pour une application du principe: Cass., 7 mai 1999, J.T. 2000, p. 66 ; Anvers, 13 décembre 1991, Turnh. Rechtsl. 1992, 96; Liège, 27 novembre 1989, R.R.D. 1990, 342.
[85] Doc. parl. Sénat, n° 717, 1971-72, pp. 1 à 4; M. Roland, o.c., volume II, p. 248; J. Van Rijn, Précis de droit commercial, 1966, p. 54; L. De Bruyckere, 'Het statuut en de aansprakelijkheid van de officina-apotheker', Jura Falc. 1999-2000, 193-225.
[86] Cass. 25 février 2000, Pas. 2000, I, 144. La Cour de cassation qualifie l'ordre des pharmaciens d''association d'entreprises' au sens de l'art. 2, § 1er de la loi du 5 août 1991. La question était en l'espèce importante car un pharmacien avait été condamné par ses pairs à une suspension disciplinaire d'un an pour avoir adressé aux gérants des officines du groupe qu'il dirigeait une circulaire imposant la mise en oeuvre d'une ristourne de 10% sur certains produits pharmaceutiques. L'ordre des pharmaciens y avait vu une pratique portant atteinte à la dignité et à l'honneur de la profession, principalement en ce qu'elle était comparable à celle mise en oeuvre dans le secteur marchand. En cassation, le pharmacien arguait que son activité était une 'entreprise' au sens de la législation relative à la protection de la concurrence et que, dès lors, il était illégal de lui interdire une telle pratique, cette interdiction constituant tant une atteinte 'déraisonnable' au libre jeu de la concurrence qu'une mesure 'disproportionnée' par rapport aux objectifs poursuivis par l'ordre. La Cour de cassation considéra que 'la décision attaquée fonde la sanction disciplinaire prononcée à charge du demandeur sur une interdiction générale et absolue de toute publicité et la condamnation de toute concurrence sur le marché pharmaceutique; elle viole ainsi les articles 1 et 2 §§ 1 et 2, de la loi du 25 août 1991'.
[87] La question est d'autant plus pertinente que de plus en plus de sociétés commerciales rachètent aujourd'hui des officines où elles installent leurs employés. En outre, ces officines ont largement diversifié leurs produits, en vendant notamment des cosmétiques et des produits de parapharmacie. Monsieur Martial Lahaye a d'ailleurs posé au gouvernement la question de savoir si, en 2003, les pharmaciens devaient toujours être exclus du champ d'application de la législation commerciale (voy. Question 737 du 13 janvier 2003, Questions et Réponses, Chambre des représentants, 13 janvier 2003, p. 19.232). Le gouvernement a répondu par l'affirmative.
[88] Voy. infra, nos 61 et s.
[89] Dans ce sens: Trib. Arr. Namur, 23 novembre 1976, J.L. 1976-77, pp. 107-109.
[90] Ce monopole, qui puise ses racines dans une ancienne loi du 21 germinal an XI, est aujourd'hui consacré par plusieurs textes de loi: la loi du 25 mars 1964 sur le médicament (artt. 3 et s.), l'arrêté royal n° 78 (artt. 4 et s.), l'arrêté royal du 3 mai 1885 (en particulier les artt. 25 et s.) et l'arrêté royal du 6 juin 1960 relatif à la fabrication et à la distribution en gros des médicaments et à leur dispensation.
[91] Voy., en France, l'art. L.4211-1 du Code de la santé publique.
[92] Voy. Cass., 31 mai 1996 (D. c. Ordre des pharmaciens), J.T. dr. eur. 1997, 159 et Pas. 1996, I, 562 (les règles déontologiques de l'ordre des pharmaciens constituent des 'mesures' restrictives de la concurrence au sens de l'art. 30 - aujourd'hui 28 - du traité CE).
[93] Voy. infra, nos 64 et s.
[94] Aff. C-60/89, Rec. C.J.C.E. 1991, p. I-1547.
