Un contrat de distribution sélective entre Rolex Benelux et une bijouterie contenait une clause permettant à Rolex de résoudre le contrat non seulement en cas de violation du contrat par le distributeur, mais également « pour tout autre juste motif ». Suite à l’inculpation et l’arrestation des administrateurs de la bijouterie pour des faits de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, faux et usage de faux, Rolex avait mis fin au contrat avec effet immédiat en invoquant les reproches faits à l’égard des dirigeants, susceptibles de nuire à sa réputation (juste motif), outre des manquements à des obligations contractuelles (fermeture du magasin, défaut de stock, impayés et défaut d’investissements).
La Cour d’appel de Bruxelles avait validé la résolution effectuée par Rolex sur base du juste motif. En tenant compte de la renommée de la marque Rolex elle avait décidé que les faits relatés, objectivement graves, ainsi que le lien opéré dans la presse avec la marque et les montres Rolex et la large couverture qui avait été réservée à l’affaire, étaient de nature à nuire à la réputation de Rolex, ce qui dans ces circonstance constituait non un manquement contractuel du distributeur, mais un juste motif autorisant Rolex à mettre en œuvre la clause résolutoire expresse. La Cour d’appel avait (contrairement au juge en premier instance) considéré qu’il n’y avait « pas lieu de sursoir à statuer » dans l’attente du résultat de l’instruction pénale au motif que « l’auteur de la rupture n’est pas tenu d’attendre une vérité judiciaire avant de rompre une relation dont il estime la poursuite impossible.»
Dans un arrêt du 11 mai 2023 (C.21.0409.F) la Cour de cassation a cassé cet arrêt. Une concession de vente soumise au Livre X, Titre 3 du Code de droit économique qui est accordée pour une durée indéterminée ne peut, hors le manquement grave d’une des parties à ses obligations, être résiliée que moyennant un préavis raisonnable ou une juste indemnité (art. X.36 CDE). La Cour de cassation confirme que, cette disposition étant impérative, une clause résolutoire expresse ne peut s’appliquer qu’en cas d’inexécution fautive par l’une des parties, et non pour un autre motif.
Il s’agit là donc d’une importante différence entre le contrat de concession de vente et le contrat d’agence commerciale, auquel il peut être mis fin avec effet immédiat en cas de « circonstances exceptionnelles qui rendent définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre le commettant et l’agent » en vertu de l’article X.17 du Code de droit économique.