[95] Selon eux, ces deux produits tombaient davantage dans le champ d'application de la directive relative aux produits cosmétiques.
[96] Voy. le point 36 de l'arrêt. Ce principe avait déjà été posé dans les arrêts Van Bennekom de 1983 (CJCE 30 novembre 1983, 227/82, Rec. C.J.C.E., p. 3883) et Tissier (CJCE 20 mars 1986, 35/85, Rec. C.J.C.E., p. 1207).
[97] Voy. aussi F. Gerbaud, 'E-commerce (B to C) et médicaments en Allemagne', Lettre des biotechnologies, n° 5, mai 2001, pp. 2-3.
[98] Aff. C-322/01.
[99] Selon l'association, cette pratique n'était pas admissible au regard de l'art. 73, § 1, de l'AMG. Cette disposition précise que '1) Les médicaments soumis à agrément ou à enregistrement ne peuvent être introduits sur le territoire sur lequel la présente loi est applicable [...] que s'ils sont agréés ou enregistrés pour la circulation sur ce territoire, ou s'ils sont dispensés de l'agrément ou de l'enregistrement, et aux conditions suivantes: 1. si le produit est importé d'un État membre des Communautés européennes ou d'un autre État partie à l'Accord sur l'Espace économique européen, le destinataire doit être entrepreneur pharmaceutique, grossiste, vétérinaire ou exploitant d'une pharmacie. [...]'.
[100] Ce qui enfreignait, selon l'association, l'art. 43, § 1, de l'AMG. Cette disposition interdit la vente par correspondance de médicaments dont la vente est réservée exclusivement aux pharmaciens: 'les médicaments [...] qui ne sont pas en vente libre en dehors des pharmacies conformément aux dispositions de l'article 44 ou des dispositions juridiques adoptées sur base de l'article 45, paragraphe 1, ne peuvent, en dehors des cas prévus à l'article 47, être mis en circulation de manière professionnelle ou commerciale, pour la consommation finale, que dans des pharmacies et non par la voie de la vente par correspondance. [...], il ne peut y avoir, en dehors des pharmacies, aucun commerce de médicaments qui sont réservés à ces dernières conformément à la première phrase de la présente disposition'.
[101] Aff. C-322/01.
[102] L'élément déterminant serait, en l'espèce, l'impression 'objective' que peut avoir le consommateur eu égard à la configuration d'ensemble de la page d'accueil, ce qui semble tolérer une interprétation au cas par cas.
[103] Voy. notamment pour un bref commentaire de cette décision, 'La vente par internet devant la justice européenne', L.N.P., n° 269, 18 décembre 2003, p. 1; 'L'arrêt DocMorris du 11 décembre 2003 et la vente de médicaments', L.N.P., n° 270, 16 janvier 2004, pp. 1 et 2. E. Wery, 'La Cour européenne de justice règle le sort des pharmacies en ligne', 1er mars 2004, www.droit.technologie.org/1_2_1.asp?actu_id=902; S. Boillat et S. Callens, 'DocMorris: une nouvelle porte vers la libre circulation des médicaments en Europe?', Bull. des médecins suisses, 2004:85, n° 3, pp. 110-114.
[104] Cette considération rejoint l'état de la question au Royaume-Uni où la vente en ligne des O.T.C. inscrits sur la General Sale List est admise.
[105] La motivation retenue par la cour en atteste. En effet, son développement est constamment jalonné du rappel d'un élément de fait perçu comme déterminant, à savoir que la pharmacie DocMorris était une officine établie aux Pays-Bas et faisant, dans ce pays, l'objet des contrôles sanitaires des autorités compétentes. La conclusion dégagée par la cour ne pourrait ainsi être étendue à des entités commerciales ne répondant pas aux exigences nationales de la profession de pharmacien.
[106] Voy. le commentaire de cet arrêt par L. de Brouwer, dans T.B.H. 2004, n° 3, Actualités.
[107] Cette préoccupation a par ailleurs notamment été récemment rappelée dans le Rapport présenté par la Commission européenne sur le suivi de la transposition de la directive 'commerce électronique' le 21 novembre 2003. Selon la Commission, en effet, 'les États membres ne peuvent, pour des raisons tenant au domaine coordonné, restreindre la liberté de prestation de services de la société de l'information depuis un autre État membre' (Rapport de la Commission sur la transposition de la directive 2000/31, COM (2003) 702 final, en particulier les pp. 8 et 9) (voy. aussi l'art. 4 de la directive). Font exceptions les situations imposant que l'on protège les consommateurs.
[108] Voy. aussi l'avis de l'avocat général Siegbert Alber rendu le 13 mars 2003.
[109] Voy. notamment, en Belgique, la loi relative à la rationalisation du fonctionnement et de la gestion de la Loterie nationale du 19 avril 2002, M.B. 4 mai 2002. Voy. aussi la loi du 7 mai 1999 sur les jeux de hasard, M.B. 30 décembre 1999.
[110] Arrêt du 24 mars 1994, C-275/92.
[111] Arrêt du 21 septembre 1999, C-124/97.
[112] Arrêt du 21 octobre 1999, C-67/98.
[113] Voy. Th. Verbiest et E. Keuleers, Loteries transfrontalières: après l'affaire Gambelli, l'Avocat Général de la Cour de justice CE persiste et signe, http://www.droit-technologie.org/1_2.asp?id=797, 25 juillet 2003).
[114] Sur ce point, voy. notamment M. Roland, o.c., volume II, pp. 231 et s.
[115] Notons que l'identification du dispensateur rejoint également des préoccupations tenant à une détermination plus aisée de la personne responsable en cas de dommage dû à un défaut du produit. L'objectif ainsi posé pourrait cependant être également atteint lorsque cette mention fait défaut et que la vente a eu lieu en ligne dès lors que la directive du 8 juin 2000 relative au commerce électronique impose désormais aux prestataires intermédiaires - comme le sont les fournisseurs d'accès ou d'hébergement - une obligation de stockage des informations.
[116] M. Roland, o.c., volume II, p. 222.
[117] L'interdiction ne vise bien entendu pas le personnel de l'officine, et notamment le(s) pharmacien(s) adjoint(s) qui collabore(nt) avec le pharmacien responsable.
[118] Comp. en France, l'art. 589 du Code de la santé publique.
[119] E. Krols, 'Het verbod tot publiciteit en reclame in de uitoefening van het beroep van apotheker', in Vrije beroepen en klantenwerving, Naar een liberalisering van de regelgeving, Louvain, De Boeck, Acco, 2000, 151 p., spécialement pp. 25-29.
[120] Voy. notamment sur ce point les communications de l'ordre nos 30 à 33, mais également les règles déontologiques nos 2 et 5. Voy. en outre les références citées par M. Roland, o.c., volume II, pp. 226 et s.
[121] Voy. notamment la règle déontologique n° 6 du 15 juillet 1965.
[122] Voy. not. sur ce point le Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social du 21 novembre 2003, COM (2003) 702 final, en particulier les pp. 11 et 12.
Voy. aussi le site http://www.pgeu.org/webdata/docs/01.06.20F%20PGEU11%20code%20de%20conduit.pdf.
[123] Voy. notamment sur ce point Th. Verbiest, 'La commercialisation des médicaments par l'internet: quelle légalité en droit français?', 21 novembre 2003, document disponible à l'adresse www.droit-technologie.org/1_2.asp?actu_id=852.
[124] Voy. notamment l'art. 1er de l'arrêté royal n° 78.
[125] Voy. supra, n° 22.
[126] L'authentification des ordonnances médicales constitue un premier problème. Bien qu'elle se pose déjà, certes dans une moindre mesure, lorsqu'un patient se présente dans une pharmacie muni d'une ordonnance établie par un médecin qui n'est pas ressortissant du pays, la question revêt une acuité particulière dès lors que l'on envisage un véritable commerce communautaire des médicaments.
[127] Voy. notamment l'arrêté royal du 11 avril 1999, M.B. 23 avril 1999, 13.497 (modèle); art. 4 de la loi de 1964 (utilisation de la Pharmacopée).
[128] Cette dernière disposition précise une série de mentions obligatoires devant nécessairement apparaître sur l'ordonnance médicale (nom et adresse du médecin prescripteur; le numéro INAMI du prescripteur, identité du patient, posologie du médicament et signature du prescripteur).
[129] Télématique médicale, avis du Conseil national de l'ordre des médecins du 15 février 1997, Bull., n° 76, p. 35.
[130] Loi du 9 juillet 2001 fixant certaines règles relatives au cadre juridique pour les signatures électroniques et les services de certification, M.B. 17 septembre 2001; directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques.
[131] La reconnaissance de la signature électronique a notamment permis en France le développement de nouveaux sites accessibles exclusivement à des professionnels comme c'est le cas du site 'Sésame Vitale'.
[132] Selon le Conseil, 'ceci nécessite un réseau de communications protégées. S'il s'agit d'adresser ces prescriptions électroniques à un pharmacien déterminé, une infrastructure technique devra également être prévue pour sauvegarder le libre choix du pharmacien par le patient'.
[133] Voy. aussi l'avis du Conseil national français de l'ordre des médecins du 30 juin 2000, Rapport adopté lors de la session du 30 juin 2000 et présenté par le Docteur André Chassort, disponible sur le site internet de l'ordre des médecins.
[134] Voy. notamment notre article 'La responsabilité du médecin au regard de la prescription de médicaments', R.G.D.C. 2003, pp. 369-383.
[135] La principale objection réside en effet sur ce point dans le fait que le médecin consulté ne pourrait éviter que le patient lui cache certaines données qui le concernent et qui auraient pu être vérifiées lors d'un examen 'classique' (voy. la présence de signes visibles comme un excès de poids).
[136] Voy. notamment le Rapport sur les enjeux de la Société de l'information dans le domaine de la santé du Professeur Régis Beuscart (Faculté de Lille) soumis en mai 2000 au Premier ministre français. Ce document est disponible à l'adresse www.telemedecine.aphp.org/doc/beuscardrapport.pdf. Il est à noter qu'une enquête internationale menée en 2000 sur les politiques de santé du fonds du Commonwealth a montré que c'est au Royaume-Uni que le nombre de prescriptions via internet est le plus élevé. Suivent ensuite, et par ordre décroissant, la Nouvelle-Zélande, l'Australie, les États-Unis et le Canada.
[137] Bull., n° 90, p. 13.
[138] Le principe est identique en France. Voy. le Rapport de Madame Jeannette Gros devant le Conseil économique et social français le 20 mars 2002 et relatif à la santé et les nouvelles technologies de l'informatique, p. 9; les Recommandations contenues dans le Rapport établi par le Conseil national de l'ordre des médecins d'octobre 2000 cité par Th. Verbiest, o.c., 2002, p. 96, n° 198.
[139] La téléconsultation se distingue de la télémédecine, laquelle n'est qu'une communication à distance entre médecins. Selon S. Callens 'telemedicine stands for the investigation, monitoring, and management of patients and the education of patients and staff using systems which allow ready access to expert advice and patient information no matter where the patient or relevant information is located' (S. Callens, 'International telemedicine and the Law', in 13th World Congress on Medical Law 6-10 août 2000, Helsinki, pp. 104 et s.). Voy. aussi J. Guigue, 'Télémédecine: légitimité et responsabilité', La revue des SAMU 2001, p. 276 et s.; L. Dusserre et F.-A. Allaert, 'La télémédecine est-elle légale et déontologique?', Informatique et santé, Paris, Springer-Verlag, 1996 (8), pp. 67-76.
[140] Avis du 21 septembre 2002, Bull. Ordre, n° 98, p. 4.
[141] Bruxelles 7 novembre 1985, J.T. 1986, p. 371 et Pas. 1986, II, p. 13; Civ. Arlon 30 mai 1984, J.L. 1985, p. 108.
[142] M. Harichaux-Ramu, Juris-Classeur, Responsabilité civile et assurances, Fasc. 440-3, p. 3, n° 3; M.T. Amsterdam 21 mars 1983, T. v. Gr. 1984, 87; M.T. 's-Gravenhage 17 décembre 1986, T. v. Gr. 1987, 333.
[143] Je remercie Mademoiselle Ludivine Kerzmann, assistante au Centre de droit des obligations, de sa précieuse collaboration dans les recherches et la rédaction de ce point de l'étude.
[144] Art. 2 de l'arrêté royal n° 78 relatif à l'exercice des professions des soins de santé (M.B. 14 novembre 1967) tel que modifié par la loi du 10 août 2001 portant des mesures en matière de soins de santé (M.B. 1er septembre 2001).
[145] Directive 93/16/CEE du Conseil du 5 avril 1993 visant à faciliter la libre circulation des médecins et la reconnaissance mutuelle de leurs diplômes, certificats et autres titres (J.O.C.E. (L) 165, 7 juillet 1993, pp. 0001-0024). La directive 'Médecins' permet aux États membres de subordonner la reconnaissance du diplôme d'un médecin émanant d'un autre pays membre à l'accomplissement de diverses formalités (art. 17 de la directive 93/16/ CEE) qui sont, en Belgique, reprises à l'art. 44decies de l'A.R. n° 78 (déclaration préalable à la direction de l'art de guérir au ministère de la Santé publique; envoi du certificat de nationalité et de l'attestation du pays où le médecin est installé; enregistrement par le ministère de la prestation effectuée; transmission par le ministère de ces informations à l'ordre des médecins, à la Commission médicale provinciale et à l'Institut national d'assurance maladie invalidité).
[146] Art. 44ter, § 1er de l'A.R. n° 78 du 10 novembre 1967.
[147] M. Roland, Pharmacie et société, volume 1, Précis de pharmacie de l'Université Catholique de Louvain, 1997, p. 216.
[148] Question écrite n° 2491/92 de M. Karel De Gucht à la Commission du 12 octobre 1992. Délivrance sur ordonnance des médicaments réservés aux médecins établis en Belgique (J.O.C.E. (C) 099, 7 avril 1993, p. 0009).
[149] Directive 92/26/CEE du Conseil du 31 mars 1992 concernant la classification en matière de délivrance de médicaments à usage humain (J.O.C.E. (L) 113, 30 avril 1992, pp. 0005-0007.
[150] Directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un Code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (J.O.C.E. (L) 311, 28 novembre 2001, pp. 0067-0128).
[151] Art. 1er, 19 du Code communautaire relatif aux médicaments à usage humain du 6 novembre 2001.
[152] M. Roland, o.c., volume 1, 1997, p. 217.
[153] L'interdiction du colportage des produits de santé est ancienne. On la trouverait déjà à Gand en 1663 où il était 'interdit aux pharmaciens de vendre des remèdes composés en d'autres lieux que leurs officines'. Voy. sur ce point, pour un aperçu historique de la réglementation pharmaceutique: M. Roland, o.c., p. 34 et s. et R. Fabre et G. Dilleman, Histoire de la pharmacie, P.U.F., 1974.
[154] Voy. en France, art. L.517 du Code de la santé publique.
[155] M. Roland, o.c., volume II, pp. 221 et s.
[156] Ibid., p. 222.
[157] Cass. fr. 16 mai 2000, 98/12612, Bull. 2000 IV n° 100, p. 89.
[158] Th. Verbiest, o.c., p. 93.
[159] Notons que cette exigence est également imposée par la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient (M.B. 26 septembre 2002). Cette loi consacre plusieurs droits, perçus comme 'fondamentaux' à 'toute personne physique à qui des soins de santé sont dispensés' (art. 2, 1°) (droit à des prestations de service de qualité, droit au libre choix du professionnel de la santé, droit à l'information et au consentement éclairé, droits relatifs au dossier du patient, droit à la protection de la vie privée et, enfin, le droit d'introduire une plainte devant une instance de médiation en cas d'insatisfaction).
[160] Loi du 2 août 2002 relative à la publicité trompeuse et à la publicité comparative, aux clauses abusives et aux contrats à distance en ce qui concerne les professions libérales (M.B. 20 novembre 2002, 51704). Cette loi abroge les lois du 3 avril 1997 relative aux clauses abusives dans les contrats conclus avec leurs clients par les titulaires de professions libérales et du 21 octobre 1992 relative à la publicité trompeuse en ce qui concerne les professions libérales. La loi s'applique aux professions libérales, c'est-à-dire à 'toute activité professionnelle indépendante de prestation de services ou de fourniture de biens, qui ne constitue pas un acte de commerce ou une activité artisanale visée par la loi du 18 mars 1965 sur le registre de l'artisanat et qui n'est pas visée par la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du consommateur, à l'exclusion des activités agricoles et d'élevage;'.
[161] Rappelons que cette loi constitue la transposition de la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance (J.O.C.E. (L) 144, 4 juin 1997, pp. 0019-0027). Voy. en particulier le considérant n° 4: '(4) considérant que l'introduction de nouvelles technologies entraîne une multiplication des moyens mis à la disposition des consommateurs pour connaître les offres faites partout dans la Communauté et pour passer leurs commandes; que certains États membres ont déjà pris des dispositions différentes ou divergentes de protection des consommateurs en matière de vente à distance, avec des incidences négatives sur la concurrence entre les entreprises dans le marché intérieur; qu'il est par conséquent nécessaire d'introduire un minimum de règles communes au niveau communautaire dans ce domaine;'. Notons que l'art. 14 de la directive contenait une clause 'a minima' permettant aux États membres d''adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. Ces dispositions comprennent, le cas échéant, l'interdiction, pour des raisons d'intérêt général, de la commercialisation sur leur territoire par voie de contrats à distance de certains biens ou services, notamment des médicaments, dans le respect du Traité'.
[162] Directive 2000/31 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, sur le marché intérieur.
[163] M.B. 17 mars 2003. Voy. aussi l'arrêté royal du 7 mai 2003 fixant les modalités selon lesquelles la libre circulation d'un service de la société de l'information peut être restreinte, M.B. 7 juillet 2003. Pour un examen de cette loi, voy. E. Montero, M. Demoulin et Chr. Lazaro, 'La loi du 11 mars 2003 sur les services de la société de l'information', J.T., 2004, pp. 81-95 .
[164] On retiendra en particulier que cette loi impose une obligation d'information préalable à la passation de la commande (art. 2) et prévoit une procédure particulière de formation du contrat en précisant que la commande doit être suivie d'un accusé de réception, envoyé 'sans délai', par la voie électronique.
[165] Voy. sur ce point l'art. 15 selon lequel 'les publicités qui font partie d'un service de la société de l'information fourni par un membre d'une profession réglementée, ou qui constituent un tel service, sont autorisées, sous réserve du respect des règles professionnelles visant, notamment, l'indépendance, la dignité et l'honneur de la profession ainsi que le secret professionnel et la loyauté envers les clients et les autres membres de la profession'.
[166] Voy. notamment l'avis d'initiative de la Commission pour la protection de la vie privée n° 34/2000 relatif à la protection de la vie privée dans le cadre du commerce électronique, 22 novembre 2000 (Réf. 10/A/2000/035/002).
[167] Le document peut être téléchargé à l'adresse suivante:
http://www.privacy.fgov.be/nieuw%2029-8-2002/FR_de_verzameling_van_persoonsgegev.htm.
Voy. également le document de travail 'Le respect de la vie privée sur internet - Une approche européenne intégrée de la protection des données en ligne' du 21 novembre 2000, document WP 37 (5063/00) disponible à l'adresse http://europa.eu.int/comm/internal_market/en/media/dataprot/ wpdocs/wp37fr.pdf.
[168] Voy. cependant pour la Belgique la loi du 17 juillet 2002 relative aux opérations effectuées aux moyens d'instruments de transfert électronique de fonds, M.B. 17 août 2002. Pour un commentaire de la loi, voyez A. Salaün, 'Une nouvelle pierre à l'édifice de protection des consommateurs: la loi sur les instruments de transfert électronique de fonds', J.T. 2003, pp. 205 à 211 . Voy. également la recommandation 97/489/CE, J.O.C.E. (L) 208, 2 août 1997.
[169] Les risques sont sur ce point nombreux. On retiendra notamment la dispense d'informations erronées et non conformes à l''évidence base médecine', l'absence d'avis médical préalable, la livraison de produits défectueux ou contrefaits, la surconsommation, l'existence non préalablement vérifiées de contre-indications, la vente de médicaments à des mineurs ou à des personnes incapables de se gérer... De même, et du côté des professionnels, existent des risques certains de violation du secret médical et d'exploitation des données personnelles à des fins de marketing ou d'incitations commerciales...
[170] Voy. notamment sur ce point le Communiqué de presse de l'Union européenne du 1er décembre 2003 intitulé 'Un sondage d'opinion révèle que les achats transfrontaliers n'inspirent toujours pas confiance aux consommateurs - des mesures en perspective', Doc. IP/03/1632 du 1er décembre 2003. Les résultats de ce sondage sont disponibles à l'adresse suivante: europa.eu.int/comm/consumers/topics/facts_en.htm.
[171] Trois situations sont ici visées: la vente de produits autorisés dans le pays du vendeur, mais non dans celui du consommateur; la vente de produits non soumis à prescription dans le pays du vendeur, mais bien dans celui du consommateur; la vente de produits ne tombant pas sous le monopole officinal dans le pays du vendeur, mais bien dans celui du consommateur.
[172] Cela étant, il ne faut pas trop exagérer les risques que génère internet. Un cadre juridique adapté, et des contrôles réels et efficaces, devraient permettre de contrer nombre d'abus. Il ne faut pas davantage sous-estimer qu'actuellement, le commerce en ligne des médicaments a été fortement encouragé par la possibilité qu'il offre aux consommateurs de se procurer ailleurs des médicaments qui ne sont pas autorisés dans leur pays de résidence. Ces situations existeront tant qu'une véritable politique commune ne sera pas arrêtée et mise en oeuvre dans la lutte contre de tels comportements illicites. L'admission plus large de la vente en ligne ne profitera ainsi pas au premier titre à ceux qui, déjà aujourd'hui, utilisent internet à des fins illicites. Elle permettra avant tout aux autres de connaître les opportunités qu'elle porte.
[173] Voy. le premier Rapport de la Commission sur la transposition de la directive dans les États membres du 21 novembre 2003, COM (2003) 702 final. Le marché européen compterait déjà 185 millions d'internautes et 70% des sociétés européennes disposeraient déjà de leur site internet (p. 5). Les ventes par internet représenteraient cependant en l'état actuel à peine 1 à 2% des ventes au détail, mais il est estimé que plus de 50% des citoyens européens utiliseront internet pour leurs achats d'ici 2006.
[174] Voy. notamment l'étude de H. Charrondière, La distribution du médicament en Europe, Eurostat, France, février 2003, 2 volumes, 470 p.
[175] Bien qu'il nous paraisse nécessaire de rendre leur cohérence aux textes et, à cette fin, de les intégrer dans un corps unique de règles. L'exemple du Code français de la santé publique pourrait sur ce point être suivi.
[176] 'Acheter des médicaments par internet. A déconseiller', Test-Santé, janvier 2004, n° 58, pp. 24-27.